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Intervention de Jean Bizet

Réunion du 2 février 2006 à 9h30
Obtentions végétales — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean BizetJean Bizet, rapporteur :

Tout à l'heure, il a exprimé la crainte que les agriculteurs qui utilisent moins d'intrants soient pénalisés. Je voudrais le rassurer pleinement sur ce point, en le renvoyant aux études réalisées récemment par l'INRA. Celles-ci établissent clairement qu'au cours du demi-siècle qui vient de s'écouler les différentes variétés mises au point l'ont été précisément avec le souci de trouver des semences utilisant moins d'intrants.

Si nous dressons le bilan d'un demi-siècle de sélection de ces variétés, nous nous apercevons que nous avons gagné 36 kilogrammes de rendement par hectare et par an avec des semences qui utilisent aujourd'hui moins d'intrants qu'hier. Je donnerai à Daniel Raoul la référence des études réalisées par l'INRA sur ce sujet. Je sais qu'il les lira avec attention.

Monsieur Le Cam, vous êtes préoccupé, je le sais - vous l'avez souligné au cours de votre intervention - par la « marchandisation du vivant ». Une telle question peut être posée, je le reconnais. Toutefois, nous y avons répondu. La réponse du Gouvernement français et de l'Union européenne consiste précisément à préférer le certificat d'obtention végétale, qui empêche l'appropriation et la privatisation du vivant et permet aux chercheurs, grâce à l'exception du sélectionneur, d'utiliser une variété ancienne pour en créer de nouvelles, plus performantes encore.

C'est ce qui fait tout l'intérêt du COV par rapport au brevet et qui explique que nos amis américains observent notre approche avec un certain intérêt. J'ignore si leurs positions évolueront, mais sachez, mes chers collègues, que dans un monde très concurrentiel et qui devra être de plus en plus respectueux de l'environnement - nous pouvons être unanimes sur ce point - les nouvelles variétés mises au point intégreront ces deux notions.

Mesdames Blandin et Voynet, vous vous êtes demandé si le certificat d'obtention végétale ne constituait pas un marchepied vers le brevet. Je puis vous garantir que ce ne sera pas le cas : nous y veillerons, et le Gouvernement, plus que tout autre, sera très attentif à cette question.

Lorsque, en décembre 2004, nous avons transposé en droit français la directive 98/44, nous avons veillé à « sanctuariser » la notion d'exception du sélectionneur. Elle atteste, me semble-t-il, de l'éthique dont ne se départit pas le Gouvernement, il faut le saluer. Les variétés végétales sont le fruit du travail accumulé de familles d'agriculteurs qui, au fil du temps, sont devenues des PME familiales ou des coopératives.

Je souligne ce point pour faire bien comprendre que nous n'accordons pas un droit de propriété intellectuelle à une variété végétale découverte dans la nature ! Elle doit encore être développée et fixée, pour satisfaire aux célèbres épreuves de DHS, c'est-à-dire de « distinction, homogénéité et stabilité ».

N'imaginez donc pas que nous privatiserons des variétés découvertes par certains peuples des pays en voie de développement ! Eux aussi y gagneront, grâce à la notion de DHS, s'ils adhèrent à l'UPOV, dont 67 pays sont déjà membres aujourd'hui. Nous veillons à privilégier les petits agriculteurs, bien en deçà du seuil fixé par la PAC, à savoir une production agricole de 92 tonnes.

Enfin, avec ce projet de loi nous mettons fin à l'ambiguïté juridique qui entoure les semences de ferme. En effet, et jusqu'à ce que ce texte soit adopté par l'Assemblée nationale et par le Sénat, l'utilisation des semences de ferme reste totalement illégale. Je vous renvoie de nouveau à la loi du 11 juin 1970 et à l'arrêt de la cour d'appel de Nancy du 13 septembre 1988.

Avec ce projet de loi, nous légalisons cet usage. Tout agriculteur aura désormais le droit de se servir de semences de ferme au sein de sa propre exploitation. Sans caricaturer, je dirai que chacun pourra se procurer la semence du grand-père à laquelle sont prêtées tant de vertus et qui, au fil du temps, est tombée dans le domaine public. Il en coûtera seulement les frais de port.

Nous savons également que les nouvelles variétés mises au point par la recherche tant publique que privée constituent une source de progrès. Or ce dernier est utile, pour les filières animales mais aussi végétales, afin que l'agriculture française puisse rester compétitive dans un monde extrêmement concurrentiel.

Madame Blandin, madame Voynet, pour conclure, je ne me puis m'empêcher de me souvenir du héros du Petit Prince - ma lecture voilà quelques années -, qui disait, tout simplement : « Si tu diffères de moi [...] loin de me nuire, tu m'enrichis ». §

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