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Intervention de Marie-Christine Blandin

Réunion du 2 février 2006 à 9h30
Obtentions végétales — Adoption d'un projet de loi

Photo de Marie-Christine BlandinMarie-Christine Blandin :

S'il est normal qu'un certificat d'obtention végétale officialise la propriété intellectuelle du semencier et lui permette de recevoir la légitime rémunération de son travail, s'il est normal qu'un catalogue répertorie les variétés et les obtenteurs, les Verts ne peuvent accepter que ce droit légitime s'étende au devenir des produits végétaux des générations suivantes qui contiennent encore trace des séquences génétiques originales.

Après avoir germé, être devenue plantule, fleur, fruit, graine qui a elle-même germé, la semence n'est plus la propriété intellectuelle de l'obtenteur ; elle est le fruit de siècles d'évolution et du travail des paysans.

Les paysans de France et d'ailleurs n'acceptent pas non plus la rupture avec le droit de ressemer, pratique majoritaire et indispensable. Savez-vous que, sur la totalité des 1, 350 milliard d'exploitations de la planète, seules 50 millions sont motorisées, alors que 300 millions font appel à la traction animale et un milliard ne mobilisent que la force humaine ? C'est dire combien les multinationales ne peuvent prétendre imposer à tous des semences certifiées et, surtout, les coûts que l'on veut y associer.

De plus, ces firmes, loin de déployer leur savoir vers la diversité et l'adéquation à tel sol ou à tel climat, convergent vers la standardisation des semences et préfèrent gérer les problèmes avec des intrants ou du matériel d'irrigation. Nous sommes à mille lieues du développement durable !

Ce sont 75 % de la diversité phytogénétique qui ont été perdus depuis le début du siècle, à mesure que les agriculteurs ont abandonné leurs multiples variétés locales et cultivars traditionnels pour passer à des variétés à haut rendement, génétiquement uniformes. Le groupement national interprofessionnel des semences, le GNIS, date de 1941.

Heureusement, le Parlement français est libre !

L'Union européenne ne nous demande que d'édicter notre règle. Nous avons ratifié la convention sur la diversité biologique. Les Nations unies nous réclament une mise en conformité des traités de l'OMC sur le respect des droits de l'homme et les engagements pour la biodiversité. Enfin, la convention de l'UPOV permet d'ouvrir aux agriculteurs l'usage des variétés sans autorisation de l'obtenteur.

Nous jouons donc pleinement notre rôle lorsque nous exerçons notre vigilance sur les imprudences que recèle ce texte.

Dans l'exposé des motifs, le ministre Philippe Vasseur sème l'ambiguïté : d'une pratique banale - l'utilisation des semences que l'on a soi-même produites - il dit vouloir donner acte par une dérogation. Mais, quelques lignes plus loin, la précision « sous réserve de la sauvegarde des intérêts légitimes des obtenteurs » ouvre la porte à toutes leurs revendications.

Décrivant les consultations avec les agriculteurs, il évoque un consensus autour du projet ; mais, définissant une commission de fixation des indemnités, il en exclut les organisations minoritaires.

Je souhaite vous alerter sur les termes « variété nouvelle découverte », qui correspondent non pas au résultat d'une obtention, mais à une simple cueillette.

Je désire ensuite attirer votre attention sur l'illisibilité de la fin de l'article 4 et sur les risques d'interprétation abusive qu'il comporte.

Quant à l'article 16, il fait l'objet de nombreux amendements : les nôtres donnent d'abord acte du droit de semer une part de sa production ; et, s'il faut en passer par des indemnités, nous vous proposerons des modes de calcul et de négociation plus équitables.

Enfin, le citoyen défenseur des droits de l'homme ne pourra que frémir et s'indigner à la lecture du texte relatif au contrôle, dont voici les passages les plus liberticides : « Les agents de ces organismes ont accès aux locaux [...] entre huit heures et vingt heures ou, en dehors de ces heures, lorsque [...] une activité est en cours. Ils peuvent recueillir, [...] sur place, tous les renseignements [...] et prendre copie des documents utiles [...] prélever des échantillons

« Les frais engagés [...] sont à la charge des producteurs [...] ».

Où sont les droits de la défense ? Tout cela, dans le but de faire encore plus d'argent grâce à la tentative de marchandisation, au-delà du raisonnable, d'un patrimoine génétique dont on ignorait encore le détail il y a cinquante ans ! Tout cela, alors que des gens meurent de faim, alors que certains paysans dans nos campagnes n'arrivent plus à s'en sortir et alors que les villes bruissent de colère contre les lois anti-sociales dont le Gouvernement inonde le Parlement !

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