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Intervention de Christiane Taubira

Réunion du 26 juin 2014 à 15h00
Renforcement de l'efficacité des sanctions pénales — Article 19 B

Christiane Taubira, garde des sceaux :

La commission des lois a adopté la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs. Le débat à l’Assemblée nationale avait été long et vif, des députés ayant souhaité également les supprimer.

Ces tribunaux, vous le savez, constituent une excroissance procédurale. Ils s’inscrivent dans la dynamique d’un rapprochement de la justice des mineurs et des majeurs décidé à une époque où toute la parole politique consistait à faire de la délinquance des mineurs une délinquance en explosion, de plus en plus grave, violente et massive.

Or les statistiques ne confirment pas ce discours, ce qui ne signifie pas qu’un certain nombre de mineurs ne se livrent pas à des actes graves, qu’ils ne récidivent pas ou ne réitèrent pas. J’observe simplement que, quand on prend un exemple, c’est toujours le même !

Ainsi la délinquance des mineurs a-t-elle au contraire légèrement diminué sur les dix dernières années, si l’on en croit les statistiques : le nombre de mineurs incarcérés est resté stable, tandis que la part de la délinquance des mineurs dans l’ensemble de la délinquance a légèrement baissé, s’établissant aujourd'hui à 18 %.

C’est cependant à la faveur d’un certain discours sur les mineurs - les jeunes d’aujourd'hui ne seraient pas comme ceux d’hier - que furent créés les tribunaux correctionnels pour mineurs.

Je rappelle le contexte sans porter le moindre jugement de valeur, quoi que j’en pense. Pour ma part, lorsqu’il s’agit d’agir au nom de la puissance publique, je ne me contente pas de mes convictions personnelles ni de mes propres élans : je veille à vérifier la réalité des choses.

Je suis donc allée interroger les chefs de juridiction sur le fonctionnement de ces tribunaux : tous, du moins tous ceux qui se sont exprimés, ont souhaité leur suppression.

Certains se fondent sur leur conviction, considérant que la justice des mineurs doit rester spécialisée, conformément à la tradition française, qui a vu la création du juge des enfants en 1912 et l’ordonnance relative à l’enfance délinquante en 1945.

D’autres avancent des raisons pratiques, estimant que la nature collégiale de ces tribunaux correctionnels pour mineurs complique la gestion des juridictions en les encombrant. Ils notent également que les condamnations sont à peu près identiques à celles que prononcent les tribunaux pour enfants, ni plus sévères ni plus massives.

Telle est la réalité, mesdames, messieurs les sénateurs, et j’ai eu l’occasion de le faire vérifier régulièrement dans les juridictions.

Tous les praticiens, tous les professionnels, même de sensibilité différente, plaident donc pour la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, certains, je le répète, par conviction, d’autres simplement pour des raisons pratiques tenant à l’organisation de leur juridiction.

Toutefois, le Gouvernement ne souhaite pas procéder à cette suppression dans le cadre de ce projet de loi, relatif aux délits. Il convient autant que possible d’écarter tant les dispositions relatives aux longues peines que les dispositions relatives aux mineurs.

Je le répète, il est souhaitable, pour le bon fonctionnement des juridictions et pour la bonne administration de la justice, que les tribunaux correctionnels pour mineurs soient supprimés. Je vous le dis très clairement – je ne me cache derrière aucun paravent ! –, je pense, par conviction, à l’instar de certains magistrats, que la justice des mineurs doit rester une justice spécialisée. Je crois que la plupart d’entre vous partagent cet avis.

L’ordonnance de 1945 est née à un moment de grande unité nationale, …

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