Séance en hémicycle du 26 juin 2014 à 15h00

Résumé de la séance

Les mots clés de cette séance

  • pollution
  • pénitentiaire
  • rétention
  • sûreté
  • tribunaux

Sommaire

La séance

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La séance, suspendue à douze heures dix, est reprise à quinze heures, sous la présidence de M. Jean-Pierre Bel.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

L’ordre du jour appelle les questions cribles thématiques sur la pollution de l’air, thème choisi par le groupe écologiste.

Je rappelle que l’auteur de la question et le ministre pour sa réponse disposent chacun de deux minutes. Une réplique d’une durée d’une minute au maximum peut être présentée soit par l’auteur de la question, soit par l’un des membres de son groupe.

La parole est à Mme Aline Archimbaud, pour le groupe écologiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Aline Archimbaud

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ma question porte sur la lutte contre les particules fines émises par le trafic routier.

Le caractère cancérigène des gaz d’échappement des moteurs diesel ne fait désormais plus débat. Reconnus depuis 2012 comme étant responsables de façon certaine des cancers du poumon, ces gaz provoquent également asthme, troubles respiratoires, infarctus et accidents vasculaires cérébraux.

Avec le soutien de mon groupe, j’ai déposé au Sénat une proposition de loi sur ce sujet, laquelle a fait l’objet d’un travail de concertation et d’amendements. Elle prévoit l’intégration dans l’actuel système du bonus-malus, qui est d’ores et déjà calculé en fonction des émissions de CO2 pour lutter contre le dérèglement climatique, d’un critère supplémentaire lié aux émissions de particules fines et d’oxydes d’azote, les fameux NOX, afin de lutter contre la pollution de l’air.

Le bonus-malus est en effet un dispositif équilibré, à la fois incitatif et dissuasif : les sommes acquittées au titre du malus permettent de verser des bonus, c'est-à-dire des primes incitatives aux consommateurs choisissant d’acheter des véhicules neufs moins polluants. Il est soutenu par les associations mobilisées sur le sujet.

Monsieur le secrétaire d’État, la théorie selon laquelle le diesel permettrait aux particuliers de réaliser des économies est un mythe. En réalité, cette technologie pèse lourdement sur nos finances publiques, sur notre balance commerciale et sur la santé de nos concitoyens, en particulier sur les plus précaires d’entre eux, qui n’ont d’autre choix que d’habiter le long des principaux axes routiers.

Il est urgent de cesser de dilapider des milliards d’euros dans une technologie mortelle, alors que nous pouvons à la fois protéger la santé, transformer les emplois de la filière diesel au profit d’une économie innovante porteuse d’emplois d’avenir et faire réaliser des économies considérables à nos finances publiques, tout en redressant notre balance commerciale.

Ma question est simple et directe : sachant qu’un amendement tendant à introduire le dispositif que je défends a été déposé sur le collectif budgétaire, pouvons-nous compter sur votre soutien ?

Applaudissements sur les travées du groupe écologiste . – Mme Chantal Jouanno applaudit également.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Vous soulevez à juste titre, madame la sénatrice, une grave question de santé publique. De fait, les véhicules à moteur diesel font partie du quotidien dans nos villes.

Aurons-nous néanmoins la capacité de régler totalement les problèmes posés eu égard aux difficultés auxquelles pourraient être confrontés nos concitoyens ? En effet, alors que, pendant des années, nombre d’entre eux ont été incités à choisir la motorisation diesel, la raison commande aujourd'hui de changer de motorisation, même si, vous le savez comme moi, les nouveaux moteurs diesel sont beaucoup moins polluants, y compris en termes d’émission de particules, que ceux qui existaient voilà quelque temps.

Ce sujet, je le sais, fait l’objet de contestations, mais, en tout état de cause, il est parfaitement légitime de s’y attaquer. Il appartiendra aux motoristes de nous éclairer et de nous dire si les nouveaux moteurs sont effectivement faiblement émetteurs de particules fines, que ce soit à chaud ou à froid.

Comme vous, je pense que notre pays et notre industrie pourraient tirer un très grand profit de cette nécessaire mutation, à condition de tendre la main à nos concitoyens et de les aider à effectuer cette transition énergétique. Bien évidemment, et vous en serez d’accord avec moi, la question ne se pose pas du tout dans les mêmes termes dans les zones urbaines denses et dans les zones rurales, sans oublier la circulation entre zones rurales.

Enfin, madame la sénatrice, je sais que le groupe écologiste a proposé, tant au Sénat qu’à l’Assemblée nationale, un certain nombre de modifications de la fiscalité du diesel. Hier soir, j’ai participé aux débats à l’Assemblée nationale sur le projet de loi de finances rectificative et je peux d’ores et déjà vous annoncer que la fiscalité applicable au diesel évoluera dans le prochain projet de loi de finances, et ce dans le sens que vous souhaitez, même si toutes vos propositions ne seront peut-être pas retenues.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Monsieur le secrétaire d’État, je m’étonne tout d’abord de l’absence des ministres chargés de l’environnement, de la santé, des transports et de l’économie, qui sont pourtant directement concernés par la thématique de la pollution de l’air.

Je suis ensuite interloquée par votre réponse. Vous vous inscrivez dans la même logique que les anciens gouvernements, qui, depuis trente ans, traitent avec une certaine désinvolture cette question, alors que la pollution de l’air constitue pourtant un véritable problème de santé publique, insuffisamment pris en considération.

Compte tenu de l’inaction du Gouvernement, je comprends que certaines ONG aient été contraintes de porter plainte en raison de la pollution de l’air.

Monsieur le secrétaire d’État, vous voulez du concret, en voici : la pollution de l’air provoque entre 42 000 et 50 000 décès prématurés chaque année en France. Elle conduit à une explosion des risques d’infarctus, d’accidents cardio-vasculaires, d’infections respiratoires et même de cancers des voies aériennes. Elle entraîne également des centaines d’hospitalisations pour des problèmes cardiaques et respiratoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Leila Aïchi

Du point de vue économique, la pollution de l’air est à l’origine de 650 000 journées d’arrêt de travail par an. Enfin, elle grève l’économie française de près de 50 milliards d’euros.

La santé serait-elle devenue une simple variable d’ajustement pour le Gouvernement ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. Raymond Vall, pour le groupe du RDSE.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le secrétaire d’État, le groupe du RDSE auquel j’appartiens est très attentif à la question de la pollution atmosphérique.

Vous le savez, selon un très récent rapport de l’OCDE, plus de 3, 5 millions de personnes meurent chaque année en raison de la pollution de l’air urbain. Et ce nombre a augmenté de 4 % dans le monde en seulement cinq ans.

Ce phénomène est dû en grande partie aux émissions par nos activités de substances polluantes. L’industrie, le chauffage au fioul, ou encore les transports sont les principaux responsables des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi de particules fines et d’oxydes d’azote.

Non seulement la pollution de l’air est un problème majeur de santé publique, mais elle a un coût important pour notre économie, évalué par l’OCDE à 40 milliards d’euros par an pour la France.

C’est précisément sur l’incidence de cette pollution et de ces émissions sur la couche d’ozone qui protège notre planète que je souhaite vous interroger, monsieur le secrétaire d’État.

En effet, cette pollution ne concerne pas uniquement les centres-villes, n’est pas simplement liée à la circulation ou aux infrastructures domestiques. L’atmosphère n’ayant pas de frontières, le problème est planétaire.

On sait que certaines molécules sont responsables de la disparition de l’ozone lorsqu’elles pénètrent dans la stratosphère. On sait aussi que ces molécules chimiques, que les activités humaines ont introduites, persistent longtemps.

Face à ce phénomène d’une extrême gravité, les pays industrialisés ont adopté, en 1987, le protocole de Montréal, qui prévoit une réduction drastique de la production et de l’utilisation des produits les plus néfastes pour la couche d’ozone. Je pense que le résultat est positif.

Monsieur le secrétaire d’État, le problème de la protection de l’atmosphère qui, je le répète, est planétaire sera-t-il abordé lors de la COP 21, la conférence de Paris sur le climat ? C’est là une opportunité qu’il ne faut pas laisser passer.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question, qui est tout à fait essentielle. Vous avez évoqué la COP 21, qui se tiendra à Paris l’année prochaine. Vous avez raison de souligner l’importance du problème de la pollution tant pour notre pays que pour le monde, en général. Nous sommes tous concernés !

La protection de la couche d’ozone est un enjeu majeur. La France s’est résolument engagée dans ce domaine. À cet égard, trois mesures concrètes sont aujourd'hui lancées.

À l’échelon européen, la France a soutenu le nouveau règlement, récemment adopté, qui prévoit une réduction de 79 % des quantités d’hydrofluorocarbones, les HFC, autorisées d’ici à 2030. Les HFC, et évidemment le CO2, jouent sur la couche d’ozone.

Au plan international, le protocole de Montréal est en cours de révision. La France défend l’extension de ce protocole aux HFC. Dans cette négociation, elle agit aux côtés des États-Unis et de la Chine – pour une fois ! –, ce qui me permet de dire aujourd’hui que cette position ambitieuse a de grandes chances d’être retenue.

Enfin, le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français contient un titre spécifique traitant des questions de la qualité de l’air et des transports.

Ce texte instaure en particulier un plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques, lequel fixera, polluant par polluant, les objectifs de réduction à différents horizons. Ces objectifs seront repris dans les schémas régionaux du climat, de l’air et de l’énergie, dont l’élaboration sera confiée aux intercommunalités.

De l’international au local, le Gouvernement est donc pleinement mobilisé pour mieux protéger la couche d’ozone. J’aurai ultérieurement l’occasion de revenir sur les implications de la pollution de l’air sur la santé, sur ce que nous avons fait, sur ce que nous n’avons pas encore fait, et de préciser la position du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Raymond Vall

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de votre réponse. J’espère effectivement que cette question, qui me paraît fondamentale, sera inscrite à l’ordre du jour de la COP 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour le groupe UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le secrétaire d’État, ma question porte sur le recours par le Gouvernement, lors des pics de pollution dans les grandes villes, notamment en Île-de-France, du système dit « de circulation alternée », prétendument pour réduire la pollution.

Après plusieurs jours d’hésitation, le Gouvernement a mis en œuvre ce système le 17 mars dernier, à un moment – comble de la stupidité ! – où le taux de pollution baissait.

Ainsi, le niveau de particules fines a été extrêmement élevé pendant plusieurs jours, mais la mise en œuvre de la circulation alternée n’a en réalité pas eu de conséquences positives. À cet égard, je précise qu’Airparif continue d’affirmer que ce n’est pas un bon système, car faire circuler alternativement les voitures portant des plaques d’immatriculation paires et impaires sans faire de distinction entre les véhicules polluants et ceux qui le sont nettement moins, parce qu’ils sont plus modernes, n’est pas une bonne solution.

Par ailleurs, Mme Batho avait déclaré à la fin de l’année 2012 que l’ensemble des ZAPA, les zones d’action prioritaire pour l’air, allaient être supprimées. Or celles-ci présentaient tout de même l’avantage de permettre de faire la distinction entre les véhicules polluants et les autres.

D’autres capitales ont mis en œuvre des systèmes différents, comme le péage urbain ou l’interdiction de la circulation dans les centres-villes, mais tel n’est pas notre objectif.

Monsieur le secrétaire d’État, qu’envisagez-vous de faire concernant les ZAPA ? Considérez-vous que la circulation alternée est une bonne solution ? Enfin, le Gouvernement réfléchit-il à un système plus équilibré, permettant de distinguer les véhicules polluants des véhicules plus modernes, moins polluants, et pouvant circuler de manière continue ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Monsieur le sénateur, votre question est très intéressante.

Vous signalez l’importance pour la connaissance des problèmes que nous avons à traiter d’Airparif, organisme auquel vous êtes évidemment attaché. Vous êtes en effet membre d’une collectivité territoriale qui devra donner à ce dernier les moyens de fonctionner, et je ne doute pas de votre engagement.

Cela étant, selon moi, vous passez un peu vite sur les effets de la circulation alternée mise en place dernièrement. Contrairement à ce que vous pensez, elle a sans doute accéléré le retour à la normale. Peut-être aurait-elle dû – c’est l’une des pistes sur lesquelles nous travaillons – intervenir de façon plutôt préventive que curative. Il faut quoi qu’il en soit pouvoir agir de manière directe, afin de prévenir les pics de pollution.

Vous m’interrogez également, monsieur le sénateur, sur les ZAPA. Le Gouvernement n’y a pas renoncé, mais la méthode a échoué. Le Gouvernement n’a pu que constater que les ZAPA ne fonctionnaient pas, car la plupart des collectivités territoriales – vous connaissez bien d’ailleurs un certain nombre d’entre elles – n’ont pas voulu jouer le jeu, pour des raisons qu’il ne m’appartient pas de juger.

Je reviens un instant sur la circulation alternée. Je pense qu’il s’agit d’un dispositif intéressant tant que nous n’avons pas opéré la transition massive de notre parc automobile et sans doute aussi tant que nous n’avons pas réduit la part de l’automobile dans l’ensemble de nos déplacements. À ce propos, je remarque que les sénateurs siégeant sur la droite de cet hémicycle présentent rarement des arguments en faveur de cette limitation du trafic automobile. En tout état de cause, l’actuelle transition du parc automobile vers des véhicules moins polluants ne permet pas encore d’atteindre les objectifs fixés.

En attendant, la circulation alternée est une mesure pertinente.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. Roger Karoutchi, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Roger Karoutchi

Monsieur le secrétaire d’État, on n’a pas laissé vivre les ZAPA ! Nombre de décrets n’ont pas été pris ; par conséquent, il était compliqué pour les collectivités de réagir. Il est nécessaire que l’État ait une vision plus complète et plus synthétique de ces questions.

Vous venez de dire que les sénateurs siégeant de ce côté de l’hémicycle sont peu loquaces sur le trafic routier. Très sincèrement, je serai favorable à la limitation et à la réduction de la circulation automobile en Île-de-France quand nous aurons des transports publics dignes de ce nom ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour le groupe UDI-UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

D’autres orateurs siégeant sur différentes travées de la Haute Assemblée l’ont déjà indiqué, la pollution de l’air est le mal de ce siècle.

Il s’agit d’un problème non seulement social – cette pollution est particulièrement inégalitaire –, mais aussi économique – M. Vall en a rappelé le coût pour la nation – et sanitaire – en 2030, environ 50 % de la population française sera touchée par des difficultés respiratoires ou par des allergies.

La pollution est donc une question de santé publique, mais malheureusement la loi relative à la santé publique est une Arlésienne !

Toutefois, nous pouvons agir en attendant ce texte assez mystérieux. Nous pouvons notamment reprendre une disposition adoptée dans le cadre du Grenelle de l’environnement : la généralisation des conseillers en environnement intérieur. Cette initiative alsacienne qui fonctionne extrêmement bien permet aux personnes les plus touchées par les allergies de bénéficier de mesures préventives à leur domicile. Monsieur le secrétaire d’État, où en sont cette expérimentation et sa généralisation ?

Nous pouvons également mettre en place une deuxième mesure préventive, elle aussi discutée dans le cadre du Grenelle : la généralisation des mesures de pollution de l’air dans les établissements accueillant des publics sensibles. La première initiative a été lancée à Paris, dans une école du XIVe arrondissement.

Au-delà des mesures préventives, nous devons prendre des mesures structurelles qui vont bien évidemment reposer sur la fiscalité.

La fiscalité actuelle est plutôt punitive à l’égard de l’ensemble des Français et favorise quelques intérêts particuliers. Or, depuis environ deux ans et demi, avec beaucoup de constance, je soutiens un amendement tendant à rééquilibrer la fiscalité pesant sur le diesel et l’essence sur un laps de temps de dix ans et je propose de baisser les taxes sur l’essence et d’augmenter celles sur le diesel. Toutefois, on me renvoie systématiquement à un projet de loi sur la fiscalité écologique qui est très attendu mais qui, si j’ai bien compris, est totalement enterré.

Monsieur le secrétaire d’État, allez-vous changer d’avis ? Allez-vous suivre les recommandations de M. Pisani-Ferry, qui, dans son rapport Quelle France dans dix ans ?, notamment à la page 123, préconise de diminuer les aides dommageables à l’environnement et d’augmenter la fiscalité écologique sur une période de dix ans justement ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, votre engagement sur ces questions est connu. Je ne reprendrai pas certains éléments de réponse que j’ai déjà donnés concernant la fiscalité.

Vous le savez, nous allons mettre en place une fiscalité relative à l’énergie pour faire en sorte que, dans les années qui viennent, elle pèse plus fortement sur les énergies fossiles, singulièrement sur le diesel, tout en traitant différemment le diesel et les autres formes d’énergie fossile.

Néanmoins, nous en avons tous conscience, il n’y a pas eu, parmi nos concitoyens et plus particulièrement parmi nous, une mobilisation suffisante en faveur de l’impératif de santé publique que vous énoncez, madame la sénatrice.

Monsieur Karoutchi, vous savez très bien que les transports collectifs ne suffiront pas à répondre à la demande de transport ! Il faut donc prendre en compte toutes les formes alternatives de transport, ainsi que les questions d’aménagement. En effet, en raison des problèmes existant en matière d’aménagement, singulièrement parce que, notamment en Île-de-France, pour l’essentiel, les logements sont situés à l’est tandis que les bureaux et les activités sont établis à l’ouest, aujourd'hui, nombre de nos concitoyens sont obligés de parcourir des trajets considérables. Vous êtes bien placée pour savoir, madame Jouanno, que toutes ces questions se posent de façon globale à la société et qu’elles seront en partie traitées dans le projet de loi de programmation sur la transition énergétique.

Pour ce qui concerne donc les modes de transport, nous avons pris du retard parce que, ici ou là, la prise de conscience n’a pas eu lieu, par exemple à l’égard des véhicules électriques. Permettez-moi de rappeler que de nombreuses personnes, parmi lesquelles certaines étaient très attachées à l’écologie, ont, pour des raisons idéologiques, combattu pendant des années le passage aux véhicules électriques. Ce fut le cas d’un certain nombre d’initiatives prises par des collectivités territoriales, tel Autolib’ mis en place par la ville de Paris.

Prenons tous conscience de la réalité et des efforts que nous devons accomplir ensemble ! Il serait selon moi illégitime de faire peser sur cette majorité la seule responsabilité d’une situation dont les origines sont anciennes…

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Chantal Jouanno, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Jouanno

Monsieur le secrétaire d’État, vous n’avez pas répondu à mes questions. Si la ministre de l’écologie, du développement durable et de l’énergie, Ségolène Royal, avait été présente, peut-être aurait-elle pu répéter qu’elle ne désire pas de modification de la fiscalité. Quoi qu’il en soit, le problème reste entier.

Monsieur le président, permettez-moi de vous faire observer que s’il y avait des prises pour les véhicules électriques accessibles et fonctionnelles au Sénat, ce serait bien.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

J’y veillerai, ma chère collègue.

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

En 2012, l’Organisation mondiale de la santé, l’OMS, a confirmé que les fumées émises par les moteurs diesel étaient des agents cancérogènes. Leur incidence sur la santé humaine est donc avérée ; elle s’explique non seulement par la présence de particules fines dans ces fumées, mais aussi par les oxydes d’azote que contiennent celles-ci. Les résultats des analyses les plus récentes attestent que la mortalité non accidentelle journalière augmente en fonction de la concentration de ces particules fines.

En Île-de-France tout particulièrement, les périodes de forte concentration s’accompagnent d’une augmentation de 2 % à 7 % des admissions aux urgences d’enfants pour des problèmes respiratoires.

Si ce type de pollution peut avoir des sources multiples et si, en France, les émissions sont majoritairement dues au chauffage des résidences ainsi qu’à l’activité industrielle et tertiaire, le secteur des transports routiers y contribue pour une part importante, évaluée à près de 20 %.

Or, malgré un fort recul des ventes de véhicules fonctionnant au gazole en 2013, ceux-ci représentaient encore plus de 60 % du parc automobile français et environ 67 % des nouveaux véhicules vendus.

Grâce aux restrictions réglementaires, les émissions de particules fines ont néanmoins diminué de près de 30 % entre 2000 et 2011, passant de 350 000 à 250 000 tonnes. Cette évolution devrait encore être amplifiée par la mise en place du plan d’urgence pour la qualité de l’air, dont la première phase de mise en œuvre a eu lieu au mois d’avril 2013.

Cependant, il conviendrait, monsieur le secrétaire d’État, d’aller plus loin et d’encourager le changement des habitudes de nos concitoyens, sans toutefois porter atteinte brutalement à un secteur économique souvent en difficulté. Il s’agit à la fois d’un enjeu économique et d’une exigence de service public.

C’est pourquoi, alors que le dispositif du bonus-malus écologique ne concerne aujourd'hui que les émissions de CO2, je vous demande, comme ma collègue Mme Archimbaud, s’il ne serait pas possible d’étendre cet outil intéressant à d’autres polluants, notamment les particules fines.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question qui rappelle, malgré les propos précédents, le chemin qui a déjà été parcouru.

Certes, nous devons le constater, notre pays a connu un certain retard en la matière. J’en veux pour preuve les chiffres enregistrés dans nos grandes agglomérations qui sont parmi les plus mauvais au plan européen.

Toutefois, nous avons un peu progressé, notamment en raison des efforts réalisés dans le domaine de l’industrie plus que dans celui des transports. J’espère que ce n’est pas lié à une forme de désindustrialisation.

Il est encore possible de continuer à progresser. Vous avez rappelé le plan d’urgence pour la qualité de l’air qui est un élément tout à fait important. Vous soutenez à votre tour, à juste titre, la mutation du parc de voitures diesel. Vous insistez avec raison sur la fiscalité ; j’ai déjà eu l’occasion de répondre à Mme Archimbaud que ces questions seront examinées avec une attention particulière par le Gouvernement et trouveront une réponse, notamment, je l’espère, dans le prochain projet de loi de finances.

Bien sûr, nous devrons être extrêmement attentifs à la situation de nos concitoyens qui se sont équipés de véhicules diesel et il faudra sans doute différencier les zones de notre territoire, car les conséquences de l’utilisation de moteurs diesel ne sont pas les mêmes partout.

Nous continuons donc à travailler dans cette direction et nous envisageons des offres alternatives, parmi lesquelles les véhicules hybrides ou électriques. Cette piste doit être creusée de façon plus volontariste et avec moins de préjugés que par le passé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Odette Herviaux, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Odette Herviaux

Monsieur le secrétaire d’État, je vous remercie de vos réponses qui rejoignent les conclusions du rapport sur la nocivité du diesel pour la santé que j’ai eu l’honneur de présenter à la commission du développement durable.

Les évolutions techniques doivent progresser pour ce qui concerne les véhicules diesel ou autres. En effet, malgré les dernières nouveautés apparues dans le domaine des moteurs à essence, ceux-ci émettent tout de même des particules fines. Il convient, comme vous l’avez dit, de favoriser le développement de véhicules réellement plus propres et, pourquoi pas, des véhicules électriques. Il faut surtout permettre à nos concitoyens d’y accéder plus facilement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour le groupe CRC.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Selon la dernière étude sur la qualité de l’air publiée par l’Agence européenne pour l’environnement, 90 % des citadins de l’Union européenne sont exposés à l’un des polluants atmosphériques les plus nocifs à des niveaux jugés dangereux pour la santé par l’Organisation mondiale de la santé. Les transports, l’industrie, l’agriculture et les habitations contribuent à la pollution de l’air en Europe.

Malgré la diminution des rejets et la baisse de la concentration de certains polluants atmosphériques au cours des dernières décennies, l’incidence sanitaire de la pollution reste très préoccupante. Deux polluants notamment, les particules fines et l’ozone au niveau du sol, sont pointés du doigt. La pollution atmosphérique n’est pas seulement un fléau urbain, certaines zones rurales présentant aussi des taux de pollution élevés, singulièrement celles qui sont situées autour des axes routiers. Et je n’oublie pas la pollution induite par le transport aérien.

En France, les particules fines seraient responsables chaque année de plus de 40 000 morts, nombre dix fois supérieur à celui des morts accidentelles survenant sur les routes. Or la mobilisation n’est pas la même.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Alors que cette question de santé publique appelle des mesures urgentes et un effort collectif, nous en sommes encore à chercher des solutions individuelles. Les transports sont l’un des secteurs dans lesquels devrait s’illustrer cette démarche collective pour lutter contre ce fléau, l’objectif étant le renforcement des transports alternatifs à la route sur l’ensemble du territoire.

Cela nécessite des moyens financiers importants, y compris en direction des collectivités territoriales. Or, on le sait, l’Agence de financement des infrastructures de transport de France, l’AFITF, en manque pour soutenir les projets des collectivités. On sait aussi que le péage de transit annoncé ne générera que 500 millions d’euros par an. Pouvez-vous, monsieur le secrétaire d’État, nous éclairer sur les autres pistes de financement destinées à soutenir les projets de transports collectifs en site propre des collectivités territoriales ? §

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. Vous insistez sur un point particulier et très important de notre débat : les transports collectifs en site propre.

Comme vous l’avez dit, les ressources de l’AFITF doivent être augmentées pour compléter l’apport du nouveau péage de transit qui sera mis en place au début de l’année 2015 et qui permettra à l’État de mener une politique des transports cohérente avec les enjeux du développement durable, en soutenant une offre de transport alternative à la route.

Le financement du troisième appel à projets de transports en site propre s’inscrit pleinement dans ces orientations. Le Gouvernement est totalement mobilisé sur ce sujet. D’ailleurs, les discussions se tiennent au plus haut niveau entre le Premier ministre, la ministre de l’écologie et le ministre des finances, afin de définir les solutions devant être mises en œuvre et d’arrêter les arbitrages dans le cadre de la préparation du budget triennal 2015-2017.

L’appel à projets « transports collectifs et mobilité durable », lancé le 7 mai 2013, prévoit une enveloppe de 450 millions d'euros. Le 15 septembre dernier, 120 dossiers avaient été déposés. Les résultats n’ont pas encore été annoncés. C’est donc dans le cadre du projet de loi de finances pour 2015 et du budget triennal 2015–2017 que les décisions seront prises. Les collectivités territoriales concernées en seront informées.

En tout état de cause, je vous confirme que le Gouvernement tiendra précisément ses engagements en la matière.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Évelyne Didier, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Évelyne Didier

Je vous remercie de vos réponses, monsieur le secrétaire d'État. Nous en acceptons les augures. Nous examinerons attentivement le prochain projet de loi de finances rectificative et les mesures que vous avez annoncées.

Je voudrais toutefois mettre en garde le Gouvernement sur la question du renvoi systématique à des solutions individuelles. Bien entendu, le comportement de nos concitoyens est important, et il faut prévoir des incitations pour les particuliers ; à ce sujet, je pense que les bonus sont beaucoup plus efficaces que les malus. Cependant, la réponse globale relève du niveau collectif et donc de l’échelon gouvernemental. Il faut faire attention à ne pas toujours renvoyer au niveau individuel.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, je voudrais attirer votre attention sur des travaux en cours à l’Organisation de l’aviation civile internationale, l’OACI, qui visent à définir au niveau mondial un système de compensation des émissions carbone émises par l’aviation.

Ce futur dispositif devrait être adopté en 2016 et mis en place en 2020. En attendant, c’est le système d’échange de quotas d’émission, dit « système ETS », qui fonctionne pour l’Europe. Maintenu uniquement sur le périmètre des vols intra-européens jusqu’en 2016, ce dernier bénéficiera d’une possibilité de prolongation jusqu’en 2020, afin d’anticiper la mise en place du système mondial.

En tout état de cause, à partir de 2020, un système mondial basé sur le marché du carbone prévoira la compensation de toutes les émissions de CO2 au-dessus du niveau atteint en 2020. Cependant, pour que ce système soit efficace, il faut obtenir l’accord des pays émergents. Il est donc indispensable de prendre en compte les compagnies de ces pays.

Monsieur le secrétaire d'État, s’il est pour l’instant difficile de spéculer sur les conclusions des négociations, d’autant qu’il existe un vrai risque de distorsion de concurrence entre les compagnies européennes et celles des pays émergents, je souhaite néanmoins interroger le Gouvernement sur les suites qu’il compte donner au système ETS.

Les compagnies européennes et françaises sont inquiètes de la disparition à l’horizon 2016 du périmètre actuel de ce système, qui écarte les vols transcontinentaux. Peuvent-elles compter sur le soutien du gouvernement français en ce qui concerne le maintien de ce périmètre et la limitation du système aux seuls vols intra-européens ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Monsieur le sénateur, je vous remercie de votre question. Vous êtes un spécialiste de ce sujet important dans ses dimensions aussi bien environnementales que commerciales, puisqu’il touche à l’attractivité et à la compétitivité de notre économie. Nous sommes partagés entre la nécessité de faire avancer la prise de conscience internationale, et donc de limiter les émissions de gaz à effet de serre, et la nécessité de composer avec la réalité internationale, ce qui exclut une décision unilatérale de l’Union européenne.

Je veux rappeler après vous que le secteur aérien doit participer activement aux efforts de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Le système ETS fonctionne actuellement. Cependant, comme vous l’avez souligné, le problème appelle une solution à l’échelle mondiale dans le cadre de l’OACI. Pour avancer, l’Union européenne a décidé d’appliquer d'abord son système aux vols intracommunautaires, quelle que soit la compagnie. Il faut désormais – c’est exact – que ce système soit étendu au monde entier. Sachez que la France est pleinement engagée et mobilisée dans les négociations au sein de l’OACI.

Nous sommes optimistes, dans la mesure où la dernière assemblée générale de l’OACI, qui s’est tenue à l’automne, a pris acte du principe. Là encore, la perspective de la COP 21, qui se déroulera à la fin de l’année 2015, peut nous permettre de susciter une prise de conscience internationale ; tous les secteurs économiques doivent être concernés. Espérons que la capacité de conviction de la France, au plan tant intra-européen qu’extra-européen, parviendra à vous donner satisfaction en conciliant l’impératif d’attractivité et l’impératif de responsabilité environnementale.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Fouché

Monsieur le secrétaire d'État, je vous remercie de votre réponse, qui me satisfait. Je sais que vous êtes très attentif et que vous continuerez de l’être. Il s’agit d’un sujet très important pour la planète.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Delphine Bataille, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d'État, mes chers collègues, au mois d’octobre dernier, l’Organisation mondiale de la santé a classé la pollution de l’air qui nous entoure dans la catégorie des cancérigènes certains pour l’homme. Des études confirment aujourd’hui qu’il s’agit du principal risque environnemental dans le monde, et indiquent que sept millions de personnes sont décédées prématurément en 2012 en raison de l’exposition à la pollution de l’air.

D’après l’OMS, les risques, à l’intérieur comme à l’extérieur des locaux, sont désormais importants pour ce qui concerne les cardiopathies et les accidents vasculaires. Les principales sources de cette pollution qui a un effet direct sur l’environnement et la santé sont, comme pour les gaz à effet de serre, les installations industrielles, les équipements de chauffage, l’agriculture et les transports.

La France est le deuxième pays européen, derrière la Suède, où l’air est le moins toxique en CO2, car, contrairement aux énergies fossiles, l’énergie nucléaire contribue à limiter les rejets dans l’atmosphère et donc à préserver la qualité de l’air. §Il n’en demeure pas moins que le niveau de pollution reste important, et que nous connaîtrons encore de graves pics de pollution atmosphérique.

Selon l’OMS, la ville de Douai, dans le Nord, est l’une des villes les plus polluées de France. Bien que les résultats de ce classement doivent être relativisés, la lutte contre la pollution atmosphérique représente un véritable enjeu sanitaire pour ce département et même pour toute la région, qui s’est construite historiquement autour d’une industrie énergivore. Les décideurs et les acteurs sont aujourd’hui mobilisés pour promouvoir une économie décarbonée, à travers de nombreux projets qui, dans l’immédiat, ont surtout besoin de financements. L’apport de l’État reste ainsi essentiel pour accompagner nos territoires.

Monsieur le secrétaire d'État, je souhaite savoir quelles mesures le Gouvernement compte prendre, dans le cadre du projet de loi sur la transition énergétique, afin d’accompagner et de soutenir nos territoires dans leurs actions qui contribuent à répondre à ces enjeux essentiels de santé publique.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, votre question me permet de vous indiquer très précisément les avancées contenues dans le projet de loi de programmation pour un nouveau modèle énergétique français, qui répond à l’essentiel de vos questions ; celles-ci sont cependant si importantes qu’un seul texte ne suffira malheureusement pas à y répondre en totalité.

Nous voulons engager la France dans un développement peu émetteur de gaz à effet de serre. Le projet de loi susvisé fixera pour une période de cinq ans des objectifs nationaux de réduction en matière de polluants atmosphériques. Ces objectifs seront déclinés dans des actions opérationnelles secteur par secteur : industrie, transports, secteur résidentiel, agriculture.

Ce projet de loi prévoit en outre plusieurs mesures, comme la possibilité pour les agglomérations qui le souhaitent de restreindre la circulation des véhicules les plus polluants ; je réponds ainsi à Roger Karoutchi, qui trouvera là, sans aucun doute, une raison de voter ce texte.

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen, secrétaire d'État

Le projet de loi précité favorise le développement de moyens de déplacement moins émetteurs, notamment des véhicules électriques, grâce au déploiement de bornes de recharge ; cette question a été soulevée précédemment. Il renforce les outils de planification territoriale en faveur de la qualité de l’air, pour inscrire résolument les collectivités territoriales dans la lutte contre la pollution. Enfin, il impose aux chargeurs de la grande distribution de mettre en œuvre des actions de réduction des émissions de gaz à effet de serre.

Nous souhaitons également que des incitations positives soient mises en place pour faciliter le renouvellement des véhicules, au profit de ces fameux véhicules électriques qui, pendant longtemps, n’ont pas trouvé le soutien qu’ils auraient dû recueillir parmi les défenseurs de l’environnement. Ces incitations viseront notamment les ménages modestes. Une prime à la conversion des véhicules diesel les plus anciens sera créée. Associée au bonus électrique, elle pourra atteindre 10 000 euros. Enfin, pour stimuler le marché des véhicules propres, les flottes de véhicules de l’État seront renouvelées au moins pour moitié par des véhicules écologiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Delphine Bataille, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Delphine Bataille

Je vous remercie de votre réponse, monsieur le secrétaire d'État. Même si l’état des lieux peut parfois sembler anxiogène, vous venez de montrer que le Gouvernement avait véritablement pris en compte la question de la santé publique qui est incontournable à un moment où les médecins s’accordent à dire qu’une exposition à des concentrations faibles de poussières sur une longue période est aussi, voire plus préoccupante qu’une exposition ponctuelle à des concentrations élevées.

C'est pourquoi la question des poussières en suspension fait l’objet de nombreuses études sanitaires. La pollution aux particules fines nécessite la mobilisation d’un maximum d’acteurs, parce que les valeurs réglementaires sont régulièrement dépassées, par exemple dans la région Nord-Pas-de-Calais. Les préfets de région ont présenté un plan de protection de l’atmosphère dont les actions s’inscrivent dans la durée pour lutter contre la pollution de fond. De nombreux partenaires sont sollicités, à côté des actions régaliennes menées par l’État.

Néanmoins, près de 90 % du budget de la fédération des associations de surveillance de la qualité de l’air, l’ATMO, restent consacrés à la surveillance de l’atmosphère, qui est inscrite dans les textes réglementaires. Il semble aujourd'hui nécessaire de développer des actions nouvelles, soutenues par les collectivités territoriales, autour des enjeux régionaux et territoriaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour le groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, je crains qu’une réponse partielle n’ait déjà été apportée à la question que je m’apprête à poser sur la place réservée à la pollution atmosphérique lors de la conférence sur le climat qui se tiendra à Paris au mois de décembre 2015.

Nous le savons, la France accueillera la grande conférence des Nations unies, communément appelée COP 21. À cette occasion, plus de 25 000 délégués venant du monde entier se pencheront sur les questions relatives à l’avenir de notre planète.

Nous sommes tous concernés par le dérèglement climatique et par l’effet de la pollution sur la santé. Comme l’ont rappelé des orateurs précédents, chaque année, plus de 42 000 Français meurent prématurément en raison de la pollution de l’air.

Face à ce chiffre inquiétant, ne serait-il pas judicieux d’adopter rapidement des plans de protection de l’atmosphère ? La reconquête de la qualité de l’air constitue un enjeu sanitaire majeur et justifie, me semble-t-il, la mobilisation de tous les acteurs concernés, ce que nous sommes tous.

La pollution atmosphérique doit avoir toute sa place lors de cette conférence mondiale de 2015. La France prépare celle-ci activement ; des discussions sont engagées et les négociations ont commencé, notre pays déployant d’intenses efforts diplomatiques pour qu’un accord ambitieux soit finalisé.

Monsieur le secrétaire d’État, pouvez-vous nous indiquer comment la France entend peser sur les orientations relatives à la pollution atmosphérique lors de la conférence sur le climat et la place qui lui sera réservée ?

Debut de section - Permalien
Jean-Marie Le Guen

Madame la sénatrice, votre question permet de réunir, dans un cadre stratégique, toutes les questions qui m’ont été posées, à juste titre, aujourd’hui.

En effet, si la France peut mener une action résolue pour avancer, par exemple, sur le sujet de la pollution atmosphérique à l’intérieur de ses villes, elle ne peut néanmoins pas traiter globalement la problématique de l’effet de serre. Seule, elle n’est pas capable de changer le destin du monde en agissant sur les conséquences du réchauffement climatique.

Par ailleurs, en étant trop volontariste, elle se couperait de la concurrence internationale et se verrait très lourdement pénalisée, notamment en matière industrielle.

La perspective qu’a tracée le Président de la République à l’égard de cette fameuse COP 21 pour tenter de surmonter l’échec de la conférence de Copenhague vise à essayer de faire converger des politiques internationales vers les objectifs définis. Cette vision est tout à fait essentielle.

Vous le savez, la méthode adoptée sera sans doute plus souple, plus pragmatique que celle qui avait été retenue pour la conférence de Copenhague. En effet, l’idée est d’arriver à déterminer des critères assurant l’égalité à tout le monde et dans tous les secteurs.

De plus, la dynamique diplomatique mise en œuvre non seulement par la France, principal organisateur de ce sommet, mais aussi par tous les participants, notamment ceux qui sont issus de la société civile mobilisée sur cette question au plan international, permet de faire avancer les dossiers tant par grande branche industrielle que par grande thématique et par grand continent. Il s’agit, à chaque fois, de partir de l’acquis pour faire un saut qualitatif.

L’engagement politique du Président de la République et du Gouvernement est total dans cette affaire. Nous espérons pouvoir aboutir enfin à des résultats significatifs qui nous permettront d’enrayer le risque de réchauffement climatique tel qu’il est aujourd’hui programmé par les scientifiques qui ont de ce sujet une connaissance assez grande.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à Mme Hélène Conway-Mouret, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Hélène Conway-Mouret

Monsieur le secrétaire d’État, je me réjouis de la volonté politique qui anime le Gouvernement. Elle est aujourd’hui essentielle non seulement pour la réussite de la conférence précitée, mais aussi pour le bien-être futur de tous.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Mes chers collègues, nous en avons terminé avec les questions cribles thématiques sur la pollution de l’air.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

La parole est à M. Philippe Marini, pour un rappel au règlement.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Marini

Monsieur le président, ce rappel au règlement se fonde sur l’article 29 bis, qui concerne l’organisation de nos travaux et les missions dévolues à la conférence des présidents.

Comme vous l’aurez compris, je veux vous parler des conditions d’examen du projet de loi portant réforme territoriale. La commission spéciale constituée a eu très peu de temps pour travailler et n’a pas pu, à ma connaissance, adopter de rapport, d’où l’insatisfaction qui s’exprime au sein de plusieurs groupes, lesquels sont conduits à solliciter de votre part, monsieur le président, une réunion de la conférence des présidents pour aménager l’ordre du jour.

Il s’agit de permettre la réalisation des études d’impact indispensables, par exemple dans le domaine budgétaire. En effet, le chiffrage des bénéfices à attendre des regroupements de régions a beaucoup varié, dans la bouche même de M. le secrétaire d’État chargé de la réforme territoriale, notre ancien collègue André Vallini : on a ainsi entendu évoquer ²le chiffre de 5 milliards d’euros, comme celui de 12 milliards d’euros. Cette évaluation nécessite donc des études plus approfondies, afin que le Sénat puisse examiner en première lecture le projet de loi susvisé dans la sérénité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Bel

Monsieur Marini, acte vous est donné de ce rappel au règlement.

Ayant effectivement été saisi d’une demande de réunion de la conférence des présidents de la part des groupes CRC, UMP et RDSE, j’ai décidé de convoquer cette dernière aujourd’hui, à seize heures quinze.

Mes chers collègues, avant d’aborder la suite de l’ordre du jour, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à quinze heures cinquante, est reprise à seize heures, sous la présidence de Mme Bariza Khiari.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La séance est reprise.

Mes chers collègues, la conférence des présidents ayant été convoquée à seize heures quinze par M. le président du Sénat, nous allons interrompre nos travaux le temps de cette réunion.

La séance est suspendue.

La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à dix-sept heures dix.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La séance est reprise.

Madame la ministre, mes chers collègues, la conférence des présidents n’a pas encore fini de siéger. Lorsque ses conclusions seront rédigées, je serai amenée à vous en donner lecture.

Nous passons donc à la suite de l’ordre du jour sans plus tarder.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi, adopté par l’Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée, tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales (projet n° 596, texte de la commission n° 642, rapport n° 641).

Nous poursuivons la discussion des articles.

Titre IEr

DISPOSITIONS VISANT À ASSURER LE PRONONCÉ DE PEINES EFFICACES ET ADAPTÉES

Chapitre III

Dispositions instituant la contrainte pénale

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de deux amendements faisant l’objet d’une discussion commune.

L’amendement n° 44 rectifié, présenté par Mmes Tasca et Klès et MM. Vandierendonck, Kaltenbach, Madec, Mohamed Soilihi, Sueur et Delebarre, est ainsi libellé :

Après l’article 8 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa des articles 131-8 et 132-54 et à la première phrase du premier alinéa de l’article 132-57 du code pénal, les mots : « deux cent dix » sont remplacés par les mots : « deux cent quatre-vingts ».

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Cet amendement vise à augmenter la durée maximale du travail d’intérêt général, ou TIG, de deux cent dix heures à deux cent quatre-vingts heures, soit huit semaines.

Les TIG ont été créés en 1983 avec une durée maximale de deux cent quarante heures, sur le modèle du système adopté par le Royaume-Uni. En 2004, constatant des difficultés de mise en œuvre, le législateur a abaissé cette durée maximale à deux cent dix heures. Or, si l’on veut faire du TIG une véritable solution alternative à l’emprisonnement, il faut lui donner plus de sens, notamment en augmentant sa durée maximale pour permettre à la personne condamnée de développer un vrai projet et, éventuellement, un véritable apprentissage.

La possibilité de prononcer des TIG longs est déjà inscrite dans la législation de plusieurs États, en particulier la Suisse, qui va jusqu’à sept cent vingt heures. Ce n’est pas ce que proposent les auteurs de cet amendement, qui, je le rappelle, se limitent à deux cent quatre-vingts heures.

Le présent projet de loi fait du TIG un élément constitutif de la contrainte pénale. Le TIG ne peut être prononcé qu’avec l’accord du condamné, c’est d’ailleurs un gage de sa réussite : lorsque l’on s’engage dans un travail d’intérêt général, mieux vaut y aller de son plein consentement !

Le moment est donc venu de donner un nouvel élan au TIG. Le juge, lorsqu’il estime que la personnalité et la situation du condamné le justifient, peut prononcer cette peine qui présente l’avantage de permettre au condamné d’amorcer une réinsertion dans la société, mais aussi dans le monde du travail. On sait en effet que le rapport avec le travail se perd lors du séjour en prison ; la remise en route est difficile et le travail d’intérêt général peut la faciliter.

Nous savons tous que la mise en application du TIG n’est pas simple, parce qu’elle nécessite un suivi approfondi, mais toutes les mesures proposées dans votre projet de loi vont dans ce sens, madame la ministre ; elle exige aussi le concours des collectivités locales et des associations. Il faudra donc veiller aux conditions pratiques de mise en œuvre et peut-être saisir cette occasion pour établir un bilan détaillé de l’usage actuel des TIG.

L’examen de ce projet de loi nous offre une belle occasion de remettre en valeur l’utilité des travaux d’intérêt général et, à cette fin, d’en augmenter la durée maximale. L’amendement n° 44 rectifié tend donc à porter cette durée maximale à deux cent quatre-vingts heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 45 rectifié, présenté par Mmes Tasca et Klès et MM. Vandierendonck, Kaltenbach, Madec, Mohamed Soilihi, Sueur et Delebarre, est ainsi libellé :

Après l’article 8 ter

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Au premier alinéa des articles 131–8 et 132–54 et à la première phrase du premier alinéa de l’article 132–57 du code pénal, les mots : « deux cent dix » sont remplacés par les mots : « deux cent quarante ».

La parole est à Mme Catherine Tasca.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Il s’agit d’un amendement de repli. Si, ce que je n’ose imaginer, l’amendement n° 44 rectifié n’était pas adopté, je pense que nous pourrions au moins trouver un très large consensus dans cet hémicycle pour adopter l’amendement n° 45 rectifié qui tend à porter à deux cent quarante heures la durée maximale du TIG.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Mme Catherine Tasca. Bien sûr, le précédent amendement me semble le meilleur.

Applaudissements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a émis un avis favorable sur l’amendement n° 44 rectifié, sous réserve de l’avis du Gouvernement, mais j’espère qu’il sera également favorable.

Si la durée maximale du TIG passe à deux cent quatre-vingts heures, le juge disposera d’une plus grande latitude pour prononcer un TIG. Comme le dit Mme Tasca, l’adoption de cette mesure ne règle pas tous les problèmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Il faut en effet trouver des TIG et je pense que les magistrats devraient se mobiliser pour rencontrer les responsables de collectivités locales et d’associations.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Le sujet abordé par les auteurs de cet amendement est très important, parce que le travail d’intérêt général est une réponse pénale particulièrement adaptée à toute une série de situations. Il présente surtout l’avantage que le condamné participe à l’exécution de sa peine : c’est l’un des rares cas où la personne condamnée joue un rôle très actif dans l’exécution de sa peine. Par conséquent, nous devons développer la pratique du travail d’intérêt général, en multipliant les situations dans lesquelles il peut être exécuté.

Nous venons de fêter le trentième anniversaire de la création du travail d’intérêt général : cette peine avait été créée par Robert Badinter, lorsqu’il était garde des sceaux. Vous savez certainement, puisque vous êtes tous très impliqués dans l’étude des questions relatives à la justice, que la Chancellerie a lancé une semaine d’action sur les travaux d’intérêt général.

Il est intéressant de noter que de nombreuses collectivités territoriales demandent à accueillir des TIG, mais elles sont inégalement réparties sur le territoire : il n’est pas rare que de petites communes accueillent très volontiers des personnes condamnées à des travaux d’intérêt général.

Nous avons d’autres partenaires très actifs qui ont fait savoir, à l’occasion du trentième anniversaire, qu’ils étaient intéressés par la perspective d’accueillir davantage de personnes exécutant des travaux d’intérêt général.

Nous avons de gros partenaires, la SNCF, par exemple. Dans ce genre de structure de taille importante, il arrive qu’une personne soit spécifiquement dédiée à l’accueil de ceux qui exécutent un TIG.

Depuis la modification de la loi de 2004, les TIG sont plafonnés à deux cent dix heures, ce qui pose des difficultés en certains endroits. Le porter à deux cent quatre-vingts heures va donner un peu plus de marge. Je le dis très honnêtement, il n’est pas certain que des tribunaux appliquent rapidement cette disposition et prononcent des TIG de deux cent quatre-vingts heures. En effet, l’exécution du TIG passe par une insertion dans une équipe et par un accompagnement. Confrontées à un certain nombre de contraintes, des collectivités évitent parfois d’accueillir des TIG parce qu’elles s’interrogent sur la cohésion de leurs équipes et sur leur responsabilité en cas d’incidents.

La démarche me paraît donc tout à fait positive et j’émets, au nom du Gouvernement, un avis favorable sur votre premier amendement. Il n’y a pas de raison de vous contraindre à l’amendement de repli dans lequel est proposé un plafond de deux cent quarante heures, soit quarante heures de moins.

Je voulais, en toute honnêteté, vous dire que, dans l’immédiat, il n’y aura pas de TIG de deux cent quatre-vingts heures. Vous ouvrez un espace qui permettra au magistrat d’être plus à l’aise pour prononcer cette sanction, qui, je le répète, a cette vertu particulière d’impliquer le condamné dans l’exécution de sa peine.

J’ai pris le temps de m’expliquer parce que, au fil de la discussion, à force d’examiner les dispositions successives, nous sommes parfois emprisonnés, ce qui nous fait un peu perdre de vue l’objectif et l’ambition de ce texte, qui sont vraiment la prévention de la récidive. Or parmi les facteurs de la prévention de la récidive figure la responsabilisation de l’auteur de l’acte et donc son implication dans l’exécution de sa peine. Le TIG est par excellence une peine dont l’exécution implique fortement l’auteur de l’acte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Alain Gournac, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Gournac

Tout le monde est d’accord avec la proposition de Mme Tasca ! Si je prends la parole pour soutenir l’amendement, c’est parce que j’ai vécu l’expérience des TIG dans ma mairie depuis à peu près vingt ans. Les TIG ont été créés voilà trente ans, nous avez-vous dit, madame le garde des sceaux. Dans ma ville, c’est une réussite totale, sauf – c’est inévitable, c’est la vie ! – dans un cas. Avec les TIG, on redonne aux personnes la possibilité de se remettre debout. Bien sûr, il ne faut pas les cantonner à des tâches secondaires.

Si nous avons obtenu d’excellents résultats, c’est parce que nous sommes en accord avec le juge qui nous envoie la personne et parce que nous discutons avec elle pour voir comment nous allons procéder. Nous affectons auprès d’elle quelqu’un de dédié pour lui éviter d’être perdue dans notre organisation. Ainsi, s’il est d’usage dans le service où elle travaille de porter une blouse, eh bien, la personne en revêt une. Le processus d’intégration ne diffère pas de celui qu’ont suivi les autres membres de l’équipe. Automatiquement, le condamné – un mot que je n’aime pas beaucoup –, la personne qui a fait une faute peut se réhabiliter à travers cela.

Nous suivons l’évolution, pas à pas, en particulier à travers la personne qui suit celui qui exécute le TIG – pas pour l’espionner mais pour l’aider, le renseigner sur le lieu et l’heure du déjeuner, par exemple. Et petit à petit, la personne chargée de l’encadrer vient nous raconter l’évolution absolument incroyable de la personne qui avait vécu la honte d’être condamnée et dont on s’aperçoit qu’elle se révèle tout à coup.

Ce dispositif, nous devons absolument le développer dans notre pays. Vous avez raison, madame le garde des sceaux, les petites mairies n’ont pas la structure ni le personnel. Je le sais pour avoir essayé de faire pratiquer les TIG dans une mairie toute proche de ma ville du Pecq. Le maire était pour, mais il n’avait pas les moyens.

Et il y a aussi, en accord avec Mme le juge de Versailles, la possibilité de s’impliquer dans la vie associative, à la Maison des associations, par exemple. Franchement, il faut donner la possibilité de se réhabiliter à un homme qui a fait une bêtise – qui pourrait prétendre ici qu’il n’en fera jamais ? – en rendant des services, en ayant la fierté de faire évoluer la ville. Moi, à l’issue du TIG, je recevais les personnes – et j’appelle les maires ou les présidents de conseil général à m’imiter – pour leur dire que tout s’était bien passé, qu’elles avaient rendu service.

Vous avez raison, madame Tasca, de proposer de porter à huit semaines la durée maximale des travaux d’intérêt général. Il faut faire un geste dans cette direction. Je ne sais pas si beaucoup de tribunaux suivront. Ce qui compte, c’est que le Sénat exprime son profond attachement à ces travaux d’intérêt général. Donc, je suis tout à fait favorable à cet amendement à titre personnel et je pense que le groupe va me suivre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Madame la présidente, j’irai tout à fait dans le même sens. Tout évolue et parfois favorablement. Je me souviens, en effet, que l’on m’avait opposé l’article 40 de la Constitution à propos d’un amendement comparable que j’avais déposé il y a quelques années. Pourtant, les TIG ne sont pas rémunérés mais on m’avait expliqué que leur encadrement générait un certain nombre de dépenses. Donc, il y a aujourd’hui une appréhension intelligente de l’article 40, ce dont on ne peut que se féliciter !

J’ai déclaré à de multiples reprises qu’en matière de délinquance routière notamment, il me paraissait tellement plus vertueux sur le plan de la lutte contre la récidive de développer les TIG dans des établissements spécialisés pour l’accueil des personnes traumatisées de la route plutôt que d’incarcérer les personnes ayant provoqué des accidents. Cela me paraissait d’autant plus important pour modifier leur propre culture.

Enfin, dans mon département, le Nord, de très nombreux maires souhaiteraient développer les travaux d’intérêt général mais ils auraient parfois besoin, pour ce faire, d’être un peu plus encadrés par les autorités de justice.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l’article 8 ter et l'amendement n° 45 rectifié n'a plus d'objet.

Par ailleurs, je constate que l’amendement n° 44 rectifié a été adopté à l’unanimité des présents.

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° À la première phrase du dernier alinéa de l’article 474, après le mot : « condamnée », sont insérés les mots : « à une contrainte pénale, » ;

2° Après le titre Ier du livre V, il est inséré un titre Ier bis ainsi rédigé :

« Titre I er Bis

« DE LA CONTRAINTE PÉNALE

« Art. 713 -42. – Le service pénitentiaire d’insertion et de probation évalue la personnalité et la situation matérielle, familiale et sociale de la personne condamnée à la contrainte pénale.

« À l’issue de cette évaluation, le service adresse au juge de l’application des peines un rapport comportant des propositions relatives au contenu et aux modalités de mise en œuvre des mesures de contrôle et d’assistance, des obligations et des interdictions mentionnées à l’article 131-4–1 du code pénal.

« Art. 713–43. – Au vu du rapport établi par le service pénitentiaire d’insertion et de probation, le juge de l’application des peines décide les obligations et interdictions particulières auxquelles le condamné est astreint parmi celles mentionnées aux 1° à 3° de l’article 131–4–1 du code pénal, ainsi que les mesures d’aide dont il bénéficie. Le juge statue par ordonnance motivée, après réquisitions écrites du procureur de la République, et après avoir entendu les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat. S’il envisage d’astreindre le condamné à l’obligation d’effectuer un travail d’intérêt général prévue au 2° de ce même article, il statue après que ce dernier a été informé de son droit de refuser l’accomplissement d’un travail d’intérêt général et après avoir reçu sa réponse. Il lui notifie cette ordonnance et lui donne connaissance des dispositions des articles 713–44 et 713–47 du présent code.

« Le juge de l’application des peines peut modifier, supprimer ou compléter les obligations et interdictions fixées par la juridiction en application du dixième alinéa de l’article 131–4–1 du code pénal si l’évaluation de la personnalité du condamné le justifie.

« La décision du juge de l’application des peines intervient au plus tard dans les quatre mois qui suivent le jugement de condamnation.

« Art. 713–44. – La situation matérielle, familiale et sociale de la personne est réévaluée à chaque fois que nécessaire au cours de l’exécution de la peine, et au moins une fois par an, par le service pénitentiaire d’insertion et de probation et le juge de l’application des peines.

« Au vu de chaque nouvelle évaluation, le juge de l’application des peines peut, selon les modalités prévues à l’article 712–8, et après avoir entendu les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat :

« 1° Modifier ou compléter les obligations et interdictions auxquelles la personne condamnée est astreinte ;

« 2° Supprimer certaines d’entre elles.

« Art. 713 -45. – Si le condamné a satisfait aux mesures, obligations et interdictions qui lui étaient imposées pendant au moins un an, que son reclassement paraît acquis et qu’aucun suivi ne paraît plus nécessaire, le juge de l’application des peines peut, par ordonnance rendue selon les modalités prévues à l’article 712-8, sur réquisitions conformes du procureur de la République, décider de mettre fin de façon anticipée à la peine de contrainte pénale.

« En l’absence d’accord du ministère public, le juge de l’application des peines peut saisir à cette fin, par requête motivée, le président du tribunal ou un juge par lui désigné, qui statue à la suite d’un débat contradictoire public en application de l’article 712-6. En cas de refus opposé à cette première demande, une autre demande ne peut être présentée qu’une année après cette décision de refus. Il en est de même, éventuellement, des demandes ultérieures.

« Art. 713 -46. – Le délai d’exécution de la contrainte pénale peut être suspendu par le juge de l’application des peines en cas d’incarcération du condamné, sauf si celle-ci résulte d’une condamnation sur le fondement de l’article 434–43–1 du code pénal.

« Art. 713 -47. – En cas d’inobservation par la personne condamnée des mesures de contrôle et d’assistance, des obligations ou des interdictions mentionnées à l’article 131-4–1 du code pénal qui lui sont imposées, le juge de l’application des peines peut, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, selon les modalités prévues à l’article 712-8 du présent code, modifier ou compléter les obligations ou interdictions auxquelles le condamné est astreint. Le juge de l’application des peines peut également procéder à un rappel aux mesures, obligations et interdictions auxquelles est astreinte la personne condamnée.

« Si la solution prévue au premier alinéa du présent article est insuffisante pour assurer l’effectivité de la peine, le juge de l’application des peines transmet au procureur de la République toute information utile lui permettant d’apprécier l’opportunité d’engager des poursuites sur le fondement de l’article 434–43–1 du code pénal.

« Art. 713 -48. –

Supprimé

« Art. 713 -49. – Un décret précise les modalités d’application du présent titre. » ;

3° §(nouveau) Au 5° de l’article 398–1, après la référence : « 433-10, premier alinéa », est insérée la référence : « 434–43–1, ».

II

« Art. 434–43–1. – La violation, par le condamné, des obligations résultant d’une peine de contrainte pénale est punie de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 14, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je fais simplement remarquer qu’il s’agit d’un amendement de cohérence avec d’autres amendements qui ont été rejetés. À mon avis, la discussion devrait être très rapide.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Défavorable, puisque c’est un amendement de cohérence avec d’autres amendements auxquels la commission a été défavorable. Cela supprime la contrainte pénale.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Même avis défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 38, présenté par Mme D. Gillot et M. Mohamed Soilihi, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 6

Après le mot :

probation

insérer les mots :

ou la personne morale habilitée à qui la mesure a été confiée

II. – Alinéa 7

Après le mot :

service

insérer les mots :

pénitentiaire d’insertion et de probation ou la personne morale habilitée à qui la mesure a été confiée

III. – Alinéa 8, première phrase

Après le mot :

probation

insérer les mots :

ou la personne morale habilitée à qui la mesure a été confiée

IV. – Alinéa 11

Après le mot :

probation

insérer les mots :

, la personne morale habilitée

La parole est à Mme Dominique Gillot.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

C’est un amendement technique de mise en cohérence à la suite de l’adoption à l’article 8 de l’amendement de la commission modifié par le sous-amendement n° 35 rectifié. Il s’agit d’introduire la complémentarité des services associatifs et du SPIP.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Par cohérence avec la position que j’ai développée hier, j’émets, au nom du Gouvernement, un avis défavorable, ce que Mme Gillot peut concevoir.

J’en profite pour rappeler que le sujet dont nous traitons est l’implication de personnes morales dans le post-sentenciel, c’est-à-dire après le prononcé de la condamnation. C’est le champ d’intervention du service pénitentiaire d’insertion et de probation. Ce service, nous le réorganisons, nous modifions la formation initiale et la formation continue. Nous travaillons pour le doter de nouveaux outils d’analyse, de prise en charge et d’évaluation.

Le SPIP a des relations partenariales de grande qualité. Voilà des années que les services d’insertion et de probation travaillent, comme l’autorité judiciaire, avec des associations. Il existe des associations très sérieuses, très rigoureuses, très professionnelles, qui interviennent essentiellement dans le présentenciel, autrement dit avant le jugement.

Nous sommes en train de faire un effort pour armer le SPIP de nouveaux outils afin qu’il soit bien performant dans l’évaluation et le suivi des personnes condamnées à une contrainte pénale.

J’attire l’attention des membres de la Haute Assemblée sur le fait que ce service, qui assure une mission régalienne, sera de mieux en mieux formé pour exercer ce type de missions. Et vous proposez que des personnes morales soient en situation d’être choisies par le ministère public, sans qu’aucune disposition ne soit prise pour l’instant pour les spécialiser de la même façon dans le post-sentenciel.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 99, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéas 19 et 20

Remplacer ces alinéas par quatre alinéas ainsi rédigés :

« Si la solution prévue au premier alinéa du présent article est insuffisante pour assurer l’effectivité de la peine, le juge, d’office ou sur réquisitions du procureur de la République, saisit, par requête motivée, le président du tribunal de grande instance ou un juge par lui désigné afin que soit mis à exécution contre le condamné tout ou partie de l’emprisonnement fixé par la juridiction en application du dixième alinéa de l’article 131–4–1 du code pénal. Le président du tribunal ou le juge par lui désigné, qui statue à la suite d’un débat contradictoire public en application de l’article 712–6 du présent code, fixe la durée de l’emprisonnement à exécuter sans pouvoir excéder celle fixée par la juridiction. La durée de cet emprisonnement est déterminée en fonction de la personnalité du condamné, de la gravité de l’inobservation des mesures, obligations et interdictions, ainsi que du délai pendant lequel la contrainte pénale a été exécutée et des obligations qui ont déjà été respectées ou accomplies. Lorsque les conditions prévues à l’article 723–15 sont remplies, le président du tribunal ou le juge par lui désigné peut décider que cet emprisonnement s’exécutera sous le régime de la semi-liberté, du placement à l’extérieur ou de la surveillance électronique.

« Lorsqu’il fait application du deuxième alinéa du présent article, le juge de l’application des peines peut, s’il l’estime nécessaire, ordonner l’incarcération provisoire du condamné en application des deux premiers alinéas de l’article 712–19. À défaut de tenue du débat contradictoire devant le président ou le juge par lui désigné dans un délai de quinze jours suivant l’incarcération du condamné, celui-ci est remis en liberté s’il n’est pas détenu pour une autre cause.

« Au cours de l’exécution de la contrainte pénale, le juge de l’application des peines peut faire application à plusieurs reprises du deuxième alinéa du présent article, dès lors que la durée totale des emprisonnements ordonnés ne dépasse pas celle fixé par la juridiction en application du dixième alinéa de l’article 131–4–1 du code pénal. Si la durée de l’emprisonnement ordonné est égale ou, compte tenu le cas échéant des précédents emprisonnements ordonnés, atteint cette durée, la décision du président ou du juge par lui désigné met fin à la contrainte pénale.

« Art. 713–48 . – Si le condamné commet, pendant la durée d’exécution de la contrainte pénale, un crime ou un délit de droit commun suivi d’une condamnation à une peine privative de liberté sans sursis, la juridiction de jugement peut, après avis du juge de l’application des peines, ordonner la mise à exécution de tout ou partie de l’emprisonnement fixé par la juridiction en application du dixième alinéa de l’article 131–4–1 du code pénal.

II. - Alinéas 22 à 24

Supprimer ces alinéas.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement n'a, me semble-t-il, plus d'objet, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 99 n’a en effet plus d’objet.

Je mets aux voix l'article 9, modifié.

L'article 9 est adopté.

(Non modifié)

Au début de l’article 20-4 de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, sont ajoutés les mots : « La contrainte pénale, ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 15, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Il s’agit d’un amendement de cohérence, qui vise à supprimer l’article 10.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement vise à supprimer l’article 10, qui précise que la contrainte pénale n’est pas applicable aux mineurs. L’avis du Gouvernement est bien sûr défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 10 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Titre II

DISPOSITIONS VISANT À PRÉCISER LE RÉGIME DE L’EXÉCUTION DES PEINES ET À RENFORCER LE SUIVI ET LE CONTRÔLE DES PERSONNES CONDAMNÉES

Chapitre Ier

Principes régissant la mise en œuvre des peines

I. – §(Non modifié) L’article 707 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au début du premier alinéa, est ajoutée la mention : « I. – » ;

2° Les deuxième et troisième alinéas sont remplacés par des II à V ainsi rédigés :

« II. –

Supprimé

« III. – Le régime d’exécution des peines privatives et restrictives de liberté vise à préparer l’insertion ou la réinsertion de la personne condamnée afin de lui permettre d’agir en personne responsable, respectueuse des règles et des intérêts de la société et d’éviter la commission de nouvelles infractions.

« Ce régime est adapté au fur et à mesure de l’exécution de la peine, en fonction de l’évolution de la personnalité et de la situation matérielle, familiale et sociale de la personne condamnée, qui font l’objet d’évaluations régulières.

« IV. – Toute personne condamnée incarcérée en exécution d’une peine privative de liberté bénéficie, chaque fois que cela est possible, d’un retour progressif à la liberté, dans le cadre d’une mesure de semi-liberté, de placement à l’extérieur, de placement sous surveillance électronique, de libération conditionnelle ou d’une libération sous contrainte, afin d’éviter une remise en liberté sans aucune forme de suivi judiciaire.

« V. – Au cours de l’exécution de la peine, la victime a le droit :

« 1° De saisir l’autorité judiciaire de toute atteinte à ses intérêts ;

« 2° D’obtenir la réparation de son préjudice, par l’indemnisation de celui-ci ou par tout autre moyen adapté, y compris, s’il y a lieu, en se voyant proposer une mesure de justice restaurative ;

« 3° D’être informée, si elle le souhaite, de la fin de l’exécution d’une peine privative de liberté, dans les cas et conditions prévus au présent code ;

« 4° À la prise en compte, s’il y a lieu, de la nécessité de garantir sa tranquillité et sa sûreté.

« L’autorité judiciaire est tenue de garantir l’intégralité de ces droits tout au long de l’exécution de la peine, quelles qu’en soient les modalités. » ;

3° Le dernier alinéa est supprimé.

I bis. – §(Non modifié) Après l’article 707-4 du même code, il est inséré un article 707-5 ainsi rédigé :

« Art. 707 -5. – En cas de délivrance d’un mandat de dépôt ou d’arrêt, les peines privatives de liberté peuvent être immédiatement aménagées, dans les conditions prévues au présent code, sans attendre que la condamnation soit exécutoire en application de l’article 707, sous réserve du droit d’appel suspensif du ministère public prévu à l’article 712-14. »

I ter. –

Supprimé

I quater. –

Supprimé

I quinquies. – §(Supprimé)

II. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 16, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Même avis.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 46, présenté par M. Lecerf, est ainsi libellé :

Alinéa 7

Après les mots :

d’un retour progressif à la liberté

insérer les mots :

en prenant en compte les conditions matérielles de détention et le taux de densité carcérale de l’établissement

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet amendement vise à intégrer le critère des conditions matérielles de détention comme un critère combiné aux conditions d'octroi des aménagements de peine et de libération sous contrainte.

Entendons-nous bien : il ne s’agit pas d’établir quelque automaticité que ce soit entre, par exemple, la surpopulation carcérale et la sortie de détention, comme le souhaiteraient notamment les partisans de ce que l’on appelle le numerus clausus. Il s’agit simplement de permettre au juge de prendre en compte, parmi un éventail de critères, celui des conditions matérielles de détention. En effet, le risque de récidive, que nous souhaitons tous minimiser, dépend aussi de la surpopulation carcérale, comme de l’état dégradé de certains établissements pénitentiaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission est absolument favorable à cet amendement. En effet, il répond aux remarques formulées à de nombreuses reprises par le contrôleur général des lieux de privation de liberté, conformément aux positions qu’il avait prises : il est certain qu’il faut prendre en compte l’état en détention. Si la personne, au lieu d’être seule dans une cellule – ce qui est la loi – la partage avec trois ou quatre autres détenus, il est normal de prendre en compte un certain nombre de dispositions de sortie qui tiennent compte de cet enfermement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Monsieur Lecerf, cet amendement vous ressemble beaucoup. On voit bien qu’il est inspiré par une connaissance très proche de la réalité carcérale. Vous vous préoccupez des conditions de détention pour les rendre conformes à la dignité de la personne.

Le Gouvernement est néanmoins très réservé sur l’inscription dans la loi d’un tel critère. Dans la circulaire générale de politique pénale que j’ai diffusée le 19 septembre 2012, je reprenais l’énoncé de la loi pénitentiaire, que vous connaissez par cœur, c'est-à-dire le choix de l’incarcération comme ultime recours, en rappelant justement les aménagements de peine possibles, tels qu’ils sont prévus dans le code de procédure pénale, et en soulignant qu’il y avait lieu de tenir compte de la situation des établissements.

Autant inscrire ce critère dans une circulaire me paraît concevable, dans la mesure où il s’agit de donner des orientations de politique pénale, autant l’inscrire dans la loi me paraît plus problématique. C’est pourquoi, tout en comprenant l’esprit de cet amendement, je ne suis pas persuadée que ces dispositions doivent devenir une norme.

J’ajoute que nous avons supprimé dans ce texte de loi la procédure simplifiée d’aménagement des peines, la PSAP, et la surveillance électronique de fin de peine, la SEFIP, qui, sans être des mécanismes de numerus clausus, sont objectivement des mécanismes automatiques de gestion des flux carcéraux. Ils n’ont pas fonctionné puisque à peine 3 % des personnes qui pouvaient y prétendre se sont vu appliquer une surveillance électronique de fin de peine ou une procédure simplifiée d’aménagement de peine. D’ailleurs, sur la PSAP, l’autorité judiciaire a certaines réticences.

En revanche, ce projet de loi améliore les choses. Par conséquent, nous devrions progressivement être moins confrontés à des situations dans lesquelles les conditions objectives de détention justifieraient soit un aménagement de peine, soit une libération.

Pour ces raisons, le Gouvernement, qui n’est pas défavorable à cet amendement au sens où celui-ci n’aurait pas lieu d’être, émettra un avis de sagesse, …

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

… en soulignant très clairement ses réserves : je le répète, inscrire une telle disposition dans une circulaire d’orientation générale n’a pas la même portée que de l’inscrire dans la loi, c’est-à-dire d’en faire une norme.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Madame la garde des sceaux, je comprends vos propos et, sur la forme, vous avez raison. Cependant, la prise en compte des conditions matérielles de détention et du taux de densité carcérale dans l’aménagement d’une peine devrait être inscrite dans la loi, précisément pour donner moins de marge de manœuvre au juge.

Il faut bien tirer les conséquences des nombreux rapports qui insistent sur les conditions de détention indignes en France ; inscrire cette prise en compte dans la loi participerait à améliorer la situation.

C’est pourquoi je soutiens fortement cet amendement. §

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Madame la ministre, je comprends la position qui est la vôtre mais je voudrais insister sur un point. Je pense que cet amendement vous donnera une arme supplémentaire, si je peux m’exprimer ainsi, en matière budgétaire. Il va de soi que le texte que nous votons aujourd’hui, on l’a dit et répété hier, ne prendra réellement toute sa signification que si vous parvenez à obtenir le recrutement d’un nombre important de personnels d’insertion et de probation et, éventuellement, des crédits supplémentaires pour les associations qui seront chargées de veiller à la réussite des aménagements de peine et de la contrainte pénale.

Je crains donc, compte tenu de la situation financière actuelle, que nous n’ayons quelques difficultés en matière de constructions de places nouvelles, d’une part, et de travaux, d’autre part. Or certains travaux seront à mon sens indispensables ; peut-être Mme la ministre trouvera-t-elle alors plus utile de réaliser ces travaux afin d’éviter l’application de cet article plutôt que de payer les sommes de plus en plus importantes qui nous sont parfois infligées par les juridictions au vu de l’état du patrimoine pénitentiaire.

L'amendement est adopté.

L'article 11 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La conférence des présidents s’est réunie cet après-midi, en application de l’article 39, quatrième alinéa, de la Constitution et de l’article 29, cinquième alinéa, du règlement du Sénat.

Elle a constaté la méconnaissance des règles fixées par la loi organique n° 2009–403 du 15 avril 2009 pour la présentation du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

En conséquence, ce projet de loi est retiré de l’ordre du jour des 1er, 2, 3 et 4 juillet prochains.

Je vous rappelle les termes de la seconde phrase du quatrième alinéa de l’article 39 de la Constitution : « En cas de désaccord entre la Conférence des présidents et le Gouvernement, le président de l’assemblée intéressée ou le Premier ministre peut saisir le Conseil constitutionnel qui statue dans un délai de huit jours. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

M. le président du Conseil constitutionnel a communiqué au Sénat, par courrier en date du 26 juin 2014, une décision du Conseil sur une question prioritaire de constitutionnalité relative à l’article 12 de la loi organique n° 2004–192 du 27 février 2004 portant statut d’autonomie de la Polynésie française, les dispositions du I de l’article L. 5843–2, du III de l’article L. 5843–2 et de l’article L. 5843–3 du code général des collectivités territoriales (n° 2014–2 LOM).

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Nous reprenons la discussion du projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales.

Dans la discussion des articles, nous en sommes parvenus à l’article 11 bis AA.

I. – Après l’article 708 du code de procédure pénale, il est inséré un article 708–1 ainsi rédigé :

« Art. 708–1. – Lorsque doit être mise à exécution une condamnation à une peine d’emprisonnement concernant une femme enceinte de plus de trois mois, le procureur de la République ou le juge de l’application des peines doivent rechercher s’il est possible soit de différer cette mise à exécution, soit faire en sorte que la peine s’exerce en milieu ouvert. »

II. – L’article 720–1 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le seuil de deux ans prévu au premier alinéa est porté à quatre ans lorsque la suspension pour raison familiale s’applique à une personne condamnée exerçant l’autorité parentale sur un enfant de moins de dix ans ayant chez ce parent sa résidence habituelle, ou à une femme enceinte de plus de trois mois. »

III. – Le deuxième alinéa de l’article 723–1 et le deuxième alinéa de l’article 723–7 du code de procédure pénale sont complétés par les mots : « ou de la date à laquelle est possible la libération conditionnelle prévue par l’article 729–3 ».

IV. – Le premier alinéa de l’article 729–3 du code de procédure pénale est complété par les mots : « ou lorsqu’il s’agit d’une femme enceinte de plus de trois mois ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 109, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Remplacer les mots :

doivent rechercher

par le mot :

recherchent

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux, ministre de la justice

Avis favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 11 bis AA est adopté.

(Non modifié)

Après le titre XIV bis du livre IV du code de procédure pénale, il est inséré un titre XIV quater ainsi rédigé :

« TITRE XIV QUATER

« DU BUREAU D’AIDE AUX VICTIMES

« Art. 706 -15 -4. – Dans chaque tribunal de grande instance, il est institué un bureau d’aide aux victimes, dont la composition, les missions et les modalités de fonctionnement sont précisées par décret. » –

Adopté.

(Non modifié)

Après le titre XIV bis du livre IV du code de procédure pénale, il est inséré un titre XIV ter ainsi rédigé :

« Titre XIV ter

« DU VERSEMENT VOLONTAIRE DE FONDS EN RÉPARATION DU PRÉJUDICE CAUSÉ PAR L’INFRACTION ET DE L’AFFECTATION DES SOMMES NON RÉCLAMÉES DESTINÉES À L’INDEMNISATION DES PARTIES CIVILES

« Art. 706 -15 -3. – I. – Lorsque la victime d’une infraction ne s’est pas constituée partie civile, l’auteur de l’infraction ou la personne civilement responsable peut verser volontairement une somme d’argent, en réparation du préjudice causé par l’infraction, auprès du fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions. Celui-ci s’efforce de trouver la victime de l’infraction et lui propose d’être indemnisée du préjudice qu’elle a subi. En cas d’impossibilité pour le fonds de garantie de trouver la victime ou si celle-ci ne souhaite pas être indemnisée, la destination de la somme d’argent versée est fixée par un décret.

« Le premier alinéa est également applicable dans le cas où l’auteur de l’infraction ou la personne civilement responsable a été condamné au paiement de dommages et intérêts mais se trouve dans l’impossibilité de connaître l’adresse de la victime.

« II. – Lorsque, à la libération d’une personne détenue, la part de ses valeurs pécuniaires affectée à l’indemnisation des parties civiles en application du premier alinéa de l’article 728-1 n’a pas été réclamée, ces valeurs sont, sous réserve des droits des créanciers d’aliments, versées au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions. Les deux dernières phrases du premier alinéa du I du présent article sont applicables. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 17, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Colette Mélot.

Debut de section - PermalienPhoto de Colette Mélot

Les auteurs de cet amendement considèrent que le dispositif prévu à l’article 11 bis n’est ni cohérent ni adapté aux situations visées.

Ils proposent donc la suppression de cet article.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

L’article 11 bis comporte plusieurs mesures destinées à améliorer l’indemnisation des victimes d’infractions pénales. Sa rédaction n’est pas parfaite, mais l’amendement n° 100 du Gouvernement, sur lequel, je le précise par avance, la commission a émis un avis favorable, vise à l’améliorer.

La commission est donc défavorable à l’amendement n° 17.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Pour les mêmes raisons, puisque je vais dans un instant présenter un amendement visant à améliorer le dispositif prévu à l’article 11 bis, je suis défavorable à l'amendement n° 17.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 17 est retiré.

L'amendement n° 100, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Alinéas 4 à 6

Remplacer ces alinéas par cinq alinéas ainsi rédigés :

« Art. 706–15–3 . – I. – L’auteur de l’infraction et la personne civilement responsable qui ont été condamnés au paiement de dommages-intérêts à la partie civile peuvent, lorsque celle-ci ne demande pas le paiement des sommes qui lui sont dus, verser volontairement ces sommes au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions prévu par l’article L. 422–1 du code des assurances.

« II. – Lorsque l’auteur de l’infraction qui a été condamnée au paiement de dommages-intérêts à la partie civile est détenu et que la part des valeurs pécuniaires affectée à l’indemnisation des parties civiles en application du premier alinéa de l’article 728–1 n’a pas été réclamée, ces valeurs sont, sous réserve des droits des créanciers d’aliments, versées au fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions à la libération du condamné.

« Un décret détermine les modalités d’application du présent article et fixe le montant minimal des sommes versées au fonds de garantie. »

... - L’article L. 422–1 du code des assurances est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Le fonds est également alimenté par des versements prévus aux I et II de l’article 706–15–3 du code de procédure pénale. Lorsque ces versements sont effectués, la victime est alors directement indemnisée par le fonds, à hauteur le cas échéant des versements effectués, et, à hauteur de ces versements, les dispositions de l’alinéa précédent ne sont pas applicables. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Madame Mélot, je vous remercie du retrait de l’amendement n° 17.

Je rappelle que nous avons introduit en première lecture à l’Assemblée nationale un dispositif de contribution en faveur des victimes.

Ce travail, que nous avons engagé très en amont, depuis la fin de 2012, s’est concrétisé par une mission confiée, sur ma demande, par le Premier ministre à la députée Nathalie Nieson. Nous cherchons à diversifier les sources de financement de l’aide aux victimes dans la mesure où les besoins sont importants. Compte tenu de l’état des finances publiques, il m’a paru important de trouver d’autres ressources mais il importe que ces ressources soient solides de manière à pérenniser le financement de l’aide aux victimes.

J’ai soumis à l’expertise du ministère des finances les pistes qui m’ont été présentées dans le cadre de ce rapport. Cela nous a pris beaucoup de temps car je voulais absolument que soit mis au point un dispositif à la fois crédible, solide et durable. Les discussions avec le ministère des finances sont toujours longues et compliquées, et elles le demeureront même si M. Lecerf se propose de venir à la rescousse !

Sourires . – M. Jean-René Lecerf s’exclame.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cette expertise porte sur la vraisemblance et le potentiel financier des pistes ainsi que sur les conditions de recouvrement, lesquelles, sauf à assécher tout l’intérêt de la source, ne doivent pas être rédhibitoires.

J’ajoute que nous avons évidemment travaillé avec le fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions, le FGTI, qui gère les sommes destinées à l’indemnisation des victimes civiles.

Nous avons introduit ces deux dispositions à l’Assemblée nationale. Il était nécessaire de les améliorer.

Comme vous le savez, il existe déjà un dispositif prévoyant que la personne condamnée verse chaque mois une part de son « pécule » aux victimes. Cette part est versée même en l’absence de victime, et si la victime ne s’est pas manifestée ou si elle a décidé qu’elle ne voulait pas de la somme versée par l’auteur de l’infraction, celui-ci se voyait restituer ces fonds à sa sortie de prison.

Nous considérons que, sur le plan moral, cette situation pose problème.

D’abord, on demande à l’auteur de l’infraction de faire un effort financier et, à sa sortie de prison, lorsqu’on lui restitue la somme versée, on lui signifie que cet effort n’était pas réellement justifié. Par ailleurs, il peut lui-même être « amendé » – j’ajoute des guillemets sous le contrôle de M. le rapporteur – par le fait d’avoir contribué à réparer le préjudice qu’il a causé à la victime. Enfin, s’il n’y a pas de victime, il est absurde de l’obliger à cotiser puisqu’on lui restituera finalement l’argent qu’il aura versé.

Nous ouvrons donc, par cet amendement, la possibilité pour l’auteur de l’infraction de verser cette somme au FGTI, qui gère l’indemnisation des victimes. La somme pourra ainsi être récupérée par la victime.

Tel est l’objet de cet amendement qui, je le répète, améliore la rédaction de l’article 11 bis qui avait été introduit à l'Assemblée nationale.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La commission s’est déjà prononcée favorablement.

L'amendement est adopté.

L'article 11 bis est adopté.

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article 710 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Pour l’examen de ces demandes, elle tient compte du comportement de la personne condamnée depuis la condamnation, de sa personnalité ainsi que de sa situation. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 52 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Compléter cet alinéa par les mots :

matérielle, familiale et sociale

Cet amendement n'est pas soutenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

J’en reprends le texte, au nom de la commission, madame la présidente !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis donc saisie d’un amendement n° 123, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, et dont le libellé est strictement identique à celui de l'amendement n° 52 rectifié.

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

J’ai repris cet amendement de coordination, car la commission y avait donné un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Heureusement, M. le rapporteur était réactif. Cet amendement améliorant en effet la rédaction du texte, le Gouvernement y est favorable.

L'amendement est adopté.

L'article 11 ter est adopté.

Après l’article 733–1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 733–1–1 ainsi rédigé :

« Art. 733–1–1. – Le juge de l’application des peines peut, d’office, à la demande de l’intéressé ou sur réquisitions du procureur de la République, ordonner, par décision motivée, de substituer à une peine de jours-amende un travail d’intérêt général. Cette décision est prise à l’issue d’un débat contradictoire, conformément aux dispositions de l’article 712–6. La substitution n’est pas possible si le détenu la refuse ou n’est pas présent à l’audience.

« Cette décision peut également intervenir à la suite de l’exécution partielle de la peine de jours-amende. » –

Adopté.

Chapitre II

Dispositions relatives à la prise en charge des personnes condamnées

(Non modifié)

La loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifiée :

1° Après l’article 2, il est inséré un article 2-1 ainsi rédigé :

« Art. 2 -1. – Le service public pénitentiaire est assuré par l’administration pénitentiaire sous l’autorité du garde des sceaux, ministre de la justice, avec le concours des autres services de l’État, des collectivités territoriales, des associations et d’autres personnes publiques ou privées.

« Chacune de ces autorités et de ces personnes veille, en ce qui la concerne, à ce que les personnes condamnées accèdent aux droits et dispositifs de droit commun de nature à faciliter leur insertion ou leur réinsertion.

« Des conventions entre l’administration pénitentiaire et les autres services de l’État, les collectivités territoriales, les associations et d’autres personnes publiques ou privées définissent les conditions et modalités d’accès des personnes condamnées aux droits et dispositifs mentionnés au deuxième alinéa en détention.

« Sont associés à ces conventions des objectifs précis, définis en fonction de la finalité d’intérêt général mentionnée au même deuxième alinéa, ainsi que des résultats attendus, et faisant l’objet d’une évaluation régulière. » ;

2° Le premier alinéa de l’article 3 est supprimé ;

3° Au deuxième alinéa de l’article 11, la référence : « du second alinéa » est supprimée ;

4° Au II de l’article 99, la référence : « 3 » est remplacée par la référence : « 2-1 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 67, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Après les mots :

condamnées

insérer les mots :

ou prévenues

II. – Alinéa 5

1° Supprimer les mots :

conditions et

2° Remplacer les mots :

d'accès

par les mots :

d’intervention de ces derniers pour favoriser l’accès

3° Après le mot :

condamnées

insérer les mots :

ou prévenues

La parole est à M. Joël Labbé.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

L’article 12 prévoit l’articulation entre l’administration pénitentiaire et les partenaires, tels que les collectivités territoriales et les associations, afin de favoriser l’accès aux droits et aux dispositifs d’insertion de droit commun des personnes condamnées.

Or l’accès aux droits doit être assuré à toutes les personnes placées sous main de justice, qu’elles soient condamnées ou prévenues.

Par ailleurs, dans le cadre des conventions de partenariat, la rédaction actuelle permet à l’administration pénitentiaire de prévoir des « conditions » à cet accès. Ces conventions doivent, au contraire, avoir pour objectif de définir les modalités d’intervention des partenaires de l’administration pénitentiaire afin d’assurer un accès effectif des personnes condamnées ou prévenues aux droits et dispositifs de droit commun.

Tel est le double objet de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a émis, par deux fois d’ailleurs, un avis défavorable. En effet, cet amendement prévoit la prise en charge des prévenus par l’administration pénitentiaire. Or celle-ci s’occupe des condamnés, et non des prévenus.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

L’avis est également défavorable.

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 53 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 5

Compléter cet alinéa par une phrase ainsi rédigée :

Elles coordonnent et déterminent les modalités de l’action de ces différents acteurs.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Je mets aux voix l'article 12.

L'article 12 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 40, présenté par Mme Klès et M. Mohamed Soilihi, est ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le deuxième alinéa de l’article 35 de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 précitée, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« À partir de l’âge de seize ans révolus, un enfant d’une personne détenue peut demander à exercer son droit de visite sans l’accord du titulaire de l’autorité parentale. L’autorité administrative ne peut refuser ce permis de visite à un enfant que pour des motifs graves relatifs à l’intérêt supérieur de l’enfant ou pouvant faire obstacle à la réinsertion du condamné. »

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Si vous me le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps les amendements n° 40 et 41.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

J’appelle donc en discussion l'amendement n° 41, présenté par Mme Klès et M. Mohamed Soilihi, et ainsi libellé :

Après l’article 12

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Le troisième alinéa de l’article 145–4 du code de procédure pénale est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« À partir de l’âge de seize ans révolus, un enfant d’une personne détenue peut demander à exercer son droit de visite sans l’accord du titulaire de l’autorité parentale. Le juge d’instruction ne peut refuser ce permis de visite à un enfant que pour des motifs graves relatifs à l’intérêt supérieur de l’enfant ou au secret de l’instruction. »

Veuillez poursuivre, mon cher collègue.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Des travaux ont été menés par le Défenseur des droits sur le maintien des liens entre l’enfant et son parent incarcéré, qu’il soit prévenu ou condamné. Selon le rapport établi par le Défenseur des droits, entre 70 000 et 140 000 enfants seraient concernés chaque année par l’incarcération de l’un de leurs parents.

En droit français, peu de dispositions organisent de façon spécifique le maintien des relations d’un enfant avec un parent en détention. Cette problématique est souvent appréhendée sous l’angle du droit des détenus et des bénéfices que cela peut avoir pour lui. Il est en effet communément admis que les contacts réguliers qu’un parent incarcéré pourra avoir avec son enfant auront une influence bénéfique sur sa réinsertion et diminueront les risques de récidive.

Sauf dans le cas du séjour de l’enfant avec sa mère détenue, la détention se traduit immanquablement par une séparation physique du parent et de ses enfants. Cette séparation ne devrait pas pour autant, dans l’intérêt supérieur de l’enfant, porter atteinte au droit de celui-ci d’entretenir régulièrement des relations personnelles et des contacts directs avec le parent détenu.

La Cour européenne des droits de l’homme a estimé à ce propos que « la détention, au même titre que toute autre mesure privant une personne de ses libertés, impose des limitations inhérentes à sa vie privée. […] Cependant cette partie essentielle du droit au respect de la vie familiale du détenu réside dans le fait que les autorités lui permettent et, si nécessaire, l’assistent dans le maintien du contact avec sa famille proche ».

Comme l’a souligné Martine Herzog-Evans, professeur à l’université de Reims et auteur de plusieurs ouvrages sur le droit pénitentiaire, aucune norme pénitentiaire ne traite spécifiquement des enfants des détenus, ces derniers étant assimilés, sans distinction, à tout autre membre de la famille.

Une des préconisations du Défenseur des droits dans ce domaine est de dispenser les mineurs de seize ans et plus de l’accord du titulaire de l’autorité parentale pour visiter le parent détenu provisoirement ou incarcéré.

Cette dispense sera délivrée par le juge d’instruction lorsque le parent est placé en détention provisoire et par l’autorité administrative, à savoir le directeur de l’établissement pénitentiaire, lorsque le parent est incarcéré.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Quel est l’avis de la commission sur les amendements n° 40 et 41 ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a émis un avis favorable sur ces deux amendements, qui ont été suscités par les services du Défenseur des droits.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement n’est pas favorable à ces amendements.

L’Assemblée nationale débat en ce moment même d’une proposition de loi relative à l’autorité parentale. La question de la visite par les mineurs d’un parent en détention est traitée à l’article 8 ter de ce texte. Il me semble qu’elle y a davantage sa place que dans le présent projet de loi.

L’un des amendements concerne les personnes prévenues et, l’autre, les personnes condamnées. Dans un cas, c’est l’autorité judiciaire qui est saisie ; dans l’autre, l’autorité administrative. C’est la différence entre ces deux amendements.

Je rappelle que sont surtout concernés les mineurs de seize à dix-huit ans. Il peut arriver, dans certaines situations, que le parent extérieur s’oppose à ce que son enfant mineur rende visite au parent détenu. En cas de désaccord, il ne faudrait pas que ce soit à l’administration de trancher entre les deux parents, mais plutôt au juge aux affaires familiales.

Il reste donc quelques difficultés. Surtout, il me semble que le vecteur législatif le plus pertinent est la proposition de loi actuellement en discussion à l’Assemblée nationale.

Voilà la raison pour laquelle je n’émets pas un avis favorable sur ces deux amendements. L’avis n’est pas non plus défavorable, car j’estime qu’il faut effectivement faciliter les visites. À seize ans, un mineur a déjà la maturité suffisante pour vouloir rendre visite à un parent en détention.

Vous l’avez compris, monsieur Mohamed Soilihi, je vous suggère donc de retirer vos amendements.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Catherine Tasca, pour explication de vote sur l’amendement n° 40.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Avant que M. Mohamed Soilihi ne réponde à votre suggestion de retrait, je voudrais simplement, madame la ministre, insister sur la nécessité pour le Gouvernement d’être vigilant à ce que cette question soit bien traitée dans la proposition de loi relative à l’autorité parentale, dont malheureusement nous ne connaissons pas précisément le calendrier d’examen. C’est la raison pour laquelle mes collègues ont souhaité évoquer cette question ici, aujourd’hui.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur Mohamed Soilihi, les amendements n° 40 et 41 sont-ils maintenus ?

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Je ne saurais mieux dire que Mme Tasca. Néanmoins, je prends les propos de Mme la garde des sceaux comme une garantie. Nous serons vigilants à ce que cette proposition de loi vienne en discussion ici au Sénat et que les dispositions que j’évoquais y aient leur place.

Dans ces conditions, je retire ces deux amendements, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Les amendements n° 40 et 41 sont retirés.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Vous savez avec quel scrupule je m’adresse à la représentation nationale, qu’il s’agisse des députés ou des sénateurs.

Eu égard au nombre d’articles restant en discussion, l'Assemblée nationale devrait normalement achever demain ses débats sur la proposition de loi relative à l’autorité parentale. S’agissant de l’examen de ce texte par le Sénat, vous savez bien que la décision ne m’appartient pas, car je n’ai pas la main sur la fixation de votre ordre du jour.

Toutefois, je m’engage devant vous à alerter le secrétaire d’État chargé des relations avec le Parlement. Je lui indiquerai qu’il est bien évidemment souhaitable que vous examiniez cette proposition de loi et, incidemment, que M. Mohamed Soilihi a aimablement accepté de retirer ses amendements dans la perspective de les défendre dans le cadre de ce support législatif plutôt que dans celui de la réforme pénale.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Mes chers collègues, M. Mohamed Soilihi a bien fait de retirer ces deux amendements tels qu’ils étaient rédigés.

En effet, il aurait fallu prévoir l’autorisation du juge aux affaires familiales, et non de l’administration pénitentiaire. Car il peut arriver des cas où il y a un désaccord entre les parents, l’un des deux s’opposant à la visite de l’enfant à l’autre parent en prison de façon totalement déraisonnable et contraire aux intérêts et de l’enfant et de la personne incarcérée. Ce n’est peut-être pas à l’administration pénitentiaire de prendre cette responsabilité.

Ce point nous avait échappé en commission, mais je reconnais qu’il s’agit d’un bon argument. Nous verrons ce qui figurera sur cette question dans la proposition de loi relative à l’autorité parentale quand elle arrivera en discussion au Sénat.

(Non modifié)

L’article 30 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Pour faciliter leurs démarches de préparation à la sortie, les personnes détenues peuvent également élire leur domicile auprès du centre communal ou intercommunal d’action sociale le plus proche du lieu où elles recherchent une activité professionnelle. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 101, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

L’article 30 de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Le 2° est ainsi rédigé :

« 2° Pour prétendre au bénéfice des droits mentionnés aux articles L. 121–1 et L. 264–1 du code de l’action sociale et des familles, lorsqu’elles ne disposent pas d’un domicile de secours ou d’un domicile personnel au moment de leur incarcération ou ne peuvent en justifier ; »

2° Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Pour faciliter leurs démarches de préparation à la sortie, les personnes détenues peuvent également procéder à l’élection de domicile mentionnée à l’article L. 264–1 du code de l’action sociale et des familles soit auprès d’un centre communal ou intercommunal d’action sociale, soit auprès d’un organisme agréé à cet effet, le plus proche du lieu où elles recherchent une activité en vue de leur insertion ou réinsertion ou le plus proche du lieu d’implantation d’un établissement de santé ou médico-social susceptible de les accueillir. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement vise à modifier l’article 30 de la loi pénitentiaire en élargissant les prestations auxquelles les personnes détenues peuvent prétendre et en ajoutant la possibilité d’élire domicile dans des organismes agréés à cet effet pour faciliter les démarches de préparation à la sortie.

Le texte résultant des travaux de l’Assemblée nationale prévoyait qu’il soit possible d’élire domicile dans un CCAS, un centre communal d’action sociale. Nous savons que, à leur sortie de prison, une fois leur peine exécutée, les détenus peuvent être sans hébergement et ne pas disposer des conditions matérielles pour se réinsérer, même si nous cherchons à améliorer les choses.

Avec cet amendement, nous élargissons la mesure aux CIAS – les centres intercommunaux d’action sociale –, aux associations et aux CHRS – les centres d’hébergement et de réinsertion sociale. Mesdames, messieurs les sénateurs, que de sigles ! C’est infâme de parler ainsi : c’est pire qu’un jargon. Pourtant, je fais la guerre tous les jours aux membres de mon cabinet pour qu’ils parlent français ! §

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, l'article 12 bis est ainsi rédigé.

Chapitre III

Dispositions relatives aux missions du service public pénitentiaire dans le suivi et le contrôle des personnes condamnées

(Non modifié)

Le premier alinéa de l’article 712-1 du code de procédure pénale est complété par deux phrases ainsi rédigées :

« Ces juridictions sont avisées, par les services d’insertion et de probation, des modalités de prise en charge des personnes condamnées, définies et mises en œuvre par ces services. Elles peuvent faire procéder aux modifications qu’elles jugent nécessaires au renforcement du contrôle de l’exécution de la peine. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 39, présenté par Mme D. Gillot et M. Mohamed Soilihi, est ainsi libellé :

Alinéa 2, première phrase

Après le mot :

probation

insérer les mots :

ou les personnes morales habilitées auxquelles les mesures sont confiées

La parole est à Mme Dominique Gillot.

Debut de section - PermalienPhoto de Dominique Gillot

Le présent amendement vise à mettre en cohérence cet article avec les précédents. J’ai bien entendu les remarques de Mme la garde des sceaux sur la qualité reconnue des associations socio-judiciaires, qui sont des partenaires de la justice dans l’accompagnement et la réinsertion des détenus en probation ou en contrôle judiciaire.

En l’occurrence, il s’agit de leur faire confiance pour leur conférer une autre responsabilité dans le cadre de cette loi, qui est effectivement très innovante et dont les moyens doivent être à la hauteur de ses ambitions.

Je voudrais rappeler que les associations socio-judiciaires ont acquis, depuis quarante ans, des compétences importantes pour l’accompagnement des personnes sous main de justice. Elles ont montré leurs capacités, leur créativité et leur fiabilité, ainsi que leur réactivité face aux différentes situations et aux demandes qui leur étaient adressées. Elles sont une force d’initiative ; elles sont capables de souplesse d’action et peuvent élaborer des référentiels en partenariat. Elles ont également su se former et s’inscrire dans une démarche d’évaluation.

Toutes ces qualités sont celles que vous estimez nécessaires, madame la garde des sceaux, pour les agents de l’État qui devront mettre en œuvre la réforme pénale.

J’aimerais insister sur ce point : il ne s’agit pas d’un acte irresponsable de la part de ceux qui préconisent la reconnaissance des associations socio-judiciaires dans la mise en œuvre de votre réforme et de votre loi ambitieuse ; il s’agit d’élargir le partenariat au bénéfice des justiciables et d’une société qui reconnaît les droits de tous les citoyens, fussent-ils des coupables, contraints à des peines dont l’accompagnement doit être le plus efficace et le mieux évalué possible.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

C’est un amendement de coordination : la commission émet un avis favorable. Toutefois, elle ne s’attendait à ce qu’un tel sujet suscite autant d’explications contradictoires, que ce soit de la part des auteurs, du Gouvernement ou de la commission elle-même.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

En quoi les explications sont-elles contradictoires ? Nous sommes tous sur la même ligne depuis hier : vous, la vôtre, moi la mienne. Chacun d’entre nous est cohérent.

Vous choisissez d’intégrer les personnes morales systématiquement dans le post-sentenciel. Pour ma part, depuis hier, je soutiens qu’il s’agit d’une mission régalienne, c’est-à-dire que ce sont les services pénitentiaires d’insertion et de probation qui l’assument et qui travaillent en partenariat intelligent, et, d’ailleurs, très souvent cordial, avec les associations.

Vous avez raison, madame Gillot, de dire qu’il s’agit d’un amendement de coordination. Cependant, il me semble que vous poussez loin la coordination. En effet, cet article concerne uniquement les services pénitentiaires d’insertion et de probation. On ne se situe plus dans le domaine de la décision de choix soit d’une personne morale, soit du service d’insertion ou de probation, comme c’était le cas pour les articles précédents.

Je travaille avec les associations et les réseaux d’associations. Ainsi, notamment pour le présentenciel, le principal réseau d’associations qui intervient c’est Citoyens et justice. Il s’agit d’un réseau d’associations sérieuses. Les personnes qui le composent, aussi bien les professionnels que les bénévoles, accomplissent un travail de qualité et sont tout à fait dévouées. Elles ont acquis de réelles compétences dans le présentenciel. Je sais qu’elles sont effectivement demandeur d’interventions dans le post-sentenciel.

Je rappelle la loi du 27 mars 2012, qui partage les interventions des associations et des conseillers d’insertion et de probation. Mais il y a aussi cette réalité, avec les nouvelles dispositions introduites par le présent projet de loi. Vous devez y être sensibles, puisque même ceux qui manifestent des réticences à l’égard de l’adoption du texte – peut-être au fil du temps et de nos débats se laisseront-ils convaincre ? §En tout cas, certains sont réceptifs et écoutent attentivement – disent qu’il faudra des moyens si l’on veut que les nouvelles dispositions soient efficaces.

Nous mettons les moyens sur la table, en termes d’effectifs de conseillers d’insertion et de probation, et de ce que cela implique. De même que nous ne nous contentons pas de créer des postes de magistrat sans créer des postes de greffier, et j’y veille particulièrement, nous ne créons pas des postes de conseiller d’insertion et de probation sans créer aussi les postes qui les accompagnent nécessairement, c’est-à-dire notamment des postes de psychologue et des postes administratifs et techniques.

Au-delà de l’amélioration des effectifs, nous travaillons aussi qualitativement, en améliorant par exemple la formation initiale et continue des conseillers d’insertion et de probation. Nous sommes en train de spécialiser davantage ce corps, et d’en améliorer les compétences et donc les performances.

Je me permets d’insister particulièrement sur ce point. En effet, il ne s’agit pas simplement d’une coordination technique, il s’agit aussi de l’introduction des personnes morales au sein d’un article qui concerne les services pénitentiaires d’insertion et de probation.

L'amendement est adopté.

L'article 13 est adopté.

(Non modifié)

Le second alinéa de l’article 13 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 précitée est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Ils procèdent à l’évaluation régulière de la situation des personnes condamnées et définissent, au vu de ces évaluations, le contenu et les modalités de leur prise en charge. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 68, présenté par M. Labbé et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer cet alinéa par quatre alinéas ainsi rédigés :

L'article 13 de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 précitée est ainsi modifié :

1° Avant le premier alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Le service pénitentiaire d’insertion et de probation, avec la participation, le cas échéant, des autres services de l’État, des collectivités territoriales, des associations et de tous organismes publics ou privés, favorise l’accès aux droits et aux dispositifs d’insertion de droit commun des détenus et personnes qui lui sont confiées par les autorités judiciaires. Il s’assure, en particulier pour les personnes libérées, de la continuité des actions d’insertion engagées et définies par décret. Il peut également apporter aux personnes qui leur sont confiées par les autorités judiciaires une aide au sens de l’article 132–46 du code pénal. » ;

2° Le second alinéa est complété par une phrase ainsi rédigée :

La parole est à M. Joël Labbé.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Actuellement, le service pénitentiaire d’insertion et de probation n’est pas défini dans la loi, alors qu’un article est consacré à son personnel dans la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.

Son rôle de coordination et sa mission d’insertion des personnes placées sous main de justice sont pourtant essentiels. S’ils sont aujourd’hui prévus à l’article D. 573 du code de procédure pénale, il convient de les élever au niveau législatif.

L’articulation avec les partenaires, afin de favoriser l’accès des personnes détenues aux droits et aux dispositifs d’insertion de droit commun, doit être également affirmée. L’administration pénitentiaire pilote n’est pas le seul intervenant dans le champ de l’insertion sociale et professionnelle – des PPSMJ, allais-je dire, mais je préfère moi aussi ne pas employer de sigles – des personnes placées sous main de justice en milieu ouvert ; il faut d’autres acteurs à ses côtés. Le service pénitentiaire d’insertion et de probation est en charge du suivi de l’exécution de la mesure, et les associations, quant à elles, sont chargées de l’accompagnement social des personnes.

Les associations de luttes contre les exclusions constituent les interlocuteurs de droit commun compétents pour faire évoluer la personne dans son environnement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission émet un avis défavorable. Il nous a semblé que, s’agissant des modalités d’intervention précises des SPIP, il était plus utile de les maintenir au niveau réglementaire, car celui-ci s’adapte et se modifie plus facilement, plutôt que de les monter au niveau de la loi.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement émet également un avis défavorable, pour deux raisons.

Première raison : ces missions des services pénitentiaires d’insertion et de probation – vous avez raison, monsieur Joël Labbé, de ne pas parler en sigles et de dérouler les titres – relèvent d’un cadre réglementaire, puisqu’elles sont définies par décret. Je vous rappelle cependant que le décret est codifié, puisqu’il est introduit dans le code de procédure pénale. Je ne vois donc pas la nécessité de monter ces missions au niveau législatif.

Seconde raison : votre proposition ne retient qu’une partie de ces missions, puisque nos services pénitentiaires d’insertion et de probation participent également à la décision judiciaire. Avec ce projet de loi, ils y participeront même encore davantage, puisque leur rôle sera d’éclairer le juge de l’application des peines.

Ces conseillers d’insertion et de probation constituent un personnel de grande qualité. En effet, il s’agit d’un personnel formé et qualifié puisqu’il faut un niveau bac+3 pour entrer à l’école pénitentiaire, auquel s’ajoutent les deux années de l’école. Ce personnel qualifié ne peut être limité à de simples actes d’exécution. Au contraire, nous avons besoin de l’impliquer afin que cette intelligence, cette qualification d’abord universitaire puis professionnelle, cette expérience accumulée servent à améliorer le service porté.

Je viens de parler de l’aide à la décision judiciaire, mais il y a aussi la lutte contre la désocialisation des personnes détenues, le contrôle du respect des obligations fixées par les magistrats. Si votre amendement était adopté, on retiendrait uniquement l’accès aux droits et aux dispositifs d’insertion de droit commun, et on supprimerait les autres missions. Pour ces raisons, je vous propose de retirer cet amendement.

Vous savez avec quel respect je m’adresse à chaque sénatrice et à chaque sénateur. Aussi, je me sens tenu de revenir un instant sur l’amendement n° 67, même s’il n’a pas été retenu et si l’affaire est donc close, car ma réponse a été trop rapide.

La raison principale de l’avis défavorable alors émis concernait l’extension des dispositifs d’insertion et de réinsertion aux prévenus, dans la mesure où les prévenus sont en attente de jugement. C’est pourquoi le Gouvernement ne souhaitait pas une telle extension.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur Labbé, l'amendement n° 68 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Madame la ministre, votre ton convaincant m’a convaincu, aussi je vais retirer l’amendement.

En ce qui concerne l’amendement n° 67, je n’ai pas été assez réactif tout à l’heure. En effet, compte tenu de l’argument avancé j’aurais dû le retirer également, mais je ne peux revenir en arrière.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 68 est retiré.

L'amendement n° 54 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après les mots :

la situation

insérer les mots :

matérielle, familiale et sociale,

Cet amendement n'est pas soutenu.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis donc saisie d’un amendement n° 124, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, et dont le libellé est strictement identique à celui de l’amendement n° 54 rectifié.

Vous avez la parole pour le défendre, monsieur le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

J’ai repris cet amendement car il précise utilement les modalités d’intervention des personnels pénitentiaires en milieu ouvert. La commission avait émis un avis favorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement émet un avis favorable, parce qu’il reconnaît l’avantage de cet amendement.

L'amendement est adopté.

L'article 14 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Chapitre III bis

Dispositions relatives au travail en détention

(Division et intitulé nouveaux)

Au premier alinéa de l’article 33 de la loi n° 2009–1436 du 24 novembre 2009 précitée, la deuxième phrase est ainsi rédigée :

« Cet acte, signé par le chef d’établissement et la personne détenue, énonce les droits et obligations professionnels de celle-ci ainsi que la désignation du poste de travail, la durée du travail et les horaires applicables, ses conditions particulières de travail justifiées par la détention, le montant de sa rémunération et de ses différentes composantes. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 87, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement n° 87 vise à supprimer un article qui a été introduit par la commission des lois.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Donc, sur l’initiative de Mme Benbassa. On ne devrait que s’en réjouir ! Vous lui transmettrez.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Merci, monsieur le sénateur !

Je présume l’état d’esprit de la commission sur cette disposition nouvelle.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Je présumais.

Mon devoir est tout de même d’attirer votre attention sur les rigidités et les difficultés qu’introduirait un tel article et sur ses effets pervers. Les personnes pénalisées seraient les détenus eux-mêmes, alors que nous cherchons justement à développer les activités en détention.

Le Gouvernement est donc défavorable à cette disposition, parce qu’il en résulterait plus d’inconvénients que d’avantages, même si j’en comprends l’intention et l’esprit, et même si, pour le dire très clairement, j’en partage même la philosophie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission ayant adopté cette disposition nouvelle faisant l’objet de l’article 14 bis, je ne peux être favorable à l’amendement du Gouvernement visant à sa suppression. Je précise cependant à Mme la ministre que nous tiendrons compte de ses observations vraisemblablement en commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je souhaiterais exprimer mon soutien à l’amendement du Gouvernement.

Pour visiter souvent les prisons, je sais le problème posé par le travail carcéral. Nous avions créé l’obligation d’activité avec la loi pénitentiaire, ce qui est une bonne chose, mais ce n’est pas cela qui a permis de faire travailler dans les faits 100 %, ni même 60 %, ni même 40 % des personnes détenues.

En cette matière l’enfer est pavé de bonnes intentions. Ainsi, tous mes collègues qui souhaitaient, par exemple, mettre en place un véritable contrat de travail dans l’univers carcéral ne se rendent pas compte que, si l’on fait cela du jour au lendemain, le travail disparaîtra totalement des prisons. Déjà, la formation professionnelle n’est pas très importante, le travail n’est pas très important. Il est pourtant fondamental de le développer.

Pour développer le travail en milieu carcéral, il faut prendre toute une série d’autres initiatives. Par exemple, la recherche de travail ne doit pas relever de la compétence exclusive du gestionnaire, y compris dans les établissements à gestion privée, et les directeurs d’établissement doivent pouvoir continuer à rencontrer les représentants des chambres de commerce, des chambres de métiers et les entrepreneurs locaux. L’administration pénitentiaire doit également faire preuve de davantage de volonté politique en matière de recherche de travail.

Je sais que des initiatives intéressantes ont été prises dans certaines prisons. Je pense notamment à la mise en place d’une plateforme de formation au tri sélectif de déchets, initiative prise par le centre pénitentiaire de Lille-Loos et reprise par la maison d’arrêt de Douai. Je pense encore aux contrats passés entre la communauté urbaine de Lille et une société d’économie mixte pour permettre aux personnes sortant de prison de trouver un travail pour six mois minimum, faisant bien évidemment baisser le taux de récidive de ces anciens détenus.

Je crains que l’adoption d’amendements comme celui de Mme Benbassa, qui a été repris par la commission des lois, n’ait des conséquences exactement inverses à celles que recherchaient leurs auteurs.

C'est la raison pour laquelle je soutiens totalement l’amendement du Gouvernement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, l'article 14 bis est supprimé.

Chapitre IV

Dispositions visant à renforcer les pouvoirs de la police et de la gendarmerie en cas de violation de ses obligations par une personne sous main de justice

I. – Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° L’article 141-4 est ainsi modifié :

a) À la première phrase du premier alinéa, la référence : « 9° » est remplacée par les références : « 1°, 2°, 3°, 8°, 9°, 14° » ;

a bis) (nouveau) Le troisième alinéa est remplacé par six alinéas ainsi rédigés :

« La personne retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend, de la durée maximale de la mesure, de la nature des obligations qu’elle est soupçonnée avoir violées et du fait qu’elle bénéficie :

« - du droit de faire prévenir un proche et son employeur ainsi que, si elle est de nationalité étrangère, les autorités consulaires de l’État dont elle est ressortissante, conformément à l’article 63–2 ;

« - du droit d’être examinée par un médecin, conformément à l’article 63–3 ;

« - du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux articles 63–3–1 à 63–4–3 ;

« - s’il y a lieu, du droit d’être assistée par un interprète ;

« - du droit, lors des auditions, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire. » ;

b) Il est ajouté un alinéa ainsi rédigé :

« Le présent article est également applicable aux personnes placées sous assignation à résidence avec surveillance électronique. » ;

2° Après le même article 141-4, il est inséré un article 141-5 ainsi rédigé :

« Art. 141 -5. – Les services de police et les unités de gendarmerie peuvent, selon les modalités prévues aux articles 56 à 58 et pendant les heures prévues à l’article 59, et après avoir recueilli l’accord du juge d’instruction ou sur instruction de ce magistrat, procéder à une perquisition chez une personne qui, placée sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique, est soumise à l’interdiction de détenir une arme, lorsqu’il existe des indices graves ou concordants que des armes se trouvent actuellement à son domicile.

« Si des armes sont découvertes, elles sont saisies et placées sous scellés. » ;

3° L’article 230-19 est ainsi modifié :

a) Au 2°, la référence : « et 14° » est remplacée par les références : «, 14° et 17° » ;

b) Au 8°, les mots : « un sursis avec mise à l’épreuve » sont remplacés par les mots : « une contrainte pénale, d’un sursis avec mise à l’épreuve, d’une libération conditionnelle, d’un aménagement de peine, d’une surveillance judiciaire ou d’une surveillance de sûreté » et, après la référence : « 14° », sont insérées les références : «, 19° et 20° » ;

c) Au 9°, la référence : « et 4° » est remplacée par les références : «, 4° et 11° » ;

4° L’article 709–1 du même code est rétabli dans la rédaction suivante :

« Art. 709 -1. – Les services de police et les unités de gendarmerie peuvent, d’office ou sur instruction du procureur de la République ou du juge de l’application des peines, appréhender toute personne condamnée pour laquelle il a été fait application du deuxième alinéa des articles 131-9 ou 131-11 du code pénal ou placée sous le contrôle du juge de l’application des peines et à l’encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’elle n’a pas respecté les obligations qui lui incombent en application de sa condamnation. La personne peut alors, sur décision d’un officier de police judiciaire, être retenue vingt-quatre heures au plus dans un local de police ou de gendarmerie, afin que soit vérifiée sa situation et qu’elle soit entendue sur la violation de ses obligations.

« Dès le début de la mesure de retenue, l’officier de police judiciaire informe le procureur de la République ou le juge de l’application des peines.

« La personne retenue est immédiatement informée par l’officier de police judiciaire ou, sous le contrôle de celui-ci, par un agent de police judiciaire, dans une langue qu’elle comprend, de la durée maximale de la mesure, de la nature des obligations qu’elle est soupçonnée avoir violées et du fait qu’elle bénéficie :

« - du droit de faire prévenir un proche et son employeur ainsi que, si elle est de nationalité étrangère, les autorités consulaires de l’État dont elle est ressortissante, conformément à l’article 63–2 ;

« - du droit d’être examinée par un médecin, conformément à l’article 63-3 ;

« - du droit d’être assistée par un avocat, conformément aux articles 63-3-1 à 63–4–3 ;

« - s’il y a lieu, du droit d’être assistée par un interprète ;

« - du droit, lors des auditions, après avoir décliné son identité, de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire.

« La personne retenue ne peut faire l’objet d’investigations corporelles internes au cours de sa retenue par le service de police ou par l’unité de gendarmerie.

« Si la personne est placée sous le contrôle du juge de l’application des peines, les pouvoirs conférés au procureur de la République par les articles 63-2 et 63-3 sont exercés par ce juge ou, en cas d’empêchement de ce juge, par le procureur de la République.

« L’article 64 est applicable à la présente mesure de retenue.

« À l’issue de la mesure de retenue, le procureur de la République ou le juge de l’application des peines peut ordonner que la personne soit conduite devant le juge de l’application des peines dans les conditions prévues aux articles 803-2 et 803-3, le cas échéant pour ordonner son incarcération provisoire.

« Le procureur de la République ou le juge de l’application des peines peut également demander à un officier ou un agent de police judiciaire d’aviser la personne qu’elle est convoquée devant lui à une date ultérieure, puis de mettre fin à la rétention de la personne.

bis (nouveau) Après l’article 709–1 du même code, il est inséré un article 709–1–1 ainsi rédigé :

« Art. 709 -1–1. – Les services de police et les unités de gendarmerie peuvent, selon les modalités prévues aux articles 56 à 58 et pendant les heures prévues à l’article 59, et après avoir recueilli l’accord du procureur de la République ou du juge de l’application des peines ou sur instruction de l’un de ces magistrats, procéder à une perquisition chez une personne condamnée qui, en raison de sa condamnation, est soumise à l’interdiction de détenir une arme, lorsqu’il existe des indices graves ou concordants que des armes se trouvent actuellement à son domicile.

« Si des armes sont découvertes, elles sont saisies et placées sous scellés. » ;

Suppression maintenue

bis (Supprimé)

ter (Supprimé)

6° L’article 712-16-3 est abrogé ;

7° Au dernier alinéa de l’article 63-6 et à la seconde phrase du dernier alinéa de l’article 706-53-19, la référence : « 712-16-3 » est remplacée par la référence : « 709-1 » ;

8° La première phrase de l’article 803-2 est ainsi modifiée :

a) Après les mots : « garde à vue », sont insérés les mots : « ou de sa retenue » ;

b) Après le mot : « République », sont insérés les mots : « ou du juge de l’application des peines » ;

9° Au premier alinéa de l’article 803-3, après les mots : « garde à vue », sont insérés les mots : « ou la retenue ».

II. –

Non modifié

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 18, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

L’amendement est défendu.

Bien que ma position ne soit pas toujours cohérente avec celle de mon groupe, je soutiens moi-même volontiers cet amendement !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Cet amendement vise à supprimer l’intégralité de l’article 15, mais le commentaire adjoint par ses auteurs n’évoque que la première partie de cet article, qui a déjà été supprimée par la commission des lois.

La commission sollicite donc le retrait de l’amendement ; à défaut, elle émettrait un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Monsieur Lecerf, ce n’est pas votre position qui est incohérente avec celle de votre groupe, c’est vous qui êtes en extraordinaire cohérence avec vous-même ! §(Sourires.)

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Votre trajectoire est incontestable…

Cela dit, j’ai vérifié le texte issu des travaux de la commission, et il me semble que vous commettez une erreur d’appréciation.

L’article 15 vise à améliorer les conditions de contrôle du respect des obligations et des interdictions. Pour ce faire, il augmente les prérogatives reconnues aux forces de sécurité – police et gendarmerie – pour qu’elles participent à ce contrôle.

Les dispositions que votre amendement tend à supprimer ont déjà fait l’objet d’une suppression par la commission des lois du Sénat. Aussi, j’ose proposer le retrait de cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Monsieur Lecerf, l’amendement n° 18 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je le retire, puisque l’objet de cet amendement correspond à des dispositions qui ont déjà été supprimées par la commission.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 18 est retiré.

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 110, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Après l’alinéa 10

Insérer quatre alinéas ainsi rédigés :

a ter) Le cinquième alinéa est remplacé par trois alinéas ainsi rédigés :

« La retenue s’exécute dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne retenue les mesures de sécurité strictement nécessaires.

« La personne retenue ne peut faire l'objet d'investigations corporelles internes au cours de sa rétention par le service de police ou par l'unité de gendarmerie.

« L'article 64 est applicable à la présente mesure de retenue. » ;

II. – Après l’alinéa 17

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

a bis) Le 7° est abrogé ;

III. – Alinéa 18

1° Après le mot :

épreuve,

insérer les mots :

d’un suivi socio judiciaire,

2° Remplacer les mots :

d’un aménagement de peine

par les mots :

d’une semi-liberté, d’un placement à l’extérieur, d’un placement sous surveillance électronique

IV. – Après l’alinéa 19

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

d) Le 11° est abrogé ;

V. – Alinéa 20

Rédiger ainsi cet alinéa :

4° Après l’article 709, sont insérés des articles 709–1–1 et 709–1–2 ainsi rédigés :

VI. – Alinéa 21

Remplacer la référence :

par la référence :

VII. – Après l’alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La retenue s’exécute dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne retenue les mesures de sécurité strictement nécessaires.

VIII. – Alinéa 34

Supprimer cet alinéa.

IX. – Alinéa 35

Remplacer la référence :

par la référence :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Derrière une rédaction très complexe, cet amendement a trois finalités.

Premièrement, il a pour objet d’étendre aux mesures de retenue les principes de l’article 63–5 du code de procédure pénale, applicables à la garde à vue – à savoir l’exécution dans le respect de la dignité de la personne.

Deuxièmement, l’amendement tend à opérer une mise en cohérence des droits et obligations devant être inscrits au fichier des personnes recherchées, en créant un régime commun à l’ensemble des peines et des mesures post-sentencielles.

Troisièmement, il vise à procéder à diverses coordinations de forme.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 58 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Après l’alinéa 28

Insérer un alinéa ainsi rédigé :

« La mesure de retenue doit s’exécuter dans des conditions assurant le respect de la dignité de la personne. Seules peuvent être imposées à la personne retenue les mesures de sécurité strictement nécessaires.

Cet amendement n'est pas soutenu.

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 110 ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Avis favorable.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 32 rectifié, présenté par MM. Capo-Canellas, Détraigne, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto, J. Boyer et Lasserre, est ainsi libellé :

Alinéa 38

Rétablir le 5° bis dans la rédaction suivante :

bis L'article 709–2 est ainsi rédigé :

« Art. 709–2. - Lorsqu'il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'une personne condamnée sortant de détention n'a pas respecté l'interdiction qui lui est faite, en application de sa condamnation, d'entrer en relation avec certaines personnes, dont la victime, ou certaines catégories de personnes, notamment des mineurs, de fréquenter certains condamnés, notamment les auteurs ou complices de l'infraction, ou de paraître en un lieu, une catégorie de lieux ou une zone spécialement désignés, les services de police et les unités de gendarmerie peuvent, sur instruction du juge de l'application des peines ou, s'il a été fait application du deuxième alinéa de l'article 131–9 ou du second alinéa de l'article 131–11 du code pénal, du juge de l'application des peines, saisi à cette fin par le procureur de la République, procéder, sur l'ensemble du territoire national, à :

« 1° L'interception, l'enregistrement et la transcription de correspondances émises par la voie des télécommunications, selon les modalités prévues à la sous-section 2 de la section 3 du chapitre Ier du titre III du livre Ier ;

« 2° La localisation en temps réel d'une personne, à l'insu de celle-ci, d'un véhicule ou de tout autre objet, sans le consentement de son propriétaire ou de son possesseur, selon les modalités prévues au chapitre V du titre IV du livre Ier. » ;

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Je me risque à intervenir sur un domaine que je sais sensible.

Afin de garantir effectivement la tranquillité et la sûreté de la victime, les députés ont voulu renforcer les moyens dont disposent les forces de l’ordre pour s’assurer du respect effectif, par une personne condamnée, à l’issue de sa détention, des obligations ou interdictions auxquelles elle est astreinte en application de sa condamnation.

Ainsi, en cas de raisons plausibles de soupçonner qu’une personne condamnée sortant de détention n’a pas respecté l’interdiction qui lui est faite, en application de sa condamnation, d’entrer en relation avec certaines personnes, de fréquenter certains condamnés ou de paraître en un lieu, le dispositif introduit à l’Assemblée nationale visait à renforcer les pouvoirs de contrôle et de surveillance à la disposition des services de police et des unités de gendarmerie, lesquels auraient pu, sur instruction du juge de l’application des peines, procéder à des écoutes ainsi qu’à la localisation en temps réel d’une personne, d’un véhicule ou de tout autre objet – autrement dit, recourir à la géolocalisation.

Le présent amendement vise à réintroduire ces dispositions – dans les termes votés par l’Assemblée nationale –, supprimées par la commission au prétexte notamment que les mesures qu’elles créent ne seraient pas limitées dans le temps. Or, dans ces dispositions, il est fait renvoi aux dispositions du code de procédure pénale applicables aux mesures d’instruction, qui prévoient précisément des limites temporelles. Pour ne parler que des écoutes, l’article 100–2 du code de procédure pénale dispose, sauf erreur de ma part, que ces écoutes sont autorisées « pour une durée maximum de quatre mois », durée renouvelable avec l’accord du juge.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Monsieur le sénateur, j’avoue que, de la part d’un groupe parlementaire qui fournit le travail législatif que l’on connaît, cet amendement me surprend. Il y a un tel écart entre ce qui est souhaitable, possible et potentiellement efficace et ce que vous demandez !

Si la possibilité de recourir à des techniques spéciales d’enquête, que l’on utilise pour les crimes et pour certains délits, avait été introduite dans le projet de loi, ces dispositions ont été supprimées, au nom d’un certain parallélisme.

En effet, ce texte de loi arme d'ores et déjà les forces de sécurité pour exercer le contrôle de manière efficace. Je vous rappelle tout de même que nous permettons les retenues ainsi que les visites domiciliaires, c'est-à-dire les perquisitions, et que nous introduisons dans le fichier des personnes recherchées les principales obligations et interdictions justifiant le recours à ces procédés.

S’il y avait un malentendu, ces précisions devraient permettre de le lever. Vous comprendrez donc que le Gouvernement soit défavorable à l’amendement.

Pour terminer, je rappelle à votre mémoire le débat que nous avons eu lorsque nous avons créé le cadre juridique de la géolocalisation : nous avions alors débattu du quantum de peines encourues pour y recourir.

Vous vous souvenez sans doute aussi que le Conseil constitutionnel avait censuré une disposition de la loi relative à la lutte contre la fraude fiscale, concernant justement l’usage des techniques spéciales d’enquête, au motif que ces techniques ne pouvaient pas être utilisées lorsqu’il n’y avait pas d’atteinte aux personnes – l’atteinte aux biens ne suffit pas. Le débat est ensuite revenu sur la géolocalisation.

C’est dans le respect de cette logique que nous avons calibré les moyens élargis des forces de sécurité.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Madame la garde des sceaux, je veux d’abord vous remercier des explications que vous avez bien voulu nous apporter et des compléments que vous avez livrés à notre réflexion.

Au nom de l’efficacité, nous sommes toujours tentés de recourir aux techniques les plus modernes, même si je mesure bien les difficultés que pose la géolocalisation – le Sénat s’est déjà largement penché sur cette question.

Si vous n’avez pas forcément convaincu l’Assemblée nationale, je crois que vous saurez convaincre le Sénat ! En tout état de cause, pour ce qui me concerne, je retire cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 32 rectifié est retiré.

Je mets aux voix l'article 15, modifié.

L'article 15 est adopté.

(Supprimé)

(Supprimé)

Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le deuxième alinéa de l’article L. 132–5 est remplacé par deux alinéas ainsi rédigés :

« À la demande de l’autorité judiciaire, ces groupes peuvent traiter des questions relatives à l’exécution des peines et à la prévention de la récidive.

« Des informations confidentielles et le cas échéant nominatives peuvent être échangées dans le cadre de ces groupes. Elles ne peuvent être communiquées à des tiers. » ;

2° Avant la dernière phrase du premier alinéa de l’article L. 132–12–1, il est inséré trois phrases ainsi rédigées :

« À la demande de l’autorité judiciaire, ces groupes peuvent traiter des questions relatives à l’exécution des peines et à la prévention de la récidive. Des informations confidentielles et le cas échéant nominatives peuvent être échangées dans le cadre de ces groupes. Elles ne peuvent être communiquées à des tiers. » ;

3° La dernière phrase de l’article L. 132–13 est remplacée par trois phrases ainsi rédigées :

« À la demande de l’autorité judiciaire, ces groupes peuvent traiter des questions relatives à l’exécution des peines et à la prévention de la récidive. Des informations confidentielles et le cas échéant nominatives peuvent être échangées dans le cadre de ces groupes. Elles ne peuvent être communiquées à des tiers. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 83, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 4

Supprimer cet alinéa.

II. – Alinéa 6, deuxième et dernière phrases

Supprimer ces phrases.

III. – Alinéa 8, deuxième et dernière phrases

Supprimer ces phrases.

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

L’article 15 quater prévoit le renforcement du rôle des conseils départementaux de prévention de la délinquance, les CDPD, et des zones de sécurité prioritaires, les ZSP, en matière d’exécution des peines et de prévention de la récidive.

Les membres de ces structures pourront ainsi se faire communiquer le bulletin n° 1 du casier judiciaire ainsi que les rapports d’expertise psychiatrique des personnes condamnées en milieu ouvert. Par ailleurs, les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD, présidés par les maires, pourront constituer en leur sein un groupe de travail sur l’exécution des peines, au sein duquel toute information, y compris individuelle, pourra être échangée en vue de prévenir la récidive.

L’échange d’informations nominatives introduit par cet article est très problématique. À nos yeux, il ne respecte pas la séparation des pouvoirs et pose a priori des problèmes de constitutionnalité. Les membres des conseils départementaux de prévention de la délinquance, des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance ainsi que ceux des cellules de coordination opérationnelle du partenariat, les CCOP, dans les zones de sécurité prioritaires, seront désormais inclus dans le secret du suivi de l’exécution des peines, notamment au titre de la prévention de la récidive.

Si les CDPD et les cellules de coordination opérationnelle sont dirigés par le préfet, les états-majors départementaux de sécurité sont « seulement » coprésidés par le procureur de la République. L’animation de ce type d’instances échangeant des informations sur les personnes condamnées devrait pourtant revenir à celui-ci, car il est officiellement en charge de l’exécution des peines.

Gérer les sorties de prison a beau être le cœur de leur métier, le juge de l’application des peines et les services pénitentiaires d’insertion et de probation ne seront qu’informés des décisions prises par ces instances, dans lesquelles peuvent siéger la police nationale, l’éducation nationale, les maires, ou encore les bailleurs sociaux. Demain, tous ces acteurs pourraient potentiellement connaître le nom des sortants de prison bénéficiant d’une peine de probation, ce qui, malgré un cadre juridique interdisant de telles pratiques, pourrait permettre à un maire de développer la surveillance de ces personnes par des polices municipales – aux statuts amenés à évoluer si l’examen des textes en cours aboutit… – ou, pourquoi pas, de les exclure du bénéfice d’un logement social ou d’une formation.

Si le pire n’est jamais certain, le mal pourrait se nicher dans de telles dispositions !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a émis un avis défavorable.

Cependant, à titre personnel, je comprends bien les réticences de Mme Cukierman, et j’attends l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Madame la sénatrice, vous savez bien que nous ne prenons pas ce sujet à la légère. Au reste, le Parlement ne l’a jamais fait non plus : en tant qu’ancienne députée, je sais combien cette question, qui ressurgit à l’occasion de textes divers, y fait débat, depuis plusieurs années.

Je me souviens notamment que, au début de l’ancien quinquennat, le gouvernement d’alors avait eu l’intention d’inscrire dans la loi l’obligation de communiquer aux maires des informations nominatives, sur d’anciens détenus par exemple. À l’époque, même les maires de la majorité UMP s’y étaient opposés, voyant quelles responsabilités on allait leur faire endosser en cas de difficultés ultérieures.

Au demeurant, ce sujet n’est pas simple à traiter.

Mon élan, ma conception philosophique, c’est que les informations nominatives ne doivent pas circuler.

Elles ne doivent pas être partagées inconsidérément, sauf à mettre des personnes en péril. Combien de temps conserve-t-on ces informations ? Qu’en fait-on ? Où vont-elles filtrer ? L’élan du texte, sa philosophie, c’est d’éviter toute dérive.

Dans le même temps, en matière de prévention de la délinquance, il doit exister un espace où des informations puissent être échangées, mais un espace bien encadré.

Aujourd’hui, en vertu du code de la sécurité intérieure, il est déjà possible de partager des informations nominatives au sein des conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance, les CLSPD – que de sigles ! Peut-être, à l’issu de l’examen de ce projet de loi, parlerons-nous une langue intelligible par tous…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Nous avons cependant constaté que les pratiques étaient disparates d’un CLSPD à l’autre. Nous avons donc travaillé au sein du Comité interministériel de prévention de la délinquance, le CIPD, et nous venons d’adopter une charte visant à harmoniser les pratiques, comme me le confirment à l’instant mes conseillers, qui échangeaient, eux, des informations non nominatives

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cette charte permettra un encadrement moral et juridique plus rigoureux.

Je vous rappelle par ailleurs que, au sein des CLSPD, seule l’autorité judiciaire peut autoriser ce partage d’informations nominatives.

Par conséquent, compte tenu de son utilité et de son efficacité en matière de lutte contre la délinquance et de prévention de la délinquance, je pense qu’il ne faut pas exclure totalement ce partage d’informations nominatives. Simplement, il convient de l’encadrer de façon rigoureuse. C’est ce que nous faisons. Dans la circulaire d’application de ce projet de loi, je veillerai à rappeler que ce partage d’informations nominatives doit se faire sous l’autorité du parquet, qui participe au CLSPD, et qu’il est interdit de l’étendre à des tiers.

Pour ces raisons, en vous rappelant que votre commission des lois a amélioré le texte issu des travaux de l’Assemblée nationale, …

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

… puisque cette dernière avait prévu l’accès y compris au bulletin n° 1 du casier judiciaire, je vous invite, madame la sénatrice, à retirer cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame Cukierman, l'amendement n° 83 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

J’entends vos arguments, madame la garde des sceaux. Je vais cependant maintenir cet amendement, et je m’en explique.

Voilà à peu près un an, nous avions eu les mêmes discussions à propos de l’évolution du statut du parquet. Je vous fais confiance pour mettre en œuvre vos recommandations. Cependant, cette possibilité de discuter de cas individuels présente un risque, certes minime mais réel, avec une autre majorité, un autre garde des sceaux et des préconisations qui seraient moins fortes que les vôtres.

C’est la raison pour laquelle nous maintenons notre amendement, madame la présidente.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je ne voterai pas cet amendement. J’ai été rapporteur de la loi relative à la prévention de la délinquance, qui avait effectivement prévu de faire du maire le chef d’orchestre de la prévention de la délinquance dans sa commune. Elle avait également prévu des dispositions en matière de secret partagé, notamment entre les travailleurs sociaux et le maire, mais ce dernier se trouvait totalement lié, de la même manière, par le secret.

De deux choses l’une : soit on veut effectivement avancer dans la prévention de la délinquance, et il faut échanger sur des cas individuels ; soit on se contente de faire figurer des slogans dans la loi sans se donner les moyens de les appliquer.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Pour avoir moi aussi participé à ces instances, madame la ministre, je sais que, lorsque l’on travaille à l’échelle d’une ville ou d’un quartier, il est assez fréquent de devoir évoquer des situations concrètes concernant telle famille ou telle personne.

Je suis également sensible aux arguments de Mme Cukierman.

L’une des manières d’avancer sur ce sujet, madame la ministre, serait de prévoir des conditions particulières dans vos textes d’application. Certains conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance réunissent une trentaine de personnes autour de la table - il faut toujours, dans notre pays, que tout le monde soit sollicité dans ces instances ! Or, c’est une chose de parler de cas particuliers devant un nombre strictement limité de personnalités qui, en raison de leurs responsabilités, doivent en connaître et respecteront profondément la confidentialité, mais évoquer le cas de telle ou telle famille devant trente voire quarante personnes, cela devient attentatoire au respect dû à tout individu, fût-il délinquant.

C’est peut-être une voie à suivre, madame la ministre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, pour conforter les propos de M. Jean-René Lecerf, je voudrais vous livrer un bref témoignage.

Les partages d’informations, au sein des CLSPD, sont très encadrés. En général, le procureur de la République y veille tout particulièrement. Il existe une clause de confidentialité. En outre, ils se font en formation extrêmement restreinte du CLSPD, et non devant trente à quarante personnes.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Les règles que doivent respecter les CLSPD et les communes prévoient déjà, me semble-t-il, un nombre très limité de personnes. Peut-être faut-il la rappeler, mais cette disposition existe déjà.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Je vous prie de m’excuser de prolonger quelque peu les débats, mais le sujet le mérite et nos précisions, inscrites au Journal officiel, éclaireront les magistrats sur la volonté du législateur.

Vos témoignages ont permis de rappeler que c’est dans le cadre de groupes restreints au sein des CLSPD que se font ces échanges d’informations nominatives, et non en formation plénière de ces conseils, parfois composés d’une trentaine de personnes. Au besoin, il sera rappelé dans la circulaire d’application que c’est bien en formation restreinte que ces informations nominatives doivent être partagées, en insistant sur les risques juridiques et judiciaires encourus en cas de non-respect de la nécessaire confidentialité.

Il convient de le rappeler, car le droit à l’oubli est aussi l’une des conditions de la réinsertion. Or, sans même parler de partage d’informations nominatives, notre législation contient des dispositions absolument impitoyables, qui favorisent plutôt le « non-oubli ». Ainsi, de par la loi, une personne condamnée qui a exécuté sa peine ne pourra pas exercer certains métiers, même si elle a suivi une formation qualifiante ou qu’elle est diplômée, et ce du seul fait de sa condamnation. Il faut donc faire preuve de discernement dans la prise en compte d’un passage en détention.

Des personnes qui, au tout début de leur vie d’adulte, ont commis des infractions, ont été sanctionnées et ont exécuté l’intégralité de leur peine se trouvent dans une impasse parce que – c’est une bien mauvaise surprise ! - la loi leur interdit d’exercer le métier auquel elles ont choisi de se former, en faisant parfois beaucoup d’efforts, notamment pour obtenir des diplômes, afin de se réinsérer dans la société.

Il est certainement des cas qui demandent de la prudence, mais nous ne pouvons pas aveuglément empêcher des personnes de construire leur vie. C’est une façon de les bannir à l’intérieur même de la République, ce qui est insupportable. Et je parle de cas précis, pas seulement de principes.

Le sujet est donc profond. En l’espèce, ce débat aura été utile parce qu’il permettra que la circulaire d’application tienne compte des observations que vous avez formulées, mesdames, messieurs les sénateurs.

J’ajoute, pour information, que je pourrai faire parvenir à chacun des groupes parlementaires un exemplaire de la charte qui vient d’être signée.

L'amendement n'est pas adopté.

L'article 15 quater est adopté.

Le chapitre II du titre III du livre Ier du code de la sécurité intérieure est complété par une section 6 ainsi rédigée :

« Section 6

« Du rôle des députés et des sénateurs

« Art. L. 132 -16. – Les députés et les sénateurs peuvent demander à être informés par le président du conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance ou, le cas échéant, du conseil intercommunal ou métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance, constitué dans la circonscription électorale dans laquelle ils ont été élus, de la tenue et de l’objet des réunions de ces instances.

« Ils peuvent assister aux réunions de ces instances et être consultés par elles sur toute question concernant la prévention de la délinquance. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 111, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 3

Remplacer les mots :

Du rôle

par les mots :

De l’information

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Il s’agit d’un amendement rédactionnel, madame la présidente.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Favorable !

L'amendement est adopté.

L'article 15 quinquies est adopté.

(Non modifié)

À la fin du quatrième alinéa de l’article 5 de la loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, les mots : « des travaux d’intérêt général destinés aux personnes condamnées » sont remplacés par les mots : « soit des travaux d’intérêt général destinés aux personnes condamnées, soit des actions d’insertion ou de réinsertion ou des actions de prévention de la récidive destinées aux personnes placées sous main de justice ». –

Adopté.

Chapitre V

Dispositions assurant un retour à la liberté contrôlé, suivi et progressif des personnes condamnées

I. – Après la section 1 du chapitre II du titre II du livre V du code de procédure pénale, est insérée une section 1 bis ainsi rédigée :

« Section 1 bis

« De la libération sous contrainte

« Art. 720. – Lorsque la durée de la peine accomplie est au moins égale au double de la durée de la peine restant à subir, la situation de la personne condamnée exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée totale inférieure ou égale à cinq ans est examinée par le juge de l’application des peines.

« À l’issue de cet examen en commission de l’application des peines, le juge de l’application des peines décide, par ordonnance motivée, soit de prononcer une mesure de libération sous contrainte, dans le respect des exigences prévues à l’article 707, soit, s’il estime qu’une telle mesure n’est pas possible ou si la personne condamnée n’a pas fait préalablement connaître expressément son accord, de ne pas la prononcer. Il peut ordonner la comparution de la personne condamnée devant la commission de l’application des peines afin d’entendre ses observations et, le cas échéant, celles de son avocat. Ce dernier peut également transmettre des observations écrites au juge de l’application des peines.

« La libération sous contrainte entraîne l’exécution du reliquat de peine sous le régime, selon la décision prise par le juge de l’application des peines, de la semi-liberté, du placement à l’extérieur, du placement sous surveillance électronique ou de la libération conditionnelle. Les conséquences de l’inobservation de ces mesures sont celles prévues au présent code.

« S’il n’est pas procédé à l’examen de la situation de la personne condamnée dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, le président de la chambre de l’application des peines de la cour d’appel peut, d’office ou sur saisine de la personne condamnée ou du procureur de la République, prononcer une mesure de libération sous contrainte. »

II. –

Non modifié

1° À la fin du 1°, la référence : « et 712-8 » est remplacée par les références : «, 712-8, 713-43 et 713-44, au premier alinéa de l’article 713-47 et à l’article 720 » ;

2° À la fin du 2°, la référence : « et 712-7 » est remplacée par les références : «, 712-7 et 713-45 et au deuxième alinéa de l’article 713-47 ».

III. – §(Non modifié) À l’article 712-12 du même code, les références : « aux articles 712-5 et 712-8 » sont remplacées par la référence : « au 1° de l’article 712-11 ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 69, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Après le mot :

examinée

insérer les mots :

, après qu'elle eut été auditionnée,

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Cet amendement vise à imposer l’audition de la personne libérable avant le prononcé de la libération sous contrainte. Cette audition est indispensable afin d’adapter les éventuelles mesures prononcées et de permettre la réussite d’une libération sous contrainte.

De surcroît, la présence du détenu au moment de la fixation de l’aménagement est indispensable pour que la personne l’accepte et se conforme aux obligations prononcées. Cette audition est donc un préalable à la réussite de l’encadrement de la sortie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement, qui alourdirait beaucoup la procédure s’il était adopté.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Madame Benbassa, je comprends votre souci d’introduire du contradictoire dans cette décision. Il est non seulement logique, mais également souhaitable, compte tenu de nos principes constitutionnels, de prévoir, dans cette circonstance, une audition contradictoire.

Nous l’avons donc prévue, par un amendement que nous avons présenté à la commission des lois du Sénat, qui l’a adopté, prévoyant que le juge de l’application des peines peut entendre le détenu ou son représentant, lesquels peuvent également, le cas échéant, adresser des observations écrites.

Sachez enfin que nous avons également prévu l’accord express du détenu à cette décision de libération sous contrainte.

Pour ces raisons, j’ai le sentiment que vos préoccupations sont satisfaites et je vous invite à retirer votre amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame Benbassa, l'amendement n° 69 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 69 est retiré.

Je mets aux voix l'article 16.

L'article 16 est adopté.

(Non modifié)

Le dernier alinéa de l’article 712-5 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le service pénitentiaire d’insertion et de probation y est représenté. » –

Adopté.

(Non modifié)

L’article 723-4 du code de procédure pénale est complété par une phrase ainsi rédigée :

« Le condamné peut également bénéficier des mesures d’aide prévues à l’article 132-46 du même code. » –

Adopté.

(Non modifié)

Après l’article 730-2 du code de procédure pénale, il est inséré un article 730-3 ainsi rédigé :

« Art. 730 -3. – Lorsque la durée de la peine accomplie est au moins égale au double de la durée de la peine restant à subir, la situation de la personne condamnée exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté d’une durée totale de plus de cinq ans est examinée par le juge ou le tribunal de l’application des peines à l’occasion d’un débat contradictoire tenu selon les modalités prévues aux articles 712-6 ou 712-7, afin qu’il soit statué sur l’octroi d’une libération conditionnelle. Si la personne a été condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité, ce débat ne peut intervenir avant le terme du temps d’épreuve ni avant celui de la période de sûreté.

« Le juge ou le tribunal de l’application des peines n’est pas tenu d’examiner la situation de la personne qui a fait préalablement savoir qu’elle refusait toute mesure de libération conditionnelle. Un décret fixe les conditions d’application du présent alinéa.

« S’il n’est pas procédé au débat contradictoire dans les conditions prévues au premier alinéa du présent article, la chambre de l’application des peines de la cour d’appel peut, d’office ou sur saisine de la personne condamnée ou du procureur de la République, tenir ce débat. » –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 70, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 17

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

À la première phrase du quatrième alinéa de l’article 730-2 du code de procédure pénale, après les mots : « d’une semi-liberté », sont insérés les mots : «, de placement à l’extérieur ».

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Le placement à l’extérieur ne figurant pas sur la liste des mesures pouvant être probatoires à la libération conditionnelle aux termes de l’article 730-2 du code de procédure pénale, la loi du 10 août 2011 ne donne plus la possibilité d’accéder à un placement à l’extérieur aux personnes condamnées aux peines les plus longues.

Pourtant, le placement à l’extérieur, au regard de l’accompagnement socio-éducatif qui le caractérise, semble l’aménagement de peine le plus à même de s’inscrire dans le parcours évolutif des personnes incarcérées depuis de très nombreuses années.

Le fait de limiter à la semi-liberté et au placement sous surveillance électronique les mesures probatoires à une libération conditionnelle en faveur des personnes condamnées à de longues peines est une aberration.

Dans le cadre de leur libération conditionnelle, les personnes condamnées à une longue peine de détention doivent pouvoir compter sur un encadrement de qualité et sur le soutien des associations conventionnées par l’administration pénitentiaire pour la mise en œuvre du placement à l’extérieur.

Le simple ajout du placement à l’extérieur dans le quatrième paragraphe de l’article 730-2 du code de procédure pénale serait de nature à régler dans l’immédiat la difficulté.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a compris le souhait de Mme Benbassa, mais préfère s’en remettre à l’avis du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Le Gouvernement se réjouit de pouvoir entraîner la commission, guidée par M. le rapporteur.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Madame Benbassa, vous avez parfaitement motivé votre amendement. Il s’agit d’une disposition bienvenue : notre droit positif prévoit déjà que le placement sous surveillance électronique ou la semi-liberté peuvent être prononcés à titre probatoire dans le cadre d’une libération conditionnelle. Dès lors, aucun argument ne s’oppose à ce qu’il en aille de même pour le placement à l’extérieur.

Le Gouvernement émet donc un avis favorable sur cet amendement.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans le projet de loi, après l'article 17.

(Non modifié)

L’article 721-2 du code de procédure pénale est ainsi rédigé :

« Art. 721 -2. – I. – Lorsqu’une personne condamnée exécutant une ou plusieurs peines privatives de liberté n’a pu bénéficier d’une mesure de libération sous contrainte ou d’une libération conditionnelle dans les conditions prévues aux articles 720 et 730-3, le juge de l’application des peines peut, aux seules fins de favoriser l’insertion ou la réinsertion de la personne condamnée et de prévenir la commission de nouvelles infractions, ordonner que le condamné ayant bénéficié d’une ou plusieurs des réductions de peines prévues aux articles 721 et 721-1 soit soumis, après sa libération et pendant une durée qui ne peut excéder le total des réductions de peines dont il a bénéficié, à une ou plusieurs :

« 1° Des mesures de contrôle prévues à l’article 132-44 du code pénal ;

« 2° Des obligations et interdictions prévues à l’article 132-45 du même code.

« La personne condamnée peut également bénéficier, pendant cette durée, des mesures d’aide prévues à l’article 132-46 dudit code.

« Cette décision est prise, selon les modalités prévues à l’article 712-6 du présent code, préalablement à la libération du condamné, le cas échéant en même temps que lui est accordée la dernière réduction de peine.

« En cas d’inobservation par la personne condamnée des mesures de contrôle, obligations et interdictions qui lui ont été imposées, le juge de l’application des peines peut, selon les modalités prévues au même article 712-6, retirer tout ou partie de la durée des réductions de peines dont elle a bénéficié et ordonner sa réincarcération. L’article 712-17 est applicable.

« Le présent I n’est pas applicable aux condamnés mentionnés à l’article 723-29.

« II. – Dans tous les cas, le juge de l’application des peines peut, selon les modalités prévues à l’article 712-6, ordonner que le condamné ayant bénéficié d’une ou plusieurs des réductions de peines prévues aux articles 721 et 721-1 soit soumis après sa libération à l’interdiction de recevoir la partie civile ou la victime, de la rencontrer ou d’entrer en relation avec elle de quelque façon que ce soit, pendant une durée qui ne peut excéder le total des réductions de peines dont il a bénéficié. Cette décision est prise préalablement à la libération du condamné, le cas échéant en même temps que lui est accordée la dernière réduction de peine.

« L’interdiction mentionnée au premier alinéa du présent II peut être accompagnée de l’obligation d’indemniser la partie civile.

« En cas d’inobservation par la personne condamnée des obligations et interdictions qui lui ont été imposées, le juge de l’application des peines peut, selon les modalités prévues à l’article 712-6, retirer tout ou partie de la durée des réductions de peines dont elle a bénéficié et ordonner sa réincarcération. L’article 712-17 est applicable. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de deux amendements identiques.

L'amendement n° 71 est présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste.

L'amendement n° 84 est présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen.

Ces deux amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour présenter l’amendement n° 71.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

L’article 17 bis, adopté par l'Assemblée nationale, étend à presque tous les délits la surveillance judiciaire mise en place par le précédent gouvernement.

Par ailleurs, cette nouvelle surveillance judiciaire entraînerait une extension très large des obligations et interdictions pesant sur le condamné, allant bien au-delà des simples interdictions d'entrer en contact avec la victime et de l’obligation de l'indemniser.

Il y a fort à craindre que cette disposition, adoptée sans étude d'impact, ne crée une charge importante pour les services pénitentiaires d'insertion et de probation et les juges d'application des peines, déjà fortement surchargés.

Enfin, cet article semble contraire à la Constitution. Dans sa décision n° 2005-27 du 8 décembre 2005, au considérant 14, le Conseil constitutionnel note en effet que « la surveillance judiciaire, y compris lorsqu'elle comprend un placement sous surveillance électronique mobile, est ordonnée par la juridiction de l'application des peines ; qu'elle repose non sur la culpabilité du condamné, mais sur sa dangerosité ; qu'elle a pour seul but de prévenir la récidive ; qu'ainsi, la surveillance judiciaire ne constitue ni une peine ni une sanction ».Or les objectifs du dispositif proposé sont aujourd'hui plus étendus, puisqu’ils prennent en compte la réinsertion au-delà de la seule récidive. De plus, au regard des obligations susceptibles d’être prononcées, ce suivi constitue une véritable peine après la peine.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Éliane Assassi, pour présenter l'amendement n° 84.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Cet amendement vise également à supprimer l’article 17 bis, qui instaure une nouvelle forme de «surveillance judiciaire » applicable à tous les condamnés sortant en fin de peine.

Cette disposition entre en totale contradiction avec l’esprit du texte, visant à favoriser une exécution de la peine en partie en détention et en partie en liberté, en engageant les détenus dans un processus dynamique d’aménagement de peine.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission est défavorable à ces deux amendements identiques de suppression.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement, dans un premier temps réservé, est favorable à la suppression d’une telle extension, compte tenu de l’évolution du débat et des votes intervenus sur d’autres dispositions du texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je mets aux voix les amendements identiques n° 71 et 84.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, l'article 17 bis est supprimé et l’amendement n° 72 n’a plus d’objet.

Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.

L'amendement n° 72, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Alinéa 4

Remplacer le mot :

par les mots :

aux 5°, 7° à 14°, 16° et 19° de

(Non modifié)

Au troisième alinéa de l’article 730 du code de procédure pénale, après les mots : « présent article », sont insérés les mots : « et sans préjudice des articles 720 et 730-3 ». –

Adopté.

(Non modifié)

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le second alinéa de l’article 712-4 est supprimé ;

2° Le chapitre II du titre II du livre V est ainsi modifié :

a) L’article 723-14 est abrogé ;

b) Le paragraphe 2 de la section 7 est abrogé ;

c) La section 8 est abrogée ;

3° L’article 934-2 est abrogé ;

4° À l’article 934-1, les références : « des articles 723-15, 723-24 et 723-27 » sont remplacées par la référence : « de l’article 723-15 ». –

Adopté.

(Non modifié)

Après le mot : « comparution », la fin de la seconde phrase de l’avant-dernier alinéa de l’article 712-17 du code de procédure pénale est ainsi rédigée : «, selon les cas, devant le juge de l’application des peines, qui doit intervenir dans un délai maximal de huit jours, ou devant le tribunal de l’application des peines, qui doit intervenir dans un délai maximal d’un mois. » –

Adopté

(Non modifié)

À la fin de la première phrase du premier alinéa de l’article 712-21 du code de procédure pénale, les mots : « condamnée pour une infraction pour laquelle le suivi socio-judiciaire est encouru » sont remplacés par les mots : « qui a été condamnée à un suivi socio-judiciaire ». –

Adopté.

1° À l’intitulé du chapitre II du titre XIX du livre IV du code de procédure pénale, les mots : « de la rétention de sûreté et » sont supprimés ;

2° L’article 706-53-13 du même code est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « d’une rétention de sûreté » sont remplacés par les mots : « d’une surveillance de sûreté » ;

b) Les deux derniers alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« La surveillance de sûreté s’applique à l’issue d’une mesure de suivi socio-judiciaire prononcé en application de l’article 131-36-1 du code pénal ou de surveillance judiciaire ordonnée en application de l’article 723-29 du présent code. » ;

3° L’article 706-53-14 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « au moins un an avant la date prévue pour leur libération » sont remplacés par les mots : « au moins six mois avant la fin de la mesure de suivi socio-judiciaire ou de surveillance judiciaire » ;

b) Le deuxième alinéa est ainsi rédigé :

« À cette fin, la commission fait procéder à une expertise médicale du condamné » ;

c) Au troisième alinéa, les mots : « d’une rétention de sûreté » sont remplacés par les mots : « d’une surveillance de sûreté » ;

d) Au quatrième alinéa, les mots : «, ainsi que les obligations résultant d’une injonction de soins ou d’un placement sous surveillance électronique mobile, susceptibles d’être prononcés dans le cadre d’un suivi socio-judiciaire ou d’une surveillance judiciaire, » sont supprimés ;

e) Au cinquième alinéa, les mots : « cette rétention » sont remplacés par les mots «cette surveillance » ;

f) Les deux derniers alinéas sont supprimés ;

4° L’article 706-53-15 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « de rétention de sûreté » sont remplacés par les mots : « de surveillance de sûreté » et les mots : « de la rétention de sûreté » sont remplacés par les mots : « de la surveillance de sûreté » ;

b) Au deuxième alinéa, la première phrase est ainsi rédigée :

« Cette juridiction est saisie à cette fin par le procureur de la République ou le juge de l’application des peines, sur proposition de la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté prévue par l’article 763-10, au moins trois mois avant la date prévue pour la fin de la mesure de suivi socio-judiciaire ou de surveillance judiciaire » ;

c) Le troisième alinéa est supprimé ;

d) Les quatrième et cinquième alinéas sont remplacés par un alinéa ainsi rédigé :

« La décision doit être spécialement motivée au regard des dispositions de l’article 706-53-14. Elle est immédiatement exécutoire. » ;

e) Au sixième alinéa, le mot : « rétention » est remplacé par le mot : « surveillance » ;

f) Il est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« La juridiction régionale de la surveillance de sûreté peut également, selon les modalités prévues au présent article, ordonner une surveillance de sûreté à l’égard d’une personne placée sous surveillance judiciaire à laquelle toutes les réductions de peine ont été retirées, en application du premier alinéa de l’article 723-35, à la suite d’une violation des obligations auxquelles elle était soumise dans des conditions qui font apparaître des risques qu’elle commette à nouveau l’une des infractions mentionnées au premier alinéa. La surveillance de sûreté s’applique dès la libération de la personne. » ;

5° À l’article 706-53-16, les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « deux ans » et le mot : « rétention » est, à deux reprises, remplacé par le mot : « surveillance » ;

6° À l’article 706-53-17, le mot : « rétention » est, à quatre reprises, remplacé par le mot : « surveillance » ;

7° À l’article 706-53-18, les mots : « « de la rétention de sûreté » sont, à deux reprises, remplacés par les mots : « de la surveillance de sûreté » ;

8° La première, la troisième et la quatrième phrase du premier alinéa de l’article 706-53-19 et les deuxième à sixième alinéas sont supprimés ;

9° L’article 706-53-20 est ainsi rédigé :

« Art. 706-53-20. – La violation de ses obligations par la personne placée sous surveillance de sûreté est punie de sept ans d’emprisonnement.

« Constitue notamment une méconnaissance par la personne sous surveillance de sûreté des obligations qui lui sont imposées, le fait pour celle-ci de refuser de commencer ou de poursuivre le traitement prescrit par le médecin traitant et qui lui a été proposé dans le cadre d’une injonction de soins. » ;

10° L’article 706-53-21 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « La rétention de sûreté et » sont supprimés, le mot « sont » est remplacé par le mot : « est » et le mot : « leur » est remplacé par le mot : « son » ;

b) Au second alinéa, les mots : « La rétention de sûreté ou » sont supprimés et le mot : « rétention » est remplacé par le mot : « surveillance » ;

11° Le deuxième alinéa de l’article 706-53-22 est supprimé ;

12° Le dernier alinéa de l’article 362 et les articles 723-37 et 763-8 sont abrogés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 19 est présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L'amendement n° 30 rectifié est présenté par MM. Détraigne, Capo-Canellas, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto et Merceron.

L'amendement n° 91 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour défendre l’amendement n° 19.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Cet article, introduit par la commission des lois, supprime la rétention de sûreté, pourtant indispensable dans certaines situations très particulières. Voilà pourquoi nos collègues en souhaitent la suppression.

Je me félicite de la qualité des débats qui se sont tenus au sein de la commission des lois sur le problème de la rétention de sûreté, entre ceux qui souhaitent la suppression de cette « peine après la peine » et ceux qui préfèrent que l’on ne touche aux lois que d’une main tremblante.

Un certain nombre d’arguments plaident en faveur de la non-suppression de la rétention de sûreté.

Tout d’abord, ce dispositif n’a jamais réellement été mis en œuvre, à l’exception de quelques cas pouvant se compter sur les doigts d’une main. La loi portant rétention de sûreté n’étant pas rétroactive, elle ne pourra commencer à s’appliquer que dans un certain nombre d’années.

Ensuite, il nous semble que la rétention de sûreté est absolument indispensable à l’encontre de certaines personnes –peu importe qu’il s’agisse d’un nombre très limité de cas – que nous n’oserions libérer, même à l’issue de leur peine. Nous avons tous quelques noms en tête…

Enfin, la suppression de la rétention de sûreté pourrait avoir un effet pervers. Aujourd’hui, le réexamen de la situation du condamné est particulièrement encadré : la commission pluridisciplinaire des mesures de sûreté rend son avis après que la dangerosité du condamné a été évaluée par une équipe pluridisciplinaire au sein d’un centre national de sûreté, au cours d’un cycle de six à sept semaines.

Si la garantie de ce réexamen passé un certain délai venait à disparaître, nous craignons que les jurys populaires ne privilégient les peines de perpétuité ou de trente ans, accompagnées d’une peine de sûreté, au détriment de peines moins longues.

Pour toutes ces raisons, il nous semble que la suppression de la rétention de sûreté devrait faire l’objet d’un texte spécifique, afin d’approfondir cette réflexion.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l'amendement n° 30 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Cet amendement, identique au précédent, vise à revenir sur la suppression de la rétention de sûreté.

Je n’ai pas grand-chose à ajouter au plaidoyer de Jean-René Lecerf, sinon pour rappeler que cette rétention est destinée à s’appliquer aux auteurs des crimes les plus graves, perpétrés contre les victimes les plus vulnérables.

Supprimer la rétention de sûreté et instaurer une peine de contrainte pénale dans le même texte ne me semble pas être un bon signal à envoyer.

Je rejoins Jean-René Lecerf : ne touchons à ces dispositions législatives que d’une main tremblante.

Au surplus, notre rapporteur a écrit lui-même que l’absence d’évaluation globale ne permet pas de juger de façon certaine que la rétention de sûreté n’a pas eu d’effets notoires sur la récidive.

Dans le doute, nous proposons de maintenir ces dispositions.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme la garde des sceaux, pour présenter l'amendement n° 91.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Sans ambiguïté, le Gouvernement est favorable à la suppression de la rétention de sûreté, pour des raisons de philosophie politique et de droit.

Je profite de l’intervention de M. Lecerf, dont je connais la cohérence de pensée, pour rappeler que cette mesure est difficile à défendre, surtout après le constat d’une accumulation de défaillances.

Vous ne la défendez d’ailleurs que sur la base d’arguments prosaïques et non pas doctrinaux. Je parle bien de doctrine, non de dogme, c’est-à-dire d’une idée construite et cohérente de la logique d’une mesure.

Je n’ai jamais entendu d’arguments doctrinaux : vous vous arrêtez toujours sur quelques cas difficiles, que l’on ne sait pas traiter, et décidez, par anticipation, d’empêcher les personnes visées de commettre un nouveau crime, la rétention de sûreté intervenant après que la peine a été exécutée.

Nous avons tous le devoir de nous interroger sur ces questions. Nous avons tous le souci de ces personnes dont on peut craindre qu’elles ne commettent à nouveau des crimes.

Je rappelle, en effet, que la rétention de sûreté est réservée aux crimes. C’est la raison pour laquelle, d’ailleurs, le Gouvernement est opposé à ce que la suppression de la rétention de sûreté se fasse dans le présent texte, qui concerne les délits. Sa demande de suppression de la suppression se fonde donc sur une question de véhicule législatif. Néanmoins, il faudra que cette question soit étudiée dans toute sa dimension.

Je ne cherche pas, mesdames, messieurs les sénateurs, à être polémique, je n’accuse pas un gouvernement plutôt qu’un autre – même s’il est vrai qu’un gouvernement d’une même couleur politique était au pouvoir ces dix dernières années, je sais que la question est bien plus ancienne -, mais ce sujet me fait penser à celui que nous avons traité hier assez longuement et de façon dense, à propos de l’altération du discernement.

Parce que toutes les mesures n’avaient pas été prises par la puissance publique, les experts comme les juridictions en étaient venus à considérer que l’altération du discernement était un facteur aggravant, et devait ainsi conduire au prononcé de peines plus lourdes.

Toute société a ses pathologies, ses malades, ses personnes à risque, et si la puissance publique ne met pas en place tous les moyens nécessaires pour prendre en charge ces réalités, elle se trouve obligée de protéger la société par des pratiques injustes. C’est ce que vous avez voulu corriger lors de nos débats d’hier, monsieur Lecerf : l’altération du discernement est une circonstance atténuante, et non pas aggravante ; elle doit par conséquent conduire à un amoindrissement de la peine, et non pas à son alourdissement.

Vous avez donc su corriger une première injustice, et je vous invite à faire de même ici, car, à mon sens, on peut faire le parallèle avec la rétention de sûreté. En la matière également, les dispositions n’ont pas été prises pour que les personnes soient soignées correctement, à temps et pendant la durée nécessaire, ni pour que celles qui présentent de vraies pathologies soient prises en charge en milieu hospitalier, avec toutes les sécurités requises, plutôt que par l’administration pénitentiaire. En conséquence de quoi, pour quelques cas seulement – ils se comptent en effet sur les doigts d’une main – on a sorti l’artillerie lourde : la punition au-delà de la punition, en prévision d’un acte qui pourrait éventuellement être commis.

La position du Gouvernement est donc extrêmement claire, et son intention est sans ambiguïté : la rétention de sûreté ne se conçoit pas et doit être supprimée. Néanmoins, sa disparition ne peut figurer dans le présent texte, qui a trait aux délits.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission émet un avis favorable sur ces trois amendements. J’aimerais néanmoins développer quelque peu mon propos.

Lors de la première réunion de la commission des lois, j’ai présenté un amendement qui tendait à supprimer la rétention de sûreté, tout en conservant la surveillance de sûreté. Cet amendement avait été adopté par la majorité présente en commission.

Lors de la deuxième réunion de la commission, la majorité avait changé, les sénateurs présents n’étant plus les mêmes. Cette situation a permis que la commission émette un avis favorable sur les amendements présentés par Jean-Jacques Hyest et Yves Détraigne.

Je le sais très bien, la rétention de sûreté concerne les crimes et la disposition visant à la supprimer était donc un cavalier législatif dans le présent texte. Il me semblait néanmoins important qu’il y ait un débat sur ce thème. À ce titre, je voudrais, mes chers collègues, vous livrer deux citations tirées de mon rapport pour illustrer mon propos.

Tout d’abord, lors de son audition par la commission des lois, Mireille Delmas-Marty a indiqué : « Ma principale critique porte sur la rétention de sûreté : le droit de la peine ne sera pas lisible et cohérent tant que cette question sera occultée. » On ne peut pas dire mieux en si peu de mots.

Ensuite, lors du débat au Sénat qui a vu l’adoption de la rétention de sûreté, en 2008 – je siégeais ici, et je m’en souviens –, Robert Badinter avait déclaré : « la rétention de sûreté altère les principes fondamentaux sur lesquels repose notre justice. En effet, […] depuis la Révolution, […] seule la justice a le pouvoir d’emprisonner un homme à raison d’une infraction commise ou, à titre exceptionnel, à raison d’une infraction dont il est fortement soupçonné d’être l’auteur. […] Pas de prison, pas de détention, sans infraction : ce principe est le fondement de notre justice criminelle depuis deux siècles. […] Or, avec la rétention de sûreté, au-delà de toutes les précautions de procédure et de tous les efforts de terminologie, nous franchissons la ligne qui sépare cette justice de liberté fondée sur la responsabilité de l’auteur de l’infraction, d’une autre justice fondée sur la dangerosité appréciée par des experts – le plus souvent des psychiatres – d’un auteur virtuel d’infractions éventuelles. C’est bien là, en effet, un changement profond de notre justice : vous me permettrez de douter qu’il s’agisse d’un progrès. »

C’est parce que je partage profondément ces propos que j’avais proposé de supprimer la rétention de sûreté. Je n’ai pas été suivi ; je le regrette. C’est pourquoi la commission a émis un avis favorable sur les trois amendements identiques.

M. le président de la commission des lois applaudit.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

M. le rapporteur a raison d’indiquer qu’il avait déposé un amendement tendant à supprimer la rétention de sûreté, tout en maintenant la surveillance sûreté.

Ce rappel me permet de souligner que le débat dépasse la seule rétention de sûreté ; la surveillance de sûreté et les mesures de sûreté en général sont également concernées.

Autant j’affirme très clairement que le Gouvernement est favorable à la suppression de la rétention de sûreté, quoique dans un autre texte que celui dont nous discutons, autant je ne prétends pas qu’il faille supprimer la surveillance de sûreté ou bannir les mesures de sûreté. Nous avons un travail d’expertise à mener sur les mesures de sûreté figurant dans notre droit. Cela entre dans la mission confiée à la commission présidée par Bruno Cotte, qui aura l’occasion d’examiner, en ce qui concerne les longues peines, ces mesures de sûreté.

Vous n’êtes pas sans savoir, mesdames, messieurs les sénateurs, que le débat existe déjà en la matière ; des décisions ont été prises en première et en deuxième instance, une autre est sur le point de l’être par la Cour de cassation. Une question d’interprétation se pose donc sur la mise en œuvre des mesures de sûreté figurant dans notre droit.

C’est l’occasion de réaliser l’expertise de ces diverses mesures de sûreté, de manière à ce que nous puissions prendre les meilleures dispositions au meilleur moment.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote sur les amendements identiques n° 19, 30 rectifié et 91.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

À titre personnel, je ne voterai pas ces amendements de suppression de la suppression. Je m’oppose en effet à la double peine que l’adoption de ces amendements permettrait de faire revivre, et qui a vocation à s’appliquer à des justiciables ayant pourtant purgé l’intégralité de la peine à laquelle ils ont été condamnés.

Je suis conscient qu’il s’agit de cas très graves. Mais, en m’appuyant sur la citation de Robert Badinter, rappelée à l’instant par M. le rapporteur, je souligne, au nom du respect des droits de la défense, que c’est à la puissance publique de réagir avec les moyens nécessaires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je respecte totalement les propos de M. le rapporteur, dont je sais la profondeur des convictions sur ce sujet.

Cela dit, je ne comprends pas que l’on puisse critiquer la loi relative à la rétention de sûreté pour son absence d’application alors que, pour l’essentiel, elle n’est pas applicable. Cette loi, en effet, n’était pas rétroactive. Peine ou mesure de sûreté, je n’entrerai pas dans ce débat, mais, dans l’un et l’autre cas, il s’agit d’un éloignement de la société, ce qui me paraît suffisamment grave pour que la rétroactivité n’ait pas été envisageable.

Je tiens à préciser, en outre, que le législateur, conscient de la limite de la loi sur la rétention de sûreté, avait adopté par la suite un autre texte, d’ailleurs largement inspiré des travaux de M. Lamanda, et tendant à amoindrir le risque de récidive criminelle. Cette loi prévoyait que la rétention de sûreté ne serait pas applicable aux personnes dont le discernement avait été altéré et qui présentaient une dangerosité, si elles n’avaient pas reçu, pendant leur détention, l’ensemble des soins nécessaires.

Quelques aménagements ont donc été apportés à la loi sur la rétention de sûreté. Ce point mérite au moins que nous ayons, sur ce sujet, un débat particulier, où chacun pourra s’exprimer.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je mets aux voix les amendements identiques n° 19, 30 rectifié et 91.

Les amendements sont adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, l’article 18 quater A est supprimé et les amendements n° 85 et 112 n’ont plus d’objet.

Toutefois, pour la bonne information du Sénat, j’en rappelle les termes.

L’amendement n° 85, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, était ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

Le code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le chapitre III du titre XIX du livre IV est abrogé ;

2° Les articles A 37-30, A 37-31, 723-37, 723-38, 732-1 et 763-8, et le 2° de l’article 730-2 sont abrogés ;

3° Le dernier alinéa de l’article 362, le huitième alinéa de l’article 717-1 et le dernier alinéa de l’article 763-3 sont supprimés.

L’amendement n° 112, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, était ainsi libellé :

I. – Alinéa 1

Remplacer la référence :

II

par la référence :

III

II. – Alinéa 23, première phrase

Compléter cette phrase par les mots :

de l’article 706-53-13

III. – Alinéa 24

Remplacer cet alinéa par trois alinéas ainsi rédigés :

5° L’article 706-53-16 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « un an » sont remplacés par les mots : « deux ans » ;

b) Aux premier et second alinéas, le mot : « rétention » est remplacé par le mot : « surveillance » ;

IV. – Alinéa 32

Remplacer les mots :

le mot : « sont » est remplacé par le mot : « est »

par les mots :

les mots : « sont suspendues » sont remplacés par les mots : « est suspendue »

V. – Alinéa 33

Rédiger ainsi cet alinéa :

b) Au second alinéa, les mots : « de la rétention de sûreté ou » sont supprimés et la seconde occurrence du mot : « rétention » est remplacée par le mot : « surveillance » ;

VI. – Compléter cet article par onze alinéas ainsi rédigés :

13° L’article 732-1 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, le mot : « rétention » est remplacé par le mot : « surveillance » ;

b) Le dernier alinéa est ainsi rédigé :

« Les articles 706-53-14 et 723-38 sont applicables. » ;

14° Au premier alinéa de l’article 706-47-1, la référence : « 706-53-19 » est remplacée par la référence : « 706-53-13 », la référence : « 723-37 » est supprimée et les références : «, 763-3 et 763-8 » sont remplacées par la référence : « et 763-3 » ;

15° L’article 769 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « des décisions de rétention de sûreté, » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « de rétention de sûreté ou » sont supprimés ;

16° Au 5° de l’article 706-56-2, les mots : « ou de rétention » sont supprimés ;

17° À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 6141-5 du code de la santé publique, les mots : « ou des personnes faisant l’objet d’une rétention de sûreté » sont supprimés ;

18° À l’intitulé de la troisième partie de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l’aide juridique, les mots : « et aux personnes placées en rétention de sûreté » sont supprimés.

Chapitre VI

Dispositions visant à instaurer une contribution pour l’aide aux victimes

I. – Après l’article 707-4 du code de procédure pénale, il est inséré un article 707-5 ainsi rédigé :

« Art. 707-5. – Les amendes prononcées en matière de police, correctionnelle ou criminelle, à l’exception des amendes forfaitaires, sont affectées d’une majoration de 10 %, dans la limite de 1 000 euros pour une personne physique et de 5 000 euros pour une personne morale, qui est perçue lors de leur recouvrement et qui est destinée à financer l’aide aux victimes.

« Cette majoration n’est pas applicable lorsque ces amendes sont majorées en application des articles L. 211-27 et L. 420-1 du code des assurances.

« Cette majoration de l’amende bénéficie s’il y a lieu de la diminution prévue à l’article 707-3 en cas de paiement volontaire. »

II. – Le paragraphe 1 de la section 1 du chapitre VI du titre XII du code des douanes est complété par un article 409-1 ainsi rédigé :

« Art. 409 -1. – L’article 707-5 du code de procédure pénale est applicable aux amendes douanières. »

III. – Le code monétaire et financier est ainsi modifié :

1° Le I de l’article L. 612-42 est ainsi rédigé :

« I. – Les sanctions pécuniaires prononcées en application des articles L. 612-39 à L. 612-41 font l’objet d’une majoration de 10 % destinée à financer l’aide aux victimes, dans la limite de 1 000 euros pour une personne physique et de 5 000 euros pour une personne morale, mise à la charge de la personne sanctionnée.

« Les montants des sanctions et astreintes prévues à ces mêmes articles sont recouvrés par le Trésor public et versés au budget de l’État. » ;

2° Avant le dernier alinéa du III de l’article L. 621-15, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Les sanctions pécuniaires prononcées en application du présent III font l’objet d’une majoration de 10 % destinée à financer l’aide aux victimes, dans la limite de 1 000 euros pour une personne physique et de 5 000 euros pour une personne morale, mise à la charge de la personne sanctionnée. »

IV. – Après l’article L. 464-5 du code de commerce, il est inséré un article L. 464-5-1 ainsi rédigé :

« Art. L. 464 -5 -1. – Les sanctions pécuniaires prononcées en application des articles L. 464-2 à L. 464-5 font l’objet d’une majoration de 10 % destinée à financer l’aide aux victimes, dans la limite de 1 000 euros pour une personne physique et de 5 000 euros pour une personne morale, mise à la charge de l’organisme ou de l’entreprise sanctionné. »

V. – Au second alinéa du I de l’article 44 de la loi n° 2010-476 du 12 mai 2010 relative à l’ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d’argent et de hasard en ligne, après le mot : « pécuniaires », sont insérés les mots : « prononcées en application de l’article 43 font l’objet d’une majoration de 10 % destinée à financer l’aide aux victimes, dans la limite de 1 000 euros pour une personne physique et de 5 000 euros pour une personne morale, mise à la charge des organismes sanctionnés. Elles ».

VI. – §(Non modifié) Le présent article entre en vigueur au 1er janvier 2015.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 113, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéas 1, 2 et 6

Remplacer la référence :

par la référence :

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Il s’agit d’un amendement de coordination avec le I bis de l’article 11 du projet de loi, madame la présidente.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Favorable !

L’amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L’amendement n° 90, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 2

Supprimer les mots :

et qui est destinée à financer l’aide aux victimes

II. – Alinéas 9, 12, 14 et 15

Supprimer les mots :

destinée à financer l’aide aux victimes

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement concerne la sur-amende introduite dans le texte de loi pour financer l’aide aux victimes.

L’Assemblée nationale s’est sentie pressée, voire oppressée – sans doute à bon droit, si j’en juge par mon expérience –, par l’idée que cette nouvelle recette, créée pour financer l’aide aux victimes, ne puisse pas être dédiée à cette fin. Cette crainte est tout sauf fantaisiste, et les parlementaires que vous êtes savent bien que les règles de la comptabilité publique interdisent l’affectation des recettes.

Si les ressources créées pour financer l’aide aux victimes devaient disparaître et ne pas remplir le rôle qui leur a été dévolu, le texte de loi pourrait être perçu comme recelant un vice caché. Or je ne crois pas que le législateur soit disposé à assumer ce risque.

Néanmoins, j’ai rappelé les règles de la comptabilité publique : parce que nous ne pouvons pas inscrire dans la loi l’affectation de la ressource à une dépense, nous allons retirer la mention.

Je dois dire, cependant, que je le fais à mon corps défendant. Pendant deux années, nous avons travaillé à trouver des ressources diversifiées, à les rendre plausibles et à mettre en place le dispositif qui permette leur recouvrement. Il est donc important que ces ressources servent bien à l’aide aux victimes. Au nom du Gouvernement, je le dis très clairement, et de façon très solennelle, nous devrons tous y veiller.

De mon côté, si j’ai fait l’effort de développer autant mon propos – vous sentez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, que je lutte intérieurement en vous présentant cet amendement, et que j’aurais aimé que cette ressource soit fléchée –, c’est pour qu’il soit inscrit dans le Journal officiel que le Gouvernement veillera à ce que ces ressources financent bien l’aide aux victimes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Je rejoins totalement Mme la garde des sceaux.

L’article 18 quater crée une « taxe » de 10 % sur les amendes pénales et douanières, ainsi que sur les sanctions financières prononcées par certaines autorités administratives indépendantes, comme l’Autorité de la concurrence, afin de financer l’aide aux victimes.

La nature de cette majoration n’est pas très claire : s’agit-il d’une taxe ou d’une sanction ?

Comme on le voit dans cet amendement, il s’agit pour le Gouvernement d’une taxe, et son produit ne peut donc pas être affecté au financement de l’aide aux victimes, en vertu du principe d’universalité budgétaire.

Dès lors que Mme la garde des sceaux s’engage, comme elle vient de le faire oralement, à affecter les sommes concernées à l’aide aux victimes, même s’il n’est juridiquement pas possible de l’inscrire dans la loi, la commission émet un avis favorable sur cet amendement.

L'amendement est adopté.

L'article 18 quater est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, il est dix-neuf heures vingt et il nous reste dix-neuf amendements à examiner.

Je vous propose de prolonger la séance jusqu’au terme de l’examen du présent projet de loi, qui pourrait intervenir à une heure raisonnable, si chacun fait preuve de concision, sans que cela nuise pour autant à la qualité du débat.

Assentiment.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je promets de me taire.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Mme la présidente. N’en faites rien, madame la garde des sceaux ; j’ai toujours beaucoup de plaisir à vous écouter.

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Titre II bis

DEMANDE DE MISE EN LIBERTÉ POUR MOTIF MÉDICAL

(Non modifié)

Après l’article 147 du code de procédure pénale, il est inséré un article 147-1 ainsi rédigé :

« Art. 147 -1. – En toute matière et à tous les stades de la procédure, sauf s’il existe un risque grave de renouvellement de l’infraction, la mise en liberté d’une personne placée en détention provisoire peut être ordonnée, d’office ou à la demande de l’intéressé, lorsqu’une expertise médicale établit que cette personne est atteinte d’une pathologie engageant le pronostic vital ou que son état de santé est incompatible avec le maintien en détention, hors les cas des personnes détenues admises en soins psychiatriques sans leur consentement.

« En cas d’urgence, lorsque le pronostic vital de la personne est engagé, sa mise en liberté peut être ordonnée au vu d’un certificat médical établi par le médecin responsable de la structure sanitaire dans laquelle cette personne est prise en charge ou par le remplaçant de ce médecin.

« La décision de mise en liberté peut être assortie d’un placement sous contrôle judiciaire ou d’une assignation à résidence avec surveillance électronique.

« L’évolution de l’état de santé de la personne peut constituer un élément nouveau permettant qu’elle fasse l’objet d’une nouvelle décision de placement en détention provisoire, selon les modalités prévues au présent code, dès lors que les conditions de cette mesure prévues à l’article 144 sont réunies. »

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 20, présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendlé et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire, est ainsi libellé :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Christophe-André Frassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe-André Frassa

Par cet amendement, nous souhaitons marquer notre opposition à la réduction du nombre d'expertises médicales nécessaires à la suspension de peine des détenus, qui passerait de deux à un.

En effet, dans de nombreux cas, une expertise unique, surtout lorsqu’elle a été réalisée par un médecin qui, travaillant dans l’établissement ou qui en était proche, connaissait la personne, a abouti à des résultats inacceptables.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

L’avis de la commission est mitigé.

À titre personnel, je suis favorable au maintien de cet article : il reprend les dispositions de la proposition de loi de notre collègue Hélène Lipietz, qui, je le rappelle, avait été adoptée par le Sénat à l’unanimité, groupe UMP compris.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

En commission, M. Hyest a proposé un amendement dont l’adoption aurait pour effet de dénaturer le dispositif issu du texte de Mme Lipietz.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Le vote en commission a fait apparaître un partage des voix.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe-André Frassa

C’est bien la preuve que nous améliorons le texte !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Et, en cas de partage des voix, la commission doit s’en remettre à la sagesse du Sénat.

Pour moi, cependant, la sagesse serait de repousser cet amendement !

Sourires sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC, ainsi que sur les travées du RDSE.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement partage le point de vue de la commission et appelle à la même sagesse, …

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

… c'est-à-dire au rejet de cet amendement, monsieur Frassa.

La discussion sur l’article 18 quinquies doit se poursuivre ; d’ailleurs, le Sénat examinera dans quelques instants un amendement du Gouvernement en ce sens.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Esther Benbassa, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Ainsi que notre collègue Jean-Pierre Michel vient de le rappeler, l’article 18 quinquies reprend les termes de la proposition de loi de Mme Hélène Lipietz, dont j’avais d’ailleurs été rapporteur.

Je me souviens avoir entendu les représentants d’association que nous avons auditionnés expliquer que la double expertise retardait la mise en liberté et ne servait pas à grand-chose.

Dès lors, je ne vois pas pourquoi nous reviendrions aujourd'hui sur une disposition que l’ensemble des sénatrices et des sénateurs, de gauche comme de droite, avaient adoptée.

Je ne vois pas l’utilité de cette double expertise, et je ne suis probablement pas la seule !

L'amendement n'est pas adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 55 rectifié, présenté par MM. Mézard, Baylet, Bertrand, C. Bourquin, Collin et Collombat, Mme Escoffier, MM. Esnol, Fortassin et Hue, Mme Laborde et MM. Requier, Tropeano, Vall et Vendasi, est ainsi libellé :

Alinéa 2

Après le mot :

vital

insérer les mots :

à court terme

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 93, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

I. - Alinéa 2

Après les mots :

état de santé

insérer les mots :

, physique ou mental,

II. - Alinéa 3

Supprimer les mots :

, lorsque le pronostic vital de la personne est engagé,

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Ainsi que j’ai déjà eu l’occasion de le préciser ici, avec ma collègue Marisol Touraine, ministre des affaires sociales et de la santé, nous avons installé deux groupes de travail « santé-justice » pour mener des réflexions sur cette double thématique et évaluer l’application de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, dite « loi Kouchner ».

Les deux groupes ont beaucoup travaillé. Celui qui était plus spécifiquement chargé de la santé en milieu pénitentiaire nous a remis son rapport voilà une dizaine de jours – déjà ?Il est vrai que les journées sont si chargées à la Chancellerie que l’on ne voit pas le temps passer…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Nous en reprenons aujourd'hui certaines des préconisations pour améliorer les dispositions de la loi Kouchner. D’ailleurs, et M. le rapporteur vient de le rappeler, nous nous inspirons de la mise en liberté pour motif médical que le Sénat avait adoptée à l’unanimité.

Le groupe de travail dont les réflexions ont porté sur la loi et sur les pratiques, via des auditions des médecins et l’étude de la jurisprudence de la Cour de cassation, a mis en lumière la nécessité d’apporter deux précisions.

D’une part, le trouble susceptible de motiver la mise en liberté pour motif médical peut être de nature physique ou mentale ; le texte de la loi Kouchner n’était pas suffisamment précis sur ce point.

D’autre part, la notion d’urgence ne doit pas se limiter aux seuls cas où le pronostic vital est engagé : l’état de santé très dégradé de certaines personnes n’est parfois pas compatible avec les conditions objectives de détention, sans même parler des conditions réelles, qui, M. Lecerf le rappelait, sont parfois jugées indignes et ont déjà valu plusieurs condamnations à l’État. Même du point de vue des conditions objectives, l’état de santé de la personne n’est pas toujours compatible avec la détention.

L'amendement est adopté.

L'article 18 quinquies est adopté.

(Non modifié)

À la première phrase du deuxième alinéa de l’article 720-1-1 du code de procédure pénale, les mots : « deux expertises médicales distinctes établissent de manière concordante » sont remplacés par les mots : « une expertise médicale établit ».

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 94 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – L’article 720-1-1 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, après les mots : « état de santé », sont insérés les mots : «, physique ou mental, », et les mots : « d’hospitalisation des personnes détenues en établissement de santé pour troubles mentaux » sont remplacés par les mots : « des personnes détenues admises en soins psychiatriques sans leur consentement » ;

b) À la première phrase du deuxième alinéa, les mots : « deux expertises médicales distinctes établissent de manière concordante » sont remplacés par les mots : « une expertise médicale établit » ;

c) À la seconde phrase du deuxième alinéa, les mots : «, lorsque le pronostic vital est engagé, » sont supprimés ;

d) Au troisième alinéa, avant les mots : « la durée de détention », sont insérés les mots : « en cas d’urgence ou lorsque » ;

e) Après le quatrième alinéa, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« Dans les cas prévus par les deux précédents alinéas, le condamné peut être régulièrement représenté par son avocat lorsque son état de santé fait obstacle à son audition ; le débat contradictoire se tient alors au tribunal de grande instance.»

II. – L’article 729 du même code est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Lorsque le condamné bénéficie d’une mesure de suspension de peine sur le fondement des dispositions de l’article 720-1-1, la libération conditionnelle peut être accordée sans condition quant à la durée de la peine accomplie si, à l’issue d’un délai de trois ans après l’octroi de la mesure de suspension, une nouvelle expertise établit que son état de santé, physique ou mental, est toujours durablement incompatible avec le maintien en détention et si le condamné justifie d’une prise en charge adaptée à sa situation. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement a le même objet que le précédent, sauf que, cette fois, il s’agit non plus des prévenus, mais des détenus.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 73 rectifié, présenté par Mme Benbassa et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Avant l'alinéa 1

Insérer un paragraphe ainsi rédigé :

… – À la première phrase du premier alinéa de l'article 720-1-1 du code de procédure pénale, les mots : « hors les cas d'hospitalisation des personnes détenues en établissement de santé pour troubles mentaux » sont remplacés par les mots : « hors les cas des personnes détenues admises en soins psychiatriques sans leur consentement ».

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Le groupe de travail « santé-justice », dans le rapport qui s’intitule Aménagements et suspensions de peine pour raison médicale, préconise de modifier l’article 720-1 -1 du code de procédure pénale pour éviter les erreurs d’interprétation.

En effet, dans sa rédaction actuelle, cette disposition a souvent pu être interprétée comme excluant toutes les personnes détenues atteintes de troubles mentaux de l’application du dispositif de suspension de peine.

Telle n’était sans doute pas l’intention du législateur, les personnes atteintes de troubles mentaux devant être considérées comme des malades comme les autres et pouvoir être soignées dans les mêmes conditions que les personnes atteintes de troubles somatiques.

Nous proposons donc une modification rédactionnelle, afin de réaffirmer que le dispositif de suspension de peine pourra s’appliquer aux personnes atteintes de troubles mentaux dont l’état de santé est incompatible avec la détention, à l’exception de celles qui font l’objet d’une mesure d’hospitalisation sous contrainte.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission émet un avis favorable sur l’amendement n° 94 rectifié, dont l’adoption ferait tomber l’amendement n° 73 rectifié, auquel elle était également favorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement n° 73 rectifié ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. L’amendement n° 73 rectifié sera, me semble-t-il, satisfait par l’adoption de l’amendement du Gouvernement.

Mme Esther Benbassa acquiesce.

L'amendement est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

En conséquence, l'article 18 sexies est ainsi rédigé et l’amendement n° 73 rectifié n’a plus d’objet.

Titre III

DISPOSITIONS DIVERSES

(Non modifié)

Après le 5° de l’article 131-6 du code pénal, il est inséré un 5° bis ainsi rédigé :

« 5° bis L’interdiction, pendant une durée de cinq ans au plus, de conduire un véhicule qui ne soit pas équipé, par un professionnel agréé ou par construction, d’un dispositif homologué d’anti-démarrage par éthylotest électronique. Lorsque cette interdiction est prononcée en même temps que la peine d’annulation ou de suspension du permis de conduire, elle s’applique, pour la durée fixée par la juridiction, à l’issue de l’exécution de cette peine ; ». –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 95 rectifié, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

Après l'article 19 A

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article 803-6 du code de procédure pénale, il est inséré un article 803-... ainsi rédigé :

« Art. 803-.. . – Lorsqu’une juridiction constate qu’en raison du non-respect des délais ou formalités prévus par le présent code, la détention provisoire d'une personne poursuivie est illégale et qu’elle ordonne sa mise en liberté immédiate si elle n’est pas détenue pour une autre cause, elle peut, dans cette même décision, ordonner le placement de la personne sous contrôle judiciaire ou sous assignation à résidence avec surveillance électronique si cette mesure est indispensable pour assurer l’un des objectifs énumérés à l’article 144.

« Si aucune juridiction n’est compétente, le procureur de la République saisit sans délai le juge des libertés et de la détention afin qu’il ordonne la libération immédiate de la personne et, le cas échéant, conformément aux dispositions du présent article, son placement sous contrôle judiciaire. »

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cet amendement concerne des situations peut-être inévitables dans l’absolu, mais dont il faut essayer de limiter autant que faire se peut l’apparition.

Les magistrats du ministère public ou du siège et les greffiers, qu’ils soient en juridiction ou en établissement pénitentiaire, effectuent leur travail de manière rigoureuse, mais des erreurs peuvent survenir, tout simplement parce que l’erreur est humaine.

Ainsi est-il arrivé récemment, et à deux reprises, de surcroît à un faible intervalle de temps, que des délais de procédure ne soient pas respectés. Dans le premier cas, personne n’avait repéré que le fax avait émis un rapport de non-transmission. Dans le second cas, il n’y avait pas eu de réaction dans les délais. Résultat ? Des détenus ayant fait appel de décisions de placement en détention provisoire ont été libérés du seul fait du non-respect des délais de procédure !

Bien entendu, l’autorité judiciaire est responsable et, en l’occurrence, la chambre de l’instruction ou le juge d’instruction ont très rapidement pris une décision de placement sous surveillance judiciaire, d’ailleurs très rigoureuse dans un cas, puisqu’elle comportait une liste d’obligations extrêmement contraignantes.

Néanmoins, pour combler cette lacune de notre procédure, nous proposons, par cet amendement, de permettre à la juridiction compétente pour ordonner la libération – la chambre de l’instruction, notamment – d’ordonner immédiatement et dans la même décision le placement sous contrôle judiciaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Madame la garde des sceaux, la commission a bien compris vos arguments. Toutefois, elle est totalement défavorable à cet amendement, pour des raisons éthiques.

En effet, votre amendement a un inconvénient notable : il pourrait être interprété comme une incitation, pour les juges d’instruction et les juridictions, à être moins rigoureux dans la gestion de la détention provisoire, qui est déjà beaucoup trop longue et beaucoup trop utilisée.

Si certaines formalités sont trop complexes et certains délais trop courts, il faut revoir la loi, modifier directement ses dispositions. Il n’est pas souhaitable de proposer une espèce de disposition-balai, qui aurait vocation à couvrir tous les cas, sans distinguer les ratés vraiment difficiles à éviter et ceux qui sont dus à un manque de diligence, à une erreur de l’instruction, voire à une faute.

Enfin, la manière dont les dispositions du présent amendement se combinent avec l’article 144-2 de code de procédure pénale n’est pas claire.

Pour l’ensemble de ces raisons, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Je reviens brièvement sur ce sujet, qui est extrêmement important.

Je comprends l’idée que, dans l’absolu, une telle mesure puisse être considérée comme une incitation à une moindre vigilance.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Cependant, dans la réalité, la nature de la mission assurée par l’institution judiciaire, la rigueur et le sérieux avec lesquels les magistrats – ministère public et siège –, ainsi que les greffiers, exercent leur profession n’autorisent pas à le penser le moins du monde

Les erreurs dont il est question font toujours beaucoup de bruit et on comprend aisément l’émotion qu’elles suscitent.

Toutefois, je rappelle que plus de 1, 2 million de décisions pénales sont prononcées chaque année. Ainsi, lorsque trois erreurs interviennent dans l’année, il faut ramener les choses à leur juste proportion.

Ne considérons donc pas cette disposition comme une incitation à un manque de vigilance ! Ce serait supposer un manque de sérieux de la part des professionnels concernés, qui font un travail exigeant et exercent les responsabilités qui sont les leurs dans des conditions parfois difficiles.

Bien sûr, nous nous efforçons de pallier les difficultés qu’ils rencontrent. Ainsi, pour ce qui concerne le dernier cas en date, l’erreur provenant du greffe d’un établissement pénitentiaire, nous avons mis en place un programme de formation des chefs de greffe dans les établissements pénitentiaires. Car il s’agit d’un métier complexe, qui suppose une connaissance des textes et des procédures que l’on imagine mal à ce niveau de responsabilités.

Une série de dispositions a été prise. La mesure que je vous propose par cet amendement, mesdames, messieurs les sénateurs, permettra de réagir rapidement, en autorisant le placement immédiat de la personne sous contrôle judiciaire.

M. le rapporteur manifeste son scepticisme.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

J’entends et je vois votre scepticisme, monsieur le rapporteur. Néanmoins, je veux dire très fortement que les quelques cas, toujours très regrettables, à l’occasion desquels je charge l’inspection générale des services judiciaires de prendre la mesure du dysfonctionnement ayant conduit au manquement, méritent que l’on prenne des dispositions.

Pour ce qui concerne le dernier cas, il s’est avéré que le service en question était débordé. L’analyse de la situation a permis à l’administration pénitentiaire de renforcer l’équipe concernée.

Je peux entendre que cette mesure vous dérange, monsieur le rapporteur. J’ai plus de mal à accepter votre critique : voir dans le dispositif que je propose une incitation à un manque de vigilance de la part des magistrats et des greffiers, cela revient à supposer que ces professionnels de la justice ne prennent pas au sérieux la mission, extrêmement lourde, qui leur est confiée. Or tel n’est pas le cas, je puis vous l’assurer pour en avoir des preuves au quotidien !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Visiblement, il existe plusieurs raisons de droit de ne pas voter cet amendement du Gouvernement, et notre rapporteur les a fort bien exprimées.

Pour autant, je ne peux qu’inviter à trouver une solution à ces situations, que l’opinion ne comprend pas et qui remettent parfois en cause des mois d’enquête. Un malheur n’arrivant jamais seul, l’erreur concerne en général des cas dont la médiatisation est très facile.

Cet amendement soulève donc une vraie question. Au demeurant, je rejoins M. le rapporteur : prévoir dans la loi le non-respect des délais, c’est ouvrir la porte à de très nombreux contentieux.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

Convaincu par les arguments de M. le rapporteur, je pense qu’il n’est pas possible d’adopter cet amendement, dans la mesure où il ne faut pas inciter a priori les professionnels à un manque de vigilance. Certes, ces derniers exercent dans des conditions difficiles. Mais il y va, je le rappelle, de la liberté des justiciables.

Par conséquent, il faudra certainement trouver une autre solution.

Une telle session de rattrapage, qui serait accordée, en tout état de cause, si des délais de procédure n’étaient pas respectés et des formalités remplies, peut inciter à une vigilance moindre. C’est la raison pour laquelle je ne voterai pas cet amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Madame la présidente, je vous remercie d’avoir bien voulu prolonger la séance pour que nous achevions l’examen de ce texte à une heure raisonnable, mais je n’en abuserai pas.

Simplement, si j’entends Mme la garde des sceaux, elle-même doit comprendre que, en tant que parlementaires, nous ne pouvons pas accepter cet amendement. Ces cas existent depuis longtemps. Pourquoi prévoir aujourd'hui une telle disposition ? N’est-ce pas saugrenu ? C’est la raison pour laquelle la commission s’est prononcée contre cet amendement et confirme son avis défavorable.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je comprends à la fois les arguments de M. le rapporteur et ceux de Mme la garde des sceaux.

Pour ma part, j’ai également beaucoup de mal à accepter l’idée selon laquelle la disposition en question permettrait à toute une série de collaborateurs de justice d’être moins efficaces dans leur travail.

À mes yeux, ces erreurs proviennent d’une perversité de l’action de justice. Même si elles sont effectivement rarissimes, elles ont sur l’opinion un effet totalement calamiteux.

C’est la raison pour laquelle je m’abstiendrai.

L'amendement n'est pas adopté.

I. – L’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante est ainsi modifiée :

1° L’article 2 est ainsi modifié :

a) Les mots : «, le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

b) Les mots : « et le tribunal correctionnel pour mineurs» sont supprimés et les mots : « ne peuvent » sont remplacés par les mots : « ne peut » ;

2° À l’article 3, les mots : «, le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

3°L’article 6 est ainsi modifié :

a) Au premier alinéa, les mots : « le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

b) Au deuxième alinéa, les mots : « le juge des enfants, le tribunal pour enfants ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont remplacés par les mots : « le juge des enfants ou le tribunal pour enfants » ;

4° L’article 8 est ainsi modifié :

a) Au huitième alinéa, les mots : «, le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

b) Le dernier alinéa est supprimé ;

5° À l’article 8-2, les mots : « soit devant le tribunal correctionnel pour mineurs, » sont supprimés ;

6° À l’article 9, la deuxième phrase du cinquième alinéa est supprimée ;

7° À l’article 10, les mots : «ou devant le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

8 °À l’article 12, les mots : « ou du tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

9° Le troisième alinéa de l’article 13 est supprimé ;

10° Le chapitre III bis est supprimé ;

11° Les articles 24-1, 24-2 et 24-3 sont supprimés ;

12° À l’article 24-5, les mots : « ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés ;

13° À l’article 24-6, les mots : «, le tribunal pour enfants ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont remplacés par les mots : « ou le tribunal pour enfants » ;

14° À l’article 24-7, les mots : « ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont supprimés.

II. – Le code de l’organisation judiciaire est ainsi modifié :

1° Le chapitre Ier bis du titre V du livre II est supprimé ;

2° Les articles 251-7 et 251-8 sont supprimés.

III. – Les affaires dont les tribunaux correctionnels pour mineurs ont été saisis avant la promulgation de la présente loi sont transférées aux tribunaux pour enfants compétents.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de trois amendements identiques.

L'amendement n° 21 est présenté par MM. Hyest, Bas et Buffet, Mme Troendle et les membres du groupe Union pour un Mouvement Populaire.

L'amendement n° 31 rectifié est présenté par MM. Détraigne, Capo-Canellas, Bockel, Marseille et Roche, Mme Férat, MM. Amoudry, J.L. Dupont et Deneux, Mme Gourault et MM. Zocchetto et Merceron.

L'amendement n° 96 est présenté par le Gouvernement.

Ces trois amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour présenter l’amendement n° 21.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Les auteurs de cet amendement s’opposent à la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, et ce pour plusieurs raisons.

Premièrement, la loi qui les a mis en place est très récente et il faudrait peut-être laisser du temps au temps pour juger de leur pertinence, même si je reconnais que les premières années de fonctionnement ne plaident pas en faveur de leur efficacité.

Deuxièmement, cette disposition intéresse les mineurs, lesquels ne sont pas concernés par ce projet de loi. Selon moi, une telle suppression a donc difficilement sa place dans ce texte.

Troisièmement, enfin, nous attendons tous une réécriture de l’ordonnance de février 1945, qui est aujourd'hui devenue quasi illisible, après les dizaines de modifications dont elle a été l’objet. Si évolution il doit y avoir, elle trouverait davantage sa place dans cette réécriture de l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour présenter l’amendement n° 31 rectifié.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Après avoir débattu de la rétention de sûreté, nous ouvrons un autre dossier symbolique et important, à savoir l’éventuelle suppression du tribunal correctionnel pour mineurs

J’observe, madame la garde des sceaux, que nous nous rejoignons sur ce sujet, sans doute pour des motifs différents. Quoi qu’il en soit, notre convergence, avec ces trois amendements identiques de suppression, montre que le sujet n’est pas mûr, en tout cas dans le cadre de ce texte.

La question de la délinquance des mineurs est tellement prégnante que l’on ne peut pas, selon moi, la traiter par petits bouts. Sans doute faut-il l’examiner dans un cadre plus global, notamment celui d’une réflexion sur l’adaptation de l’ordonnance de février 1945.

Il s’agit bien sûr d’un sujet particulièrement sensible. Toutefois, outre le fait que la création de ces tribunaux correctionnels pour mineurs est relativement récente et qu’il est difficile d’en dresser un bilan aujourd'hui, je veux rappeler que, pour un mineur, passer devant un tribunal revêt une charge symbolique et une solennité qui peuvent paraître nécessaires à sa compréhension de la réalité des actes qu’il a commis.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme la garde des sceaux, pour présenter l’amendement n° 96.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

La commission des lois a adopté la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs. Le débat à l’Assemblée nationale avait été long et vif, des députés ayant souhaité également les supprimer.

Ces tribunaux, vous le savez, constituent une excroissance procédurale. Ils s’inscrivent dans la dynamique d’un rapprochement de la justice des mineurs et des majeurs décidé à une époque où toute la parole politique consistait à faire de la délinquance des mineurs une délinquance en explosion, de plus en plus grave, violente et massive.

Or les statistiques ne confirment pas ce discours, ce qui ne signifie pas qu’un certain nombre de mineurs ne se livrent pas à des actes graves, qu’ils ne récidivent pas ou ne réitèrent pas. J’observe simplement que, quand on prend un exemple, c’est toujours le même !

Ainsi la délinquance des mineurs a-t-elle au contraire légèrement diminué sur les dix dernières années, si l’on en croit les statistiques : le nombre de mineurs incarcérés est resté stable, tandis que la part de la délinquance des mineurs dans l’ensemble de la délinquance a légèrement baissé, s’établissant aujourd'hui à 18 %.

C’est cependant à la faveur d’un certain discours sur les mineurs - les jeunes d’aujourd'hui ne seraient pas comme ceux d’hier - que furent créés les tribunaux correctionnels pour mineurs.

Je rappelle le contexte sans porter le moindre jugement de valeur, quoi que j’en pense. Pour ma part, lorsqu’il s’agit d’agir au nom de la puissance publique, je ne me contente pas de mes convictions personnelles ni de mes propres élans : je veille à vérifier la réalité des choses.

Je suis donc allée interroger les chefs de juridiction sur le fonctionnement de ces tribunaux : tous, du moins tous ceux qui se sont exprimés, ont souhaité leur suppression.

Certains se fondent sur leur conviction, considérant que la justice des mineurs doit rester spécialisée, conformément à la tradition française, qui a vu la création du juge des enfants en 1912 et l’ordonnance relative à l’enfance délinquante en 1945.

D’autres avancent des raisons pratiques, estimant que la nature collégiale de ces tribunaux correctionnels pour mineurs complique la gestion des juridictions en les encombrant. Ils notent également que les condamnations sont à peu près identiques à celles que prononcent les tribunaux pour enfants, ni plus sévères ni plus massives.

Telle est la réalité, mesdames, messieurs les sénateurs, et j’ai eu l’occasion de le faire vérifier régulièrement dans les juridictions.

Tous les praticiens, tous les professionnels, même de sensibilité différente, plaident donc pour la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, certains, je le répète, par conviction, d’autres simplement pour des raisons pratiques tenant à l’organisation de leur juridiction.

Toutefois, le Gouvernement ne souhaite pas procéder à cette suppression dans le cadre de ce projet de loi, relatif aux délits. Il convient autant que possible d’écarter tant les dispositions relatives aux longues peines que les dispositions relatives aux mineurs.

Je le répète, il est souhaitable, pour le bon fonctionnement des juridictions et pour la bonne administration de la justice, que les tribunaux correctionnels pour mineurs soient supprimés. Je vous le dis très clairement – je ne me cache derrière aucun paravent ! –, je pense, par conviction, à l’instar de certains magistrats, que la justice des mineurs doit rester une justice spécialisée. Je crois que la plupart d’entre vous partagent cet avis.

L’ordonnance de 1945 est née à un moment de grande unité nationale, …

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

… à l’époque du Conseil national de la Résistance, quand les forces de la Résistance étaient composées de sensibilités de droite, de gauche et du centre. Dans les gouvernements qui se sont succédé, je pense, notamment, aux deux gardes des sceaux François de Menthon, qui était, me semble-t-il, centriste – il était en tout cas républicain – ou encore à Pierre-Henri Teitgen.

Cette production législative est donc le fruit d’une époque où il y avait une convergence politique sur la façon dont la société devait traiter les enfants délinquants. Je suis animée de la même conviction.

En outre, en qualité de garde des sceaux, sur un plan pratique, pour la bonne administration de la justice, j’estime que, conformément à la demande de nombreux chefs de juridiction, il est souhaitable de supprimer ces tribunaux. Toutefois, je vous demande, c’est le sens de l’amendement du Gouvernement, de ne pas maintenir dans ce texte la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs. C’est ce que l’on appelle « la bipolarité ».

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

La commission a – fort heureusement ! – rejeté ces trois amendements identiques de suppression. En effet, pourquoi remettre à plus tard ce que l’on peut faire aujourd'hui, même dans le cadre d’un texte qui concerne la justice correctionnelle ?

Vous aviez demandé, madame la garde des sceaux, à M. le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, de me confier une mission sur la Protection judiciaire de la jeunesse et, plus largement, sur les mineurs. Les magistrats que j’ai rencontrés sont tous – tous, j’y insiste –, de la tête aux pieds, contre cette nouvelle juridiction et demandent l’abrogation de cette disposition le plus rapidement possible, et ce pour deux raisons.

D’une part, cette nouvelle juridiction désorganise les tribunaux. D’autre part, les condamnations ne sont pas plus sévères, contrairement à l’objectif qui était, semble-t-il, recherché.

Supprimons donc dès aujourd'hui ces tribunaux.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Pour ma part, je tiendrai bon en commission mixte paritaire. J’espère que vous ferez de même, mes chers collègues, car vous avez souvent montré la voie en matière de libertés publiques !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Pour ma part, je suis, bien sûr, très attaché, comme vous tous, au principe en vertu duquel, dans la République française, on est jugé et condamné pour des faits, et non pour des virtualités. Cette idée très forte a été évoquée précédemment à propos de la rétention de sûreté.

L’ordonnance de février 1945, cet héritage dont vous avez magnifiquement parlé, madame la garde des sceaux, instaure une justice spécifique pour les mineurs, considérant à juste titre que le mineur est un être en devenir.

Or certains multiplient les arguties pour convaincre que l’idée d’une telle spécificité serait surannée et ne correspondrait plus à la réalité de la jeunesse d’aujourd’hui. Bien sûr, la société a évolué. Mais enfin, qui va désespérer du cas d’un jeune ou, d’ailleurs, d’un adulte, mais a fortiori d’un mineur ?

Je n’ai donc pas grand-chose à ajouter à votre beau plaidoyer, madame la garde des sceaux. Vous avez relevé, comme M. le rapporteur, que tous les magistrats que vous avez rencontrés estiment qu’il convient de supprimer le tribunal correctionnel pour mineurs.

Dans le rapport de notre collègue Jean-Pierre Michel, on peut lire, à la page 185 : « La création de ces tribunaux relevait clairement d’une logique tendant à rapprocher autant que possible la justice des mineurs de celle des majeurs. Cette logique ne reçoit pas l’approbation de votre commission, qui considère que la spécificité de la justice des mineurs doit perdurer, conformément au principe qui a guidé la rédaction de l’ordonnance n° 45-174 du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante. »

J’ai bien compris la force de votre conviction, madame la garde des sceaux, ainsi que l’explication que vous donnez à votre refus de voir la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs intervenir dans le présent texte. Ce n’est pas de la bipolarité ; ce sont deux éléments. Peut-être est-ce de la dialectique ?

Quoi qu’il en soit, j’ai lu avec soin – comme toujours ! – l’objet de l’amendement n° 96 du Gouvernement. Je vous lis, madame la garde des sceaux : « Le Gouvernement n’est pas hostile à la suppression du tribunal correctionnel pour mineurs, mais il estime que cette question doit être examinée dans le cadre d’une réforme d’ensemble de l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante. »

Voilà qui est bien dit, madame la garde des sceaux. Aussi, je me permets ici simplement d’appeler cette réforme de mes vœux.

Mme la garde des sceaux s’exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Madame la garde des sceaux, de nombreux sujets sont inscrits à l’ordre du jour du Parlement, matin, midi et du soir ! Il y a aussi des procédures à n’en plus finir.

Mme la garde des sceaux réagit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

J’en parlais avec Philippe Kaltenbach à l’instant, nous avons assisté cet après-midi à la mise en œuvre d’une procédure particulière, et nous respectons les procédures. Mais, dans l’emploi du temps, il y a des priorités.

C’est dans ce contexte que je me permets de vous faire remarquer que la réforme d’ensemble de l’ordonnance de 1945, que vous appelez de vos vœux, devrait être examinée en priorité, dans les prochains mois, par le Parlement.

La question des mineurs dans notre société, et singulièrement de la délinquance des mineurs, est au moins aussi essentielle que beaucoup d’autres. On doit donc trouver le temps, dans les prochains mois, de la traiter.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Vincent Capo-Canellas, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Il ne faut évidemment pas stigmatiser les mineurs. Nous devons aborder cette question avec sérénité.

Je vous remercie, madame la garde des sceaux, des éléments d’analyse que vous avez bien voulu nous communiquer et de la réflexion d’ensemble que vous engagez avec nous. J’entends les arguments de fond et les arguments pratiques que vous avancez.

Vous estimez qu’il faut, à une échéance relativement brève, procéder à la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs, au nom de la bonne administration de la justice.

Ce débat n’est pas tabou ; on peut l’ouvrir dans le cadre de la réflexion globale que vous avez évoquée.

Concernant les statistiques que vous avez citées, vous me permettrez d’être dubitatif. Il est des territoires dans notre vieille France où la question de la justice des mineurs se pose avec une acuité particulière : un certain nombre de phénomènes ont, malgré tout, une réalité statistique.

Selon moi, il convient de traiter cette question dans un cadre global et, j’y insiste, avec sérénité. Je crains que la consécration ici de la suppression de ces tribunaux n’ait un double effet négatif. Je m’explique.

Premièrement, cette mesure ne prend pas en compte la question dans sa globalité.

Deuxièmement, si nous supprimons à ce stade, dans ce projet de loi, les tribunaux correctionnels pour mineurs, un certain nombre de contrevenants feront immanquablement l’addition, considérant que cette suppression vient s’ajouter au fait que, pour certains délits, la prison n’existe plus. Ce sera très clair pour eux. Ne leur adressons pas ces deux signaux en même temps. Il faut, au contraire, disjoindre les deux questions.

Soyons donc attentifs au signal que nous allons envoyer à un certain nombre de réitérants, pour lesquels on doit engager un travail de prévention dans le cadre de la lutte contre la récidive. Si l’on additionne ces deux mesures, je crains un effet négatif.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Thani Mohamed Soilihi, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Thani Mohamed Soilihi

La suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs ne signifie pas l’impunité pour les mineurs. Cela va certes de soi, mais il vaut mieux le préciser.

On peut remettre à demain certains sujets, mais il faut régler tout de suite la question de la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs.

Compte tenu de l’importance du sujet eu égard à la place spécifique de la justice de nos mineurs dans notre droit répressif, je vous demande, mes chers collègues, de procéder immédiatement à cette suppression. Symboliquement, ce sujet ne saurait attendre.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Jean-René Lecerf, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Je rejoins totalement l’argumentation développée par mon collègue Vincent Capo-Canellas.

J’ajoute que les dispositions essentielles de l’ordonnance de 1945 ont été constitutionnalisées, qu’il s’agisse de la primauté de l’éducatif sur le répressif ou de la minoration des peines. Cette constitutionnalisation protège aussi ces dispositions essentielles.

Je veux faire observer que la loi qui portait notamment – ce n’était pas la seule disposition ! – création des tribunaux correctionnels pour mineurs a été soumise au Conseil constitutionnel, qui en a reconnu la constitutionnalité.

Aussi, on ne saurait décider à dix – pardonnez-moi de le souligner ! –, à la sauvette, au terme de l’examen de ce texte important concernant les délits, la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Cécile Cukierman, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Certes, on peut déplorer le faible nombre de sénateurs présents à la fin de ce débat, mais nous avons eu également cette discussion en commission.

Un certain nombre de groupes parlementaires s’étaient fortement opposés à la création, il y a quelques années, sous le précédent gouvernement, des tribunaux correctionnels pour mineurs. La présente discussion s’inscrit donc en quelque sorte dans la continuité.

Bien évidemment, nous aimerions tous, à commencer même par vous, ai-je envie de dire, madame la garde des sceaux, trouver le temps, dans un calendrier parlementaire relativement contraint, de remettre à plat l’ordonnance de 1945 relative à l’enfance délinquante, pour qu’elle soit au diapason du XXIe siècle, tout en lui conservant sa substantifique moelle. Pour l’heure, cela n’est pas possible.

Pourtant, supprimer les tribunaux correctionnels pour les mineurs constituerait un acte fort dans ce texte visant à mieux individualiser les peines et à prendre en considération la spécificité de chaque détenu. Cela s’inscrit dans notre volonté de mettre en place une autre justice et, plus largement, d’éviter les généralisations.

La suppression de ces tribunaux est plus qu’un symbole. Vous l’avez rappelé, ils ont été mis en place non pas pour répondre à un problème, mais pour satisfaire l’opinion publique dans l’immédiateté, ce qui ne résout pas forcément les maux de la société sur le long terme.

Pour toutes ces raisons, nous ne voterons pas les trois amendements identiques visant à supprimer la suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Philippe Kaltenbach, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Il est certain que nous aimerions tous débattre d’une grande loi sur la justice des mineurs, mais nous avons l’occasion de supprimer dès aujourd’hui les tribunaux correctionnels pour mineurs qui, à l’expérience, ne servent à rien.

Au bout d’un moment, il faut tout de même se pencher sur l’efficacité des dispositifs votés par le Parlement.

Depuis deux ans, tous les professionnels constatent l’inefficacité de ces tribunaux correctionnels pour mineurs. Dès lors, pourquoi les conserverions-nous, d’autant qu’ils entrent en contradiction avec l’ordonnance de 1945 ?

Devrions-nous avoir peur du qu’en-dira-t-on, de l’opinion publique, de l’exploitation que certains pourraient faire de cette suppression ? Non, ça suffit ! Nous sommes ici pour légiférer, les professionnels nous demandent de supprimer ces tribunaux correctionnels pour mineurs et il s’agit de surcroît d’un engagement pris par François Hollande durant sa campagne.

Debut de section - PermalienPhoto de Philippe Kaltenbach

Cette suppression a été validée par les électeurs ; il faut le dire clairement et, si nous sommes tous d’accord pour reconnaître que ces tribunaux ne servent à rien, nous devons l’assumer et porter ensemble cette suppression en convainquant l’opinion qu’il est utile de les supprimer.

Je soutiens donc pleinement la position de M. le rapporteur sur ce point, et c’est aussi l’avis, me semble-t-il, de l’ensemble des sénateurs socialistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Lorsque nos collègues de la majorité étaient dans l’opposition, voilà quelques années, ils nous reprochaient souvent, notamment dans le domaine pénal, de légiférer au coup par coup en réaction à tel ou tel fait divers, sans vision d’ensemble des changements introduits. Et en effet, la justice des mineurs a fait l’objet de nombreuses modifications. Elles ont peut-être été introduites en fonction des circonstances, mais faut-il pour autant les détricoter de la même manière ?

Il faut sans doute repenser la justice des mineurs, qui date pour l’essentiel de la fin de la guerre, car la situation a bien changé depuis lors. Mais nous devrions poser la problématique dans son ensemble, en tenant compte des évolutions de la délinquance des mineurs, plutôt que de détricoter au coup par coup ce qui a également été tricoté, hélas, au coup par coup.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

La parole est à Mme Virginie Klès, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Mme Virginie Klès. Pour avoir fait pas mal de tricot dans ma jeunesse, quand j’en avais le temps, je reprendrai l’image employée par notre collègue Yves Détraigne pour dire que, malgré tout, lorsque l’on se trouve avec deux ou trois fausses mailles à la suite, il vaut mieux défaire tout le rang plutôt que d’essayer de les reprendre une à une !

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Virginie Klès

Je pense effectivement que les tribunaux correctionnels pour mineurs étaient une mauvaise idée, et qu’ils constituaient une très mauvaise maille dans le tricot ! Nous avons l’occasion de les supprimer, sans pour autant que cela puisse être considéré comme un cavalier législatif.

Évitons surtout de dramatiser : avant l’existence de ces tribunaux correctionnels spécifiques, les mineurs délinquants étaient tout de même repérés et sanctionnés par des juridictions adaptées à leur qualité de mineurs. Ils le seront encore demain, quand bien même il n’y aurait plus de tribunaux correctionnels pour mineurs. Ce n’est pas parce qu’on les fait disparaître que l’on fait disparaître pour autant tout l’appareil juridique destiné à lutter contre la délinquance des mineurs.

Cet outil est peu utilisé, mal utilisé et il encombre les tribunaux ; tous les professionnels souhaitent qu’on le supprime.

Ayons donc le courage de la vérité. Ne nous cachons pas derrière des mots, en prétendant que cette suppression des tribunaux correctionnels pour mineurs nous obligerait à reprendre tout de suite l’ensemble de l’ouvrage.

Oui, il faudra sans doute tout reprendre, mais cela ne nous empêche pas de supprimer dès aujourd’hui ces deux rangs qui ont été tricotés à l’envers !

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Au risque d’énerver M. le rapporteur

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Pour répondre tout d’abord à l’interpellation de M. le président de la commission des lois, je lui indique que nous travaillons depuis plus de huit mois maintenant sur l’ordonnance de février 1945, dont je rappelle qu’elle a été modifiée à trente-sept reprises. Elle est donc devenue illisible au fil du temps et tous les praticiens nous demandent de la rendre plus cohérente.

Nous avons reçu les organisations professionnelles et syndicales, ainsi que les associations qui interviennent dans ce domaine, et toutes pointent la difficulté de naviguer entre sanctions et mesures éducatives. Il faut donc simplifier les procédures. Nous nous y attelons, et nous avons presque abouti.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Maintenant, vous savez bien, mesdames, messieurs les sénateurs, que je ne suis pas en mesure de m’engager devant vous sur une date d’inscription de ce texte à l’ordre du jour. Je souhaite profondément, tout comme les professionnels concernés, qu’il soit examiné, afin de rendre la justice des mineurs plus juste et plus efficace.

J’en profite aussi pour communiquer certains chiffres, car il me semble nécessaire, au-delà du ressenti ou de l’effet que peut produire telle ou telle émission de télévision, d’éclairer la représentation nationale sur les réalités.

Or, la réalité, c’est que, je le répète, la part de la délinquance des mineurs a plutôt baissé, rapportée à l’ensemble de la délinquance.

On prétend que les mineurs délinquants seraient de plus en plus jeunes, de plus en plus violents, qu’ils commettraient des actes de plus en plus scandaleux et qu’ils seraient de moins en moins punis.

Je me contenterai de quelques chiffres, tenant à votre disposition des statistiques plus détaillées si vous le souhaitez, mesdames, messieurs les sénateurs.

Loin de nous l’idée de minorer la délinquance des mineurs. En revanche, nous la mesurons.

Entre 2004 et 2012, la part des mineurs dans le total des personnes interpellées est passée de 20 % à 18 %.

Le nombre de mineurs mis en cause par la police nationale a diminué de 12, 6 % entre juillet 2011 et juin 2013.

Pour les mineurs délinquants, le premier contact avec la justice est fortement dissuasif. En effet, 65 % des mineurs qui ont eu un premier contact avec la justice ne récidivent pas – je précise que cette étude a été conduite sur six ans. Et l’on sait que, plus les personnes avancent en âge, plus elles sortent de la délinquance de manière générale ; c’est une tendance lourde.

Ensuite, les mineurs sont-ils vraiment de plus en plus violents ? Ils ne représentent que de 4 % à 7 % de l’effectif total des condamnés pour homicide volontaire et, sur l’ensemble des faits susceptibles d’être qualifiés de criminels, la part des mineurs est inférieure à 1 %.

Les atteintes volontaires à l’intégrité physique commises par les mineurs sont également en baisse, avec une diminution de 18 % entre 2010 et 2013. De même, les vols avec violence ont diminué de 13, 9 %.

On prétend également que les mineurs délinquants sont de plus en plus jeunes. Les moins de treize ans ne représentent pourtant que 4 % des mineurs auteurs de délits, selon les chiffres de 2012.

On dit aussi que les juridictions pour mineurs seraient laxistes, ce qui aurait justifié la création de ces tribunaux correctionnels spécifiques. Mais le taux de réponse pénale pour les mineurs est de 93, 5 %, contre 89 % pour les adultes.

Enfin, j’ai soutenu tout à l’heure que les tribunaux pour enfants étaient aussi sévères, voire parfois plus sévères, que les tribunaux correctionnels pour mineurs, qui ont pourtant été créés pour accroître la sévérité des peines prononcées.

Les tribunaux pour enfants se montrent en effet très sévères, puisque 61 % des peines qu’ils ont prononcées en 2012 comportaient de l’emprisonnement, ferme ou avec sursis, contre 52 % en 2010 et 53 % en 2011.

Ces chiffres méritaient d’être portés à votre connaissance, mesdames, messieurs les sénateurs, même s’ils ne modifient bien entendu en rien la position officielle du Gouvernement que je vous ai communiquée.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je mets aux voix les amendements identiques n° 21, 31 rectifié et 96.

Les amendements ne sont pas adoptés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je précise au Sénat que je demanderai à la commission des lois de me mandater pour intervenir auprès du Premier ministre afin qu’un débat sur la question de la justice des mineurs soit inscrit à l’ordre du jour de nos travaux au cours des prochains mois.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 114, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

I. – Alinéa 10

Remplacer le mot :

huitième

par le mot :

neuvième

II. – Alinéa 12

Rédiger ainsi cet alinéa :

5° À l’article 8-2, les mots : « soit devant le tribunal correctionnel pour mineurs, » et la deuxième phrase sont supprimés ;

III. – Alinéa 17

Rédiger ainsi cet alinéa :

10° Le chapitre III bis est abrogé ;

IV. – Alinéa 18

Supprimer cet alinéa.

V. – Alinéa 19

Rédiger ainsi cet alinéa :

12° Au deuxième alinéa de l’article 24-5, les mots : «, le tribunal pour enfants ou le tribunal correctionnel pour mineurs » sont remplacés par les mots : « ou le tribunal pour enfants » ;

VI. – Alinéas 22 à 24

Remplacer ces alinéas par un alinéa ainsi rédigé :

II. – Le chapitre Ier bis du titre V du livre II du code de l’organisation judiciaire est abrogé.

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Favorable !

L'amendement est adopté.

L'article 19 B est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 74, présenté par Mme Benbassa, M. Gattolin et les membres du groupe écologiste, est ainsi libellé :

Après l’article 19 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – Après l’article 116-1 du code de procédure pénale, il est inséré un article 116-2 ainsi rédigé :

« Art. 116-2 . – Pour les délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, lorsque le juge d’instruction envisage de procéder à la mise en examen, il peut procéder comme il est dit au présent article, par dérogation aux articles 80-1 et 116 du code de procédure pénale.

« S’il apparaît au cours de la procédure que des indices graves ou concordants justifient la mise en examen de la personne, le juge d’instruction l’informe de son intention par lettre recommandée avec accusé de réception en précisant chacun des faits qui lui sont reprochés ainsi que leur qualification juridique et en l’informant de son droit de faire connaître des observations écrites dans un délai d’un mois. Il peut aussi, par le même avis, interroger la personne par écrit afin de solliciter, dans le même délai, sa réponse à différentes questions écrites. En ce cas, la personne est informée qu’elle peut choisir de répondre auxdites questions directement en demandant à être entendue par le juge d’instruction.

« Lors de l’envoi de l’avis prévu à l’alinéa précédent, la personne est informée de son droit de désigner un avocat. En ce cas, la procédure est mise à la disposition de l’avocat désigné durant les jours ouvrables, sous réserve des exigences du bon fonctionnement du cabinet d’instruction. Les avocats peuvent également se faire délivrer, à leurs frais, copie de tout ou partie des pièces et actes du dossier dans les conditions mentionnées aux quatrième à dernier alinéas de l’article 114 du code de procédure pénale.

« À l’issue d’un délai d’un mois à compter de la réception de l’avis mentionné au deuxième alinéa, le juge d’instruction peut procéder à la mise en examen en adressant à la personne ainsi avisée et à son avocat une lettre recommandée avec accusé de réception selon les modalités prévues aux deux deuxième et troisième alinéas à l’article 113-8 du code de procédure pénale. Il informe à cette occasion la personne mise en examen que si elle demande à être entendue par le juge d’instruction, celui-ci est tenu de procéder à son interrogatoire. »

II. – L’article 80-1 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, dans le cas de délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, l’article 116-2 du code pénal s’applique. »

III. – L’article 116 du code de procédure pénale est complété par un alinéa ainsi rédigé :

« Par dérogation aux dispositions du présent article, dans le cas de délits dont la responsabilité est fixée par les articles 42 et 43 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, ou par l’article 93-3 de la loi n° 82-652 du 29 juillet 1982 sur la communication audiovisuelle, l’article 116-2 du code de procédure pénale s’applique. »

La parole est à Mme Esther Benbassa.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Cet amendement vise à simplifier la procédure pénale pour les délits en matière de liberté de la presse. Il s’agit, sans porter bien évidemment atteinte aux droits de la défense, de permettre la mise en examen par simple lettre dans un cadre extrêmement circonscrit.

En l’état du droit, dans le cas des infractions prévues par la loi du 29 juillet 1881, le juge est tenu de convoquer physiquement les personnes poursuivies pour simplement vérifier leur identité, sans pouvoir juger au fond. Cela entraîne une perte de temps considérable, tant pour les juges d’instruction que pour les justiciables comme les directeurs de publications, contraints de faire des kilomètres pour simplement décliner leur identité.

Le groupe écologiste souhaite donc supprimer cette procédure inutile et lourde via l’introduction d’un article 116-2 dans le code de procédure pénale.

Avec mon collègue André Gattolin, nous savons que cette mesure d’allègement de la procédure pénale a le soutien des éditeurs de presse comme de nombreux magistrats. Elle permettrait en effet de rationaliser le temps du juge et de la presse, alors que la qualité du traitement des justiciables dépend largement de la charge de travail des magistrats.

Je précise que cet amendement, qui s’apparente, je le sais, à un cavalier législatif, a été déposé pour attirer l’attention de Mme la ministre sur cette question.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Mme Benbassa a tout dit. Sans me prononcer sur le fond, je lui confirme que cet amendement n’a pas sa place dans ce texte.

Je pense donc qu’elle sera disposée à le retirer, après que Mme la garde des sceaux lui aura répondu, succinctement…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Succinctement ? Voilà qui est de plus en plus aimable, monsieur le rapporteur !

Nouveaux sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Je comprends votre intention, madame la sénatrice. Toutefois, il n’existe aucun lien direct entre la disposition que vous proposez et le texte dont nous débattons. Je vous suggère donc de bien vouloir retirer cet amendement.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Absolument !

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame Benbassa, l'amendement n° 74 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 74 est retiré.

L'amendement n° 103, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l’article 19 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après le septième alinéa de l’article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un alinéa ainsi rédigé :

« L’étranger bénéficiant d’un aménagement de peine et purgeant une peine alternative à l’incarcération voit sa mesure d’assignation à résidence assortie d’une autorisation de travail. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

L'amendement n° 102 rectifié bis, présenté par M. Leconte, est ainsi libellé :

Après l'article 19 B

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

Après l’article L. 571-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est inséré un article L. 571-1-… ainsi rédigé :

« Art. L. 571-1-… - Lorsqu’un étranger condamné à des peines privatives de liberté bénéficie d’un des aménagements de peine prévus aux articles 132-25 à 132-26-3 du code pénal ou d’une libération conditionnelle, ou lorsqu’il est condamné à la peine prévue à l’article 131-4-1 du même code, la mise à exécution des mesures d’éloignement prévues au livre V du présent code est suspendue jusqu’à la fin de la mesure. »

Cet amendement n'est pas soutenu.

(Non modifié)

Lorsqu’un sursis simple a été révoqué de plein droit par une condamnation prononcée antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi, l’article 735 du code de procédure pénale demeure applicable tant que la peine résultant de la révocation n’a pas été totalement ramenée à exécution.

Toutefois, lorsqu’une juridiction de l’application des peines est saisie de l’octroi d’une des mesures prévues aux articles 712-6 et 712-7 du même code, elle est compétente pour statuer sur la demande de dispense de révocation du sursis simple. Elle statue alors dans les conditions prévues au même article 712-6.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 115, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Après les mots :

du code de procédure pénale

insérer les mots :

dans sa rédaction antérieure à celle résultant du II de l'article 6 de la présente loi

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

L’article 735 du code de procédure pénale permet à un détenu dont le sursis a été automatiquement révoqué de demander, après sa condamnation, à être dispensé de cette révocation. Il convient de prévoir que cet article continue de s’appliquer dans sa rédaction actuelle aux personnes dont le sursis a été révoqué de plein droit par une condamnation prononcée antérieurement à l’entrée en vigueur de la présente loi.

C’est un peu technique, …

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Avis favorable, madame la présidente.

L'amendement est adopté.

L'article 19 est adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 86, présenté par Mmes Cukierman et Assassi, M. Favier et les membres du groupe communiste républicain et citoyen, est ainsi libellé :

Après l’article 19

Insérer un article additionnel ainsi rédigé :

I. – L'article 706-54 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Le premier alinéa est ainsi modifié :

a) Aux première et seconde phrases, après les mots : « des personnes », il est inséré le mot : « majeures » ;

b) Sont ajoutées deux phrases ainsi rédigées :

« Ces empreintes sont effacées sur instruction du procureur de la République agissant soit d'office, soit à la demande de l'intéressé, lorsque leur conservation n'apparaît plus nécessaire compte tenu de la finalité pour laquelle elles sont enregistrées. Lorsqu'il est saisi par l'intéressé, le procureur de la République informe celui-ci de la suite qui a été réservée à sa demande ; s'il n'a pas ordonné l'effacement, cette personne peut saisir à cette fin le juge des libertés et de la détention, dont la décision peut être contestée devant le président de la chambre de l'instruction. » ;

2°Après la référence : « 706-55 », la fin du deuxième alinéa est ainsi rédigée : « ou à l'encontre de laquelle il existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle ait commis l'une des infractions mentionnées à ce même article, peuvent faire l'objet, à la demande du juge d'instruction ou du procureur de la République, d'un rapprochement avec les données incluses au fichier. Elles ne peuvent toutefois y être conservées. Il est fait mention de cette décision au dossier de la procédure. » ;

3° Le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Cet article ne s'applique pas aux infractions commises par des salariés ou agents publics, à l'occasion de conflits du travail ou à l'occasion d'activités syndicales et revendicatives, y compris au cours de manifestations sur la voie publique ou dans des lieux publics. » ;

4° Après le mot : « également », la fin du quatrième alinéa est ainsi rédigée : «, de manière distincte, les empreintes génétiques recueillies à l'occasion des procédures de recherche des causes de la mort ou de recherche des causes d'une disparition prévues par les articles 74, 74-1 et 80-4. » ;

5° Les 1° et 2° sont abrogés.

II. – L'article 706-55 du code de procédure pénale est ainsi modifié :

1° Au 2°, la référence : « 222-18 » est remplacée par la référence : « 222-16 » ;

2° Au 3°, la référence : « 311-1 » est remplacée par la référence : « 311-5 » et les références : « 322-1 et 322-14 » sont remplacées par les références : « 322-5 à 322-11-1 ».

III. – Le III de l'article 706-56 du code de procédure pénale est abrogé.

IV. – Après l'article 16-11 du code civil, il est inséré un article 16-11-… ainsi rédigé :

« Art. 16-11... - Un fichier national, placé sous le contrôle d'un magistrat, est destiné à centraliser les empreintes génétiques recueillies à l'occasion des recherches aux fins d'identification, prévues par l'article 16-11, à l'exception de celles des militaires décédés à l'occasion d'une opération conduite par les forces armées ou les formations rattachées.

« Les empreintes génétiques recueillies dans ce cadre sont effacées sur instruction du procureur de la République, agissant soit d'office, soit à la demande des intéressés, lorsqu'il est mis fin aux recherches d'identification qui ont justifié leur recueil. Les empreintes génétiques des ascendants, descendants et collatéraux des personnes dont l'identification est recherchée ne peuvent être conservées dans le fichier que sous réserve du consentement éclairé, exprès et écrit des intéressés.

« Les empreintes génétiques conservées dans ce fichier ne peuvent être réalisées qu'à partir de segments d'acide désoxyribonucléique non codants, à l'exception du segment correspondant au marqueur du sexe.

« Un décret en Conseil d'État, pris après avis de la commission nationale de l'informatique et des libertés, détermine les modalités d'application du présent article. Ce décret précise notamment la durée de conservation des informations enregistrées. »

La parole est à Mme Cécile Cukierman.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Cet amendement reprend en grande partie le texte de notre proposition de loi visant, notamment, à encadrer le fichage génétique.

Nous souhaitons tout d’abord que soit mise en place une procédure d’effacement des données enregistrées dans le fichier national automatisé des empreintes génétiques, le FNAEG, car leur durée d’enregistrement est actuellement exorbitante : elle peut aller jusqu’à quarante ans ! Nous déplorons que ni l’amnistie ni la réhabilitation n’aient d’effet sur le maintien des données dans ce fichier.

Nous proposons également que les mineurs, les personnes poursuivies pour des faits commis à l’occasion d’activités syndicales et revendicatives, ainsi que les simples suspects ne soient pas inscrits dans ce fichier. Seules les personnes ayant été réellement condamnées devraient effectivement y figurer.

Alors que nous ne cessons de parler de réinsertion et de droit à l’oubli depuis le début de ce débat, il nous semble qu’un certain nombre de situations doivent être prises en compte. Je pense notamment à celle des militants syndicaux, afin que les peines qu’ils encourent ne soient pas aggravées. Nous avons vu notamment lors de l’affaire des cinq de Roanne que le fait de refuser un prélèvement d’ADN pouvait entraîner une condamnation supplémentaire.

J’espère vous avoir convaincue, madame la garde des sceaux et que vous réserverez un sort favorable à notre amendement, n’ayant pas été désagréable à votre égard depuis le début du débat.

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Mais vous ne savez pas l’être !

Nouveaux sourires.

Mêmes mouvements.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Ma chère collègue, la commission a bien sûr compris le sens de votre amendement.

Vous proposez de supprimer la durée de conservation de quarante ans aujourd’hui prévue au profit d’un effacement des données « lorsque leur conservation n’apparaît plus nécessaire ». Or on sait très bien qu’une phrase aussi imprécise peut donner lieu à toutes sortes d’interprétations ; elle pourrait même autoriser une durée de conservation supérieure à quarante ans !

Nous pensons qu’il y a là une véritable question, mais une réflexion plus aboutie est nécessaire afin de concilier à la fois efficacité et droit à l’oubli.

La commission demande donc le retrait de cet amendement. À défaut, elle émettra un avis défavorable.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Madame la sénatrice, je sais que votre groupe est à vos côtés pour soutenir cet amendement. À cet égard, je dois saluer votre constance, tant dans votre action que dans votre argumentation.

Nous avons déjà eu un échange sur cette question, vous vous en souvenez, à l’occasion, pour ne pas dire à la faveur de l’examen d’une proposition de loi qui a connu ensuite une trajectoire un peu chaotique, sinon cahoteuse.

J’ai également eu l’occasion de vous dire, lors d’un débat sur la conservation des scellés, que le Gouvernement a entamé un travail avec le ministère de l’intérieur visant à modifier les conditions d’inscription et d’effacement des informations, ainsi que leur durée de conservation.

Deux décrets sur les conditions d’effacement des données sont pratiquement finalisés, leur publication est imminente. Vous savez en effet que le Conseil constitutionnel a formulé des observations sur ce sujet.

Nous travaillons également sur la limitation de la durée de conservation des informations concernant les mineurs.

En ce qui concerne le FNAEG, mais aussi le TAJ, le traitement d’antécédents judiciaires, je pense qu’il y a lieu de travailler de façon plus collective et plus coordonnée entre nous sur le fond.

Je vous entends donc, mais je vous propose de continuer de travailler sur le sujet et, dans cette attente, de retirer l’amendement.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame Cukierman, l'amendement n° 86 est-il maintenu ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Je vous entends également, madame la garde des sceaux.

Sachez que l’ensemble de notre groupe est effectivement disponible pour travailler.

Je note tout de même que le caractère « imminent » de la publication des décrets est aussi imprécis que certains éléments de notre argumentaire !

Sourires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Je n’ai pas les dates en tête. Je retiens les chiffres, mais pas les dates, sans doute à cause de ma date de naissance !

Nouveaux sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Nous sommes complémentaires !

Sachez aussi que nous sommes là, madame la garde des sceaux, et que nous ne lâcherons rien, sur cette question comme sur d’autres.

Je ne doute pas que ce débat aura une certaine résonance. À cet égard, j’en appelle à l’ensemble des députés faisant partie de la majorité de gauche et je leur demande d’achever l’examen en commission de la proposition de loi visant à encadrer le fichage génétique et à interdire le fichage des personnes poursuivies pour des faits commis à l’occasion d’activités syndicales et revendicatives.

J’invite également le Gouvernement à convaincre les députés de la majorité, comme il sait le faire pour de nombreux textes lorsque certains d’entre eux se rebellent un peu, d’adopter ce texte.

Convaincus que tout cela se fera en bonne intelligence et, surtout, que notre groupe et vos services seront prochainement amenés à travailler ensemble sur ces questions, nous retirons notre amendement, madame la garde des sceaux.

(Non modifié)

I. – Les articles 7 à 10 de la présente loi entrent en vigueur, pour les infractions commises à compter de cette date, le premier jour du sixième mois suivant sa promulgation.

II. – Les articles 16 à 18 de la présente loi entrent en vigueur le premier jour du troisième mois suivant sa promulgation.

Les dispositions des articles 16 et 17 sont mises en œuvre dans un délai d’un an pour les condamnés ayant, au moment de leur entrée en vigueur, déjà accompli au moins le double de la durée de la peine restant à subir.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Je suis saisie de deux amendements faisant l'objet d'une discussion commune.

L'amendement n° 122, présenté par le Gouvernement, est ainsi libellé :

A. - Alinéa 1

Remplacer les mots :

Les articles 7 à 10

par les mots :

Les articles 7, 8, 9 et 10

B. - Compléter cet article par deux paragraphes ainsi rédigés :

III. - L’article 11 bis de la présente loi entre en vigueur le premier jour du sixième mois suivant sa promulgation.

IV. - Hors les cas prévus par les I, II et III du présent article, les dispositions de la présente loi entrent en vigueur un mois après sa promulgation.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

La loi sera promulguée juste avant l’été, ce qui pourrait placer nos juridictions en tort par rapport à la loi nouvelle si elles devaient l’appliquer au beau milieu de la période estivale. Nous demandons donc que l’entrée en application de certaines mesures soit différée d’un mois, de trois mois, ou de six mois, selon les cas.

Il s’agit là de dispositions transitoires et pratiques visant à assurer la mise en œuvre de ce texte dans les meilleures conditions et avec le souci de l’efficacité.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 116, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Alinéa 1

Remplacer les références :

par les références :

7 bis et 7 ter

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

L’amendement n° 116 porte également sur l’entrée en application de la loi.

Je suggère au Gouvernement de retirer son amendement au profit du mien, car, le Sénat ayant adopté l’article 8 ter, qui fait de la contrainte pénale une peine autonome, il faut préciser qu’elle est d’application immédiate. À défaut, on risque d’inacceptables hiatus. Nous verrons ensuite, après la commission mixte paritaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Madame la garde des sceaux, acceptez-vous de vous rallier à l’amendement n° 116, comme vous y invite M. le rapporteur ?

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Mme Christiane Taubira, garde des sceaux. Rien que ça, monsieur le rapporteur ?

Rires.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Objectivement, le projet de loi pourrait prévoir des décrets d’application, mais, pour ma part, je ne joue jamais de cette corde.

Vous l’avez vu, certains décrets d’application de la loi pénitentiaire faisaient défaut. Nous avons donc travaillé d’arrache-pied pour qu’ils soient tous publiés, ce qui est le cas aujourd'hui.

J’estime que, pour la crédibilité du travail législatif, donc du travail que vous fournissez, mesdames, messieurs les sénateurs, les règles que vous énoncez doivent être applicables. Pour cela, des décrets d’application sont parfois nécessaires. Si l’exécutif s’amuse à jouer la montre sur les décrets d’application, il décrédibilise la loi et le travail des législateurs. Je pourrais le faire, mais je me l’interdis.

Oui, mesdames, messieurs les sénateurs, je pourrais faire traîner les décrets d’application et ainsi m’offrir à moi-même les délais dérogatoires que je vous demande d’insérer dans la loi. Mais je préfère que ce soit vous qui me les accordiez et qu’ils soient clairement inscrits dans la loi. Tel est le sens de ma démarche.

Je vous demande ces délais pour des raisons pratiques. Les conseillers d’insertion et de probation que nous avons recrutés sont en formation. En outre, la constitution des groupes de travail et l’élaboration des outils requièrent des délais. Un mois, trois mois, six mois, ce sont des délais raisonnables.

Je comprends que vous soyez impatients et que vous souhaitiez que la loi soit appliquée immédiatement, mais pour les raisons que j’ai dites, je ne me rallie pas à l’amendement de M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

M. Jean-Pierre Michel, rapporteur. Je suis bien entendu hostile à l’amendement du Gouvernement, car il n’est pas applicable en l’état. Si vous souhaitez plus d’explications, je vais vous en donner, mes chers collègues, mais je vais susciter un frisson dans l’hémicycle !

Exclamations amusées.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Le Sénat a adopté la contrainte pénale comme peine autonome pour toute une série de délits. Or il s’agit d’une peine plus douce. Si elle n’est pas applicable immédiatement, toutes les personnes condamnées à une peine de prison pour ces délits, avec ou sans sursis, seront immédiatement libérées si elles sont en prison, car la peine à laquelle elles auront été condamnées n’existera plus.

Il faut donc prévoir l’application immédiate de la contrainte pénale afin qu’elle puisse se substituer automatiquement aux peines de prison pour les délits concernés.

Telle est la raison pour laquelle je préfère mes dates d’entrée en vigueur à celles que propose le Gouvernement !

L'amendement n'est pas adopté.

L'amendement est adopté.

L'article 20 est adopté.

(Non modifié)

La présente loi est applicable sur l’ensemble du territoire de la République, à l’exception du II de l’article 15, qui n’est pas applicable en Nouvelle-Calédonie et dans les îles Wallis et Futuna.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

L'amendement n° 117, présenté par M. J.P. Michel, au nom de la commission, est ainsi libellé :

Rédiger ainsi cet article :

I. – Les articles 1er à 11 quater, les articles 13 à 14, le I de l’article 15, les articles 15 sexies à 18 ter, les I, II, III et VI de l’article 18 quater, les articles 18 quinquies à 20 sont applicables aux îles Wallis et Futuna, en Polynésie française et en Nouvelle-Calédonie.

II. – Les articles 12 et 12 bis, le II de l’article 15, l’article 15 quinquies et le IV de l’article 18 quater sont applicables en Polynésie française.

III. – Les articles 12, 12 bis et 15 quinquies sont applicables en Nouvelle-Calédonie.

IV. – Le code de la sécurité intérieure est ainsi modifié :

1° Le 3° de l’article L. 155-1 est complété par la référence : « et L. 132-16 » ;

2° L’article L. 155-2 est complété par un 9° ainsi rédigé :

« 9° À l’article L. 132-16, les mots : « ou, le cas échéant, du conseil intercommunal ou métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance, » sont supprimés. » ;

3° Au 3° de l’article L. 156-1, la référence : « et L. 132-14 » est remplacée par les références : «, L. 132-14 et L. 132-16 » ;

4° L’article L. 156-2 est complété par un 11° ainsi rédigé :

« 11° À l’article L. 132-16, les mots : « ou, le cas échéant, du conseil intercommunal ou métropolitain de sécurité et de prévention de la délinquance, » sont supprimés. »

V. – L’article 99 de la loi n° 2009-1436 du 24 novembre 2009 pénitentiaire est ainsi modifié :

1° Au 2° du I, la référence : « de l’article 3 » est remplacée par les références : « des articles 2-1 et 3 » ;

2° Au II, la référence : « 3 » est remplacée par la référence : « 2-1 » ;

3°Après le II, il est inséré un II bis ainsi rédigé :

« II bis. – Pour l’application de l’article 2-1 en Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, le troisième alinéa est ainsi rédigé :

« Des conventions entre l’administration pénitentiaire et les autres services de l’État, les communes, les associations et d’autres personnes publiques ou privées définissent les conditions et modalités d’accès des personnes condamnées aux droits et dispositifs mentionnés au deuxième alinéa en détention. Les autres collectivités territoriales peuvent participer à la conclusion de ces conventions. »

La parole est à M. le rapporteur.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Michel

Il s’agit d’un amendement de coordination, visant à permettre une meilleure application du texte dans les collectivités d’outre-mer.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira, garde des sceaux

Le Gouvernement émet un avis favorable.

L'amendement est adopté.

(Non modifié)

Dans les deux ans suivant la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présente au Parlement un rapport sur son évaluation, en particulier sur la mise en œuvre de la contrainte pénale. –

Adopté.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Avant de mettre aux voix l'ensemble du projet de loi, je donne la parole à M. Yves Détraigne, pour explication de vote.

Debut de section - PermalienPhoto de Yves Détraigne

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, lors de la discussion générale, nous avions clairement affiché notre volonté de nous investir pleinement dans le débat sur cette réforme, sans adopter une posture d’opposition systématique. Nous avons rappelé à plusieurs reprises que nous n’étions pas opposés à la version de la contrainte pénale proposée dans le texte initial du Gouvernement.

Cette position d’ouverture avait cependant ses limites, puisque nous avions également affiché clairement notre opposition à plusieurs des modifications introduites par M. le rapporteur, dont nous saluons une fois de plus la qualité du travail.

Pourtant, nous ne pouvons souscrire à l’idée selon laquelle la justice devrait être au service d’une idéologie. La justice est au service de nos concitoyens, et c’est en fonction de leurs besoins et de ceux de la société que doit être construit notre système pénal. C’est là une règle de bon sens, nous semble-t-il.

Nous entendons les arguments de ceux et de celles qui nous rappellent que l’une des vocations du Sénat est la protection des droits fondamentaux, et donc, à ce titre, la défense de la nécessité des peines. Toujours est-il que la sécurité et la justice sont également des droits fondamentaux et qu’il est aussi de notre devoir de les défendre. L’équilibre du texte sur lequel nous nous apprêtons à nous prononcer n’est donc pas satisfaisant. L’idéologie n’est pas l’ingrédient des bonnes lois, et le présent texte est, d’une certaine manière, une illustration de ce fait.

Malgré le soutien du Gouvernement à notre amendement de suppression, l’article 8 ter a été maintenu. Pour une série de délits, le Sénat a donc voté la suppression de la peine de référence actuellement en vigueur, l’emprisonnement, pour imposer la contrainte pénale, portant ainsi atteinte à la libre appréciation du juge, que ce texte est pourtant censé renforcer.

Le système proposé fait donc disparaître la peine de prison pour plusieurs délits, y compris en cas de récidive. Pour reprendre les mots de Mme la garde des sceaux, cette modification « procède d’une confusion sur l’objectif et le contenu de la peine de contrainte pénale […], complexifie la répression […] et aboutit à un affaiblissement de la répression ».

Nous étions également fermement opposés à la suppression de la rétention de sûreté : nos arguments ont heureusement été entendus et les amendements de suppression de l’article 18 quater A ont été adoptés. Ce régime pose pour l’heure des difficultés de mise en œuvre ; cependant, nous savons bien que certains individus extrêmement dangereux ne sauraient être remis en liberté sans que la puissance publique assure le minimum de sûreté, qui sera garanti à terme par cette disposition. Peut-être faudra-t-il peaufiner son régime dans les années qui viennent ; le débat reste donc ouvert sur ce sujet.

Le présent texte avait pour objet de tirer un trait sur les dispositifs introduits dans notre droit pénal par les précédents gouvernements. Nous avons déjà pu nous exprimer sur ce sujet lors de la discussion générale, mais je rappelle, une fois de plus, que les outils d’individualisation des peines existent déjà et que les peines planchers sont peu utilisées mais ont un important effet dissuasif.

À l’issue de nos débats, nous en restons globalement à la rédaction du texte proposée par la commission des lois sur l’initiative de son rapporteur. Je me garderai bien d’en tirer une quelconque conclusion quant à l’utilité de nos débats en séance publique ; toutefois, je ne peux que regretter que nous aboutissions à un texte qui envoie, sur plusieurs points, un signal de laxisme à nos concitoyens. L’équilibre issu des travaux de l’Assemblée nationale était manifestement plus en phase avec les positions défendues par les sénateurs du groupe UDI-Union Centriste.

Dans ces conditions, madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, comme vous l’aurez sans doute déjà compris, le groupe UDI-UC votera contre le présent projet de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Tasca

Les débats sur ce projet de loi dans notre assemblée n’auront pas toujours été apaisés, mais comment auraient-ils pu l’être complètement sur un tel sujet ?

Quoi qu’il en soit, les membres du groupe socialiste ne partagent absolument pas la vision de leurs collègues de l’opposition sur le texte auquel nous avons abouti.

Certes, il y a encore matière à débattre et, sans doute, à améliorer ce texte. Nous ne pouvons que regretter que le recours à la procédure accélérée n’ait pas laissé du temps au temps, n’ait pas permis de débattre de façon plus posée sur un sujet aussi important, qui est d’ailleurs inscrit dans l’histoire du Sénat. Nombre des questions abordées, telles que le respect de la dignité des personnes en milieu pénitentiaire, la protection des libertés individuelles, l’organisation de la chaîne pénale, relèvent d’un champ de réflexion constamment ouvert dans notre assemblée. Par conséquent, il est normal que l’élaboration de ce texte ait suscité une certaine passion. Je le répète, nous regrettons tous que l’engagement de la procédure accélérée nous ait placés devant une sorte d’ultimatum.

Cela étant, comme je l’ai déjà dit, au terme de ce débat, nous ne partageons pas du tout le jugement sévère porté sur le texte issu des travaux du Sénat par nos collègues de l’opposition et, hors de nos murs, par nombre de députés.

À notre sens, le travail du Sénat a conforté le projet initial de renforcer la lutte contre la récidive et de redonner du sens à la sanction pénale, celui-ci étant souvent perdu de vue du fait des difficultés de notre système pénitentiaire, en particulier, mais aussi, plus généralement, de notre justice, dont on sait que les moyens sont loin d’être à la hauteur de ses missions. À cet égard, nous apprécions, madame la garde des sceaux, le travail que vous avez accompli depuis votre arrivée place Vendôme afin d’améliorer petit à petit, raisonnablement mais de façon très déterminée, les conditions de travail de l’ensemble des acteurs de la justice. Nous vous en sommes reconnaissants.

Le texte auquel nous sommes parvenus, qui soulève un certain nombre de craintes et d’interrogations au Gouvernement et à l’Assemblée nationale, est loin d’être déraisonnable, contrairement à ce que l’on peut entendre dire. Peut-être est-il un peu en avance au regard de l’état actuel de l’opinion publique et des positions adoptées par les différentes forces politiques en conséquence, mais c’est parce qu’il est inspiré par notre réelle préoccupation devant la situation présente en matière de délinquance et de prévention de la récidive.

Mes chers collègues, nous aurions pu opter pour le statu quo, adopter une posture d’extrême prudence. Nous aurions pu ne pas traiter des problèmes qui sont importants à nos yeux, mais, si nous avions fait ce choix, nous nous trouverions toujours aujourd’hui face à un mur, celui auquel toutes les majorités ont été confrontées dans le passé et le seront encore plus demain si l’on ne parvient pas à faire bouger les choses.

Aujourd'hui comme hier, la délinquance est présente dans notre société ; elle inquiète beaucoup et, surtout, elle met en péril les nouvelles générations. En effet, ce sont elles qui ont le plus à souffrir de la situation actuelle de notre justice et de notre système pénitentiaire ! Par conséquent, si nous n’adoptions pas un certain nombre d’avancées en matière de législation pénale, nous manquerions, je le crois, à notre devoir à l’égard des nouvelles générations. De ce point de vue, l’introduction de la contrainte pénale constitue, à l’évidence, une mesure courageuse, que nous vous devons également, madame la garde des sceaux.

Nous avons travaillé, au sein de la commission des lois et du groupe socialiste, pour faire avancer la réflexion. Le texte issu de l’Assemblée nationale n’était pas au-dessus de toute critique, comme en témoigne l’adoption d’un certain nombre d’amendements.

Des désaccords demeurent, entre les différentes composantes de notre assemblée, entre le Sénat et l’Assemblée nationale, avec le Gouvernement. Il nous appartient d’utiliser au mieux le temps qui reste jusqu’à la commission mixte paritaire pour nous entendre sur un certain nombre de points, sans nous figer dans une attitude de déni des évidences et des problèmes.

Madame la garde des sceaux, le groupe socialiste votera le texte tel qu’issu de nos travaux. §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

Madame la présidente, madame le garde des sceaux, chers collègues, je rejoins les propos tenus par Mme Tasca sur l’attachement particulier du Sénat à la protection des libertés. J’ai souvent dit que notre assemblée a un rôle spécifique à jouer dans deux domaines : la défense des collectivités territoriales – nous devrons attendre un peu, si j’ai bien compris, pour nous pencher sur ce dossier ! – et celle des libertés, donc. À cet égard, je pourrais évoquer par exemple la saisine du Conseil constitutionnel par le président Poher sur le sujet de la liberté d’association.

Je regrette moi aussi que la procédure accélérée ait été engagée. Sur des questions de cette nature, qui marquent de manière très profonde la politique pénale, recourir à cette procédure n’est pas, à mon avis, un bon choix. Cela étant, je n’en tiens pas rigueur au Gouvernement, sachant trop bien que son prédécesseur avait commis les mêmes erreurs à cet égard. Je crains que ce qui est vérité lorsque l’on est dans l’opposition ne devienne contre-vérité lorsque l’on passe dans la majorité…

Concernant la qualité de nos débats, pour avoir pris la peine de lire le compte rendu de ceux de l’Assemblée nationale, je ne pense pas que le Sénat ait à rougir. §En effet, si nous n’avons pas les mêmes opinions, si nous nous sommes opposés sur bien des points, nous nous sommes toujours écoutés les uns les autres avec respect, et parfois même nous avons réussi à nous entendre pour améliorer le texte qui nous était soumis.

Les membres du groupe UMP, à une exception près, voteront contre ce projet de loi, pour des raisons qui ont été exprimées avec beaucoup de clarté par Jean-Jacques Hyest, en particulier, tant lors de la discussion générale qu’à l’occasion de la défense des amendements qu’il avait déposés. Il a notamment exprimé la crainte que ce projet de loi n’envoie un message d’indulgence à l’égard des délinquants ou apprentis délinquants, ce qui ne paraît pas opportun au regard des problèmes que nous connaissons.

En ce qui me concerne, je ne voterai pas contre ce projet de loi, pour deux raisons principales.

La première est que la contrainte pénale, innovation qui doit beaucoup à Pierre-Victor Tournier, dont le nom méritait à mon sens d’être prononcé au moins une fois dans cet hémicycle, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-René Lecerf

… est une idée tout à fait intéressante, dont la mise en œuvre, après un large travail d’approfondissement, pourrait peut-être nous permettre de progresser sur le chemin difficile de la lutte contre la récidive, d’obtenir des résultats plus probants, plus visibles que ceux des politiques menées depuis un certain nombre d’années et dont nous avons reconnu avec bonne foi, les uns et les autres, l’insuffisance.

La seconde raison est que je ne peux pas ne pas reconnaître que, sur un certain nombre de points importants, cette réforme n’a pas désavoué la loi pénitentiaire, mais a au contraire tendu à revenir sinon à sa lettre, du moins à son esprit.

Cela étant, je ne voterai pas non plus en faveur de l’adoption de ce projet de loi, parce que la majorité a cédé à la tentation d’aborder un certain nombre de problèmes qui, selon moi, n’avaient pas totalement leur place dans ce débat, qu’il s’agisse de la rétention de sûreté – même si la réponse donnée me convient – ou des tribunaux correctionnels pour mineurs.

L’intitulé initial du texte témoigne de ce mélange des genres : « projet de loi tendant à renforcer l’efficacité des sanctions pénales ». On peut penser ce que l’on veut des tribunaux correctionnels pour mineurs, mais je suis convaincu que leur disparition ne contribuera en rien à renforcer l’efficacité des sanctions pénales.

Debut de section - PermalienPhoto de Cécile Cukierman

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, je déplore à mon tour le recours à la procédure accélérée. En effet, nos débats ont montré que certains points auraient mérité d’être approfondis, ce que le fonctionnement de la commission mixte paritaire ne permettra malheureusement pas, celle-ci ayant plutôt vocation à dégager des compromis.

Je déplore également l’irruption plus ou moins directe du Président de la République dans le débat parlementaire. Au lendemain des travaux de la commission des lois de l’Assemblée nationale, il s’est ainsi permis un rappel à l’ordre, entendant voir préserver l’équilibre du texte gouvernemental. La séparation des pouvoirs chère à Montesquieu est au fondement de notre République : il convient de la respecter.

Votre projet de loi est un texte ambitieux, madame la ministre, qui nous invite à nous interroger sur l’efficacité et l’utilité des peines, quelles qu’elles soient, qu’elles s’accomplissent en milieu fermé ou en milieu ouvert, quelle que soit leur durée, ainsi que sur le travail à mener avec la personne condamnée durant l’exécution de la peine, jusqu’à la sortie et à la réinsertion, afin d’éviter la récidive. C’est une dimension fondamentale.

La contrainte pénale ne concernera que les petits délits du quotidien auxquels chacun d’entre nous peut être confronté. Il s’agira d’interroger le prévenu sur les motivations de son acte, de lui expliquer pourquoi cet acte est interdit et comment obtenir le pardon de la société, plutôt que de le mettre en prison au risque d’en faire un récidiviste qui pourrait glisser progressivement du délit vers le crime.

Ce texte marque une volonté d’apporter des réponses constructives aux maux de notre société. Il nous invite en outre à poursuivre l’évolution nécessaire de notre justice en ce début de XXIe siècle, une justice qui doit toujours être au service des citoyens et de la société, et non, comme cela a trop souvent été le cas ces dernières décennies, constituer le bras armé de la majorité politique en place. Pour ces raisons, madame la garde des sceaux, nous voterons ce projet de loi. §

Debut de section - PermalienPhoto de Vincent Capo-Canellas

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, mes chers collègues, Yves Détraigne ayant déjà exposé très clairement la position de notre groupe, je me contenterai de formuler cinq observations.

Premièrement, il est clair que la prison ne règle pas le problème de la récidive ; il a même été démontré ici, parfois avec talent, qu’elle l’aggravait, malheureusement. Pour autant, la prison reste un mal nécessaire, car la société n’a pas trouvé mieux que la privation de liberté pour manifester sa réprobation face à certains délits graves et sanctionner leurs auteurs.

Deuxièmement, affirmer que la contrainte pénale réglera le problème de la récidive me paraît être une pétition de principe. Cette idée doit être considérée avec beaucoup de prudence.

Troisièmement, en réponse à l’accusation de permissivité, certains ont soutenu que, finalement, la contrainte pénale sera plus efficace que les sanctions actuelles, celles-ci n’étant pas toujours exécutées. Cet argument est compréhensible d’un point de vue tactique, mais sa pertinence devra être évaluée à la lumière des faits… Je noterai au passage, avec un peu de malice, que l’intention initiale des partisans de la contrainte pénale n’était sans doute pas d’instaurer une sanction plus dure que les peines actuelles !

Quatrièmement, il me semble que le problème de fond, c’est que la contrainte pénale n’est pas suffisamment définie dans le texte. De ce fait, elle risque de se révéler ou trop faible ou trop forte, selon la manière dont elle sera mise en œuvre. Cette absence de définition claire pose question ; elle est troublante.

Cinquièmement, je pense que, paradoxalement, l’instauration de la contrainte pénale en tant que mesure alternative à la prison, dans la continuité de la loi pénitentiaire, est sans doute une idée qui peut prospérer, mais dans un autre cadre que celui fixé par le présent texte. Il aurait fallu l’introduire dans le débat public et dans la loi avec davantage de sérénité, en l’établissant comme une alternative à la prison de manière progressive, évaluée et pragmatique. Ce n’est malheureusement pas le cas ici, au contraire.

Je conclus en remerciant le président de la commission, le rapporteur et Mme la garde des sceaux de ces échanges, qu’il faudra poursuivre.

Applaudissements sur les travées de l'UDI -UC et de l'UMP.

Debut de section - PermalienPhoto de Esther Benbassa

Madame la présidente, madame la garde des sceaux, chers collègues, comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, les écologistes approuvent ce projet de loi et le voteront.

Nos travaux en commission et en séance publique ont abouti à un texte qui va peut-être changer l’esprit de la justice, si la contrainte pénale devient une peine à part entière et est expliquée correctement au public. Un effort de pédagogie sur l’intérêt de cette peine pour lutter contre la récidive reste à faire, de manière urgente puisqu’on lit déjà, dans la presse, des articles criant au laxisme. Il faut convaincre nos concitoyens que la prison n’est pas une solution pour les petits délits et qu’il existe d’autres mesures plus pertinentes.

Nous saluons également la suppression programmée des tribunaux correctionnels pour mineurs, même s’il reste encore beaucoup à faire pour ces derniers.

Le projet de loi n’oublie nullement les victimes. Au contraire, il les protège davantage. Il constitue non seulement une réforme pénale, mais aussi une réforme sociétale, visant à resserrer le lien social et à mettre fin à la binarité coupables-victimes.

Nous sommes fiers de ce texte, qui est vraiment de gauche dans la rédaction issue de nos travaux en commission et en séance publique. Il y aura toujours des reproches et des critiques ; c’est inévitable. Nous avions besoin d’un peu d’audace : cette réforme pénale met du baume au cœur. Qui pourra dire désormais que, au Sénat, nous manquons d’ambition et de liberté ?

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Pierre Sueur

Je tiens à saluer l’abnégation de M. Lecerf, qui a exposé la position de son groupe alors qu’il ne la partage pas.

Le recours à la procédure accélérée a été déploré à juste titre. Je partage ce regret, mais je voudrais le tempérer quelque peu. En effet, grâce à l’engagement de Mme la garde des sceaux, ce projet de loi a bénéficié d’une préparation exceptionnelle, et même sans précédent.

Il y a d'abord eu la conférence de consensus, préparée par une trentaine de personnalités très différentes. Cette conférence de consensus restera inscrite dans l’histoire : 2 000 personnes, représentant toutes les professions de la justice, ont été appelées à travailler ensemble dans un climat remarquable. La conférence tenue à l’UNESCO a elle aussi contribué à enclencher un véritable mouvement, qui a permis d’aboutir à l’élaboration d’un texte extrêmement novateur. En effet, il s’écarte de l’idée toute faite selon laquelle la prison serait la référence en matière de peines. Le projet de loi repose sur une vision équilibrée. Puisque nous sommes contre l’impunité, nous sommes pour la diversité des peines, et nous voulons que la contrainte pénale prenne toute sa place.

Madame Cukierman, vous avez évoqué la commission mixte paritaire, en souhaitant qu’elle soit l’occasion d’un approfondissement plutôt que de la recherche d’un simple compromis. Je partage ce vœu. Je tiens à cet égard à saluer le travail de Mme la garde des sceaux et de M. le rapporteur. Ce dernier a veillé, avec beaucoup de vigilance, à ce que l’on respecte l’esprit du projet de loi. Cela nous a valu des critiques et des remarques, mais nous sommes très attachés à cet esprit, ainsi qu’à un certain nombre de principes fondamentaux du droit et de la justice.

Nous espérons de tout cœur parvenir à un accord avec nos collègues députés, sur la base d’un approfondissement du travail effectué dans les deux assemblées : on a assez parlé de ce texte, nous croyons très nécessaire que ses dispositions s’appliquent maintenant rapidement, dans l’intérêt des justiciables et dans celui de la société.

Qu’un tel texte puisse être voté constitue un signal d’espoir, et j’espère de tout cœur, je le redis, que nous parviendrons à maintenir l’esprit et les principes auxquels nous tenons, tout en trouvant un accord avec nos collègues députés. Nous ferons en tout cas tout ce qui est en notre pouvoir pour atteindre cet objectif.

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste . – M. Jean-René Lecerf applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Personne ne demande plus la parole ?...

Je mets aux voix l'ensemble du projet de loi relatif à l’individualisation des peines et à la prévention de la récidive dans le texte de la commission, modifié.

La parole est à Mme la garde des sceaux.

Debut de section - Permalien
Christiane Taubira

Madame la présidente, monsieur le président de la commission des lois, monsieur le rapporteur, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais, sans abuser de votre patience, vous remercier très chaleureusement de la qualité de nos échanges, tant lors de la discussion générale que lors de l’examen des articles. Même la présentation d’une motion de procédure par le groupe UMP a été l’occasion d’aborder des questions de fond tout à fait intéressantes.

Le travail accompli par le Sénat, en commission puis en séance publique, a incontestablement contribué à enrichir ce texte et à renforcer l’efficacité de son dispositif, même si je regrette l’introduction d’une ou deux mesures ! §Les quelques jours qui nous séparent de la commission mixte paritaire vous permettront sans doute d’approfondir votre réflexion sur ces quelques points de désaccord entre nous.

En tout état de cause, vous avez renforcé la colonne vertébrale de ce projet de loi, qui est inspiré par notre souci de consolider le contrat social. Toute l’action du Gouvernement témoigne de cette préoccupation : nous entendons que l’État accomplisse son devoir de protection à l’égard de l’ensemble des citoyens, avec une attention particulière pour les victimes. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’exposer la politique d’aide aux victimes que nous conduisons depuis deux ans.

Nous avons aussi le souci de renforcer le pacte républicain, qui sous-tend les liens nous permettant de vivre ensemble. Or l’acte de délinquance brise ces liens. Il est important de faire en sorte que, au-delà de la punition, l’exécution de la peine contribue à préparer le délinquant à réintégrer le corps social, en le responsabilisant.

Monsieur Lecerf, vous avez eu raison de rendre hommage au travail obstiné accompli par Pierre-Victor Tournier sur la contrainte pénale. Il est bien l’un des artisans de cette réforme. Il n’est pas le seul, de nombreuses personnalités des milieux parlementaire, judiciaire et universitaire ayant apporté leur contribution, mais il occupe incontestablement une place particulière dans la réflexion qui a mené à ce projet de loi.

L’élaboration de ce texte a permis d’établir, de façon lucide et sérieuse, un bilan de la situation et de prendre toute la mesure de la détresse créée par l’acte de délinquance, tant chez la victime que dans la société, qui s’interroge sur les risques pouvant la menacer.

La délinquance ne se résume pas à des statistiques, et même lorsque le nombre d’actes de délinquance diminue, chacun d’entre eux, en faisant une ou plusieurs victimes, blesse la société. Chaque acte de délinquance cause de la souffrance : nous ne devons jamais l’oublier.

Nous nous sommes donné pour objectif d’être efficaces et de prévenir réellement la récidive. En effet, il s’agit non pas seulement de sanctionner plus sévèrement celle-ci, à l’instar de la loi instaurant les peines planchers, mais aussi de créer les conditions pour éviter la commission de nouveaux actes de délinquance.

Le Gouvernement a travaillé avec rigueur à la préparation de ce texte. M. le président de la commission des lois a rappelé l’organisation de la conférence de consensus. Au cours du tour de France que j’ai effectué pour présenter le projet de loi, j’ai rencontré des personnes qui avaient de fortes préventions à l’égard de son contenu. Certaines avaient été, à l’évidence, très fortement endoctrinées sur le prétendu laxisme du texte et sur nos intentions, mais, chaque fois, le dialogue s’est établi, même lorsque nos interlocuteurs étaient très peu ouverts a priori à nos arguments, et, au bout du compte, les positions ont pu évoluer. Notre pays est celui de la raison : son histoire est marquée par la philosophie des Lumières, par l’émancipation de l’individu par la raison.

Dans le passé, des textes ont été élaborés, des politiques publiques ont été mises en place, des mesures ont été prises avec l’ambition tout à fait sincère de lutter contre la récidive. Nous mesurons aujourd’hui l’insuffisance des résultats de ces politiques et de ces dispositifs. Il s’agit non pas de porter des jugements de valeur, car nous n’avons pas de temps ni d’énergie à perdre en ce vain exercice, mais de reconnaître que nous n’avons pas encore réussi à réduire de façon significative la récidive. Telle est la réalité, et le présent texte vise à y remédier.

Bien sûr, on continuera à invoquer, comme un mantra, notre supposé laxisme, mais je crois à la force de la raison dans ce pays : même après les pires égarements, il arrive toujours un moment où nos concitoyens se soumettent à ce que j’ai appelé, après Bertolt Brecht, la « douce violence de la raison ». Par conséquent, je ne doute pas que le mantra que j’évoquais finira pas s’éteindre, parce qu’il n’a pas d’emprise, de consistance, ni surtout de fondement.

En améliorant ce texte avec la hauteur de vues et le sérieux dont vous avez tous fait preuve, vous avez déjà contribué à faire reculer cette croyance erronée. Comme nous y invitait Wittgenstein, luttons contre l’ensorcellement de notre entendement par les moyens du langage !

Applaudissements sur les travées du groupe socialiste, du groupe CRC et du groupe écologiste . – M. Vincent Capo-Canellas applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat que M. le Premier ministre a saisi aujourd’hui même le Conseil constitutionnel, en application du quatrième alinéa de l’article 39 de la Constitution, afin qu’il se prononce sur le respect des règles fixées par la loi organique du 15 avril 2009 pour la présentation du projet de loi relatif à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

M. le président du Conseil constitutionnel a informé le Sénat, le 26 juin 2014, qu’en application de l’article 61-1 de la Constitution, la Cour de cassation a adressé au Conseil constitutionnel une décision de renvoi d’une question prioritaire de constitutionnalité portant sur l’article L. 191-4 du code des assurances (dispositions particulières aux départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle en matière d’assurance générale) (2014-414 QPC).

Le texte de cette décision de renvoi est disponible à la direction de la séance.

Acte est donné de cette communication.

Debut de section - PermalienPhoto de Bariza Khiari

Voici quel sera l’ordre du jour de la prochaine séance publique, précédemment fixée au lundi 30 juin 2014 :

À seize heures :

1. Débat sur le bilan annuel de l’application des lois.

Rapport d’information de M. David Assouline, fait au nom de la commission sénatoriale pour le contrôle de l’application des lois, sur l’application des lois – session parlementaire 2012-2013 (623, 2013-2014).

À vingt et une heures trente :

2. Débat sur la Corse et la réforme territoriale.

Personne ne demande la parole ?…

La séance est levée.

La séance est levée à vingt et une heures dix.