Séance en hémicycle du 12 avril 2023 à 15h00

Résumé de la séance

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Sommaire

La séance

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La séance est ouverte à quinze heures.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Le compte rendu analytique de la précédente séance a été distribué.

Il n’y a pas d’observation ?…

Le procès-verbal est adopté sous les réserves d’usage.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

L’ordre du jour appelle les réponses à des questions d’actualité au Gouvernement.

Madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, je vous rappelle que notre séance est retransmise en direct sur Public Sénat et sur notre site internet.

J’invite chacun à observer au cours de nos échanges l’une des valeurs essentielles du Sénat : le respect, qu’il s’agisse du respect des uns et des autres ou de celui du temps de parole.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Monsieur le président, madame la Première ministre, mesdames, messieurs les ministres, mes chers collègues, « La pire des choses serait de penser que nous, Européens, devrions être suivistes sur [le] sujet [de Taïwan] et nous adapter au rythme américain et à une surréaction chinoise ». Ces propos du Président de la République, à la suite de sa visite d’État en Chine, ont suscité un tollé international à la veille de manœuvres chinoises sans précédent.

Alors que les tensions sont maximales en ce qui concerne l’autonomie de l’île à l’égard de la Chine, nous regrettons ces propos maladroits, voire tout à fait dommageables, du chef de l’État.

En affirmant que l’Europe doit incarner une troisième voie entre les États-Unis et la Chine, il a rendu notre positionnement diplomatique plus flou que jamais et illustré un « en même temps » qui, à l’évidence, n’est pas partagé par l’ensemble des pays européens, certains d’entre eux ayant fait le choix d’un partenariat américain en matière de protection ou de dissuasion.

On peut s’interroger sur l’opportunité d’une telle déclaration à l’heure du conflit en Ukraine. En effet, nombreux sont les pays qui comptent sur la collaboration renforcée entre Bruxelles et Washington pour faire cesser cette guerre. Cette polyphonie ne peut que nous affaiblir !

Madame la Première ministre, ma question est donc double : la France va-t-elle lever toute ambiguïté sur sa position concernant Taïwan ? Et comment l’exécutif entend-il concrètement faire avancer l’idée d’autonomie européenne sans remettre en cause notre partenariat privilégié avec notre allié américain ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, INDEP, RDSE et SER. – M. André Gattolin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Monsieur le sénateur Olivier Cigolotti, je vous prie tout d’abord de bien vouloir excuser l’absence de Mme Catherine Colonna, qui se trouve aux côtés du Président de la République, en visite d’État aux Pays-Bas.

La position de la France concernant la situation en Asie est constante.

L’Union européenne doit défendre ses propres intérêts. C’est légitime, et il ne viendrait à personne l’idée de le contester. Le Président de la République l’a toujours dit : nous ne sommes pas à équidistance de Washington et de Pékin, nous partageons des valeurs. La relation avec Pékin s’inscrit dans un cadre européen très clair depuis 2019 : partenariat, concurrence économique et rivalité systémique. Nous voulons éviter une logique de confrontation bloc contre bloc.

En ce qui concerne Taïwan, nous sommes opposés à toute modification unilatérale du statu quo, a fortiori par la force. C’est une position claire et constante de la France.

Dans le cadre de notre politique d’« une seule Chine », nous avons d’importantes coopérations avec Taïwan dans de nombreux domaines, et nous nous y tenons.

Face aux défis qui se posent dans cette région, les Européens doivent aussi défendre leurs intérêts économiques de manière indépendante. Ils l’ont fait en développant des instruments de défense commerciale, précisément sur l’initiative de la France. C’est aussi le sens du de - risking, qui vise à diversifier nos sources d’approvisionnement.

Au cours de son déplacement, le Président de la République a dit très clairement les choses au président Xi Jinping sur tous les sujets, dans le cadre d’un dialogue exigeant et franc, assez éloigné des polémiques.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Olivier Cigolotti, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Cigolotti

Je vous remercie, monsieur le ministre, de ces éléments. Toutefois, de l’Ukraine à Taïwan, nos alliés ne peuvent que s’interroger sur la stratégie internationale de la France.

J’entends que le Président de la République veuille faire de la souveraineté européenne une priorité. Erreur d’analyse ou faute tactique, peut-être… Ses propos à son retour de Chine restent, pour autant, un magnifique cadeau diplomatique offert au président Xi Jinping.

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes Les Républicains, INDEP, RDSE, SER et CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Ma question s’adresse à Mme la Première ministre. Elle sera particulièrement solennelle. Elle concerne la République, la défense des libertés et des droits.

Le ministre de l’intérieur, M. Darmanin, a menacé de manière à peine voilée la Ligue des droits de l’homme (LDH) de sanctions financières. Il a déclaré, pour être précis : « Je ne connais pas la subvention donnée par l’État, mais ça mérite d’être regardé dans le cadre des actions menées. »

Madame la Première ministre, les choses sont claires, votre ministre de l’intérieur envisageait sans sourciller de remettre en cause les subventions à la LDH, car cette dernière avait exercé un rôle d’observateur et de vérification du respect des libertés et des droits à Sainte-Soline ou sur d’autres théâtres d’affrontements ou de tensions.

Mme la Première ministre fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Ces menaces sont d’une gravité insupportable. Pouvez-vous accepter qu’un ministre de la République envisage de porter atteinte à une association qui est l’honneur de cette dernière ?

La Ligue des droits de l’homme – vous le savez, mais je le rappelle – a été créée pour défendre un innocent victime de l’antisémitisme et de la raison d’État, le capitaine Dreyfus. Elle a étendu d’emblée son action à la défense de tout citoyen victime d’une injustice ou d’une atteinte à ses droits. Dès le début du XXe siècle, seule, elle porta la justice sociale et le droit des travailleurs.

Madame la Première ministre, ne l’oublions pas : à la Libération, un tiers des membres du comité central de la LDH avaient disparu, assassinés, morts en déportation ou fusillés. Victor Basch, son président, fut assassiné en 1944 avec son épouse Ilona par la milice et les nazis.

Tout au long du XXe siècle et jusqu’à nos jours, cette grande association exerça avec vigilance et humanisme le contrôle des excès des pouvoirs publics. Sans elle et d’autres vigies, l’autoritarisme nous guette. Il peut prendre le dessus.

Avec les mille personnalités qui ont déjà signé une tribune publiée ce jour dans L ’ Humanité, je le dis dignement, mais fermement : « Ne touchez pas à la Ligue des droits de l’homme ! »

Je vous demande, madame la Première ministre, d’affirmer, sans ambiguïté, qu’aucune menace ne pèse sur elle. Je vous demande d’affirmer devant le Sénat que vous désavouez les propos de votre ministre de l’intérieur.

Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Madame la présidente Éliane Assassi, depuis plusieurs semaines, certains, à l’Assemblée nationale, au Sénat ou dans des interviews, dénoncent ce qu’ils appellent « une dérive autoritaire ». C’est une accusation tout aussi grave que mensongère.

Notre État de droit et notre République reposent sur des libertés fondamentales.

Ces libertés, nous les défendons et nous les défendrons. Les associations de défense des libertés publiques et des droits de l’homme mènent également ce combat, et je crois que personne ici ne peut contester sérieusement qu’elles ont, dans notre pays, la capacité de prendre position et de s’exprimer librement, pleinement et sans restriction. C’est indispensable, et nous veillerons à ce que cela demeure.

Comme d’autres acteurs associatifs, la Ligue des droits de l’homme joue son rôle en observant, en critiquant et en exigeant des réponses des acteurs publics. Lorsque l’État est mis en cause, nous écoutons et nous le prenons en compte. Je souhaite, comme tous les membres du Gouvernement, que les associations de soutien aux droits de l’homme poursuivent leur action de vigie, d’ailleurs largement financée par l’État et les collectivités.

Il n’est donc pas question de baisser par principe la subvention de telle ou telle association. Mais dialoguer avec ces structures sur leurs actions est aussi une responsabilité, dès lors qu’il s’agit de financement public.

Madame la présidente Assassi, pour en revenir à la Ligue des droits de l’homme, je connais l’histoire de cette grande association.

Pendant longtemps, l’histoire de l’émancipation républicaine et celle de la LDH se sont mêlées. L’universalisme était un terreau commun. Il y a toujours eu des débats exigeants, des confrontations parfois. Sans remonter à l’affaire Dreyfus, je pense à l’engagement de Madeleine Rebérioux ou de Me Henri Leclerc.

M. Éliane Assassi approuve.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Je crois que, au fond, c’est essentiellement à cette histoire collective que les signataires de l’appel au soutien de la LDH figurant à la une de L ’ Humanité ce matin disent leur attachement.

J’ai beaucoup de respect pour ce que la LDH a incarné, mais je ne comprends plus certaines de ses prises de position.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Cette incompréhension n’est pas nouvelle. Elle s’est fait jour dans les ambiguïtés de cette association face à l’islamisme radical et elle s’est confortée depuis quelques mois.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Je rappelle que cette association a attaqué un arrêté interdisant le transport d’armes par destination à Sainte-Soline.

Cette incompréhension est partagée par de nombreux acteurs associatifs et, dans une lettre adressée hier au président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH), le président de la Ligue internationale contre le racisme et l’antisémitisme (Licra) a dénoncé les dérives et la défaillance de la Ligue des droits de l’homme.

Madame la présidente Assassi, la liberté d’expression et la liberté de manifester pacifiquement sont fondamentales en démocratie.

Avec le Gouvernement, avec la grande majorité d’entre vous sur ces travées, je veux rendre hommage aux policiers et aux gendarmes, qui connaissent leur devoir d’exemplarité et assurent l’ordre républicain dans notre pays. Plus de 1 800 ont été blessés depuis le début du mois de janvier.

Debut de section - PermalienPhoto de Thomas Dossus

Et combien de manifestants ont été blessés ?

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Manifester est un droit fondamental.

Debut de section - Permalien
Elisabeth Borne

Mme Élisabeth Borne, Première ministre. Ce n’est pas en excusant des violences qu’on le défend. Au contraire, il doit pouvoir s’exercer dans la sécurité. Aussi, nous continuerons à agir pour protéger ce droit, les manifestants et les Français !

Très bien ! et applaudissements sur les travées des groupes RDPI, INDEP, RDSE, UC et Les Républicains. – Murmures sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Didier Rambaud, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Didier Rambaud

Ma question s’adresse à M. le ministre délégué chargé des comptes publics.

Qu’elles soient fiscales, sociales ou douanières, les fraudes sont une réalité persistante en France. Élément déterminant de notre contrat social, la lutte contre la fraude est un sujet préoccupant, un exemple de cause commune qui doit faire concorde.

Dans un contexte où la maîtrise de nos finances publiques s’impose plus que jamais face aux crises que nous traversons, notre pays doit continuer de lutter contre toutes les fraudes.

Depuis la loi du 28 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude, la France a considérablement progressé en la matière, comme en témoignent les résultats records obtenus en 2021 : près de 11 milliards d’euros ont été recouvrés par le contrôle fiscal. Pensons également à l’amende, elle aussi record, de plus de 1 milliard d’euros, amende payée il y a un an par McDonald’s !

L’année 2022 est également une année significative. Les montants mis en recouvrement après contrôle fiscal ont atteint le niveau inédit de 14, 6 milliards d’euros au total.

Concernant la fraude au recouvrement social, le réseau des Urssaf a plus que doublé le montant des redressements réalisés depuis dix ans, lequel est passé de 320 millions d’euros en 2013 à 788 millions d’euros en 2022.

Quant aux résultats de la douane, ils sont de nouveau historiques pour plusieurs segments de la fraude, comme les contrefaçons ou les trafics de tabacs. Ils devraient être accompagnés, je l’espère, d’un renforcement de nos outils dans la lutte contre la fraude douanière grâce au projet de loi à venir. En la matière, en effet, des progrès peuvent indéniablement être réalisés.

Il y a quatre mois, monsieur le ministre, nous débattions dans cet hémicycle de la lutte contre la fraude et l’évasion fiscales. Depuis lors, un important travail de réflexion, associant les parlementaires de tous les groupes, a été engagé sur votre initiative, l’objectif étant d’aboutir à un plan d’action.

Monsieur le ministre, que compte faire le Gouvernement pour continuer de renforcer notre lutte contre la fraude, sous toutes ses formes ?

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Gabriel Attal, ministre délégué chargé des comptes publics.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Monsieur le sénateur Didier Rambaud, je le dis solennellement devant vous, la lutte contre la fraude n’est pas qu’une question de deniers publics.

C’est aussi, et probablement avant tout, une question de confiance dans l’action publique, de confiance de nos concitoyens, de cette classe moyenne qui a parfois le sentiment de payer trop parce que certains choisissent de ne rien payer du tout.

La lutte contre la fraude est un enjeu autant de finances publiques que de cohésion nationale, et nous devons être implacables pour renforcer la confiance de nos concitoyens à l’égard de l’action publique. Pour leur redonner confiance, il nous faut mettre en avant les résultats importants, inédits, que nous avons obtenus.

Vous l’avez dit, la loi de 2018 a été une étape majeure. L’année dernière a été historique, inédite, en termes de droits mis en recouvrement, en matière de fraude fiscale comme de fraude sociale.

L’autre manière de redonner confiance, c’est de s’attaquer à toutes les fraudes. Je veux que l’on arrête de segmenter les fraudes.

Debut de section - Permalien
Gabriel Attal

Dans certains cas, on a l’impression qu’il n’y aurait que de la fraude fiscale et, dans d’autres, uniquement de la fraude sociale.

Nous devons nous attaquer à toutes les fraudes, qu’elles soient fiscales, sociales ou douanières. Tel est l’objectif du groupe de travail que j’ai mis en place et qui réunit des représentants de la quasi-totalité des groupes politiques de l’Assemblée nationale et du Sénat. Nous nous sommes réunis à plusieurs reprises ces derniers mois. Nous avons beaucoup travaillé, et je présenterai dans les prochaines semaines un plan complet de lutte contre la fraude fiscale, sociale et douanière.

Je précise que je me suis appuyé pour préparer ce plan sur de nombreux travaux sénatoriaux. Je pense à ceux de Nathalie Goulet, du président de la commission des finances Claude Raynal ou du rapporteur général de la commission des finances Jean-François Husson. Un rapport important a été remis ; j’annoncerai notamment un renforcement massif des moyens du Service d’enquêtes judiciaires des finances (SEJF), conformément à la proposition que vous aviez faite. Je pense, enfin, aux travaux du sénateur Éric Bocquet sur ce sujet.

Nous nous retrouverons dans les prochaines semaines pour faire preuve ensemble d’une plus grande fermeté et dégager des moyens plus importants pour lutter contre les fraudes.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI. – MM. Pierre Louault et Alain Cazabonne applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Yan Chantrel, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Madame la Première ministre, à Strasbourg, dans la nuit du 21 au 22 mars dernier, le planning familial du Bas-Rhin a subi l’attaque d’un groupe d’extrême droite antichoix, venu taguer ses locaux de messages contre le droit à l’avortement.

À Saint-Brévin-les-Pins, le 22 mars, le maire a été victime d’un incendie volontaire perpétré par l’extrême droite intégriste et identitaire, qui s’oppose à l’emménagement du centre d’accueil pour demandeurs d’asile dans sa ville.

À Bordeaux, le 23 mars, des identitaires, qui menacent de mort le maire depuis des mois, ont mis feu à la porte de sa mairie.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

À Metz, le 5 avril, le chanteur Bilal Hassani a dû annuler un concert, après avoir reçu des menaces d’un collectif d’extrême droite catholique.

Des groupuscules identitaires, comme Les Remparts à Lyon ou L’Oriflamme à Rennes, multiplient les intimidations et les attaques xénophobes et homophobes.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Partout, on s’inquiète d’une résurgence des violences d’extrême droite.

Le directeur général de la sécurité intérieure déclarait récemment que ces violences constituent la principale menace à laquelle nous sommes confrontés. Ainsi, sept des dix dernières tentatives d’attentats venaient de l’extrême droite.

Madame la Première ministre, le mandat que les Français vous ont donné au soir du second tour de l’élection présidentielle, c’était d’être un rempart contre l’extrême droite.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Yan Chantrel

M. Yan Chantrel . Quand allez-vous enfin prendre la mesure de votre échec et lutter de manière implacable contre la montée de l'extrême droite dans notre pays ?

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

M. Yan Chantrel. Quand allez-vous enfin prendre la mesure de votre échec et lutter de manière implacable contre la montée de l’extrême droite dans notre pays ?

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST. – Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté

Monsieur le sénateur Chantrel, je puis vous assurer de la pleine mobilisation du ministère de l'intérieur et des outre-mer, notamment de nos services de renseignement, pour anticiper et détecter la formation des groupuscules, qu'ils soient d'extrême droite ou d'extrême gauche, qui sont à l'origine de troubles à l'ordre public. Le ministère de l'intérieur fait preuve de la plus grande fermeté en la matière.

Je vous rappelle que nous avons dissous une association d'extrême droite, les Zouaves Paris, dont les membres agissaient de manière extrêmement violente en perpétrant un certain nombre de délits à caractère raciste, antisémite, homophobe, etc.

Je rappelle également que les socialistes ont déposé un projet de résolution visant à traiter la question des violences d'extrême droite, dont nous aurons l'occasion de débattre.

Enfin, nous disposons, grâce à la loi d'août 2021 confortant le respect des principes de la République, de tous les outils pour lutter le plus efficacement possible contre tous ces séparatismes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Monsieur le sénateur Chantrel, je puis vous assurer de la pleine mobilisation du ministère de l’intérieur et des outre-mer, notamment de nos services de renseignement, pour anticiper et détecter la formation des groupuscules, qu’ils soient d’extrême droite ou d’extrême gauche, qui sont à l’origine de troubles à l’ordre public. Le ministère de l’intérieur fait preuve de la plus grande fermeté en la matière.

Je vous rappelle que nous avons dissous une association d’extrême droite, les Zouaves Paris, dont les membres agissaient de manière extrêmement violente en perpétrant un certain nombre de délits à caractère raciste, antisémite, homophobe, etc.

Je rappelle également que les sénateurs socialistes ont déposé un projet de résolution visant à traiter la question des violences d’extrême droite, dont nous aurons l’occasion de débattre.

Enfin, nous disposons, grâce à la loi d’août 2021 confortant le respect des principes de la République, de tous les outils pour lutter le plus efficacement possible contre tous ces séparatismes.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Monsieur le sénateur Chantrel, je puis vous assurer de la pleine mobilisation du ministère de l’intérieur et des outre-mer, notamment de nos services de renseignement, pour anticiper et détecter la formation des groupuscules, qu’ils soient d’extrême droite ou d’extrême gauche, qui sont à l’origine de troubles à l’ordre public. Le ministère de l’intérieur fait preuve de la plus grande fermeté en la matière.

Je vous rappelle que nous avons dissous une association d’extrême droite, les Zouaves Paris, dont les membres agissaient de manière extrêmement violente en perpétrant un certain nombre de délits à caractère raciste, antisémite, homophobe, etc.

Je rappelle également que les socialistes ont déposé un projet de résolution visant à traiter la question des violences d’extrême droite, dont nous aurons l’occasion de débattre.

Enfin, nous disposons, grâce à la loi d’août 2021 confortant le respect des principes de la République, de tous les outils pour lutter le plus efficacement possible contre tous ces séparatismes.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Madame la Première ministre, j'avais espéré que, sur un sujet aussi grave, sur lequel vous avez mandat des Français, vous répondriez vous-même à ma question.

Non seulement votre gouvernement n'est pas un rempart contre l'extrême droite, …

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Madame la Première ministre, j’avais espéré que, sur un sujet aussi grave, sur lequel vous avez mandat des Français, vous répondriez vous-même à ma question.

Non seulement votre gouvernement n’est pas un rempart contre l’extrême droite, …

Debut de section - Permalien
Yan Chantrel

M. Yan Chantrel . … mais les provocations de votre ministre de l'intérieur, dignes d'un régime autoritaire, l'alimentent.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

M. Yan Chantrel. … mais les provocations de votre ministre de l’intérieur, dignes d’un régime autoritaire, l’alimentent.

Debut de section - Permalien
Yan Chantrel

Vous banalisez dangereusement le mot « terrorisme », attaché à une mémoire si douloureuse dans notre pays, pour qualifier des adversaires politiques.

Vous menacez de priver de subvention une association comme la Ligue des droits de l'homme, garante du respect de nos libertés publiques.

Protestations sur les travées du groupe Les Républicains.

Mme la Première ministre fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Vous banalisez dangereusement le mot « terrorisme », attaché à une mémoire si douloureuse dans notre pays, pour qualifier des adversaires politiques.

Vous menacez de priver de subvention une association comme la Ligue des droits de l’homme, garante du respect de nos libertés publiques.

Debut de section - Permalien
Yan Chantrel

Vous n'êtes pas le rempart contre l'extrême droite, vous êtes sa passerelle vers le pouvoir !

Mme la Première ministre fait un signe de dénégation.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Yan Chantrel

Vous n’êtes pas le rempart contre l’extrême droite, vous êtes sa passerelle vers le pouvoir !

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

contamination de l’eau potable par le chlorothalonil

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Chlorothalonil R471811 : la France a découvert ce nom la semaine dernière, après la publication d'un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses).

Lors d'une étude de grande ampleur, l'Anses a trouvé 77 pesticides et résidus dans l'eau traitée. Parmi eux, le chlorothalonil a attiré l'attention des autorités, puisque ses métabolites ont été trouvés dans plus d'un prélèvement sur deux et ont même dépassé la limite de qualité – je précise bien : la limite de qualité – dans plus d'un prélèvement sur trois.

Au total, au moins un tiers de l'eau du robinet et certaines eaux en bouteille seraient non conformes à la réglementation. Et pour cause : les filières de traitement conventionnelles ne parviennent pas à se débarrasser de ce fongicide. Les technologies pour lutter contre ce métabolite sont à la fois coûteuses et énergivores.

Ce fongicide, longtemps utilisé dans de nombreuses cultures, est considéré comme un cancérogène probable depuis 2006. Il est interdit en Europe depuis 2019. Pourtant, alors que l'on sait que certains résidus de pesticides peuvent être présents dans l'environnement plusieurs années après leur interdiction, le chlorotholanil n'avait jamais été recherché dans notre eau potable.

Alors que l'on sait que la molécule provoque des tumeurs rénales chez les souris, les recherches sur la santé humaine demeurent lacunaires. Or celles-ci pourraient justement permettre de rassurer la population, voire, si c'est justifié, d'abaisser le niveau d'exigence sanitaire.

Sur un sujet aussi sensible que l'accès à l'eau potable, dans le contexte de tensions croissantes que nous connaissons sur le partage de la ressource, il nous faut des éléments de réponse précis et des solutions nationales à court et à long terme, sous peine d'aboutir à une fracture de confiance, mais aussi à une fracture territoriale, avec de petits réseaux en zone rurale qui peineraient à investir dans les technologies adaptées.

Comment en sommes-nous arrivés là ? Surtout, quelles mesures sont envisagées pour évaluer les risques sanitaires et dépolluer nos réseaux d'eau ?

Applaudissements sur les travées des groupes RDSE et INDEP.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Chlorothalonil R471811 : la France a découvert ce nom la semaine dernière, après la publication d’un rapport de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses).

Lors d’une étude de grande ampleur, l’Anses a trouvé 77 pesticides et résidus dans l’eau traitée. Parmi eux, le chlorothalonil a attiré l’attention des autorités, puisque ses métabolites ont été trouvés dans plus d’un prélèvement sur deux et ont même dépassé la limite de qualité – je précise bien : la limite de qualité – dans plus d’un prélèvement sur trois.

Au total, au moins un tiers de l’eau du robinet et certaines eaux en bouteille seraient non conformes à la réglementation. Et pour cause : les filières de traitement conventionnelles ne parviennent pas à se débarrasser de ce fongicide. Les technologies pour lutter contre ce métabolite sont à la fois coûteuses et énergivores.

Ce fongicide, longtemps utilisé dans de nombreuses cultures, est considéré comme un cancérogène probable depuis 2006. Il est interdit en Europe depuis 2019. Pourtant, alors que l’on sait que certains résidus de pesticides peuvent être présents dans l’environnement plusieurs années après leur interdiction, le chlorothalonil n’avait jamais été recherché dans notre eau potable.

Alors que l’on sait que la molécule provoque des tumeurs rénales chez les souris, les recherches sur la santé humaine demeurent lacunaires. Or celles-ci pourraient justement permettre de rassurer la population, voire, si c’est justifié, d’abaisser le niveau d’exigence sanitaire.

Sur un sujet aussi sensible que l’accès à l’eau potable, dans le contexte de tensions croissantes que nous connaissons sur le partage de la ressource, il nous faut des éléments de réponse précis et des solutions nationales à court et à long terme, sous peine d’aboutir à une fracture de confiance, mais aussi à une fracture territoriale, avec de petits réseaux en zone rurale qui peineraient à investir dans les technologies adaptées.

Comment en sommes-nous arrivés là ? Surtout, quelles mesures sont envisagées pour évaluer les risques sanitaires et dépolluer nos réseaux d’eau ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé.

Applaudissements sur les travées du groupe RDSE. – Mme Évelyne Perrot applaudit également.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée auprès du ministre de la santé et de la prévention, chargée de l'organisation territoriale et des professions de santé

Madame la sénatrice Guillotin, j'ai eu l'occasion de m'exprimer sur ce sujet hier à l'Assemblée nationale.

Je vous remercie de me donner l'occasion de le redire aujourd'hui devant le Sénat : l'eau est notre bien le plus précieux, et le Gouvernement met évidemment tout en œuvre pour en assurer et surveiller la qualité. Il s'agit d'un enjeu majeur de santé publique. La surveillance de la qualité de l'eau est une préoccupation quotidienne.

C'est bien pour cette raison que, sous l'autorité du ministère de la santé et de la prévention, la direction générale de la santé missionne régulièrement les agences d'expertise françaises pour disposer de connaissances sanitaires sur les pesticides et leurs métabolites. Le but de ces campagnes exploratoires est de disposer des données les plus précises possible pour évaluer les risques sanitaires.

L'Anses, vous l'avez dit, a publié la semaine dernière les principaux résultats de la dernière campagne exploratoire 2020-2022, relative aux polluants émergeant dans l'eau potable. Ce rapport met en évidence une contamination des ressources en eau destinées à la consommation humaine en France métropolitaine par différents métabolites, dont le chlorothalonil, un fongicide interdit en France depuis 2020.

À ce stade, et à date, la campagne exploratoire de l'Anses a mis en évidence des concentrations maximales de 2 microgrammes par litre, la valeur sanitaire transitoire permettant de prévenir d'un risque sanitaire est de 3 microgrammes par litre. Les échantillons prélevés ne présentent donc pas de risque sanitaire à ce stade.

Plusieurs responsables de la production et de la distribution d'eau ont déjà intégré le chlorothalonil et ses métabolites dans leurs plans de surveillance. Le programme de contrôle des agences régionales de santé va progressivement intégrer, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites dans le contrôle sanitaire des eaux pour rendre des résultats fiables.

Ces éléments permettent de poursuivre le travail d'amélioration de la qualité des eaux, en particulier dans les zones de captage, et d'adapter et de différencier nos mesures en fonction des spécificités territoriales, comme l'a annoncé le Président de la République lors de la présentation du plan Eau le 30 mars dernier.

Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement mobilisé. Il suit ce sujet essentiel avec une grande vigilance, car l'eau, c'est la vie, et l'eau de qualité, c'est la santé ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Madame la sénatrice Guillotin, j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet hier à l’Assemblée nationale.

Je vous remercie de me donner l’occasion de le redire aujourd’hui devant le Sénat : l’eau est notre bien le plus précieux, et le Gouvernement met évidemment tout en œuvre pour en assurer et surveiller la qualité. Il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique. La surveillance de la qualité de l’eau est une préoccupation quotidienne.

C’est bien pour cette raison que, sous l’autorité du ministère de la santé et de la prévention, la direction générale de la santé missionne régulièrement les agences d’expertise françaises pour disposer de connaissances sanitaires sur les pesticides et leurs métabolites. Le but de ces campagnes exploratoires est de disposer des données les plus précises possible pour évaluer les risques sanitaires.

L’Anses, vous l’avez dit, a publié la semaine dernière les principaux résultats de la dernière campagne exploratoire 2020-2022, relative aux polluants émergeant dans l’eau potable. Ce rapport met en évidence une contamination des ressources en eau destinées à la consommation humaine en France métropolitaine par différents métabolites, dont le chlorothalonil, un fongicide interdit en France depuis 2020.

À ce stade, et à date, la campagne exploratoire de l’Anses a mis en évidence des concentrations maximales de 2 microgrammes par litre, la valeur sanitaire transitoire permettant de prévenir d’un risque sanitaire est de 3 microgrammes par litre. Les échantillons prélevés ne présentent donc pas de risque sanitaire à ce stade.

Plusieurs responsables de la production et de la distribution d’eau ont déjà intégré le chlorothalonil et ses métabolites dans leurs plans de surveillance. Le programme de contrôle des agences régionales de santé va progressivement intégrer, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites dans le contrôle sanitaire des eaux pour rendre des résultats fiables.

Ces éléments permettent de poursuivre le travail d’amélioration de la qualité des eaux, en particulier dans les zones de captage, et d’adapter et de différencier nos mesures en fonction des spécificités territoriales, comme l’a annoncé le Président de la République lors de la présentation du plan Eau le 30 mars dernier.

Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement mobilisé. Il suit ce sujet essentiel avec une grande vigilance, car l’eau, c’est la vie, et l’eau de qualité, c’est la santé !

Debut de section - Permalien
Agnès Firmin Le Bodo

Madame la sénatrice Guillotin, j’ai eu l’occasion de m’exprimer sur ce sujet hier à l’Assemblée nationale.

Je vous remercie de me donner l’occasion de le redire aujourd’hui devant le Sénat : l’eau est notre bien le plus précieux, et le Gouvernement met évidemment tout en œuvre pour en assurer et surveiller la qualité. Il s’agit d’un enjeu majeur de santé publique. La surveillance de la qualité de l’eau est une préoccupation quotidienne.

C’est bien pour cette raison que, sous l’autorité du ministère de la santé et de la prévention, la direction générale de la santé missionne régulièrement les agences d’expertise françaises pour disposer de connaissances sanitaires sur les pesticides et leurs métabolites. Le but de ces campagnes exploratoires est de disposer des données les plus précises possible pour évaluer les risques sanitaires.

L’Anses, vous l’avez dit, a publié la semaine dernière les principaux résultats de la dernière campagne exploratoire 2020-2022, relative aux polluants émergeant dans l’eau potable. Ce rapport met en évidence une contamination des ressources en eau destinées à la consommation humaine en France métropolitaine par différents métabolites, dont le chlorothalonil, un fongicide interdit en France depuis 2020.

À ce jour, la campagne exploratoire de l’Anses a mis en évidence des concentrations maximales de 2 microgrammes par litre, la valeur sanitaire transitoire permettant de prévenir d’un risque sanitaire est de 3 microgrammes par litre. Les échantillons prélevés ne présentent donc pas de risque sanitaire à ce stade.

Plusieurs responsables de la production et de la distribution d’eau ont déjà intégré le chlorothalonil et ses métabolites dans leurs plans de surveillance. Le programme de contrôle des agences régionales de santé va progressivement intégrer, à partir de 2023, le chlorothalonil et ses métabolites dans le contrôle sanitaire des eaux pour rendre des résultats fiables.

Ces éléments permettent de poursuivre le travail d’amélioration de la qualité des eaux, en particulier dans les zones de captage, et d’adapter et de différencier nos mesures en fonction des spécificités territoriales, comme l’a annoncé le Président de la République lors de la présentation du plan Eau le 30 mars dernier.

Vous le voyez, le Gouvernement est pleinement mobilisé. Il suit ce sujet essentiel avec une grande vigilance, car l’eau, c’est la vie, et l’eau de qualité, c’est la santé !

Debut de section - PermalienPhoto de Véronique Guillotin

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Il est important de différencier le seuil de qualité et le seuil sanitaire. En outre, comme vous l'avez dit, il semble nécessaire aujourd'hui d'investir dans la recherche en santé humaine, afin de rendre les plus précises possible les mesures de la qualité de l'eau, qui est indispensable.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Photo de Gérard Larcher

La parole est à Mme Véronique Guillotin, pour la réplique.

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

Photo de Véronique Guillotin

Je vous remercie de votre réponse, madame la ministre.

Il est important de différencier le seuil de qualité et le seuil sanitaire. En outre, comme vous l’avez dit, il semble nécessaire aujourd’hui d’investir dans la recherche en santé humaine, afin de rendre les plus précises possible les mesures de la qualité de l’eau, qui est indispensable.

pollutions de l’eau

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

La semaine dernière, l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a révélé qu'un tiers de notre eau potable n'était pas conforme à la réglementation.

Le pire selon nous, monsieur le ministre de l'agriculture, c'est que vous mettez en cause le travail scientifique de l'Anses en contestant ses décisions, notamment concernant le retrait du S-métolachlore.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.

M. le ministre de l'agriculture fait un signe de dénégation.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Que répondez-vous à la population inquiète de boire de l'eau du robinet ? Que répondez-vous aux collectivités qui s'interrogent sur les coûts de dépollution ? Que répondez-vous aux agriculteurs qui n'utilisent pas les pesticides et qui ne sont pas responsables de la pollution ?

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

La semaine dernière, l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a révélé qu’un tiers de notre eau potable n’était pas conforme à la réglementation.

Le pire selon nous, monsieur le ministre de l’agriculture, c’est que vous mettez en cause le travail scientifique de l’Anses en contestant ses décisions, notamment concernant le retrait du S-métolachlore.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

M. le ministre de l ’ agriculture fait un signe de dénégation.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Que répondez-vous à la population inquiète de boire de l’eau du robinet ? Que répondez-vous aux collectivités qui s’interrogent sur les coûts de dépollution ? Que répondez-vous aux agriculteurs qui n’utilisent pas les pesticides et qui ne sont pas responsables de la pollution ?

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Monsieur le sénateur Labbé, je vous remercie de votre question, qui me permet d'apporter un certain nombre de précisions

Tout d'abord, à aucun moment, vous pouvez le vérifier dans tous les verbatim de mes propos – nous assistions hier ensemble à une réunion –, je n'ai remis en cause les analyses scientifiques et celles de l'Anses. J'ai simplement posé la question – a-t-on encore le droit d'en poser dans ce pays ? –, alors que notre agriculture s'inscrit dans un cadre européen, de la synchronisation et de la chronologie de nos décisions.

Personne ne remet en cause l'étude de l'Anses sur le S-métolachlore, mais un travail est en cours sur ce sujet à l'échelle européenne. Il y a donc, me semble-t-il, un risque de désynchronisation. Telle est la question que j'ai posée.

Applaudissements sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Ensuite, saluons le travail qui a été réalisé sur les molécules les plus à risques, celles qui sont classées comme cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, les CMR1 : leur utilisation a été réduite de 96 % depuis 2016. C'est là un résultat tangible des différents plans que nous avons mis en œuvre, en particulier le plan Écophyto.

Par ailleurs, nous comptons aller plus loin, pour les raisons qui ont été évoquées à l'instant. Il est nécessaire de réduire l'utilisation des produits phytosanitaires. Vous me trouverez toujours sur ce chemin. La différence entre vous et moi, c'est qu'il me semble que, pour progresser en ce sens, il faut agir en bon ordre et dans le cadre d'une planification.

L'interdiction, je l'ai déjà dit, ne produit pas la solution. Elle produit de la distorsion de concurrence à l'échelon européen. En effet, à l'extérieur de nos frontières européennes, dans le même espace de marché, des producteurs utilisent ces produits, qui sont autorisés chez eux. Nous devons donc travailler en Européens.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le sénateur Labbé, je vous remercie de votre question, qui me permet d’apporter un certain nombre de précisions

Tout d’abord, à aucun moment, vous pouvez le vérifier dans tous les verbatim de mes propos – nous assistions hier ensemble à une réunion –, je n’ai remis en cause les analyses scientifiques et celles de l’Anses. J’ai simplement posé la question – a-t-on encore le droit d’en poser dans ce pays ? –, alors que notre agriculture s’inscrit dans un cadre européen, de la synchronisation et de la chronologie de nos décisions.

Personne ne remet en cause l’étude de l’Anses sur le S-métolachlore, mais un travail est en cours sur ce sujet à l’échelle européenne. Il y a donc, me semble-t-il, un risque de désynchronisation. Telle est la question que j’ai posée.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le sénateur Labbé, je vous remercie de votre question, qui me permet d’apporter un certain nombre de précisions

Tout d’abord, à aucun moment, vous pouvez le vérifier dans tous les verbatim de mes propos – nous assistions hier ensemble à une réunion –, je n’ai remis en cause les analyses scientifiques, notamment celles de l’Anses. J’ai simplement posé la question – a-t-on encore le droit d’en poser dans ce pays ? –, alors que notre agriculture s’inscrit dans un cadre européen, de la synchronisation et de la chronologie de nos décisions.

Personne ne remet en cause l’étude de l’Anses sur le S-métolachlore, mais un travail est en cours sur ce sujet au niveau européen. Il y a donc, me semble-t-il, un risque de désynchronisation. Telle est la question que j’ai posée.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Monsieur le sénateur Labbé, je vous remercie de votre question, qui me permet d’apporter un certain nombre de précisions

Tout d’abord, à aucun moment, vous pouvez le vérifier dans tous les verbatims de mes propos – nous assistions hier ensemble à une réunion –, je n’ai remis en cause les analyses scientifiques, notamment celles de l’Anses. J’ai simplement posé la question – a-t-on encore le droit d’en poser dans ce pays ? –, alors que notre agriculture s’inscrit dans un cadre européen, de la synchronisation et de la chronologie de nos décisions.

Personne ne remet en cause l’étude de l’Anses sur le S-métolachlore, mais un travail est en cours sur ce sujet au niveau européen. Il y a donc, me semble-t-il, un risque de désynchronisation. Telle est la question que j’ai posée.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

De même, nous devons procéder à une planification. Sous l'autorité de la Première ministre, nous avons ainsi décidé d'interdire, filière par filière, molécule après molécule, le recours aux produits qui ne doivent plus être utilisés et d'étudier les solutions de remplacement potentielles. Il faut le faire dans cet ordre, afin que, à chaque interdiction, corresponde une solution.

(Exclamations sur les travées du groupe GEST.) et nous trouverons à l'intérieur de nos frontières des produits ayant été cultivés avec des substances dont nous ne voulons pas !

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Ensuite, saluons le travail qui a été réalisé sur les molécules les plus à risques, celles qui sont classées comme cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, les CMR1 : leur utilisation a été réduite de 96 % depuis 2016. C’est là un résultat tangible des différents plans que nous avons mis en œuvre, en particulier le plan Écophyto.

Par ailleurs, nous comptons aller plus loin, pour les raisons qui ont été évoquées à l’instant. Il est nécessaire de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Vous me trouverez toujours sur ce chemin. La différence entre vous et moi, c’est qu’il me semble que, pour progresser en ce sens, il faut agir en bon ordre et dans le cadre d’une planification.

L’interdiction, je l’ai déjà dit, ne produit pas la solution. Elle produit de la distorsion de concurrence à l’échelon européen. En effet, à l’extérieur de nos frontières européennes, dans le même espace de marché, des producteurs utilisent ces produits, qui sont autorisés chez eux. Nous devons donc travailler en Européens.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Ensuite, saluons le travail qui a été réalisé sur les molécules présentant le plus de risques, celles qui sont classées comme cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques, les CMR1 : leur utilisation a été réduite de 96 % depuis 2016. C’est là un résultat tangible des différents plans que nous avons mis en œuvre, en particulier le plan Écophyto.

Par ailleurs, nous comptons aller plus loin, pour les raisons qui ont été évoquées à l’instant. Il est nécessaire de réduire l’utilisation des produits phytosanitaires. Vous me trouverez toujours sur ce chemin. La différence entre vous et moi, c’est qu’il me semble que, pour progresser en ce sens, il faut agir en bon ordre et dans le cadre d’une planification.

L’interdiction, je l’ai déjà dit, ne produit pas la solution. Elle produit de la distorsion de concurrence à l’échelon européen. En effet, à l’extérieur de nos frontières européennes, dans le même espace de marché, des producteurs utilisent ces produits, qui sont autorisés chez eux. Nous devons donc travailler en Européens.

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Sinon, je vais vous dire ce qui va se passer, monsieur Labbé : nous n'aurons plus d'agriculture §

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

De même, nous devons procéder à une planification. Sous l’autorité de la Première ministre, nous avons ainsi décidé d’interdire, filière par filière, molécule après molécule, le recours aux produits qui ne doivent plus être utilisés et d’étudier les solutions de remplacement potentielles. Il faut le faire dans cet ordre, afin que, à chaque interdiction, corresponde une solution.

(Exclamations sur les travées du groupe GEST.) et nous trouverons à l’intérieur de nos frontières des produits ayant été cultivés avec des substances dont nous ne voulons pas !

Applaudissements sur les travées des groupes RDPI et INDEP, ainsi que sur des travées des groupes RDSE, UC et Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le ministre, lorsqu'il y a urgence, on n'a plus le temps de prendre son temps !

Au lieu de rester sur la défensive, vous auriez pu nous parler de l'étude prospective de l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), intitulée Vers une Europe sans pesticides en 2050 . Cette étude montre que c'est possible, …

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau

Sinon, je vais vous dire ce qui va se passer, monsieur Labbé : nous n’aurons plus d’agriculture §

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

… à condition de définir des trajectoires pour y parvenir sans rupture. Selon les conclusions de cette étude, cette transition nécessite des politiques publiques cohérentes et articulées.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, mon mandat va très bientôt prendre fin. Je me suis donc penché sur mon passé de sénateur. Or la quasi-totalité des questions que j'ai posées au Gouvernement depuis 2011 a concerné la lutte contre les pesticides et leurs méfaits, ainsi que le soutien à l'agriculture biologique, qui n'a pas recours aux pesticides et préserve la biodiversité.

Aujourd'hui, quand on fait le bilan, très peu de choses ont avancé. Les pesticides sont toujours dans la place, sur le sol, dans l'eau et dans l'air. L'agriculture biologique reste un parent pauvre, et cela malgré la succession des ministres de l'agriculture.

Je me dis avec dépit que les ministres passent, mais que la biodiversité et la santé, hélas, trépassent !

Debut de section - PermalienPhoto de Joël Labbé

Monsieur le ministre, lorsqu’il y a urgence, on n’a plus le temps de prendre son temps !

Au lieu de rester sur la défensive, vous auriez pu nous parler de l’étude prospective de l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae), intitulée Vers une Europe sans pesticides en 2050. Cette étude montre que c’est possible, …

Applaudissements prolongés sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et CRCE. – M. Julien Bargeton s'exclame.

Photo de Joël Labbé

… à condition de définir des trajectoires pour y parvenir sans rupture. Selon les conclusions de cette étude, cette transition nécessite des politiques publiques cohérentes et articulées.

Monsieur le ministre, mes chers collègues, mon mandat va très bientôt prendre fin. Je me suis donc penché sur mon passé de sénateur. Or la quasi-totalité des questions que j’ai posées au Gouvernement depuis 2011 a concerné la lutte contre les pesticides et leurs méfaits, ainsi que le soutien à l’agriculture biologique, qui n’a pas recours aux pesticides et préserve la biodiversité.

Aujourd’hui, quand on fait le bilan, très peu de choses ont avancé. Les pesticides sont toujours dans la place, sur le sol, dans l’eau et dans l’air. L’agriculture biologique reste un parent pauvre, et cela malgré la succession des ministres de l’agriculture.

Je me dis avec dépit que les ministres passent, mais que la biodiversité et la santé, hélas, trépassent !

Photo de Gérard Larcher

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Photo de Vanina Paoli-Gagin

Ma question s'adresse à Mme la ministre de la culture.

Le patrimoine culturel immobilier, c'est surtout ce que nos ancêtres ont bâti au cours des siècles – les églises, notamment, qui maillent l'ensemble de notre territoire. Dans nos villes comme dans nos campagnes, ces édifices sont un trait saillant du visage de la France, et ils contribuent à sa tenue et à son rayonnement.

Nous avons le devoir de préserver ces richesses héritées, pour les transmettre aux générations futures, lesquelles, à leur tour, en seront responsables. Cette noble mission de conservateur et de passeur nous incombe aujourd'hui, madame la ministre, et nos communes sont en première ligne, puisqu'elles sont propriétaires d'une grande part des monuments et bâtiments historiques.

Face aux défis protéiformes de la préservation patrimoniale, dont l'ampleur ne cesse d'enfler, les communes peinent à conserver et à valoriser ces trésors. Elles rencontrent également des difficultés à les assurer, madame la ministre, car le secteur privé n'a pas développé les réponses idoines. Les élus locaux, notamment nos maires, se sentent démunis.

Il est urgent d'engager une vaste réflexion sur la préservation du patrimoine communal et la capacité de l'assurer.

Comment le Gouvernement appréhende-t-il la menace qui pèse sur le patrimoine, madame la ministre ? Comment compte-t-il accompagner les communes qui ne parviennent pas à trouver une solution ?

préservation des patrimoines historiques communaux

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Sébastien Meurant et Alain Duffourg applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Ma question s’adresse à Mme la ministre de la culture.

Le patrimoine culturel immobilier, c’est surtout ce que nos ancêtres ont bâti au cours des siècles – les églises, notamment, qui maillent l’ensemble de notre territoire. Dans nos villes comme dans nos campagnes, ces édifices sont un trait saillant du visage de la France, et ils contribuent à sa tenue et à son rayonnement.

Nous avons le devoir de préserver ces richesses héritées, pour les transmettre aux générations futures, lesquelles, à leur tour, en seront responsables. Cette noble mission de conservateur et de passeur nous incombe aujourd’hui, madame la ministre, et nos communes sont en première ligne, puisqu’elles sont propriétaires d’une grande part des monuments et bâtiments historiques.

Face aux défis protéiformes de la préservation patrimoniale, dont l’ampleur ne cesse d’enfler, les communes peinent à conserver et à valoriser ces trésors. Elles rencontrent également des difficultés à les assurer, madame la ministre, car le secteur privé n’a pas développé les réponses idoines. Les élus locaux, notamment nos maires, se sentent démunis.

Il est urgent d’engager une vaste réflexion sur la préservation du patrimoine communal et la capacité de l’assurer.

Comment le Gouvernement appréhende-t-il la menace qui pèse sur le patrimoine, madame la ministre ? Comment compte-t-il accompagner les communes qui ne parviennent pas à trouver une solution ?

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak , ministre de la culture

Madame la sénatrice Paoli-Gagin, j'adhère à chaque mot de votre constat, de même que je partage l'attachement de tous les Français à leur patrimoine, notamment dans les petites communes.

J'étais hier à Conty, dans la Somme. J'ai pu constater l'engagement de l'État et de l'ensemble des collectivités territoriales pour restaurer l'église du XVIe siècle dans cette commune de 1 800 habitants. Nous finançons à hauteur de 40 % ces travaux, dans le cadre du fonds incitatif patrimonial.

Ce nouveau dispositif, qui a été lancé en 2018 et dont j'ai augmenté le budget de 12 % en 2023, permet d'abonder les crédits de l'État quand les régions s'engagent. Depuis 2018, il a permis de financer près de 600 chantiers, dont 77 % sont menés dans des communes de moins de mille habitants. C'est une première réponse.

Nous avons accru ce budget, parce qu'il s'inscrit dans une ambition très forte pour les monuments historiques, avec des crédits globaux sans précédent, qui atteignent presque 470 millions d'euros en 2023, soit 7 % de plus que l'année dernière et, surtout, 40 % de plus que dans le dernier budget du quinquennat de François Hollande. Il s'agit donc d'un investissement massif en faveur des monuments historiques.

De fait, l'État a la responsabilité, depuis la loi de 2004, des monuments protégés comme monuments historiques, inscrits ou classés.

Vous soulevez au travers de votre question l'enjeu du patrimoine non protégé – en effet, pour le patrimoine protégé, nous sommes au rendez-vous, y compris dans les petites communes.

Deux leviers existent. Tout d'abord, il y a les fonds interministériels des préfectures, comme la dotation de soutien à l'investissement local (DSIL) ou la dotation d'équipement des territoires ruraux (DETR). Dans la Somme, ils représentent quelque 4 millions d'euros pour une centaine d'églises. Ensuite, il y a le loto du patrimoine, que nous avons créé. La moitié des sites que ce dispositif permet de préserver sont non protégés.

Évidemment, il faut mener une réflexion, avec l'ensemble des partenaires, la Fondation du patrimoine et les collectivités territoriales, pour aller plus loin. Les enjeux sont immenses. Nous sommes à la tâche !

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – MM. Sébastien Meurant et Alain Duffourg applaudissent également.

MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Rima Abdul-Malak

Madame la sénatrice Paoli-Gagin, j’adhère à chaque mot de votre constat, de même que je partage l’attachement de tous les Français à leur patrimoine, notamment dans les petites communes.

J’étais hier à Conty, dans la Somme. J’ai pu constater l’engagement de l’État et de l’ensemble des collectivités territoriales pour restaurer l’église du XVIe siècle dans cette commune de 1 800 habitants. Nous finançons à hauteur de 40 % ces travaux, dans le cadre du fonds incitatif patrimonial.

Ce nouveau dispositif, qui a été lancé en 2018 et dont j’ai augmenté le budget de 12 % en 2023, permet d’abonder les crédits de l’État quand les régions s’engagent. Depuis 2018, il a permis de financer près de 600 chantiers, dont 77 % sont menés dans des communes de moins de mille habitants. C’est une première réponse.

Nous avons accru ce budget, parce qu’il s’inscrit dans une ambition très forte pour les monuments historiques, avec des crédits globaux sans précédent, qui atteignent presque 470 millions d’euros en 2023, soit 7 % de plus que l’année dernière et, surtout, 40 % de plus que dans le dernier budget du quinquennat de François Hollande. Il s’agit donc d’un investissement massif en faveur des monuments historiques.

De fait, l’État a la responsabilité, depuis la loi de 2004, des monuments protégés comme monuments historiques, inscrits ou classés.

Vous soulevez au travers de votre question l’enjeu du patrimoine non protégé – en effet, pour le patrimoine protégé, nous sommes au rendez-vous, y compris dans les petites communes.

Deux leviers existent. Tout d’abord, il y a les fonds interministériels des préfectures, comme la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL) ou la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Dans la Somme, ils représentent quelque 4 millions d’euros pour une centaine d’églises. Ensuite, il y a le loto du patrimoine, que nous avons créé. La moitié des sites que ce dispositif permet de préserver sont non protégés.

Évidemment, il faut mener une réflexion, avec l’ensemble des partenaires, la Fondation du patrimoine et les collectivités territoriales, pour aller plus loin. Les enjeux sont immenses. Nous sommes à la tâche !

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Je vous remercie, madame la ministre.

On pourrait envisager un fonds d'aide accessible à toutes les communes qui ne sont pas en mesure d'assurer leur patrimoine immobilier. Il viendrait utilement compléter celui qui a été proposé récemment par M. Stéphane Bern et il permettrait de mobiliser concrètement l'État aux côtés des communes, en faveur de ce patrimoine qui ne relève pas de sa compétence.

Nous devons, ensemble, relever le défi de la préservation de ce patrimoine remarquable !

MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP. – Mme Sonia de La Provôté et Mme Laure Darcos applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Vanina Paoli-Gagin, pour la réplique.

Photo de Vanina Paoli-Gagin

Je vous remercie, madame la ministre.

On pourrait envisager un fonds d’aide accessible à toutes les communes qui ne sont pas en mesure d’assurer leur patrimoine immobilier. Il viendrait utilement compléter celui qui a été proposé récemment par M. Stéphane Bern et il permettrait de mobiliser concrètement l’État aux côtés des communes, en faveur de ce patrimoine qui ne relève pas de sa compétence.

Nous devons, ensemble, relever le défi de la préservation de ce patrimoine remarquable !

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains.

reprise de l’entreprise segault

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Après le rachat par l'américain Heico de l'entreprise Exxelia, fleuron français de l'électronique, c'est à présent la PME Segault qui menace de passer sous pavillon américain.

Pour ceux d'entre vous qui ne la connaissent pas, mes chers collègues, je rappelle que cette PME fabrique, entre autres, les pièces de robinetterie de haute technologie qui équipent nos centrales nucléaires et les chaufferies de nos sous-marins nucléaires, ou encore celles de notre porte-avions Charles-de-Gaulle – c'est pourquoi j'associe à ma question M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Indispensable au nucléaire civil comme militaire, Segault entre, à double titre, dans le champ des secteurs stratégiques visés par la réglementation sur le contrôle des investissements étrangers.

Si nous ne pouvons pas envisager que cette entreprise passe sous contrôle américain, monsieur le ministre, c'est parce que le Patriot Act permet au Gouvernement américain de demander l'accès à tout type d'information détenue par une entreprise américaine, quelle que soit sa localisation dans le monde et sans aucune justification.

Ainsi, dans le champ de compétences de Segault, des informations, même partielles, sur la conception de nos infrastructures nucléaires pourraient être transmises sans obstacle juridique. Il y a donc un double enjeu, de souveraineté industrielle et de souveraineté militaire.

Le Président de la République se gargarise aujourd'hui d'avoir gagné la bataille idéologique de l'autonomie stratégique. Chiche ! Il y a là un magnifique cas d'espèce.

Quels outils juridiques et quels moyens financiers allez-vous mobiliser pour que Segault revienne durablement dans le giron français ? Allez-vous activer, monsieur le ministre, le décret de 2014 relatif au contrôle des investissements étrangers ? Allez-vous chercher des acquéreurs nationaux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Sophie Primas, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et CRCE. – MM. Henri Cabanel et Rachid Temal applaudissent également

Vifs applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

Après le rachat par l’américain Heico de l’entreprise Exxelia, fleuron français de l’électronique, c’est à présent la PME Segault qui menace de passer sous pavillon américain.

Pour ceux d’entre vous qui ne la connaissent pas, mes chers collègues, je rappelle que cette PME fabrique, entre autres, les pièces de robinetterie de haute technologie qui équipent nos centrales nucléaires et les chaufferies de nos sous-marins nucléaires, ou encore celles de notre porte-avions Charles-de-Gaulle – c’est pourquoi j’associe à ma question M. Christian Cambon, président de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées.

Indispensable au nucléaire civil comme militaire, Segault entre, à double titre, dans le champ des secteurs stratégiques visés par la réglementation sur le contrôle des investissements étrangers.

Si nous ne pouvons pas envisager que cette entreprise passe sous contrôle américain, monsieur le ministre, c’est parce que le Patriot Act permet au Gouvernement américain de demander l’accès à tout type d’information détenue par une entreprise américaine, quelle que soit sa localisation dans le monde et sans aucune justification.

Ainsi, dans le champ de compétences de Segault, des informations, même partielles, sur la conception de nos infrastructures nucléaires pourraient être transmises sans obstacle juridique. Il y a donc un double enjeu, de souveraineté industrielle et de souveraineté militaire.

Le Président de la République se gargarise aujourd’hui d’avoir gagné la bataille idéologique de l’autonomie stratégique. Chiche ! Il y a là un magnifique cas d’espèce.

Quels outils juridiques et quels moyens financiers allez-vous mobiliser pour que Segault revienne durablement dans le giron français ? Allez-vous activer, monsieur le ministre, le décret de 2014 relatif au contrôle des investissements étrangers ? Allez-vous chercher des acquéreurs nationaux ?

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Madame Sophie Primas, le robinetier français Segault est un fleuron de l'industrie nucléaire française, vous l'avez dit. Il intervient principalement dans la fabrication des sous-marins nucléaires, mais également dans celle des réacteurs nucléaires. C'est donc Roland Lescure qui aurait dû répondre à votre question. Je vous prie d'excuser son absence : il est retenu aux Pays-Bas, où il accompagne le Président de la République.

Segault est actuellement détenu par l'entreprise canadienne Velan. La famille Velan a communiqué récemment sur des discussions poussées qui sont en cours avec un autre grand robinetier américain, Flowserve. Un accord de rachat par cette société des activités de Velan, y compris Segault, pourrait être conclu d'ici à l'été.

Bien sûr, nous sommes particulièrement vigilants, parce que Segault est une entreprise stratégique et parce que les États-Unis, comme vous l'avez rappelé, disposent d'une réglementation particulièrement offensive, qui pourrait menacer la confidentialité et la souveraineté des informations relatives aux technologies développées par Segault.

Cette opération sera évidemment soumise à la procédure de contrôle des investissements étrangers. Le ministère de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, avec le concours du ministère des armées et du ministère de la transition énergétique, statuera sur les risques d'un tel rachat et sur les suites à donner.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et CRCE. – MM. Henri Cabanel et Rachid Temal applaudissent également

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et CRCE. – MM. Henri Cabanel et Rachid Temal applaudissent également .

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé de la transition numérique et des télécommunications.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot

Madame Sophie Primas, le robinetier français Segault est un fleuron de l’industrie nucléaire française, vous l’avez dit. Il intervient principalement dans la fabrication des sous-marins nucléaires, mais également dans celle des réacteurs nucléaires. C’est donc Roland Lescure qui aurait dû répondre à votre question. Je vous prie d’excuser son absence : il est retenu aux Pays-Bas, où il accompagne le Président de la République.

Segault est actuellement détenu par l’entreprise canadienne Velan. La famille Velan a communiqué récemment sur des discussions poussées qui sont en cours avec un autre grand robinetier américain, Flowserve. Un accord de rachat par cette société des activités de Velan, y compris Segault, pourrait être conclu d’ici à l’été.

Bien sûr, nous sommes particulièrement vigilants, parce que Segault est une entreprise stratégique et parce que les États-Unis, comme vous l’avez rappelé, disposent d’une réglementation particulièrement offensive, qui pourrait menacer la confidentialité et la souveraineté des informations relatives aux technologies développées par Segault.

Cette opération sera évidemment soumise à la procédure de contrôle des investissements étrangers. Le ministère de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, avec le concours du ministère des armées et du ministère de la transition énergétique, statuera sur les risques d’un tel rachat et sur les suites à donner.

Debut de section - PermalienPhoto de Sophie Primas

En 2015, le ministre de l'économie a commis l'erreur stratégique de céder Arabelle et ses turbines nucléaires à General Electric dans le cadre du rachat d'Alstom.

Monsieur le ministre, je vous engage à ne pas commettre deux fois la même erreur !

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Très bien ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC, SER et CRCE. – M. Henri Cabanel applaudit également.

Photo de Sophie Primas

En 2015, le ministre de l’économie a commis l’erreur stratégique de céder Arabelle et ses turbines nucléaires à General Electric dans le cadre du rachat d’Alstom.

Monsieur le ministre, je vous engage à ne pas commettre deux fois la même erreur !

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains.

déplacement du président de la république en chine

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 8 janvier 1964 – il y aura bientôt soixante ans – le général de Gaulle, en conseil des ministres, déclarait : « La Chine est là. Vivre comme si elle n'existait pas, c'est être aveugle ». Le 27 janvier suivant, la reconnaissance par la France de la République populaire de Chine était annoncée, dans un environnement international pas forcément plus conciliant que celui que nous connaissons aujourd'hui. Quelle vision !

Le Président de la République rentre de Chine. Nous approuvons ce voyage, qui nous confirme que, finalement, la Chine garde son cap, en fonction de ses seuls intérêts stratégiques.

Dès lors, monsieur le ministre, pourquoi cette déclaration à l'emporte-pièce sur Taïwan ? Entre Europe, Chine et États-Unis, quelle est la stratégie française ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Pascal Allizard, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. André Gattolin applaudit également.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le 8 janvier 1964 – il y aura bientôt soixante ans – le général de Gaulle, en conseil des ministres, déclarait : « La Chine est là. Vivre comme si elle n’existait pas, c’est être aveugle ». Le 27 janvier suivant, la reconnaissance par la France de la République populaire de Chine était annoncée, dans un environnement international pas forcément plus conciliant que celui que nous connaissons aujourd’hui. Quelle vision !

Le Président de la République rentre de Chine. Nous approuvons ce voyage, qui nous confirme que, finalement, la Chine garde son cap, en fonction de ses seuls intérêts stratégiques.

Dès lors, monsieur le ministre, pourquoi cette déclaration à l’emporte-pièce sur Taïwan ? Entre Europe, Chine et États-Unis, quelle est la stratégie française ?

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

Monsieur le sénateur Pascal Allizard, de nouveau, je vous prie d'excuser l'absence de la ministre de l'Europe et des affaires étrangères Catherine Colonna, qui est en déplacement.

En matière diplomatique, j'ai tendance à me référer aux éléments mûrement réfléchis qui me sont fournis.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER. – M. André Gattolin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je vais donc vous les communiquer.

Comme vous l'avez rappelé, le Président de la République a effectué une visite d'État en Chine du 5 au 8 avril dernier. Il était accompagné par la présidente de la Commission européenne.

Cette visite avait plusieurs objectifs.

D'une part, il s'agissait de relancer la relation, en particulier dans le domaine des échanges humains. À ce titre, des accords ont été conclus dans le domaine du développement durable, de la coopération culturelle et de l'économie agroalimentaire et aéronautique.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Monsieur le sénateur Pascal Allizard, de nouveau, je vous prie d’excuser l’absence de la ministre de l’Europe et des affaires étrangères Catherine Colonna, qui est en déplacement.

En matière diplomatique, j’ai tendance à me référer aux éléments mûrement réfléchis qui me sont fournis.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

D'autre part, l'enjeu était d'avoir un dialogue franc sur l'Ukraine. Le Président de la République a fait valoir les positions européennes, a appelé la Chine à s'engager dans la recherche d'une solution et a alerté son homologue chinois sur les conséquences que tout soutien militaire à la Russie aurait sur la relation entre Union européenne et Chine.

Des points de convergence sont ainsi apparus : l'opposition à l'emploi de l'arme nucléaire, le respect du droit international humanitaire et la nécessité de trouver une issue au conflit sur la base du droit international.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je vais donc vous les communiquer.

Comme vous l’avez rappelé, le Président de la République a effectué une visite d’État en Chine du 5 au 8 avril dernier. Il était accompagné par la présidente de la Commission européenne.

Cette visite avait plusieurs objectifs.

D’une part, il s’agissait de relancer la relation, en particulier dans le domaine des échanges humains. À ce titre, des accords ont été conclus dans le domaine du développement durable, de la coopération culturelle et de l’économie agroalimentaire et aéronautique.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Un autre enjeu de ce déplacement était de marquer notre unité européenne. La présence de la présidente de la Commission était un point essentiel pour le Président de la République, qui tenait à montrer que les Européens ont leurs propres intérêts et qu'ils les assument dans un dialogue exigeant avec Pékin.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

D’autre part, l’enjeu était d’avoir un dialogue franc sur l’Ukraine. Le Président de la République a fait valoir les positions européennes, a appelé la Chine à s’engager dans la recherche d’une solution et a alerté son homologue chinois sur les conséquences que tout soutien militaire à la Russie aurait sur la relation entre Union européenne et Chine.

Des points de convergence sont ainsi apparus : l’opposition à l’emploi de l’arme nucléaire, le respect du droit international humanitaire et la nécessité de trouver une issue au conflit sur la base du droit international.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Enfin, monsieur le sénateur, vous connaissez le souhait de la France de travailler à un agenda commun avec la Chine sur les enjeux globaux.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Un autre enjeu de ce déplacement était de marquer notre unité européenne. La présence de la présidente de la Commission était un point essentiel pour le Président de la République, qui tenait à montrer que les Européens ont leurs propres intérêts et qu’ils les assument dans un dialogue exigeant avec Pékin.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Le Président de la République a ainsi souligné la dynamique positive qui prévaut dans le domaine du climat et de la biodiversité. Il a invité la Chine au sommet de juin prochain sur le nouveau pacte financier, et on lui a indiqué qu'elle y serait représentée à haut niveau.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Enfin, monsieur le sénateur, vous connaissez le souhait de la France de travailler à un agenda commun avec la Chine sur les enjeux globaux.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

En ce qui concerne Taïwan, j'ai eu l'occasion de répondre à l'occasion d'une précédente question. J'ai donc souhaité éviter une redite, monsieur le sénateur.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Le Président de la République a ainsi souligné la dynamique positive qui prévaut dans le domaine du climat et de la biodiversité. Il a invité la Chine au sommet de juin prochain sur le nouveau pacte financier, et on lui a indiqué qu’elle y serait représentée à haut niveau.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Allizard

Le rapprochement russo-chinois est un fait géopolitique sur lequel nous n'avons eu aucune prise, monsieur le ministre.

La France qui, je le crois, est fermement attachée au droit, à la liberté de navigation et à l'avenir de l'Indopacifique ne peut rester étrangère à la montée des tensions autour de Taïwan, où les incursions militaires chinoises sont de plus en plus fréquentes et structurées.

Sur les États-Unis, j'avais publié avec plusieurs de mes collègues du Sénat un rapport intitulé, pour illustrer notre relation, Amis, alliés, mais pas alignés. Malgré leurs inélégances australiennes, les Américains demeurent nos alliés ultimes. Dans les faits, nous ne sommes pas capables de soutenir un conflit de haute intensité, et nos partenaires de l'Union européenne le sont encore moins.

Une tentative d'action de vive force sur Taïwan par la Chine, comme celle qui a été perpétrée en Ukraine par la Russie, n'est plus à exclure. L'Armée populaire s'y prépare au quotidien. Nous devons donc rester extrêmement prudents dans toutes nos déclarations.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

En ce qui concerne Taïwan, j’ai eu l’occasion de répondre à l’occasion d’une précédente question. J’ai donc souhaité éviter une redite, monsieur le sénateur.

Applaudissements sur les travées d u groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER. – MM. Julien Bargeton, André Gattolin et Claude Malhuret applaudissent également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Pascal Allizard, pour la réplique.

Photo de Pascal Allizard

Le rapprochement russo-chinois est un fait géopolitique sur lequel nous n’avons eu aucune prise, monsieur le ministre.

La France qui, je le crois, est fermement attachée au droit, à la liberté de navigation et à l’avenir de l’Indopacifique ne peut rester étrangère à la montée des tensions autour de Taïwan, où les incursions militaires chinoises sont de plus en plus fréquentes et structurées.

Sur les États-Unis, j’avais publié avec plusieurs de mes collègues du Sénat un rapport intitulé, pour illustrer notre relation, Amis, alliés, mais pas alignés. Malgré leurs inélégances australiennes, les Américains demeurent nos alliés ultimes. Dans les faits, nous ne sommes pas capables de soutenir un conflit de haute intensité, et nos partenaires de l’Union européenne le sont encore moins.

Une tentative d’action de vive force sur Taïwan par la Chine, comme celle qui a été perpétrée en Ukraine par la Russie, n’est plus à exclure. L’Armée populaire s’y prépare au quotidien. Nous devons donc rester extrêmement prudents dans toutes nos déclarations.

Photo de Jean-Claude Tissot

Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé.

La semaine dernière, le conseil de surveillance du centre hospitalier du Forez a acté la fermeture des urgences de Feurs, dans la Loire.

Les urgences les plus proches sont désormais à Montbrison. Pour des milliers de personnes, c'est à plus de trente minutes de route. Or, comme vous le savez, de délai représente un seuil critique, au-delà duquel la perte de chance est réelle.

À l'inquiétude des patients s'ajoutent les alertes des professionnels du soin. Les pompiers volontaires nous disent ainsi que la longueur des trajets risque non seulement de rendre les employeurs réticents à laisser leurs salariés s'engager, mais aussi de dissuader les volontaires eux-mêmes.

Cette situation n'est pas isolée. Les risques de fermetures de services d'urgences ou de maternités se multiplient : à l'hôpital Sud-Gironde de Langon-La Réole, à l'hôpital de Carpentras, dans les centres hospitaliers de Guingamp et de Carhaix, à l'hôpital de Ruffec en Charente...

Dans tous ces hôpitaux, l'entrée en application de la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite « loi Rist », qui encadre la rémunération de l'intérim médical, a agi comme un détonateur.

Il est certes nécessaire de lutter contre le mercenariat de certains intérimaires, qui grève les budgets hospitaliers, nous l'avons déjà dit dans cet hémicycle. Mais, en ne ciblant que les établissements publics, et sans travail sur l'attractivité de l'hôpital, la mesure ne pouvait qu'entraîner des effets pervers. Nous en voyons aujourd'hui les conséquences. Qu'allez-vous faire pour y remédier, monsieur le ministre ?

Pour Feurs, une solution de substitution proposée par la cheffe des urgences, le docteur Massacrier, permettrait de maintenir une ligne de garde d'urgence jusqu'en juin prochain – solution que j'ai proposée à votre cabinet. Autoriserez-vous cette organisation, monsieur le ministre, afin de maintenir le service ouvert le temps de trouver d'autres solutions ?

Concernant les intérimaires, allez-vous rétablir l'équité de traitement entre établissements publics et privés ? Il est clair que le Ségur n'a pas suffi à redonner de l'attractivité aux carrières médicales hospitalières…

Monsieur le ministre, allez-vous enfin proposer une réforme d'ampleur pour revaloriser les salaires et améliorer les conditions de travail à l'hôpital ? Ou attendrez-vous qu'il y ait encore dix, cinquante ou cent fermetures, comme à Feurs ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER. – MM. Julien Bargeton, André Gattolin et Claude Malhuret applaudissent également.

rémunération des remplaçants infirmiers

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

François Braun, ministre de la santé et de la prévention

Monsieur le sénateur Tissot, je vous remercie d'avoir rappelé le consensus que suscite la mise en application de la loi Rist, notamment de son article 33 sur le plafonnement de l'intérim médical. C'est bien sûr contre les dérives de ce dispositif que nous luttons, et aucunement contre son principe même.

Pourquoi lutter contre ces dérives de l'intérim ? Parce qu'elles menacent notre service public hospitalier en aspirant nos praticiens. Elles risquent, à très court terme, de détruire encore plus de services et encore plus d'établissements.

Cette lutte va de pair avec un travail, que je mène avec les représentants des médecins hospitaliers, sur l'amélioration des conditions de travail à l'hôpital. L'objectif est de faire revenir ceux qui sont partis et de maintenir ceux qui sont toujours en place.

Comme je m'y suis engagé, nous recherchons des solutions territoire par territoire, avec les professionnels de santé, les élus, les représentants des patients et les agences régionales de santé, pour que la continuité des soins soit assurée.

Je me réjouis que des propositions soient formulées pour le cas de Feurs, d'autant que cet établissement est en grande difficulté structurelle depuis plusieurs années, comme vous le savez, avec des fermetures itératives, le plus souvent liées aux dérives de l'intérim médical.

Je me réjouis qu'une solution ait été trouvée pour le site de Montbrison, qui est distant de 20 kilomètres et où les urgences vitales étaient déjà assurées depuis longtemps. S'agissant des autres urgences, nous cherchons une solution locale, plus pérenne.

Vous avez évoqué plusieurs autres établissements. Le service des urgences de Langon est effectivement en difficulté, et nous travaillons sur ce dossier. À Guingamp, le problème porte sur la maternité, mais il est structurel et date, là encore, malheureusement, de plusieurs années.

Nous surveillons au plus près l'ensemble de ces situations, pour adapter les dispositifs territoire par territoire. L'amélioration des conditions de travail à l'hôpital fera l'objet de propositions avant la fin du mois de juin prochain, lors de la remise du rapport que j'ai demandé.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Tissot

Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé.

La semaine dernière, le conseil de surveillance du centre hospitalier du Forez a acté la fermeture des urgences de Feurs, dans la Loire.

Les urgences les plus proches sont désormais à Montbrison. Pour des milliers de personnes, c’est à plus de trente minutes de route. Or, comme vous le savez, de délai représente un seuil critique, au-delà duquel la perte de chance est réelle.

À l’inquiétude des patients s’ajoutent les alertes des professionnels du soin. Les pompiers volontaires nous disent ainsi que la longueur des trajets risque non seulement de rendre les employeurs réticents à laisser leurs salariés s’engager, mais aussi de dissuader les volontaires eux-mêmes.

Cette situation n’est pas isolée. Les risques de fermetures de services d’urgences ou de maternités se multiplient : à l’hôpital Sud-Gironde de Langon-La Réole, à l’hôpital de Carpentras, dans les centres hospitaliers de Guingamp et de Carhaix, à l’hôpital de Ruffec en Charente…

Dans tous ces hôpitaux, l’entrée en application de la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite « loi Rist », qui encadre la rémunération de l’intérim médical, a agi comme un détonateur.

Il est certes nécessaire de lutter contre le mercenariat de certains intérimaires, qui grève les budgets hospitaliers, nous l’avons déjà dit dans cet hémicycle. Mais, en ne ciblant que les établissements publics, et sans travail sur l’attractivité de l’hôpital, la mesure ne pouvait qu’entraîner des effets pervers. Nous en voyons aujourd’hui les conséquences. Qu’allez-vous faire pour y remédier, monsieur le ministre ?

Pour Feurs, une solution de substitution proposée par la cheffe des urgences, le docteur Massacrier, permettrait de maintenir une ligne de garde d’urgence jusqu’en juin prochain – solution que j’ai proposée à votre cabinet. Autoriserez-vous cette organisation, monsieur le ministre, afin de maintenir le service ouvert le temps de trouver d’autres solutions ?

Concernant les intérimaires, allez-vous rétablir l’équité de traitement entre établissements publics et privés ? Il est clair que le Ségur n’a pas suffi à redonner de l’attractivité aux carrières médicales hospitalières…

Monsieur le ministre, allez-vous enfin proposer une réforme d’ampleur pour revaloriser les salaires et améliorer les conditions de travail à l’hôpital ? Ou attendrez-vous qu’il y ait encore dix, cinquante ou cent fermetures, comme à Feurs ?

Photo de Jean-Claude Tissot

Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé.

La semaine dernière, le conseil de surveillance du centre hospitalier du Forez a acté la fermeture des urgences de Feurs, dans la Loire.

Les urgences les plus proches sont désormais à Montbrison. Pour des milliers de personnes, c’est à plus de trente minutes de route. Or, comme vous le savez, de délai représente un seuil critique, au-delà duquel la perte de chance est réelle.

À l’inquiétude des patients s’ajoutent les alertes des professionnels du soin. Les pompiers volontaires nous disent ainsi que la longueur des trajets risque non seulement de rendre les employeurs réticents à laisser leurs salariés s’engager, mais aussi de dissuader les volontaires eux-mêmes.

Cette situation n’est pas isolée. Les risques de fermetures de services d’urgences ou de maternités se multiplient : à l’hôpital Sud-Gironde de Langon-La Réole, à l’hôpital de Carpentras, dans les centres hospitaliers de Guingamp et de Carhaix, à l’hôpital de Ruffec en Charente…

Dans tous ces hôpitaux, l’entrée en application de la loi visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, dite loi Rist, qui encadre la rémunération de l’intérim médical, a agi comme un détonateur.

Il est certes nécessaire de lutter contre le mercenariat de certains intérimaires, qui grève les budgets hospitaliers, nous l’avons déjà dit dans cet hémicycle. Mais, en ne ciblant que les établissements publics, et sans travail sur l’attractivité de l’hôpital, la mesure ne pouvait qu’entraîner des effets pervers. Nous en voyons aujourd’hui les conséquences. Qu’allez-vous faire pour y remédier, monsieur le ministre ?

Pour Feurs, une solution de substitution proposée par la cheffe des urgences, le docteur Massacrier, permettrait de maintenir une ligne de garde d’urgence jusqu’en juin prochain – solution que j’ai proposée à votre cabinet. Autoriserez-vous cette organisation, monsieur le ministre, afin de maintenir le service ouvert le temps de trouver d’autres solutions ?

Concernant les intérimaires, allez-vous rétablir l’équité de traitement entre établissements publics et privés ? Il est clair que le Ségur n’a pas suffi à redonner de l’attractivité aux carrières médicales hospitalières…

Monsieur le ministre, allez-vous enfin proposer une réforme d’ampleur pour revaloriser les salaires et améliorer les conditions de travail à l’hôpital ? Ou attendrez-vous qu’il y ait encore dix, cinquante ou cent fermetures, comme à Feurs ?

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour le groupe Les Républicains.

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

François Braun

Monsieur le sénateur Tissot, je vous remercie d’avoir rappelé le consensus que suscite la mise en application de la loi Rist, notamment de son article 33 sur le plafonnement de l’intérim médical. C’est bien sûr contre les dérives de ce dispositif que nous luttons, et aucunement contre son principe même.

Pourquoi lutter contre ces dérives de l’intérim ? Parce qu’elles menacent notre service public hospitalier en aspirant nos praticiens. Elles risquent, à très court terme, de détruire encore plus de services et encore plus d’établissements.

Cette lutte va de pair avec un travail, que je mène avec les représentants des médecins hospitaliers, sur l’amélioration des conditions de travail à l’hôpital. L’objectif est de faire revenir ceux qui sont partis et de maintenir ceux qui sont toujours en place.

Comme je m’y suis engagé, nous recherchons des solutions territoire par territoire, avec les professionnels de santé, les élus, les représentants des patients et les agences régionales de santé, pour que la continuité des soins soit assurée.

Je me réjouis que des propositions soient formulées pour le cas de Feurs, d’autant que cet établissement est en grande difficulté structurelle depuis plusieurs années, comme vous le savez, avec des fermetures itératives, le plus souvent liées aux dérives de l’intérim médical.

Je me réjouis qu’une solution ait été trouvée pour le site de Montbrison, qui est distant de 20 kilomètres et où les urgences vitales étaient déjà assurées depuis longtemps. S’agissant des autres urgences, nous cherchons une solution locale, plus pérenne.

Vous avez évoqué plusieurs autres établissements. Le service des urgences de Langon est effectivement en difficulté, et nous travaillons sur ce dossier. À Guingamp, le problème porte sur la maternité, mais il est structurel et date, là encore, malheureusement, de plusieurs années.

Nous surveillons au plus près l’ensemble de ces situations, pour adapter les dispositifs territoire par territoire. L’amélioration des conditions de travail à l’hôpital fera l’objet de propositions avant la fin du mois de juin prochain, lors de la remise du rapport que j’ai demandé.

Photo de Chantal Deseyne

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Monsieur le ministre, à partir du 25 avril, la France s'interdit d'exporter ses céréales en dehors de l'Union européenne. En cause, la phosphine, un insecticide considéré comme dangereux par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses), mais pas par nos partenaires européens.

Cet insecticide, utilisé pour la fumigation des cales de bateaux céréaliers, est exigé par les importateurs de cargaisons de blé, notamment dans les pays extraeuropéens, en particulier pour nos marchés en Afrique du Nord et de l'Ouest.

Or l'Anses a décidé, de façon unilatérale, de ne plus permettre l'usage de la phosphine, qui reste pourtant homologuée, en contact direct avec les céréales.

Paradoxalement, les céréales importées en France continueront, elles, à être traitées à la phosphine. En effet, aucune réglementation européenne n'interdit l'utilisation de cet insecticide. C'est un non-sens total !

Comment l'Anses a-t-elle pu édicter une telle règle sans concertation ? A-t-on bien mesuré les conséquences de cette interdiction ? Cette sentence est également dramatique pour les pays du bassin méditerranéen qui dépendent de la France et dont la sécurité alimentaire est menacée par cette décision absurde.

Aussi, monsieur le ministre, j'aimerais connaître les solutions que le Gouvernement peut proposer pour préserver nos exportations de céréales et empêcher les crises alimentaires dans les pays qui dépendent de nos exportations. Envisagez-vous de réautoriser l'usage de la phosphine malgré la décision de l'Anses ? §

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

exportation des céréales françaises

Debut de section - Permalien
Marc Fesneau, ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. J'y ai déjà répondu hier à l'Assemblée nationale, mais ce n'est pas un reproche : vous me donnez l'occasion d'apporter des précisions supplémentaires.

La France fera en sorte de continuer à exporter ses céréales après le 25 avril 2023, car elle souhaite conserver sa capacité d'exportation.

Premièrement, c'est l'un des éléments de la puissance de notre pays que d'être capable de livrer des céréales à l'extérieur de nos frontières. Cela participe de notre politique étrangère.

Deuxièmement, il y va de la sécurité alimentaire mondiale, au moment où la guerre menée par M. Poutine en Ukraine a déstabilisé les marchés mondiaux, avec des fluctuations de prix et même des difficultés d'accès aux céréales. Nous devons avoir des marchés fluides, et tous les pays qui en ont besoin doivent avoir accès aux céréales.

Troisièmement, le droit européen permet, si une molécule est prohibée au niveau national, de déroger à cette interdiction dès lors que ce produit est encore autorisé à l'échelon européen, sous réserve que le pays importateur le demande.

Nous travaillons donc avec l'Anses, pour faire en sorte que nous puissions légalement continuer à exporter après le 25 avril.

La souveraineté alimentaire des pays tiers nous importe, en effet, d'autant que l'on voit bien combien l'arme alimentaire est utilisée par certains États, notamment la Russie. Nous n'emprunterons pas cette voie et, comme d'autres pays européens, comme les Allemands, les Bulgares ou les Roumains, nous allons nous mettre en situation de continuer à exporter des céréales.

Ce n'est pas seulement l'intérêt de la France. C'est celui de la sécurité alimentaire mondiale.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Monsieur le ministre, à partir du 25 avril, la France s’interdit d’exporter ses céréales en dehors de l’Union européenne. En cause, la phosphine, un insecticide considéré comme dangereux par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), mais pas par nos partenaires européens.

Cet insecticide, utilisé pour la fumigation des cales de bateaux céréaliers, est exigé par les importateurs de cargaisons de blé, notamment dans les pays extraeuropéens, en particulier pour nos marchés en Afrique du Nord et de l’Ouest.

Or l’Anses a décidé, de façon unilatérale, de ne plus permettre l’usage de la phosphine, qui reste pourtant homologuée, en contact direct avec les céréales.

Paradoxalement, les céréales importées en France continueront, elles, à être traitées à la phosphine. En effet, aucune réglementation européenne n’interdit l’utilisation de cet insecticide. C’est un non-sens total !

Comment l’Anses a-t-elle pu édicter une telle règle sans concertation ? A-t-on bien mesuré les conséquences de cette interdiction ? Cette sentence est également dramatique pour les pays du bassin méditerranéen qui dépendent de la France et dont la sécurité alimentaire est menacée par cette décision absurde.

Aussi, monsieur le ministre, j’aimerais connaître les solutions que le Gouvernement peut proposer pour préserver nos exportations de céréales et empêcher les crises alimentaires dans les pays qui dépendent de nos exportations. Envisagez-vous de réautoriser l’usage de la phosphine malgré la décision de l’Anses ?

Debut de section - PermalienPhoto de Chantal Deseyne

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui lève quelques inquiétudes pour la filière, et de votre engagement à sortir de cette situation ubuesque.

Cependant, les acteurs du secteur ont besoin d'une assise juridique solide et pérenne. Nous souhaitons donc de votre part un engagement écrit.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées des groupes UC et INDEP.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Marc Fesneau

Madame la sénatrice, je vous remercie de votre question. J’y ai déjà répondu hier à l’Assemblée nationale, mais ce n’est pas un reproche : vous me donnez l’occasion d’apporter des précisions supplémentaires.

La France fera en sorte de continuer à exporter ses céréales après le 25 avril 2023, car elle souhaite conserver sa capacité d’exportation.

Premièrement, c’est l’un des éléments de la puissance de notre pays que d’être capable de livrer des céréales à l’extérieur de nos frontières. Cela participe de notre politique étrangère.

Deuxièmement, il y va de la sécurité alimentaire mondiale, au moment où la guerre menée par M. Poutine en Ukraine a déstabilisé les marchés mondiaux, avec des fluctuations de prix et même des difficultés d’accès aux céréales. Nous devons avoir des marchés fluides, et tous les pays qui en ont besoin doivent avoir accès aux céréales.

Troisièmement, le droit européen permet, si une molécule est prohibée au niveau national, de déroger à cette interdiction dès lors que ce produit est encore autorisé à l’échelon européen, sous réserve que le pays importateur le demande.

Nous travaillons donc avec l’Anses, pour faire en sorte que nous puissions légalement continuer à exporter après le 25 avril.

La souveraineté alimentaire des pays tiers nous importe, en effet, d’autant que l’on voit bien combien l’arme alimentaire est utilisée par certains États, notamment la Russie. Nous n’emprunterons pas cette voie et, comme d’autres pays européens, comme les Allemands, les Bulgares ou les Roumains, nous allons nous mettre en situation de continuer à exporter des céréales.

Ce n’est pas seulement l’intérêt de la France. C’est celui de la sécurité alimentaire mondiale.

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour le groupe Union Centriste.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.

Photo de Gérard Larcher

La parole est à Mme Chantal Deseyne, pour la réplique.

Photo de Jean-Marie Mizzon

J'associe à ma question mon collègue Stéphane Demilly, sénateur de la Somme.

De nombreuses communes se trouvent confrontées à une situation bien compliquée du fait de l'automatisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

Photo de Chantal Deseyne

Monsieur le ministre, je vous remercie de votre réponse, qui lève quelques inquiétudes pour la filière, et de votre engagement à sortir de cette situation ubuesque.

Cependant, les acteurs du secteur ont besoin d’une assise juridique solide et pérenne. Nous souhaitons donc de votre part un engagement écrit.

Photo de Jean-Marie Mizzon

Cette modification, présentée comme technique à l'origine, aboutit en effet à les priver de la récupération de la TVA sur des travaux lourds dits « d'agencement et d'aménagement de terrains », ce qui exclut nombre de chantiers, comme des terrains de football, des aires de jeu ou encore des pistes cyclables.

Surtout, cette réglementation comporte des éléments de complexité supplémentaires, avec, au sein d'un même projet, des dépenses qui restent éligibles et d'autres qui ne le sont plus, alors qu'un projet est un tout.

Aussi, ma première question est simple : envisagez-vous de revenir sur cette réglementation très mal vécue par les collectivités locales ou, à tout le moins, d'intégrer la part de TVA dans l'assiette subventionnable ?

Ma seconde question est plus simple encore et porte sur un sujet connexe : trouvez-vous normal que les communes apprennent seulement à la fin du mois de mars, voire au début du mois d'avril, le montant de dotation générale de fonctionnement (DGF) qui leur est alloué par l'État ?

fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée et dotations aux collectivités

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains . – M. Christian Bilhac applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour le groupe Union Centriste.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

Applaudissements sur les travées du groupe UC.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer et du ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, chargée des collectivités territoriales et de la ruralité

Monsieur le sénateur Mizzon, vous avez raison, l'automatisation du FCTVA conduit à une redéfinition de l'assiette des dépenses ouvrant droit à compensation.

Dans la collecte des données comptables nécessaires au calcul automatique des attributions, certaines dépenses ont été exclues de l'assiette.

Parmi elles figurent des dépenses engagées par les collectivités, telles que celles que vous avez citées. D'autres dépenses qui n'étaient pas éligibles le sont désormais. C'est le cas, par exemple, des investissements réalisés par des collectivités pour des biens immobiliers qu'elles mettent à la disposition de tiers.

Toutefois, ces arbitrages ont été réalisés en leur temps en accord avec les associations d'élus locaux et le Comité des finances locales (CFL).

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

J’associe à ma question mon collègue Stéphane Demilly, sénateur de la Somme.

De nombreuses communes se trouvent confrontées à une situation bien compliquée du fait de l’automatisation du fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée (FCTVA).

Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

Cette modification, présentée comme technique à l’origine, aboutit en effet à les priver de la récupération de la TVA sur des travaux lourds dits « d’agencement et d’aménagement de terrains », ce qui exclut nombre de chantiers, comme des terrains de football, des aires de jeu ou encore des pistes cyclables.

Surtout, cette réglementation comporte des éléments de complexité supplémentaires, avec, au sein d’un même projet, des dépenses qui restent éligibles et d’autres qui ne le sont plus, alors qu’un projet est un tout.

Aussi, ma première question est simple : envisagez-vous de revenir sur cette réglementation très mal vécue par les collectivités locales ou, à tout le moins, d’intégrer la part de TVA dans l’assiette subventionnable ?

Ma seconde question est plus simple encore et porte sur un sujet connexe : trouvez-vous normal que les communes apprennent seulement à la fin du mois de mars, voire au début du mois d’avril, le montant de dotation générale de fonctionnement (DGF) qui leur est alloué par l’État ?

Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains. – M. Christian Bilhac applaudit également.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Si, mesdames, messieurs les sénateurs, le CFL a bien été associé.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des collectivités territoriales et de la ruralité.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Monsieur le sénateur Mizzon, vous avez raison, l’automatisation du FCTVA conduit à une redéfinition de l’assiette des dépenses ouvrant droit à compensation.

Dans la collecte des données comptables nécessaires au calcul automatique des attributions, certaines dépenses ont été exclues de l’assiette.

Parmi elles figurent des dépenses engagées par les collectivités, telles que celles que vous avez citées. D’autres dépenses qui n’étaient pas éligibles le sont désormais. C’est le cas, par exemple, des investissements réalisés par des collectivités pour des biens immobiliers qu’elles mettent à la disposition de tiers.

Toutefois, ces arbitrages ont été réalisés en leur temps en accord avec les associations d’élus locaux et le Comité des finances locales (CFL).

Protestations sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Les incidences financières de l'automatisation de la gestion du FCTVA doivent être considérées de manière globale. L'automatisation de la gestion du FCTVA constitue une mesure favorable aux collectivités, puisqu'elle permet la disparition du non-recours, qui concernait jusqu'à présent les plus petites d'entre elles.

Pour autant, une évaluation sera conduite à la mi-2023.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Mme Dominique Faure, ministre déléguée. Si, mesdames, messieurs les sénateurs, le CFL a bien été associé.

Ah ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Mêmes mouvements.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

La question des dépenses d'aménagement de terrain sera examinée de très près, monsieur le sénateur, dans la suite des débats que nous avons menés sur le projet de loi de finances pour 2023.

Quant aux délais de mise en ligne des résultats de la répartition de la dotation globale de fonctionnement, ils sont très souvent respectés.

Cette année, la mise en ligne a été réalisée le 31 mars, ce qui a laissé quinze jours aux collectivités pour l'inscrire dans leur budget. Oui, c'est très court, mais, pour l'avoir vécue, je veux dire que cette mise en ligne au 31 mars a nécessité un travail très important des agents de la direction générale des collectivités locales (DGCL), que je tiens à remercier.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Ce délai permet de s'assurer de la fiabilité des calculs réalisés.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Les incidences financières de l’automatisation de la gestion du FCTVA doivent être considérées de manière globale. L’automatisation de la gestion du FCTVA constitue une mesure favorable aux collectivités, puisqu’elle permet la disparition du non-recours, qui concernait jusqu’à présent les plus petites d’entre elles.

Pour autant, une évaluation sera conduite à la mi-2023.

Ah ! sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Il s'agit en effet de répartir selon des règles, reposant sur un grand nombre de critères, près de 27 milliards d'euros.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

La question des dépenses d’aménagement de terrain sera examinée de très près, monsieur le sénateur, dans la suite des débats que nous avons menés sur le projet de loi de finances pour 2023.

Quant aux délais de mise en ligne des résultats de la répartition de la dotation globale de fonctionnement, ils sont très souvent respectés.

Cette année, la mise en ligne a été réalisée le 31 mars, ce qui a laissé quinze jours aux collectivités pour l’inscrire dans leur budget. Oui, c’est très court, mais, pour l’avoir vécue, je veux dire que cette mise en ligne au 31 mars a nécessité un travail très important des agents de la direction générale des collectivités locales (DGCL), que je tiens à remercier.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Je m'engage cependant à demander à la DGCL, pour l'année 2024, de raccourcir le délai de la répartition et de prévoir sa publication une semaine plus tôt, soit le 23 mars. Je vous en tiendrai informés.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Ce délai permet de s’assurer de la fiabilité des calculs réalisés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, votre réponse m'a fait penser à ce que disait André Maurois : « Le difficile, dans une discussion, ce n'est pas de défendre son opinion, c'est de la connaître ».

Sourires. – Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Il s’agit en effet de répartir selon des règles, reposant sur un grand nombre de critères, près de 27 milliards d’euros.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

C'est un peu le problème de ce gouvernement : on ne peut pas vouloir construire 5 000 équipements sportifs un jour et, le lendemain, sortir de la dépense éligible les dépenses qui les financent.

Applaudissements sur les mêmes travées.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure

Je m’engage cependant à demander à la DGCL, pour l’année 2024, de raccourcir le délai de la répartition et de prévoir sa publication une semaine plus tôt, soit le 23 mars. Je vous en tiendrai informés.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

On ne peut pas avoir des mots très forts pour défendre les vertus de la simplification et ériger des barrières supplémentaires en obligeant les porteurs de projets à décortiquer ceux-ci pour récupérer un peu de TVA.

D'où tenez-vous, madame la ministre, que les réalités doivent se plier aux règles administratives et comptables ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. Jean-Marie Mizzon, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Dominique Faure, ministre déléguée

Je n'ai pas dit cela !

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Marie Mizzon. Madame la ministre, votre réponse m’a fait penser à ce que disait André Maurois : « Le difficile, dans une discussion, ce n’est pas de défendre son opinion, c’est de la connaître ».

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Marie Mizzon . Mettez les choses dans l'ordre et, vous verrez, tout ira mieux !

Sourires. – Applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains.

Bravo ! et vifs applaudissements sur les travées des groupes UC et Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Marie Mizzon

C’est un peu le problème de ce gouvernement : on ne peut pas vouloir construire 5 000 équipements sportifs un jour et, le lendemain, sortir de la dépense éligible les dépenses qui les financent.

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains.

Photo de Jean-Marie Mizzon

On ne peut pas avoir des mots très forts pour défendre les vertus de la simplification et ériger des barrières supplémentaires en obligeant les porteurs de projets à décortiquer ceux-ci pour récupérer un peu de TVA.

D’où tenez-vous, madame la ministre, que les réalités doivent se plier aux règles administratives et comptables ?

Dominique Faure

Je n’ai pas dit cela !

Photo de François Bonhomme

Ma question s'adresse à M. le ministre de l'intérieur et des outre-mer.

Monsieur le ministre, à la suite des violences qui se sont produites à Sainte-Soline, vous avez déclaré la semaine dernière, devant la commission des lois du Sénat, être prêt à examiner la subvention annuelle versée par l'État à la Ligue des droits de l'Homme.

Aussitôt, nous avons assisté à une véritable levée de boucliers. Au nom d'un passé glorieux, cette association bénéficie de toutes les largesses de l'État, quoi qu'elle fasse, et s'exonère de toute explication sur la façon dont elle utilise ces moyens.

Il est étonnant que cette association sollicite de l'argent public et prospère sur cette base tout en s'opposant systématiquement à l'État et en le combattant, particulièrement dans sa difficile mission de maintien de l'ordre public, qui répond à un droit fondamental s'il en est.

Il y a, dans cette instrumentalisation systématique du droit, une dérive qui interroge.

Comment l'État peut-il soutenir et subventionner des associations faisant profession de jeter l'opprobre sur les forces de l'ordre, particulièrement lorsque celles-ci font face à des groupes violents et armés qui cherchent à tuer nos policiers et nos gendarmes ?

Depuis votre déclaration, monsieur le ministre, avez-vous pu examiner la subvention de l'État versée à cette association ?

Photo de Jean-Marie Mizzon

M. Jean-Marie Mizzon. Mettez les choses dans l’ordre et, vous verrez, tout ira mieux !

Photo de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d'État chargée de la citoyenneté.

subventions de la ligue des droits de l’homme

Debut de section - Permalien
Sonia Backès, secrétaire d'État auprès du ministre de l'intérieur et des outre-mer, chargée de la citoyenneté

Monsieur le sénateur Bonhomme, permettez-moi tout d'abord d'excuser l'absence de Gérald Darmanin, qui accompagne le Président de la République aux Pays-Bas.

Permettez-moi aussi de rappeler le contexte de la prise de parole du ministre, que vous avez interrogé, dans le cadre d'une audition en commission, sur la possibilité de supprimer les subventions versées à cette association.

La Ligue des droits de l'Homme est une association ancienne et respectable, dont le nom a été associé, c'est vrai, à des combats qui font honneur à la République.

Pour autant, certaines de ses prises de position récentes interrogent, et ce n'est pas lui faire injure que de le reconnaître. Je citerai par exemple son absence au procès des attentats de Charlie Hebdo en 2020, ou encore sa décision, difficile à comprendre, de défendre le Collectif contre l'islamophobie en France (CCIF) au moment où le Gouvernement a pris la décision de le dissoudre du fait de ses menées séparatistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à M. François Bonhomme, pour le groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

On peut aussi regretter que la Ligue des droits de l'Homme colporte des rumeurs, dont il est désormais certain qu'elles étaient infondées, visant à faire croire que les gendarmes auraient empêché les secours d'intervenir à Sainte-Soline.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Monsieur le ministre, à la suite des violences qui se sont produites à Sainte-Soline, vous avez déclaré la semaine dernière, devant la commission des lois du Sénat, être prêt à examiner la subvention annuelle versée par l’État à la Ligue des droits de l’Homme.

Aussitôt, nous avons assisté à une véritable levée de boucliers. Au nom d’un passé glorieux, cette association bénéficie de toutes les largesses de l’État, quoi qu’elle fasse, et s’exonère de toute explication sur la façon dont elle utilise ces moyens.

Il est étonnant que cette association sollicite de l’argent public et prospère sur cette base tout en s’opposant systématiquement à l’État et en le combattant, particulièrement dans sa difficile mission de maintien de l’ordre public, qui répond à un droit fondamental s’il en est.

Il y a, dans cette instrumentalisation systématique du droit, une dérive qui interroge.

Comment l’État peut-il soutenir et subventionner des associations faisant profession de jeter l’opprobre sur les forces de l’ordre, particulièrement lorsque celles-ci font face à des groupes violents et armés qui cherchent à tuer nos policiers et nos gendarmes ?

Depuis votre déclaration, monsieur le ministre, avez-vous pu examiner la subvention de l’État versée à cette association ?

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Ma question s’adresse à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

Monsieur le ministre, à la suite des violences qui se sont produites à Sainte-Soline, vous avez déclaré la semaine dernière, devant la commission des lois du Sénat, être prêt à examiner la subvention annuelle versée par l’État à la Ligue des droits de l’homme.

Aussitôt, nous avons assisté à une véritable levée de boucliers. Au nom d’un passé glorieux, cette association bénéficie de toutes les largesses de l’État, quoi qu’elle fasse, et s’exonère de toute explication sur la façon dont elle utilise ces moyens.

Il est étonnant que cette association sollicite de l’argent public et prospère sur cette base tout en s’opposant systématiquement à l’État et en le combattant, particulièrement dans sa difficile mission de maintien de l’ordre public, qui répond à un droit fondamental s’il en est.

Il y a, dans cette instrumentalisation systématique du droit, une dérive qui interroge.

Comment l’État peut-il soutenir et subventionner des associations faisant profession de jeter l’opprobre sur les forces de l’ordre, particulièrement lorsque celles-ci font face à des groupes violents et armés qui cherchent à tuer nos policiers et nos gendarmes ?

Depuis votre déclaration, monsieur le ministre, avez-vous pu examiner la subvention de l’État versée à cette association ?

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Le ministre de l'intérieur et des outre-mer a simplement voulu rappeler que la Ligue des droits de l'Homme bénéficie d'un soutien important de la part des pouvoirs publics.

Vous l'avez dit, nous parlons d'argent public, c'est-à-dire des impôts de nos concitoyens. En l'occurrence, il s'agit de 276 000 euros de l'État et de 233 000 euros des collectivités territoriales.

Il est donc légitime que l'État s'assure que les actions conduites par une association bénéficiant de financements publics sont en phase avec l'objectif qu'elle déclare, ainsi qu'avec nos valeurs républicaines.

C'est ce que le ministre de l'intérieur et des outre-mer vous a indiqué en réponse à votre question en commission, et c'est ce que la Première ministre vous a confirmé à l'instant.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.

MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Monsieur le sénateur Bonhomme, permettez-moi tout d’abord d’excuser l’absence de Gérald Darmanin, qui accompagne le Président de la République aux Pays-Bas.

Permettez-moi aussi de rappeler le contexte de la prise de parole du ministre, que vous avez interrogé, dans le cadre d’une audition en commission, sur la possibilité de supprimer les subventions versées à cette association.

La Ligue des droits de l’Homme est une association ancienne et respectable, dont le nom a été associé, c’est vrai, à des combats qui font honneur à la République.

Pour autant, certaines de ses prises de position récentes interrogent, et ce n’est pas lui faire injure que de le reconnaître. Je citerai par exemple son absence au procès des attentats de Charlie Hebdo en 2020, ou encore sa décision, difficile à comprendre, de défendre le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) au moment où le Gouvernement a pris la décision de le dissoudre du fait de ses menées séparatistes.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Monsieur le sénateur Bonhomme, je vous prie tout d’abord d’excuser l’absence de Gérald Darmanin, qui accompagne le Président de la République aux Pays-Bas.

Permettez-moi de rappeler le contexte de la prise de parole du ministre, que vous avez interrogé, dans le cadre d’une audition en commission, sur la possibilité de supprimer les subventions versées à cette association.

La Ligue des droits de l’homme est une association ancienne et respectable, dont le nom a été associé, c’est vrai, à des combats qui font honneur à la République.

Pour autant, certaines de ses prises de position récentes interrogent, et ce n’est pas lui faire injure que de le reconnaître. Je citerai par exemple son absence au procès des attentats de Charlie Hebdo en 2020, ou encore sa décision, difficile à comprendre, de défendre le Collectif contre l’islamophobie en France (CCIF) au moment où le Gouvernement a pris la décision de le dissoudre du fait de ses menées séparatistes.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Et Marlène Schiappa, combien a-t-elle donné à ses amis ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

On peut aussi regretter que la Ligue des droits de l’Homme colporte des rumeurs, dont il est désormais certain qu’elles étaient infondées, visant à faire croire que les gendarmes auraient empêché les secours d’intervenir à Sainte-Soline.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

On peut aussi regretter que la Ligue des droits de l’homme colporte des rumeurs, dont il est désormais certain qu’elles étaient infondées, visant à faire croire que les gendarmes auraient empêché les secours d’intervenir à Sainte-Soline.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

M. François Bonhomme. M. Darmanin est en vadrouille et Mme Schiappa, secrétaire d'État chargée notamment de la vie associative, s'exprime partout, sauf au Sénat…

Sourires.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Le ministre de l’intérieur et des outre-mer a simplement voulu rappeler que la Ligue des droits de l’Homme bénéficie d’un soutien important de la part des pouvoirs publics.

Vous l’avez dit, nous parlons d’argent public, c’est-à-dire des impôts de nos concitoyens. En l’occurrence, il s’agit de 276 000 euros de l’État et de 233 000 euros des collectivités territoriales.

Il est donc légitime que l’État s’assure que les actions conduites par une association bénéficiant de financements publics sont en phase avec l’objectif qu’elle déclare, ainsi qu’avec nos valeurs républicaines.

C’est ce que le ministre de l’intérieur et des outre-mer vous a indiqué en réponse à votre question en commission, et c’est ce que la Première ministre vous a confirmé à l’instant.

Debut de section - Permalien
Sonia Backès

Le ministre de l’intérieur et des outre-mer a simplement voulu rappeler que la Ligue des droits de l’homme bénéficie d’un soutien important de la part des pouvoirs publics.

Vous l’avez dit, nous parlons d’argent public, c’est-à-dire des impôts de nos concitoyens. En l’occurrence, il s’agit de 276 000 euros de l’État et de 233 000 euros des collectivités territoriales.

Il est donc légitime que l’État s’assure que les actions conduites par une association bénéficiant de financements publics sont en phase avec l’objectif qu’elle déclare, ainsi qu’avec nos valeurs républicaines.

C’est ce que le ministre de l’intérieur et des outre-mer vous a indiqué en réponse à votre question en commission, et c’est ce que Mme la Première ministre vous a confirmé à l’instant.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Certes, la Première ministre s'est prononcée tout à l'heure, mais je regrette sa réponse, car, comme l'a dit à l'instant Mme Backès, la Ligue des droits de l'Homme sélectionne soigneusement ses indignations : elle a défendu les militants du CCIF après l'assassinat de Samuel Paty, elle a défendu les thèses de l'extrême gauche, dont le mot d'ordre est « La police tue ! », et elle met toute son énergie à multiplier les recours juridictionnels contre nombre de décisions de l'État, y compris en matière de flux migratoires.

MM. François Patriat et Thani Mohamed Soilihi applaudissent.

Protestations sur les travées du groupe GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de David Assouline

Et Marlène Schiappa, combien a-t-elle donné à ses amis ?

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. François Bonhomme, pour la réplique.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

À Sainte-Soline, elle a déposé un recours contre une décision visant à lutter contre le transport d'armes et elle a diffusé de fausses informations laissant entendre que le Samu aurait été délibérément empêché de porter secours…

Tout cela mériterait vraiment que l'on y regarde de plus près. Ce que je reproche au Gouvernement, c'est sa faiblesse.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

M. François Bonhomme. M. Darmanin est en vadrouille et Mme Schiappa, secrétaire d’État chargée notamment de la vie associative, s’exprime partout, sauf au Sénat…

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Certes, la Première ministre s’est prononcée tout à l’heure, mais je regrette sa réponse, car, comme l’a dit à l’instant Mme Backès, la Ligue des droits de l’Homme sélectionne soigneusement ses indignations : elle a défendu les militants du CCIF après l’assassinat de Samuel Paty, elle a défendu les thèses de l’extrême gauche, dont le mot d’ordre est « La police tue ! », et elle met toute son énergie à multiplier les recours juridictionnels contre nombre de décisions de l’État, y compris en matière de flux migratoires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

Certes, la Première ministre s’est prononcée tout à l’heure, mais je regrette sa réponse, car, comme l’a dit à l’instant Mme Backès, la Ligue des droits de l’homme sélectionne soigneusement ses indignations : elle a défendu les militants du CCIF après l’assassinat de Samuel Paty, elle a défendu les thèses de l’extrême gauche, dont le mot d’ordre est « La police tue ! », et elle met toute son énergie à multiplier les recours juridictionnels contre nombre de décisions de l’État, y compris en matière de flux migratoires.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

M. François Bonhomme. Vous avez dit, madame la secrétaire d'État, que le Gouvernement s'interdisait toute mesure restrictive. Mais sa mission, c'est de contrôler l'argent public !

Protestations sur les travées du groupe GEST.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC. – Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Photo de François Bonhomme

À Sainte-Soline, elle a déposé un recours contre une décision visant à lutter contre le transport d’armes et elle a diffusé de fausses informations laissant entendre que le Samu aurait été délibérément empêché de porter secours…

Tout cela mériterait vraiment que l’on y regarde de plus près. Ce que je reproche au Gouvernement, c’est sa faiblesse.

Photo de Annie Le Houerou

Mme Annie Le Houerou . Madame la Première ministre, vous avez fait adopter la réforme des retraites en tordant l'esprit de notre Constitution.

Photo de Annie Le Houerou

Pour une réforme à tout prix, vous avez utilisé un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, c'est-à-dire l'article 47-1 de la Constitution, puis l'article 44.3 pour éviter un 49.3 par lequel, malgré tout, vous avez fini !

Photo de François Bonhomme

M. François Bonhomme. Vous avez dit, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement s’interdisait toute mesure restrictive. Mais sa mission, c’est de contrôler l’argent public !

Photo de Annie Le Houerou

Cette méthode fait fi de l'expression démocratique et de ce qu'ont exprimé les électeurs dans les urnes pour éviter le pire. Ils espéraient que le Président de la République saurait en tenir compte. Or, en retour, après onze journées de très forte mobilisation dans une grande responsabilité intersyndicale, il reste sourd.

Comme lui, votre gouvernement prend une attitude arrogante. Votre autosatisfaction montre combien vous êtes déconnectée des réalités que vivent nos concitoyens.

Vous méprisez l'intersyndicale, qui est unie contre cette réforme.

Vous méprisez l'opposition parlementaire, notamment au Sénat, en utilisant tous les artifices, afin de brider le débat.

Vous méprisez les millions de Françaises et de Français qui manifestent leur opposition depuis des mois dans la rue, et cela malgré l'inflation qui grève le budget de leur famille.

Face à la colère qui s'exprime, vous restez insensible aux revendications légitimes. Ainsi, vous affaiblissez nos institutions, notre démocratie et notre modèle social. Cette réforme laissera des séquelles profondes dans notre pays.

Ces dernières semaines, vous avez usé de tous les stratagèmes, jusqu'aux magazines people, pour faire diversion et tenter de tourner la page de cette séquence. Mais les Français ne sont pas dupes : ils n'oublieront pas. Votre réforme est inutile et injuste, c'est une régression sociale. Madame la Première ministre, vous êtes dans l'impasse.

Comment entendez-vous gouverner après avoir méprisé à ce point les corps intermédiaires ? Comment entendez-vous apaiser les tensions et renouer le dialogue social ? Je ne vois qu'une issue : le retrait de la réforme des retraites.

réforme des retraites

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Annie Le Houerou, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, il m'est arrivé de me trouver dans des situations plus confortables pour répondre à une question d'un sénateur ou d'une sénatrice, puisque nous siégions tous deux comme députés au sein du groupe socialiste de l'Assemblée nationale en 2014

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Mme Annie Le Houerou . Madame la Première ministre, vous avez fait adopter la réforme des retraites en tordant l’esprit de notre Constitution.

Oh ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

En effet, lorsqu'il a fallu réformer les retraites en 2014, j'étais là, comme vous, pour voter la réforme.

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Pour une réforme à tout prix, vous avez utilisé un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale, c’est-à-dire l’article 47-1 de la Constitution, puis l’article 44.3 pour éviter un 49.3 par lequel, malgré tout, vous avez fini !

Protestations sur les travées du groupe SER.

Marques de lassitude sur les travées des groupes Les Républicains et UC.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

Je voudrais reprendre les mots que vous utilisiez alors dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, où il se trouve que nous étions intervenus l'un après l'autre : « Nous avons besoin d'une réforme responsable qui tient compte de la réalité que constitue l'allongement de l'espérance de vie. »

Debut de section - PermalienPhoto de Annie Le Houerou

Cette méthode fait fi de l’expression démocratique et de ce qu’ont exprimé les électeurs dans les urnes pour éviter le pire. Ils espéraient que le Président de la République saurait en tenir compte. Or, en retour, après onze journées de très forte mobilisation dans une grande responsabilité intersyndicale, il reste sourd.

Comme lui, votre gouvernement prend une attitude arrogante. Votre autosatisfaction montre combien vous êtes déconnectée des réalités que vivent nos concitoyens.

Vous méprisez l’intersyndicale, qui est unie contre cette réforme.

Vous méprisez l’opposition parlementaire, notamment au Sénat, en utilisant tous les artifices, afin de brider le débat.

Vous méprisez les millions de Françaises et de Français qui manifestent leur opposition depuis des mois dans la rue, et cela malgré l’inflation qui grève le budget de leur famille.

Face à la colère qui s’exprime, vous restez insensible aux revendications légitimes. Ainsi, vous affaiblissez nos institutions, notre démocratie et notre modèle social. Cette réforme laissera des séquelles profondes dans notre pays.

Ces dernières semaines, vous avez usé de tous les stratagèmes, jusqu’aux magazines people, pour faire diversion et tenter de tourner la page de cette séquence. Mais les Français ne sont pas dupes : ils n’oublieront pas. Votre réforme est inutile et injuste, c’est une régression sociale. Madame la Première ministre, vous êtes dans l’impasse.

Comment entendez-vous gouverner après avoir méprisé à ce point les corps intermédiaires ? Comment entendez-vous apaiser les tensions et renouer le dialogue social ? Je ne vois qu’une issue : le retrait de la réforme des retraites.

Nouvelles protestations sur les mêmes travées.

Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement

Depuis dix ans, madame la sénatrice, l'espérance de vie s'est encore allongée et l'équilibre du système des retraites – un principe que vous souteniez à l'époque comme une valeur de gauche ! – est aujourd'hui en danger.

De la même manière que, il y a dix ans, nous avons vous et moi voté l'allongement de la durée de cotisation à 43 années, aujourd'hui, nous assumons nos responsabilités

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre délégué chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement.

Brouhaha sur les travées des groupes SER, GEST et CRCE.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

M. Olivier Véran, ministre délégué auprès de la Première ministre, chargé du renouveau démocratique, porte-parole du Gouvernement. Madame la sénatrice Annie Le Houerou, il m’est arrivé de me trouver dans des situations plus confortables pour répondre à une question d’un sénateur ou d’une sénatrice, puisque nous siégions tous deux comme députés au sein du groupe socialiste de l’Assemblée nationale en 2014

Ah ! sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

M. Olivier Véran, ministre délégué. On peut se jeter à la figure tous les mots fleuris qui existent, on peut mettre en avant toutes les arguties juridiques ou légistiques, le fait est, madame la sénatrice, que vous ne faisiez pas partie des frondeurs à l'époque !

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

En effet, lorsqu’il a fallu réformer les retraites en 2014, j’étais là, comme vous, pour voter la réforme.

Protestations sur les travées du groupe SER.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Vous avez voté comme moi et vous vous emportiez avec moi contre celles et ceux qui bloquaient – vous savez donc ce que c'est de bloquer le Parlement ! – et qui, parce qu'ils étaient en désaccord sur le fond, voulaient empêcher le débat de se tenir.

Je suis sûr que, au fond de vous-même, madame la sénatrice, vous pouvez vous retrouver avec nous sur une ligne responsable. Vous pouvez reconnaître que ce sont les conditions du débat qui nous ont conduits à recourir au 49.3 pour terminer ce chemin démocratique.

Debut de section - Permalien
Olivier Véran

Je voudrais reprendre les mots que vous utilisiez alors dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale, où il se trouve que nous étions intervenus l’un après l’autre : « Nous avons besoin d’une réforme responsable qui tient compte de la réalité que constitue l’allongement de l’espérance de vie. »

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et Les Républicains. – M. Daniel Chasseing applaudit également.

Nouvelles protestations sur les mêmes travées.

Olivier Véran

Depuis dix ans, madame la sénatrice, l’espérance de vie s’est encore allongée et l’équilibre du système des retraites – un principe que vous souteniez à l’époque comme une valeur de gauche ! – est aujourd’hui en danger.

De la même manière que, il y a dix ans, nous avons vous et moi voté l’allongement de la durée de cotisation à 43 années, aujourd’hui, nous assumons nos responsabilités

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour le groupe Les Républicains.

Photo de Laurence Rossignol

Vous pouvez continuer, cela ne marche pas !

Photo de Annie Delmont-Koropoulis

Ma question s'adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Monsieur le ministre, ce n'est malheureusement plus à démontrer : les zones blanches médicales concernent tous les territoires, et les aides financières ponctuelles ne permettent pas, à elles seules, d'attirer les jeunes médecins.

Le Sénat a adopté l'an dernier une proposition de loi de Bruno Retailleau visant à créer une année de professionnalisation en fin de cursus pour les internes en médecine générale.

Ce dispositif prévoyait que les étudiants en médecine générale effectuent une quatrième année d'internat sous la forme d'un stage en pratique ambulatoire dans les zones caractérisées par des difficultés d'accès aux soins. Chaque année, près de 4 000 internes auraient ainsi été déployés dans les zones sous-dotées.

L'article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit un dispositif analogue. Les étudiants resteraient dans la région où ils ont suivi leurs études et bénéficieraient d'une rémunération adaptée.

Monsieur le ministre, vous avez confié à des personnalités qualifiées une mission sur la refonte du troisième cycle de médecine générale. Pouvez-vous nous faire part de leurs conclusions et nous préciser la date d'entrée en vigueur de l'article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ?

Olivier Véran

M. Olivier Véran, ministre délégué. On peut se jeter à la figure tous les mots fleuris qui existent, on peut mettre en avant toutes les arguties juridiques ou légistiques, le fait est, madame la sénatrice, que vous ne faisiez pas partie des frondeurs à l’époque !

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Olivier Véran

Vous avez voté comme moi et vous vous emportiez avec moi contre celles et ceux qui bloquaient – vous savez donc ce que c’est de bloquer le Parlement ! – et qui, parce qu’ils étaient en désaccord sur le fond, voulaient empêcher le débat de se tenir.

Je suis sûr que, au fond de vous-même, madame la sénatrice, vous pouvez vous retrouver avec nous sur une ligne responsable. Vous pouvez reconnaître que ce sont les conditions du débat qui nous ont conduits à recourir au 49.3 pour terminer ce chemin démocratique.

François Braun, ministre de la santé et de la prévention

Madame la sénatrice Delmont-Koropoulis, comme s'y est engagé le Président de la République, nous mettons en place, à compter de la rentrée prochaine, une quatrième année de spécialité de médecine générale.

C'est une mesure qui fait consensus – vous avez rappelé l'adoption par le Sénat de la proposition de loi déposée par Bruno Retailleau – et qui a deux objectifs principaux.

Tout d'abord, il s'agit d'améliorer la formation de nos futurs médecins généralistes. La médecine générale était la seule spécialité sans quatrième année d'autonomie supervisée, alors que celle-ci permet de mieux former les futurs médecins, particulièrement dans des spécialités que les internes en médecine générale demandent souvent, comme la pédiatrie et la gynéco-obstétrique.

Ensuite, cette quatrième année facilitera l'installation de ces futurs médecins généralistes, en les déployant prioritairement dans les territoires sous-denses – c'était l'un des objectifs du Sénat – et en leur permettant de passer plus vite leur thèse de doctorat en médecine.

Pour accéder à cette quatrième année, ils devront en effet avoir passé leur thèse ; nous n'aurons donc plus d'étudiants qui ne peuvent pas s'installer à la sortie de leurs études, parfois durant plusieurs années, parce qu'ils doivent encore passer leur thèse.

En ce qui concerne la mission que j'ai confiée à quatre personnalités qualifiées – deux professeurs de médecine générale, un doyen et une interne –, leurs conclusions me seront rendues dans les jours qui viennent. La question principale, vous en avez parlé, est celle de la rémunération : elle devra être adaptée à cet exercice particulier de docteur junior en libéral, et non en centre hospitalier.

Bien entendu, dès que les conclusions de cette mission me seront remises, je serai à votre disposition pour vous les présenter et en débattre.

Cette mesure permettra d'améliorer la formation des médecins généralistes et de faciliter leur installation. Nous contribuerons ainsi à répondre à la problématique de l'inégalité d'accès territorial à la santé.

quatrième année de médecine générale

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour le groupe Les Républicains.

Photo de Annie Delmont-Koropoulis

Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.

Je voudrais toutefois vous rappeler que, sur l'initiative du Sénat, la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé prévoyait l'obligation pour les étudiants de troisième cycle de médecine générale d'effectuer un stage d'au moins six mois en médecine ambulatoire.

Cette mesure n'a jamais été mise en place. Tout en regrettant le temps perdu, nous nous réjouissons que le Sénat ait enfin été entendu.

Photo de Annie Delmont-Koropoulis

Ma question s’adresse à M. le ministre de la santé et de la prévention.

Monsieur le ministre, ce n’est malheureusement plus à démontrer : les zones blanches médicales concernent tous les territoires, et les aides financières ponctuelles ne permettent pas, à elles seules, d’attirer les jeunes médecins.

Le Sénat a adopté l’an dernier une proposition de loi de Bruno Retailleau visant à créer une année de professionnalisation en fin de cursus pour les internes en médecine générale.

Ce dispositif prévoyait que les étudiants en médecine générale effectuent une quatrième année d’internat sous la forme d’un stage en pratique ambulatoire dans les zones caractérisées par des difficultés d’accès aux soins. Chaque année, près de 4 000 internes auraient ainsi été déployés dans les zones sous-dotées.

L’article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 prévoit un dispositif analogue. Les étudiants resteraient dans la région où ils ont suivi leurs études et bénéficieraient d’une rémunération adaptée.

Monsieur le ministre, vous avez confié à des personnalités qualifiées une mission sur la refonte du troisième cycle de médecine générale. Pouvez-vous nous faire part de leurs conclusions et nous préciser la date d’entrée en vigueur de l’article 37 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ?

Photo de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour le groupe Les Républicains.

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention.

François Braun

Madame la sénatrice Delmont-Koropoulis, comme s’y est engagé le Président de la République, nous mettons en place, à compter de la rentrée prochaine, une quatrième année de spécialité de médecine générale.

C’est une mesure qui fait consensus – vous avez rappelé l’adoption par le Sénat de la proposition de loi déposée par Bruno Retailleau – et qui a deux objectifs principaux.

Tout d’abord, il s’agit d’améliorer la formation de nos futurs médecins généralistes. La médecine générale était la seule spécialité sans quatrième année d’autonomie supervisée, alors que celle-ci permet de mieux former les futurs médecins, particulièrement dans des spécialités que les internes en médecine générale demandent souvent, comme la pédiatrie et la gynéco-obstétrique.

Ensuite, cette quatrième année facilitera l’installation de ces futurs médecins généralistes, en les déployant prioritairement dans les territoires sous-denses – c’était l’un des objectifs du Sénat – et en leur permettant de passer plus vite leur thèse de doctorat en médecine.

Pour accéder à cette quatrième année, ils devront en effet avoir passé leur thèse ; nous n’aurons donc plus d’étudiants qui ne peuvent pas s’installer à la sortie de leurs études, parfois durant plusieurs années, parce qu’ils doivent encore passer leur thèse.

En ce qui concerne la mission que j’ai confiée à quatre personnalités qualifiées – deux professeurs de médecine générale, un doyen et une interne –, leurs conclusions me seront rendues dans les jours qui viennent. La question principale, vous en avez parlé, est celle de la rémunération : elle devra être adaptée à cet exercice particulier de docteur junior en libéral, et non en centre hospitalier.

Bien entendu, dès que les conclusions de cette mission me seront remises, je serai à votre disposition pour vous les présenter et en débattre.

Cette mesure permettra d’améliorer la formation des médecins généralistes et de faciliter leur installation. Nous contribuerons ainsi à répondre à la problématique de l’inégalité d’accès territorial à la santé.

Photo de Catherine Procaccia

Ma question s'adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Après un premier rapport en 2009, l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) vient de faire le point sur la situation de la pollution par le chlordécone aux Antilles. En effet, bien que son usage soit interdit depuis trente ans, cette molécule persiste dans les sols et les eaux, contaminant les légumes racines, les animaux, les poissons et par conséquent les hommes, par le biais de l'alimentation.

Si le rapport évoque le progrès des connaissances scientifiques et médicales, il dresse un constat, que certains qualifient de sévère, sur une certaine inefficacité des plans Chlordécone qui se sont succédé, inefficacité qui explique le sentiment de défiance et de colère des Antillais.

Sa conclusion est, hélas, d'actualité : ce qui est arrivé aux Antilles doit servir de modèle à l'État pour gérer les pollutions que nous ne manquerons pas de découvrir ; une vision à long terme s'appuyant sur la recherche et associant tous les acteurs est dorénavant nécessaire.

La question de la pollution des eaux signalée récemment par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) a été évoquée il y a quelques minutes par deux collègues. Cette pollution concerne une molécule qui, tout comme le chlordécone, est interdite, mais persistante dans le temps.

Monsieur le ministre, ma question est simple. Avez-vous mis au point une stratégie permettant de faire face à ces contaminations, une stratégie qui soit réfléchie et qui englobe les aspects sanitaires, économiques, environnementaux et sociaux ? Comment comptez-vous associer et informer clairement la population pour éviter le contre-modèle du chlordécone ?

Photo de Gérard Larcher

La parole est à Mme Annie Delmont-Koropoulis, pour la réplique.

Photo de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Photo de Annie Delmont-Koropoulis

Je vous remercie, monsieur le ministre, de votre réponse.

Je voudrais toutefois vous rappeler que, sur l’initiative du Sénat, la loi du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé prévoyait l’obligation pour les étudiants de troisième cycle de médecine générale d’effectuer un stage d’au moins six mois en médecine ambulatoire.

Cette mesure n’a jamais été mise en place. Tout en regrettant le temps perdu, nous nous réjouissons que le Sénat ait enfin été entendu.

Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

Madame la sénatrice, vous évoquez à raison le rapport qui a été publié le mois dernier par le Sénat, dont vous êtes l'auteure et qui souligne en conclusion que la gestion du chlordécone entre 1973 et 1993 aux Antilles et, surtout, les conséquences de l'utilisation de ce produit doivent nous servir de boussole et de guide.

Vous conviendrez que, en quelques semaines seulement, nous n'avons pu tirer tous les enseignements de votre rapport – je le dis avec beaucoup d'humilité –, notamment pour les autres situations du même type : un produit interdit, mais une pollution persistante.

Dans votre rapport, vous pointez du doigt les impacts sur la santé, les dégâts du manque de transparence et la nécessité de la prévention et de l'anticipation.

En ce qui concerne la transparence, je vous rappelle que, depuis un peu plus de deux ans, un site internet, InfoSols, certes méconnu de la plupart de nos concitoyens, géré par le ministère de la transition écologique, recense toutes les pollutions existantes. Et il est mis à jour de manière régulière.

Les secteurs d'information sur les sols (SIS), qui sont adossés aux parcelles, permettent déjà à des personnes acquérant une propriété de mesurer toutes les pollutions recensées sur le site.

Par ailleurs, la Commission européenne prépare en ce moment même, avec le soutien de la France, une proposition de directive sur la santé des sols.

Nous avons rendez-vous dans quelques jours pour un cas pratique : les polluants éternels per et polyfluoroalkylés, dits « PFAS ». Vendredi prochain, je rendrai public le rapport commandé à l'Inspection générale de l'environnement et du développement durable (IGEDD), qui fait le point sur la réalité de cette pollution présentant une difficulté particulière : ces polluants sont extrêmement persistants.

Un plan d'action dévoilé en janvier dernier par mon ministère a mis l'accent sur la nécessité de connaître l'existant, de recenser et d'améliorer les informations ou encore de mesurer les endroits où il y a potentiellement des problèmes pour la santé.

Là aussi, une action européenne est en préparation avec d'autres pays. En effet, chacun comprend les limites d'une réglementation ou d'une action prise par un seul pays, puisque les molécules franchissent évidemment nos frontières au travers de produits agricoles ou industriels.

contamination de l’eau potable

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

M. le président. La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour le groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je vous remercie, monsieur le ministre. J'ai pris connaissance de votre plan d'action sur les PFAS, mais il privilégie le préventif au curatif.

Or, parmi les défauts que nous avons mis en avant dans la gestion du dossier chlordécone, nous avons souligné un déficit dans les recherches. Les efforts en la matière ne commencent que maintenant, alors que des plans sont régulièrement élaborés depuis presque vingt ans.

Vous citez InfoSols, mais nous dénonçons justement dans notre rapport le fait que, aux Antilles, les terres cultivables n'ont pas toutes été analysées, ce qui ôte beaucoup d'efficacité à cette base de données.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Ma question s’adresse à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Après un premier rapport en 2009, l’Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques (Opecst) vient de faire le point sur la situation de la pollution par le chlordécone aux Antilles. En effet, bien que son usage soit interdit depuis trente ans, cette molécule persiste dans les sols et les eaux, contaminant les légumes racines, les animaux, les poissons et par conséquent les hommes, par le biais de l’alimentation.

Si le rapport évoque le progrès des connaissances scientifiques et médicales, il dresse un constat, que certains qualifient de sévère, sur une certaine inefficacité des plans Chlordécone qui se sont succédé, inefficacité qui explique le sentiment de défiance et de colère des Antillais.

Sa conclusion est, hélas, d’actualité : ce qui est arrivé aux Antilles doit servir de modèle à l’État pour gérer les pollutions que nous ne manquerons pas de découvrir ; une vision à long terme s’appuyant sur la recherche et associant tous les acteurs est dorénavant nécessaire.

La question de la pollution des eaux signalée récemment par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) a été évoquée il y a quelques minutes par deux collègues. Cette pollution concerne une molécule qui, tout comme le chlordécone, est interdite, mais persistante dans le temps.

Monsieur le ministre, ma question est simple. Avez-vous mis au point une stratégie permettant de faire face à ces contaminations, une stratégie qui soit réfléchie et qui englobe les aspects sanitaires, économiques, environnementaux et sociaux ? Comment comptez-vous associer et informer clairement la population pour éviter le contre-modèle du chlordécone ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Mme Catherine Procaccia . Nous avons besoin d'une vision d'ensemble tournée vers l'avenir.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Jean-Marie Vanlerenberghe applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d'actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions d'actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 3 mai 2023, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Madame la sénatrice, vous évoquez à raison le rapport qui a été publié le mois dernier par le Sénat, dont vous êtes l’auteure et qui souligne en conclusion que la gestion du chlordécone entre 1973 et 1993 aux Antilles et, surtout, les conséquences de l’utilisation de ce produit doivent nous servir de boussole et de guide.

Vous conviendrez que, en quelques semaines seulement, nous n’avons pu tirer tous les enseignements de votre rapport – je le dis avec beaucoup d’humilité –, notamment pour les autres situations du même type : un produit interdit, mais une pollution persistante.

Dans votre rapport, vous pointez du doigt les impacts sur la santé, les dégâts du manque de transparence et la nécessité de la prévention et de l’anticipation.

En ce qui concerne la transparence, je vous rappelle que, depuis un peu plus de deux ans, un site internet, InfoSols, certes méconnu de la plupart de nos concitoyens, géré par le ministère de la transition écologique, recense toutes les pollutions existantes. Et il est mis à jour de manière régulière.

Les secteurs d’information sur les sols (SIS), qui sont adossés aux parcelles, permettent déjà à des personnes acquérant une propriété de mesurer toutes les pollutions recensées sur le site.

Par ailleurs, la Commission européenne prépare en ce moment même, avec le soutien de la France, une proposition de directive sur la santé des sols.

Nous avons rendez-vous dans quelques jours pour un cas pratique : les polluants éternels per et polyfluoroalkylés, dits « PFAS ». Vendredi prochain, je rendrai public le rapport commandé à l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), qui fait le point sur la réalité de cette pollution présentant une difficulté particulière : ces polluants sont extrêmement persistants.

Un plan d’action dévoilé en janvier dernier par mon ministère a mis l’accent sur la nécessité de connaître l’existant, de recenser et d’améliorer les informations ou encore de mesurer les endroits où il y a potentiellement des problèmes pour la santé.

Là aussi, une action européenne est en préparation avec d’autres pays. En effet, chacun comprend les limites d’une réglementation ou d’une action prise par un seul pays, puisque les molécules franchissent évidemment nos frontières au travers de produits agricoles ou industriels.

Debut de section - PermalienPhoto de Christophe Béchu

Madame la sénatrice, vous évoquez à raison le rapport qui a été publié le mois dernier par le Sénat, dont vous êtes l’auteure et qui souligne en conclusion que la gestion du chlordécone entre 1973 et 1993 aux Antilles et, surtout, les conséquences de l’utilisation de ce produit doivent nous servir de boussole et de guide.

Vous conviendrez que, en quelques semaines seulement, nous n’avons pu tirer tous les enseignements de votre rapport – je le dis avec beaucoup d’humilité –, notamment pour les autres situations du même type : un produit interdit, mais une pollution persistante.

Dans votre rapport, vous pointez du doigt les impacts sur la santé, les dégâts du manque de transparence et la nécessité de la prévention et de l’anticipation.

En ce qui concerne la transparence, je vous rappelle que, depuis un peu plus de deux ans, un site internet, InfoSols, certes méconnu de la plupart de nos concitoyens, géré par le ministère de la transition écologique, recense toutes les pollutions existantes. Et il est mis à jour de manière régulière.

Les secteurs d’information sur les sols (SIS), qui sont adossés aux parcelles, permettent déjà à des personnes acquérant une propriété de mesurer toutes les pollutions recensées sur le site.

Par ailleurs, la Commission européenne prépare en ce moment même, avec le soutien de la France, une proposition de directive sur la santé des sols.

Nous avons rendez-vous dans quelques jours pour un cas pratique : les polluants éternels per- et polyfluoroalkylés, dits PFAS. Vendredi prochain, je rendrai public le rapport commandé à l’inspection générale de l’environnement et du développement durable (IGEDD), qui fait le point sur la réalité de cette pollution présentant une difficulté particulière : ces polluants sont extrêmement persistants.

Un plan d’action dévoilé en janvier dernier par mon ministère a mis l’accent sur la nécessité de connaître l’existant, de recenser et d’améliorer les informations ou encore de mesurer les endroits où il y a potentiellement des problèmes pour la santé.

Là aussi, une action européenne est en préparation avec d’autres pays. En effet, chacun comprend les limites d’une réglementation ou d’une action mises en place par un seul pays, puisque les molécules franchissent évidemment nos frontières au travers de produits agricoles ou industriels.

La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Alain Richard.

Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.

Debut de section - PermalienPhoto de Gérard Larcher

La parole est à Mme Catherine Procaccia, pour la réplique.

Photo de Catherine Procaccia

Je vous remercie, monsieur le ministre. J’ai pris connaissance de votre plan d’action sur les PFAS, mais il privilégie le préventif au curatif.

Or, parmi les défauts que nous avons mis en avant dans la gestion du dossier chlordécone, nous avons souligné un déficit dans les recherches. Les efforts en la matière ne commencent que maintenant, alors que des plans sont régulièrement élaborés depuis presque vingt ans.

Vous citez InfoSols, mais nous dénonçons justement dans notre rapport le fait que, aux Antilles, les terres cultivables n’ont pas toutes été analysées, ce qui ôte beaucoup d’efficacité à cette base de données.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Procaccia

Je vous remercie, monsieur le ministre. J’ai pris connaissance de votre plan d’action sur les PFAS, mais il donne la priorité au préventif sur le curatif.

Or, parmi les défauts que nous avons mis en avant dans la gestion du dossier du chlordécone, nous avons souligné un déficit dans les recherches. Les efforts en la matière ne commencent que maintenant, alors que des plans sont régulièrement élaborés depuis presque vingt ans.

Vous citez InfoSols, mais nous dénonçons justement dans notre rapport le fait que, aux Antilles, les terres cultivables n’ont pas toutes été analysées, ce qui ôte beaucoup d’efficacité à cette base de données.

Photo de Jean-Claude Requier

Nos collègues Jean-Pierre Corbisez et Nathalie Delattre souhaitent rectifier leur vote sur le scrutin n° 270 portant sur les amendements identiques tendant à supprimer l'article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité.

Jean-Pierre Corbisez souhaitait voter pour, tandis que Nathalie Delattre souhaitait voter contre.

Photo de Catherine Procaccia

Mme Catherine Procaccia. Nous avons besoin d’une vision d’ensemble tournée vers l’avenir.

Photo de Pierre-Antoine Levi

Lors du scrutin n° 269 sur l'article 1er de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité, Daphné Ract-Madoux souhaitait voter contre.

Lors du scrutin n° 271 sur l'ensemble de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité, Daphné Ract-Madoux et Brigitte Devésa souhaitaient voter contre.

Photo de Gérard Larcher

Nous en avons terminé avec les questions d’actualité au Gouvernement.

Notre prochaine séance de questions d’actualité au Gouvernement aura lieu le mercredi 3 mai 2023, à quinze heures.

Mes chers collègues, nous allons maintenant interrompre nos travaux quelques instants.

La séance est suspendue.

Photo de Alain Richard

Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l'analyse politique du scrutin.

Photo de Alain Richard

L'ordre du jour appelle le débat d'actualité sur le thème : « Impacts économique, social et politique de l'intelligence artificielle générative ».

Je vous rappelle que, dans ce débat, le Gouvernement aura la faculté, s'il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque orateur pour une durée de deux minutes ; l'orateur disposera alors à son tour du droit de répartie, pour une minute.

Le temps de réponse du Gouvernement à l'issue du débat est limité à cinq minutes.

Monsieur le ministre, vous pourrez donc, si vous le souhaitez, répondre après chaque orateur, une fois que celui-ci aura regagné sa place dans l'hémicycle.

Dans le débat, la parole est à M. André Gattolin.

Photo de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d'abord remercier le groupe Union Centriste, qui a proposé à M. le président du Sénat d'inscrire ce débat à notre ordre du jour.

Il me revient d'ouvrir le bal, si j'ose dire, sans introduction préalable par le Gouvernement ou par un rapporteur, sur un sujet à la fois important et particulièrement complexe : l'intelligence artificielle (IA) générative.

Je voudrais dire en préambule que nous devrions en parler au pluriel, puisqu'il existe plusieurs types d'IA générative. Cette dernière est en fait un sous-ensemble de ce que l'on appelle « l'apprentissage profond », lui-même un sous-ensemble de ce que l'on appelle « l'apprentissage machine ».

L'IA générative est fondée sur des systèmes neuronaux artificiels, un concept qui a été créé au sein d'universités américaines dans les années 1940, mais qui n'a trouvé des applications concrètes et des débouchés que ces dernières années, avec le développement des capacités de calcul et de stockage des données.

C'est un sujet hautement complexe, car expliquer ce qu'est un système neuronal artificiel n'est pas chose aisée. L'idée est de copier le modèle de fonctionnement du cerveau humain. Quand votre œil enregistre une donnée, il la transfère à travers le nerf optique au cerveau, et celui-ci l'analyse.

Je vais prendre un exemple. Nous sommes le matin, vous venez de vous réveiller, vous avez un discours à écrire pour une discussion générale et vous ne voulez qu'une chose : boire un café.

L'image que l'œil va envoyer à votre cerveau est celle de la cuisine et de la porte ouverte du placard. Vous savez que les tasses se situent à tel endroit et que, par chance, vous avez vidé le lave-vaisselle : vous êtes donc à peu sûr de trouver une tasse pour votre café.

Il existe aussi une mémoire d'alerte qui vous rappelle que, la dernière fois, vous vous êtes pris la porte du placard dans le visage.

Ainsi, le cerveau réalise un traitement complexe de toutes ces informations, et pas seulement de la donnée de base transmise à un moment donné par le nerf optique, en intégrant tout dans un environnement de synapses et de neurones qui vous permettra de vous guider jusqu'à la fameuse tasse. Ce système est donc particulièrement riche et performant.

La particularité des IA génératives est de s'appuyer non pas sur un seul algorithme, mais sur un ensemble complexe d'algorithmes qui échangent – c'est ce que permettent les progrès des dernières années.

Sans entrer dans les détails, certaines IA sont qualifiées « d'adversorielles » – elles mettent en concurrence deux systèmes de réseaux neuronaux qui se transmettent des informations et s'enrichissent l'un l'autre –, d'autres de « probabilistes » – le niveau de détail et d'information est alors plus élevé.

En tout cas, nous vivons aujourd'hui une véritable révolution, qui touche la production de contenus et d'images comme les processus de décision.

Comme je n'étais pas très réveillé ce matin, j'ai demandé à une intelligence artificielle de préparer mon discours sur les impacts économique, social et politique de l'IA générative. Le résultat est sympathique, mais il est extrêmement plat et descriptif. Il ne contient pas d'éléments complètement faux, mais il est incapable d'évaluer véritablement ses impacts. La marge de progression reste donc particulièrement importante.

Pour autant, nous devons nous intéresser aux conséquences du développement des IA. J'ai eu la chance de travailler récemment, avec Catherine Morin-Desailly et Cyril Pellevat, sur le projet de législation européenne destiné à encadrer l'intelligence artificielle. Nous avons retenu deux idées fortes : il faut à la fois préserver les libertés, les responsabilités et l'éthique, dans un cadre européen, et permettre le développement et l'innovation en matière d'IA.

Nous sommes tous affolés aujourd'hui par le succès de ChatGPT : diffusé en novembre dernier, celui-ci a atteint plus de cent millions de téléchargements en seulement deux mois. Le précédent record était détenu par TikTok, qui avait atteint le même nombre de téléchargements en neuf mois.

C'est donc bien un incroyable succès, qui transforme, par exemple dans le secteur de l'éducation, notre manière d'enseigner ou de valider les travaux. Le numérique n'est pas uniquement négatif ; il faut aussi considérer ses aspects positifs. Par exemple, le plagiat dans le monde universitaire a été en grande partie éradiqué par un logiciel ad hoc.

Pour conclure, nous devons prendre en compte les apports, mais aussi les risques et les dangers de l'IA générative – nous ne les mesurons certainement pas tous. Nous devons apprendre à utiliser ce nouvel outil.

Photo de Jean-Claude Requier

Nos collègues Jean-Pierre Corbisez et Nathalie Delattre souhaitent rectifier leur vote sur le scrutin n° 270 portant sur les amendements identiques tendant à supprimer l’article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité.

Jean-Pierre Corbisez souhaitait voter pour, tandis que Nathalie Delattre souhaitait voter contre.

Photo de Pierre-Antoine Levi

Lors du scrutin n° 269 sur l’article 1er de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, Daphné Ract-Madoux souhaitait voter contre.

Lors du scrutin n° 271 sur l’ensemble de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, Daphné Ract-Madoux et Brigitte Devésa souhaitaient voter contre.

Photo de Alain Richard

La parole est à M. le ministre délégué.

Photo de Alain Richard

Acte est donné de ces mises au point. Elles seront publiées au Journal officiel et figureront dans l’analyse politique du scrutin.

Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais simplement, en cet instant, saluer l'initiative prise par le Sénat d'inscrire à son ordre du jour ce débat d'actualité sur l'impact économique, social et politique de l'intelligence artificielle.

Je salue également l'introduction qu'André Gattolin, révélant son expertise sur le sujet, vient de réaliser.

Je salue enfin le rapport d'information publié récemment par la commission des affaires européennes du Sénat sur la proposition de législation européenne relative à l'intelligence artificielle, dont M. Gattolin est l'un des auteurs.

Photo de Alain Richard

La parole est à M. Christian Redon-Sarrazy.

Débat d’actualité

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « l'intelligence artificielle générative, une technologie capable de créer de nouveaux contenus, écrits ou images, recèle un fort potentiel, et ses impacts sociaux sont multiples.

« Dans le champ économique, l'intelligence artificielle générative, en permettant l'automatisation de certaines tâches répétitives et sans grande valeur ajoutée, accroît l'efficacité du travail et donc sa rentabilité. En créant de nouveaux produits ou services basés sur cette technologie, elle est potentiellement créatrice d'emplois.

« Toutes ces potentialités peuvent néanmoins être disruptives pour notre modèle économique actuel. En générant un risque de destruction d'emplois ou en limitant la nécessité d'acquérir de nouveaux savoirs, l'intelligence artificielle générative obligera plusieurs secteurs industriels à s'adapter pour demeurer compétitifs.

« Les risques politiques et éthiques existent aussi pour nos valeurs démocratiques, notamment par la génération de faux contenus, qu'ils soient écrits, visuels ou sonores, qui viendraient nourrir propagandes diverses et désinformation. Les répercussions sur les processus électoraux sont possibles. À mesure que les intelligences artificielles génératives se perfectionneront, il deviendra de plus en plus difficile de distinguer le vrai du faux. »

Ce que vous venez d'entendre, mes chers collègues, ce n'est pas un discours rédigé exclusivement par mes soins ou par ceux de ma collaboratrice. Ce début d'intervention a été généré à près de 95 % par l'application ChatGPT.

Monsieur le ministre, vous avez qualifié ChatGPT de « perroquet approximatif ». Utilisé dans le contexte précis d'une intervention dans l'hémicycle, le trouvez-vous convaincant ou maintenez-vous votre jugement ?

« Distinguer le vrai du faux », « création d'emplois » et « potentiel disruptif », etc. En une minute, je pense que vous avez pu relever les principaux apports et risques de l'intelligence artificielle générative, limites et promesses dont la machine elle-même semble parfaitement consciente.

Vous constatez également la nécessité qui est la nôtre de les identifier pour combler le vide juridique entourant le développement de cette technologie, dont on ne peut nier le potentiel de fascination et qui évolue à une vitesse sidérante.

Comme toute innovation majeure dans l'histoire de l'humanité, les intelligences artificielles génératives font planer le spectre de destructions d'emplois, d'un remplacement de la force humaine par l'agilité de la machine et d'une forme de simplification de l'organisation du travail par la suppression du facteur humain.

On oublie seulement de dire que les nouvelles technologies, quelles qu'elles soient, créent souvent davantage d'emplois qu'elles n'en détruisent. Par ailleurs, leur développement ne signifie pas systématiquement un abandon des savoir-faire antérieurs. L'intelligence artificielle peut au contraire permettre la création et l'acquisition de nouvelles compétences.

Le secteur qui sera le plus directement affecté par leur développement sera sans surprise celui de l'informatique. Cela induira nécessairement une adaptation et, par là même, une expertise plus poussée de la part des ingénieurs, ainsi que la création de nouveaux métiers attractifs.

L'une des principales craintes généralement partagées face à un tel potentiel est aussi de voir l'humain dépassé par sa créature.

Toutefois, cette source d'intelligence repose encore et toujours sur l'humain, tandis que les intelligences artificielles génératives ne demeurent, en tout cas en 2023, que des fabriques d'illusions. En dépit de leur qualité, le contenu proposé ne se fonde que sur des corrélations statistiques, un volume de données certes exponentiel, mais toujours limité. Sans l'humain, point de machine, pour l'instant !

Ces inventions posent néanmoins de réelles questions éthiques et philosophiques. Comme toutes les technologies qui les ont précédées, par exemple internet, elles sont un pharmakon, à la fois poison et remède selon l'usage que l'on en fait.

Bien sûr, entre de mauvaises mains, ces outils sont dangereux, parce qu'ils sont hautement capables de tromper notre vigilance ou d'être utilisés pour défendre des intérêts particuliers. Mais cette créature-là ne nous échappera que si nous ne nous posons pas les bonnes questions et si nous n'anticipons pas ses effets pervers.

Les mêmes interrogations relatives à la régulation, aux normes et à une éventuelle gouvernance mondiale se posent aujourd'hui pour l'intelligence artificielle, comme elles se posent depuis plus de vingt-cinq ans face à l'essor d'internet. Force est de constater que nous avons appris en marchant. Il pouvait difficilement en être autrement, faute de précédent.

Toutefois, nous disposons aujourd'hui de cette expérience, d'un corpus de réflexions, de normes et d'une jurisprudence – tout cela peut nous guider. Il nous faut nous servir de ce savoir empirique.

Une difficulté demeure cependant : face à une technologie par nature dynamique, qui progresse sans cesse, le risque de caducité rapide des normes définies à un moment précis est réel. Il nous faut donc être plus rapides que la machine. Et c'est là, je pense, que se situe l'aspect le plus positif de cette technologie novatrice : en nous débarrassant du superflu, elle peut aussi nous permettre de nous concentrer sur l'essentiel. En vérité, elle nous lance un défi : elle nous invite à un regain d'intelligence.

Si l'IA générative peut nous affranchir de certaines tâches répétitives, doit-elle fatalement nous rendre intellectuellement paresseux ? C'est à l'humain de montrer qu'aucune machine ne peut surpasser son intelligence, son jugement, son esprit critique et sa remarquable capacité d'adaptation.

« Qu'ils soient positifs ou négatifs, les impacts sociaux et économiques de l'intelligence artificielle générative doivent être évalués. Nous ne pourrons pas faire l'économie d'une réflexion éthique, afin que cette technique puisse être utilisée au bénéfice de l'intérêt général. »

Cette conclusion, mes chers collègues, m'a été proposée par l'application ChatGPT... Je vous laisse apprécier sa pertinence !

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

L’ordre du jour appelle le débat d’actualité sur le thème : « Impacts économique, social et politique de l’intelligence artificielle générative ».

Je vous rappelle que, dans ce débat, le Gouvernement aura la faculté, s’il le juge nécessaire, de prendre la parole immédiatement après chaque orateur pour une durée de deux minutes ; l’orateur disposera alors à son tour du droit de répartie, pour une minute.

Le temps de réponse du Gouvernement à l’issue du débat est limité à cinq minutes.

Monsieur le ministre, vous pourrez donc, si vous le souhaitez, répondre après chaque orateur, une fois que celui-ci aura regagné sa place dans l’hémicycle.

Dans le débat, la parole est à M. André Gattolin.

Applaudissements sur les travées du groupe SER. – M. André Gattolin applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier le groupe Union Centriste, qui a proposé à M. le président du Sénat d’inscrire ce débat à notre ordre du jour.

Il me revient d’ouvrir le bal, si j’ose dire, sans introduction préalable par le Gouvernement ou par un rapporteur, sur un sujet à la fois important et particulièrement complexe : l’intelligence artificielle (IA) générative.

Je voudrais dire en préambule que nous devrions en parler au pluriel, puisqu’il existe plusieurs types d’IA générative. Cette dernière est en fait un sous-ensemble de ce que l’on appelle « l’apprentissage profond », lui-même un sous-ensemble de ce que l’on appelle « l’apprentissage machine ».

L’IA générative est fondée sur des systèmes neuronaux artificiels, un concept qui a été créé au sein d’universités américaines dans les années 1940, mais qui n’a trouvé des applications concrètes et des débouchés que ces dernières années, avec le développement des capacités de calcul et de stockage des données.

C’est un sujet hautement complexe, car expliquer ce qu’est un système neuronal artificiel n’est pas chose aisée. L’idée est de copier le modèle de fonctionnement du cerveau humain. Quand votre œil enregistre une donnée, il la transfère à travers le nerf optique au cerveau, et celui-ci l’analyse.

Je vais prendre un exemple. Nous sommes le matin, vous venez de vous réveiller, vous avez un discours à écrire pour une discussion générale et vous ne voulez qu’une chose : boire un café.

L’image que l’œil va envoyer à votre cerveau est celle de la cuisine et de la porte ouverte du placard. Vous savez que les tasses se situent à tel endroit et que, par chance, vous avez vidé le lave-vaisselle : vous êtes donc à peu sûr de trouver une tasse pour votre café.

Il existe aussi une mémoire d’alerte qui vous rappelle que, la dernière fois, vous vous êtes pris la porte du placard dans le visage.

Ainsi, le cerveau réalise un traitement complexe de toutes ces informations, et pas seulement de la donnée de base transmise à un moment donné par le nerf optique, en intégrant tout dans un environnement de synapses et de neurones qui vous permettra de vous guider jusqu’à la fameuse tasse. Ce système est donc particulièrement riche et performant.

La particularité des IA génératives est de s’appuyer non pas sur un seul algorithme, mais sur un ensemble complexe d’algorithmes qui échangent – c’est ce que permettent les progrès des dernières années.

Sans entrer dans les détails, certaines IA sont qualifiées « d’adversorielles » – elles mettent en concurrence deux systèmes de réseaux neuronaux qui se transmettent des informations et s’enrichissent l’un l’autre –, d’autres de « probabilistes » – le niveau de détail et d’information est alors plus élevé.

En tout cas, nous vivons aujourd’hui une véritable révolution, qui touche la production de contenus et d’images comme les processus de décision.

Comme je n’étais pas très réveillé ce matin, j’ai demandé à une intelligence artificielle de préparer mon discours sur les impacts économique, social et politique de l’IA générative. Le résultat est sympathique, mais il est extrêmement plat et descriptif. Il ne contient pas d’éléments complètement faux, mais il est incapable d’évaluer véritablement ses impacts. La marge de progression reste donc particulièrement importante.

Pour autant, nous devons nous intéresser aux conséquences du développement des IA. J’ai eu la chance de travailler récemment, avec Catherine Morin-Desailly et Cyril Pellevat, sur le projet de législation européenne destiné à encadrer l’intelligence artificielle. Nous avons retenu deux idées fortes : il faut à la fois préserver les libertés, les responsabilités et l’éthique, dans un cadre européen, et permettre le développement et l’innovation en matière d’IA.

Nous sommes tous affolés aujourd’hui par le succès de ChatGPT : diffusé en novembre dernier, celui-ci a atteint plus de cent millions de téléchargements en seulement deux mois. Le précédent record était détenu par TikTok, qui avait atteint le même nombre de téléchargements en neuf mois.

C’est donc bien un incroyable succès, qui transforme, par exemple dans le secteur de l’éducation, notre manière d’enseigner ou de valider les travaux. Le numérique n’est pas uniquement négatif ; il faut aussi considérer ses aspects positifs. Par exemple, le plagiat dans le monde universitaire a été en grande partie éradiqué par un logiciel ad hoc.

Pour conclure, nous devons prendre en compte les apports, mais aussi les risques et les dangers de l’IA générative – nous ne les mesurons certainement pas tous. Nous devons apprendre à utiliser ce nouvel outil.

Debut de section - PermalienPhoto de André Gattolin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord remercier le groupe Union Centriste, qui a proposé à M. le président du Sénat d’inscrire ce débat à notre ordre du jour.

Il me revient d’ouvrir le bal, si j’ose dire, sans introduction préalable par le Gouvernement ou par un rapporteur, sur un sujet à la fois important et particulièrement complexe : l’intelligence artificielle (IA) générative.

Je voudrais dire en préambule que nous devrions en parler au pluriel, puisqu’il existe plusieurs types d’IA générative. Cette dernière est en fait un sous-ensemble de ce que l’on appelle « l’apprentissage profond », lui-même un sous-ensemble de ce que l’on appelle « l’apprentissage machine ».

L’IA générative est fondée sur des systèmes neuronaux artificiels, un concept qui a été créé au sein d’universités américaines dans les années 1940, mais qui n’a trouvé des applications concrètes et des débouchés que ces dernières années, avec le développement des capacités de calcul et de stockage des données.

C’est un sujet hautement complexe, car expliquer ce qu’est un système neuronal artificiel n’est pas chose aisée. L’idée est de copier le modèle de fonctionnement du cerveau humain. Quand votre œil enregistre une donnée, il la transfère à travers le nerf optique au cerveau, et celui-ci l’analyse.

Je vais prendre un exemple. Nous sommes le matin, vous venez de vous réveiller, vous avez un discours à écrire pour une discussion générale et vous ne voulez qu’une chose : boire un café.

L’image que l’œil va envoyer à votre cerveau est celle de la cuisine et de la porte ouverte du placard. Vous savez que les tasses se situent à tel endroit et que, par chance, vous avez vidé le lave-vaisselle : vous êtes donc à peu près sûr de trouver une tasse pour votre café.

Il existe aussi une mémoire d’alerte qui vous rappelle que, la dernière fois, vous vous êtes pris la porte du placard dans le visage.

Ainsi, le cerveau réalise un traitement complexe de toutes ces informations, et pas seulement de la donnée de base transmise à un moment donné par le nerf optique, en intégrant tout dans un environnement de synapses et de neurones qui vous permettra de vous guider jusqu’à la fameuse tasse. Ce système est donc particulièrement riche et performant.

La particularité des IA génératives est de s’appuyer non pas sur un seul algorithme, mais sur un ensemble complexe d’algorithmes qui échangent – c’est ce que permettent les progrès des dernières années.

Sans entrer dans les détails, certaines IA sont qualifiées d’« adversorielles » – elles mettent en concurrence deux systèmes de réseaux neuronaux qui se transmettent des informations et s’enrichissent l’un l’autre –, d’autres de « probabilistes » – le niveau de détail et d’information est alors plus élevé.

En tout cas, nous vivons aujourd’hui une véritable révolution, qui touche la production de contenus et d’images comme les processus de décision.

Comme je n’étais pas très réveillé ce matin, j’ai demandé à une intelligence artificielle de préparer mon discours sur les impacts économique, social et politique de l’IA générative. Le résultat est sympathique, mais il est extrêmement plat et descriptif. Il ne contient pas d’éléments complètement faux, mais il est incapable d’évaluer véritablement ses impacts. La marge de progression reste donc particulièrement importante.

Pour autant, nous devons nous intéresser aux conséquences du développement des IA. J’ai eu la chance de travailler récemment, avec Catherine Morin-Desailly et Cyril Pellevat, sur le projet de législation européenne destiné à encadrer l’intelligence artificielle. Nous avons retenu deux idées fortes : il faut à la fois préserver les libertés, les responsabilités et l’éthique, dans un cadre européen, et permettre le développement et l’innovation en matière d’IA.

Nous sommes tous affolés aujourd’hui par le succès de ChatGPT : diffusé en novembre dernier, celui-ci a atteint plus de cent millions de téléchargements en seulement deux mois. Le précédent record était détenu par TikTok, qui avait atteint le même nombre de téléchargements en neuf mois.

C’est donc bien un incroyable succès, qui transforme, par exemple dans le secteur de l’éducation, notre manière d’enseigner ou de valider les travaux. Le numérique n’est pas uniquement négatif ; il faut aussi considérer ses aspects positifs. Par exemple, le plagiat dans le monde universitaire a été en grande partie éradiqué par un logiciel ad hoc.

Pour conclure, nous devons prendre en compte les apports, mais aussi les risques et les dangers de l’IA générative – nous ne les mesurons certainement pas tous. Nous devons apprendre à utiliser ce nouvel outil.

Applaudissements sur des travées du groupe UC.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la révolution numérique a suscité un véritable bouleversement du monde du travail, opérant une transformation en profondeur de notre modèle économique et des métiers qui en constituent l'architecture.

Il est estimé qu'environ la moitié des métiers que les jeunes écoliers d'aujourd'hui exerceront demain n'existent pas encore. Si les potentialités de ce capitalisme numérique sont présentées comme assurément immenses, une telle numérisation du monde, au vu de l'orientation qu'elle a prise, alimente la crainte d'une déshumanisation de la société et d'une robotisation généralisée.

Nous sommes aujourd'hui dans un système où l'utilisateur est poussé par un ensemble de plateformes et de systèmes algorithmiques à générer toujours plus de données, au service finalement d'annonceurs, de publicitaires et de producteurs d'intelligence artificielle. Ces gigantesques masses de données numériques sont valorisées dans ce big data et exploitées au profit des algorithmes d'intelligence artificielle.

Or ce système, mes chers collègues, c'est celui de l'intensification de l'exploitation et de l'aliénation des travailleurs.

J'en veux pour preuve l'enquête du magazine Time, qui a révélé que l'entreprise OpenAI employait des travailleurs kenyans, rémunérés moins de deux dollars de l'heure, pour indexer d'immenses quantités de contenus toxiques circulant sur internet et ainsi nettoyer les données d'entraînement de ChatGPT.

Parce que « mal nommer un objet, c'est ajouter au malheur de ce monde », comme disait Albert Camus, il convient de rappeler que l'intelligence artificielle n'est ni artificielle ni intelligente. Considérer le logiciel ChatGPT comme intelligent, c'est se tromper lourdement sur la nature de notre débat et sur ses enjeux écologiques, politiques et sociaux.

ChatGPT n'est pas simplement un automate computationnel. Il implique l'exploitation des ressources minérales – terres rares – et humaines nécessaires à sa production et à son fonctionnement. Il dépend du travail gratuit des millions d'utilisateurs dont les requêtes améliorent l'algorithme. Par ces « micro-tâches », rémunérées moins de deux euros de l'heure, on s'affranchit du salariat et on précarise, à l'heure actuelle, des centaines de milliers de personnes à travers le monde, selon les travaux d'Antonio Casilli.

Comme toute révolution technologique, la révolution numérique est au cœur d'un affrontement de classes ; l'industrie du numérique a pour seule obsession de casser le coût du travail, en espérant substituer du capital mort au capital vivant.

Pourtant, cette révolution numérique pourrait créer de nouveaux métiers, augmenter les besoins en formation initiale et professionnelle et offrir la possibilité de réduire le temps de travail pour gagner du temps libre.

Néanmoins, l'orientation choisie par l'industrie du numérique, avec la collaboration aveugle de nos gouvernants, est manifeste : il s'agit d'exercer une pression sur les salaires et sur l'emploi, en captant la valeur, plutôt que d'améliorer l'efficacité sociale du travail. Il s'agit aussi de transformer en plateformes nos services publics et administratifs, créant de facto davantage d'insécurité sociale.

Cette industrie est dominée, à l'exception de la Chine, par une poignée de firmes américaines concentrant des capitalisations boursières démesurées et motivées par une visée politique mondiale, celle d'un capitalisme à son paroxysme, où l'on peut s'arroger certaines prérogatives étatiques en toute impunité.

Face à cela, la France et l'Union européenne ont joué le jeu de la big tech en reléguant le choix de l'outil numérique ou d'un prestataire technique à une logique utilitariste, sans prendre en compte les aspects politiques et stratégiques.

Il est impératif de reprendre la main sur notre destin et de choisir la société dans laquelle nous voulons vivre demain. Nous devons nous réapproprier collectivement nos données sous forme de communs, en exigeant la transparence et la lisibilité des algorithmes participant à l'apprentissage automatique.

Cet espoir de transition numérique, je le place aussi dans notre jeunesse, dans ce nombre considérable de jeunes adultes qui ne supportent plus de faire des « jobs à la con » – entendez par là, mes chers collègues, un travail auquel on ne trouve pas de sens, qui prive d'une réelle protection sociale et dans lequel règne une hiérarchie autre que celle de la compétence.

Parmi ces jeunes, nombreux sont ceux qui veulent créer et entreprendre, mais pas forcément en fondant une start-up pour la revendre au plus offrant et faire fortune. Leur objectif est plutôt d'entretenir et de rendre accessibles, via un réseau numérique, des communs mondiaux d'innovation partagée.

Cette jeunesse pense nouveaux modes de production, coopératives, économie sociale et solidaire, économie circulaire, lutte contre l'obsolescence programmée et mise en commun !

Ces nouveaux terrains de la lutte de classe, où l'on prépare une alternative au monde numérique capitalistique tel qu'il est conçu aujourd'hui, on les retrouve dans les ateliers coopératifs de fabrication et de création numériques, au sein des communautés de développement de logiciels libres, mais aussi dans les plateformes numériques coopératives. Ces tiers lieux préfigurent une possible République des communs.

Oui, mes chers collègues, cette révolution numérique, à l'œuvre depuis des années déjà, nous place au pied du mur du dépassement de la condition salariale. Mais aujourd'hui, nous devons choisir : est-ce pour aller vers une société d'« entrepreneurs de soi-même », sur le modèle des chauffeurs Uber esclaves du diktat du marché, ou est-ce pour construire la société de libres producteurs associés que Marx, d'ailleurs, appelait de ses vœux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le développement exponentiel de la technologie signifie-t-il la fin programmée de l'humanité, telle que nous la connaissons ?

Sans être aussi pessimiste, on peut être inquiet des menaces que l'intelligence artificielle générative fait peser, avec l'automatisation croissante, sur l'emploi dans tous les secteurs, sur l'éducation et la création, ainsi que sur nos modèles sociaux, politiques et démocratiques, notamment par de possibles abus en matière de désinformation, de manipulation des opinions ou de contrôle des individus.

Si la presse se fait, jour après jour, l'écho des nouvelles prouesses de ChatGPT, des pays comme l'Italie ou le Canada l'ont interdit, tout comme d'autres ont banni TikTok.

Faut-il mettre en pause la recherche sur l'intelligence artificielle, comme l'ont demandé Elon Musk et un millier de scientifiques ? Peut-être, mais ne soyons pas dupes : au-delà des considérations éthiques, il y a là pour le dirigeant de SpaceX et de Twitter une occasion de régler ses comptes avec OpenAI dans la course effrénée à laquelle se livrent les entreprises pour la captation du marché.

Faut-il de la régulation et une intervention des pouvoirs publics pour mieux encadrer ces futures applications ? Assurément. Je le demande depuis dix ans, rapport après rapport, car je mesure la puissance transformatrice des nouvelles technologies, mais aussi leurs effets incertains et potentiellement dangereux sur la mise en réseau du monde.

En matière de régulation, après le règlement général sur la protection des données (RGPD), l'Europe légifère de nouveau, avec le Digital Markets Act (DMA), le Digital Services Act (DSA), puis la proposition de règlement sur l'intelligence artificielle en cours d'examen.

Rapporteure de ce dernier texte pour notre commission des affaires européennes, avec André Gattolin, Cyril Pellevat et Elsa Schalck, et co-auteure à ce titre d'une proposition de résolution européenne, je veux en souligner le caractère précurseur, l'Europe étant la première à se doter d'un cadre juridique en la matière.

Cependant, si son approche par le risque est pertinente, cette proposition de règlement ne résout pas, hélas, les questions éthiques que posent les algorithmes gourmands de nos données et les modèles économiques qui les sous-tendent.

Comme je le réclamais pour le DSA, il faut exiger la transparence absolue, des audits indépendants et, tant avant la mise sur le marché d'une application ou d'un logiciel que tout au long de leur cycle de vie, une évaluation des possibles effets dangereux, en somme un safety by design.

Je n'ai pas le temps d'évoquer en détail à cette tribune les mesures que nous avons suggérées pour hisser la proposition de règlement à un haut niveau de protection et pallier certaines lacunes. Nous avons pris en considération, comme l'a rappelé André Gattolin, les risques de l'intelligence artificielle, mais également les progrès fulgurants qu'elle rend possibles. Elle n'est en effet ni positive ni négative : en réalité, sa valeur dépend intrinsèquement de l'usage qui en est fait.

L'intelligence artificielle peut nous aider à résoudre des questions environnementales, de santé, de productivité, toutes questions stratégiques ; d'où la nécessité, pour l'Europe, de soutenir l'innovation !

Or par manque de stratégie industrielle ces dernières années, l'Europe a été largement distancée par les États-Unis et la Chine, car ces États ont massivement investi dans la recherche et le développement de leurs propres entreprises, qui dominent aujourd'hui le monde.

Si l'Europe ne veut pas totalement disparaître de la carte des technologies de demain, monsieur le ministre, elle doit se réveiller et sortir de ces dépendances dangereuses.

Avec l'Inflation Reduction Act, les États-Unis vont investir près de 348 milliards de dollars. On en est loin en Europe ! Il nous faut pourtant un minimum d'investissements dans l'intelligence artificielle, dans le cloud et dans les réseaux, ce qui n'est pas vraiment prévu dans la boussole numérique pour 2030, qui est censée constituer le plan d'action de l'Union en la matière.

Il faut donc une réglementation exigeante, mais aussi une formation et une information de tous, pour ne pas se laisser dominer par une élite technologique seule capable de décider de notre avenir, ainsi qu'un investissement dans la recherche et un soutien assumé à notre écosystème européen, grâce à un Buy European Act : tel est le triptyque pour lequel je ne cesse de plaider.

La maîtrise des technologies les plus avancées est devenue un enjeu géopolitique. Cette approche n'est donc pas du protectionnisme ; c'est la seule manière de promouvoir un monde fondé sur nos valeurs fondamentales, un monde qui n'exprime ni le modèle business above all de la big tech – le profit avant la sécurité – ni le modèle du contrôle social par le parti communiste chinois.

L'Europe doit aussi peser dans les instances mondiales où s'élaborent les protocoles et les standards. Elle doit peser, monsieur le ministre, dans l'élaboration du Pacte numérique mondial proposé par les Nations unies pour 2024.

Ce cadre d'engagement universel, au sujet duquel j'ai défendu, au nom de l'Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), un rapport devant l'Organisation internationale de la francophonie (OIF), doit absolument comprendre des mesures claires en faveur d'une intelligence artificielle qui soit au service de l'humain, fiable et éthique. Il y a là un enjeu de civilisation.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, je voudrais simplement, en cet instant, saluer l’initiative prise par le Sénat d’inscrire à son ordre du jour ce débat d’actualité sur l’impact économique, social et politique de l’intelligence artificielle.

Je salue également l’introduction qu’André Gattolin, révélant son expertise sur le sujet, vient de réaliser.

Je salue enfin le rapport d’information publié récemment par la commission des affaires européennes du Sénat sur la proposition de législation européenne relative à l’intelligence artificielle, dont M. Gattolin est l’un des auteurs.

Mme Sylvie Robert et M. André Gattolin applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Christian Redon-Sarrazy

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « l’intelligence artificielle générative, une technologie capable de créer de nouveaux contenus, écrits ou images, recèle un fort potentiel, et ses impacts sociaux sont multiples.

« Dans le champ économique, l’intelligence artificielle générative, en permettant l’automatisation de certaines tâches répétitives et sans grande valeur ajoutée, accroît l’efficacité du travail et donc sa rentabilité. En créant de nouveaux produits ou services basés sur cette technologie, elle est potentiellement créatrice d’emplois.

« Toutes ces potentialités peuvent néanmoins être disruptives pour notre modèle économique actuel. En générant un risque de destruction d’emplois ou en limitant la nécessité d’acquérir de nouveaux savoirs, l’intelligence artificielle générative obligera plusieurs secteurs industriels à s’adapter pour demeurer compétitifs.

« Les risques politiques et éthiques existent aussi pour nos valeurs démocratiques, notamment par la génération de faux contenus, qu’ils soient écrits, visuels ou sonores, qui viendraient nourrir propagandes diverses et désinformation. Les répercussions sur les processus électoraux sont possibles. À mesure que les intelligences artificielles génératives se perfectionneront, il deviendra de plus en plus difficile de distinguer le vrai du faux. »

Ce que vous venez d’entendre, mes chers collègues, ce n’est pas un discours rédigé exclusivement par mes soins ou par ceux de ma collaboratrice. Ce début d’intervention a été généré à près de 95 % par l’application ChatGPT.

Monsieur le ministre, vous avez qualifié ChatGPT de « perroquet approximatif ». Utilisé dans le contexte précis d’une intervention dans l’hémicycle, le trouvez-vous convaincant ou maintenez-vous votre jugement ?

« Distinguer le vrai du faux », « création d’emplois » et « potentiel disruptif », etc. En une minute, je pense que vous avez pu relever les principaux apports et risques de l’intelligence artificielle générative, limites et promesses dont la machine elle-même semble parfaitement consciente.

Vous constatez également la nécessité qui est la nôtre de les identifier pour combler le vide juridique entourant le développement de cette technologie, dont on ne peut nier le potentiel de fascination et qui évolue à une vitesse sidérante.

Comme toute innovation majeure dans l’histoire de l’humanité, les intelligences artificielles génératives font planer le spectre de destructions d’emplois, d’un remplacement de la force humaine par l’agilité de la machine et d’une forme de simplification de l’organisation du travail par la suppression du facteur humain.

On oublie seulement de dire que les nouvelles technologies, quelles qu’elles soient, créent souvent davantage d’emplois qu’elles n’en détruisent. Par ailleurs, leur développement ne signifie pas systématiquement un abandon des savoir-faire antérieurs. L’intelligence artificielle peut au contraire permettre la création et l’acquisition de nouvelles compétences.

Le secteur qui sera le plus directement affecté par leur développement sera sans surprise celui de l’informatique. Cela induira nécessairement une adaptation et, par là même, une expertise plus poussée de la part des ingénieurs, ainsi que la création de nouveaux métiers attractifs.

L’une des principales craintes généralement partagées face à un tel potentiel est aussi de voir l’humain dépassé par sa créature.

Toutefois, cette source d’intelligence repose encore et toujours sur l’humain, tandis que les intelligences artificielles génératives ne demeurent, en tout cas en 2023, que des fabriques d’illusions. En dépit de leur qualité, le contenu proposé ne se fonde que sur des corrélations statistiques, un volume de données certes exponentiel, mais toujours limité. Sans l’humain, point de machine, pour l’instant !

Ces inventions posent néanmoins de réelles questions éthiques et philosophiques. Comme toutes les technologies qui les ont précédées, par exemple internet, elles sont un pharmakon, à la fois poison et remède selon l’usage que l’on en fait.

Bien sûr, entre de mauvaises mains, ces outils sont dangereux, parce qu’ils sont hautement capables de tromper notre vigilance ou d’être utilisés pour défendre des intérêts particuliers. Mais cette créature-là ne nous échappera que si nous ne nous posons pas les bonnes questions et si nous n’anticipons pas ses effets pervers.

Les mêmes interrogations relatives à la régulation, aux normes et à une éventuelle gouvernance mondiale se posent aujourd’hui pour l’intelligence artificielle, comme elles se posent depuis plus de vingt-cinq ans face à l’essor d’internet. Force est de constater que nous avons appris en marchant. Il pouvait difficilement en être autrement, faute de précédent.

Toutefois, nous disposons aujourd’hui de cette expérience, d’un corpus de réflexions, de normes et d’une jurisprudence – tout cela peut nous guider. Il nous faut nous servir de ce savoir empirique.

Une difficulté demeure cependant : face à une technologie par nature dynamique, qui progresse sans cesse, le risque de caducité rapide des normes définies à un moment précis est réel. Il nous faut donc être plus rapides que la machine. Et c’est là, je pense, que se situe l’aspect le plus positif de cette technologie novatrice : en nous débarrassant du superflu, elle peut aussi nous permettre de nous concentrer sur l’essentiel. En vérité, elle nous lance un défi : elle nous invite à un regain d’intelligence.

Si l’IA générative peut nous affranchir de certaines tâches répétitives, doit-elle fatalement nous rendre intellectuellement paresseux ? C’est à l’humain de montrer qu’aucune machine ne peut surpasser son intelligence, son jugement, son esprit critique et sa remarquable capacité d’adaptation.

« Qu’ils soient positifs ou négatifs, les impacts sociaux et économiques de l’intelligence artificielle générative doivent être évalués. Nous ne pourrons pas faire l’économie d’une réflexion éthique, afin que cette technique puisse être utilisée au bénéfice de l’intérêt général. »

Cette conclusion, mes chers collègues, m’a été proposée par l’application ChatGPT… Je vous laisse apprécier sa pertinence !

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L'avenir, la liberté et la souveraineté : voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les défis majeurs que suscite l'essor de l'intelligence artificielle générative.

À l'heure où 100 millions de personnes ont les yeux rivés sur leur écran pour admirer les prouesses aussi extraordinaires qu'effrayantes du robot ChatGPT, la société semble programmée pour une forme d'obsolescence de ses modes de production et d'éducation.

Monsieur le ministre, vous avez qualifié l'intelligence artificielle générative, de façon assez légère et péremptoire, de « perroquet approximatif »… Je crois que vous n'avez pas pris la mesure de la révolution en cours.

Les balbutiements de cette technologie – car nous n'en sommes qu'aux balbutiements – dépassent déjà les performances de tous les outils que nous connaissions jusqu'ici. Les équilibres économiques du monde vont être bouleversés, et Google pourrait être remisé au rang de curiosité du passé.

Alors que la parole publique et les fonctions électives sont plus que jamais remises en question dans notre pays, le peuple va chercher les réponses à ses questions auprès d'algorithmes pré-entraînés dont la capacité stupéfiante à singer l'intelligence humaine crée les conditions d'une dystopie nouvelle.

Les craintes que nous éprouvons, mais aussi les chances que nous entrevoyons avec une telle technologie ne font que rappeler l'intrusion du numérique dans nos vies depuis de nombreuses années.

Nous assistons à l'extension de l'ubérisation au domaine de la pensée. Cela pose la question de la liberté et du rapport à la réalité. Créées dans la Silicon Valley, ces technologies diffusent un conformisme idéologique fidèle au progressisme de ses concepteurs et aux références anglo-saxonnes. C'est donc l'esprit critique et notre souveraineté qui sont menacés.

L'intelligence artificielle générative représente aussi une occasion de développer le secteur de la santé et de refondre l'éducation nationale en un système d'instruction tourné vers l'innovation et l'ingénierie. Le monde accélère. Monsieur le ministre, il faudrait vous mettre, ou vous remettre, en marche !

Applaudissements su r les travées du groupe SER. – M. André Gattolin applaudit également.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Aussi, qu'avez-vous prévu pour promouvoir le développement des entreprises françaises dans ce domaine et réfléchir aux limites éthiques que nous devons mettre en place pour empêcher l'effondrement de notre pays et assurer notre compétitivité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la révolution numérique a suscité un véritable bouleversement du monde du travail, opérant une transformation en profondeur de notre modèle économique et des métiers qui en constituent l’architecture.

Il est estimé qu’environ la moitié des métiers que les jeunes écoliers d’aujourd’hui exerceront demain n’existent pas encore. Si les potentialités de ce capitalisme numérique sont présentées comme assurément immenses, une telle numérisation du monde, au vu de l’orientation qu’elle a prise, alimente la crainte d’une déshumanisation de la société et d’une robotisation généralisée.

Nous sommes aujourd’hui dans un système où l’utilisateur est poussé par un ensemble de plateformes et de systèmes algorithmiques à générer toujours plus de données, au service finalement d’annonceurs, de publicitaires et de producteurs d’intelligence artificielle. Ces gigantesques masses de données numériques sont valorisées dans ce big data et exploitées au profit des algorithmes d’intelligence artificielle.

Or ce système, mes chers collègues, c’est celui de l’intensification de l’exploitation et de l’aliénation des travailleurs.

J’en veux pour preuve l’enquête du magazine Time, qui a révélé que l’entreprise OpenAI employait des travailleurs kenyans, rémunérés moins de deux dollars de l’heure, pour indexer d’immenses quantités de contenus toxiques circulant sur internet et ainsi nettoyer les données d’entraînement de ChatGPT.

Parce que « mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde », comme disait Albert Camus, il convient de rappeler que l’intelligence artificielle n’est ni artificielle ni intelligente. Considérer le logiciel ChatGPT comme intelligent, c’est se tromper lourdement sur la nature de notre débat et sur ses enjeux écologiques, politiques et sociaux.

ChatGPT n’est pas simplement un automate computationnel. Il implique l’exploitation des ressources minérales – terres rares – et humaines nécessaires à sa production et à son fonctionnement. Il dépend du travail gratuit des millions d’utilisateurs dont les requêtes améliorent l’algorithme. Par ces « micro-tâches », rémunérées moins de deux euros de l’heure, on s’affranchit du salariat et on précarise, à l’heure actuelle, des centaines de milliers de personnes à travers le monde, selon les travaux d’Antonio Casilli.

Comme toute révolution technologique, la révolution numérique est au cœur d’un affrontement de classes ; l’industrie du numérique a pour seule obsession de casser le coût du travail, en espérant substituer du capital mort au capital vivant.

Pourtant, cette révolution numérique pourrait créer de nouveaux métiers, augmenter les besoins en formation initiale et professionnelle et offrir la possibilité de réduire le temps de travail pour gagner du temps libre.

Néanmoins, l’orientation choisie par l’industrie du numérique, avec la collaboration aveugle de nos gouvernants, est manifeste : il s’agit d’exercer une pression sur les salaires et sur l’emploi, en captant la valeur, plutôt que d’améliorer l’efficacité sociale du travail. Il s’agit aussi de transformer en plateformes nos services publics et administratifs, créant de facto davantage d’insécurité sociale.

Cette industrie est dominée, à l’exception de la Chine, par une poignée de firmes américaines concentrant des capitalisations boursières démesurées et motivées par une visée politique mondiale, celle d’un capitalisme à son paroxysme, où l’on peut s’arroger certaines prérogatives étatiques en toute impunité.

Face à cela, la France et l’Union européenne ont joué le jeu de la big tech en reléguant le choix de l’outil numérique ou d’un prestataire technique à une logique utilitariste, sans prendre en compte les aspects politiques et stratégiques.

Il est impératif de reprendre la main sur notre destin et de choisir la société dans laquelle nous voulons vivre demain. Nous devons nous réapproprier collectivement nos données sous forme de communs, en exigeant la transparence et la lisibilité des algorithmes participant à l’apprentissage automatique.

Cet espoir de transition numérique, je le place aussi dans notre jeunesse, dans ce nombre considérable de jeunes adultes qui ne supportent plus de faire des « jobs à la con » – entendez par là, mes chers collègues, un travail auquel on ne trouve pas de sens, qui prive d’une réelle protection sociale et dans lequel règne une hiérarchie autre que celle de la compétence.

Parmi ces jeunes, nombreux sont ceux qui veulent créer et entreprendre, mais pas forcément en fondant une start-up pour la revendre au plus offrant et faire fortune. Leur objectif est plutôt d’entretenir et de rendre accessibles, via un réseau numérique, des communs mondiaux d’innovation partagée.

Cette jeunesse pense nouveaux modes de production, coopératives, économie sociale et solidaire, économie circulaire, lutte contre l’obsolescence programmée et mise en commun !

Ces nouveaux terrains de la lutte de classe, où l’on prépare une alternative au monde numérique capitalistique tel qu’il est conçu aujourd’hui, on les retrouve dans les ateliers coopératifs de fabrication et de création numériques, au sein des communautés de développement de logiciels libres, mais aussi dans les plateformes numériques coopératives. Ces tiers lieux préfigurent une possible République des communs.

Oui, mes chers collègues, cette révolution numérique, à l’œuvre depuis des années déjà, nous place au pied du mur du dépassement de la condition salariale. Mais aujourd’hui, nous devons choisir : est-ce pour aller vers une société d’« entrepreneurs de soi-même », sur le modèle des chauffeurs Uber esclaves du diktat du marché, ou est-ce pour construire la société de libres producteurs associés que Marx, d’ailleurs, appelait de ses vœux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Savoldelli

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la révolution numérique a suscité un véritable bouleversement du monde du travail, opérant une transformation en profondeur de notre modèle économique et des métiers qui en constituent l’architecture.

Il est estimé qu’environ la moitié des métiers que les jeunes écoliers d’aujourd’hui exerceront demain n’existent pas encore. Si les potentialités de ce capitalisme numérique sont présentées comme assurément immenses, une telle numérisation du monde, au vu de l’orientation qu’elle a prise, alimente la crainte d’une déshumanisation de la société et d’une robotisation généralisée.

Nous sommes aujourd’hui dans un système où l’utilisateur est poussé par un ensemble de plateformes et de systèmes algorithmiques à générer toujours plus de données, au service finalement d’annonceurs, de publicitaires et de producteurs d’intelligence artificielle. Ces gigantesques masses de données numériques sont valorisées dans ce big data et exploitées au profit des algorithmes d’intelligence artificielle.

Or ce système, mes chers collègues, c’est celui de l’intensification de l’exploitation et de l’aliénation des travailleurs.

J’en veux pour preuve l’enquête du magazine Time, qui a révélé que l’entreprise OpenAI employait des travailleurs kenyans, rémunérés moins de deux dollars de l’heure, pour indexer d’immenses quantités de contenus toxiques circulant sur internet et ainsi nettoyer les données d’entraînement de ChatGPT.

Parce que « mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde », comme disait Albert Camus, il convient de rappeler que l’intelligence artificielle n’est ni artificielle ni intelligente. Considérer le logiciel ChatGPT comme intelligent, c’est se tromper lourdement sur la nature de notre débat et sur ses enjeux écologiques, politiques et sociaux.

ChatGPT n’est pas simplement un automate computationnel. Il implique l’exploitation des ressources minérales – terres rares – et humaines nécessaires à sa production et à son fonctionnement. Il dépend du travail gratuit des millions d’utilisateurs dont les requêtes améliorent l’algorithme. Par ces « micro-tâches », rémunérées moins de 2 euros de l’heure, on s’affranchit du salariat et on précarise, à l’heure actuelle, des centaines de milliers de personnes à travers le monde, selon les travaux d’Antonio Casilli.

Comme toute révolution technologique, la révolution numérique est au cœur d’un affrontement de classes ; l’industrie du numérique a pour seule obsession de casser le coût du travail, en espérant substituer du capital mort au capital vivant.

Pourtant, cette révolution numérique pourrait créer de nouveaux métiers, augmenter les besoins en formation initiale et professionnelle et offrir la possibilité de réduire le temps de travail pour gagner du temps libre.

Néanmoins, l’orientation choisie par l’industrie du numérique, avec la collaboration aveugle de nos gouvernants, est manifeste : il s’agit d’exercer une pression sur les salaires et sur l’emploi, en captant la valeur, plutôt que d’améliorer l’efficacité sociale du travail. Il s’agit aussi de transformer en plateformes nos services publics et administratifs, créant de facto davantage d’insécurité sociale.

Cette industrie est dominée, à l’exception de la Chine, par une poignée de firmes américaines concentrant des capitalisations boursières démesurées et motivées par une visée politique mondiale, celle d’un capitalisme à son paroxysme, où l’on peut s’arroger certaines prérogatives étatiques en toute impunité.

Face à cela, la France et l’Union européenne ont joué le jeu de la big tech en reléguant le choix de l’outil numérique ou d’un prestataire technique à une logique utilitariste, sans prendre en compte les aspects politiques et stratégiques.

Il est impératif de reprendre la main sur notre destin et de choisir la société dans laquelle nous voulons vivre demain. Nous devons nous réapproprier collectivement nos données sous forme de communs, en exigeant la transparence et la lisibilité des algorithmes participant à l’apprentissage automatique.

Cet espoir de transition numérique, je le place aussi dans notre jeunesse, dans ce nombre considérable de jeunes adultes qui ne supportent plus de faire des « jobs à la con » – entendez par là, mes chers collègues, un travail auquel on ne trouve pas de sens, qui prive d’une réelle protection sociale et dans lequel règne une hiérarchie autre que celle de la compétence.

Parmi ces jeunes, nombreux sont ceux qui veulent créer et entreprendre, mais pas forcément en fondant une start-up pour la revendre au plus offrant et faire fortune. Leur objectif est plutôt d’entretenir et de rendre accessibles, via un réseau numérique, des communs mondiaux d’innovation partagée.

Cette jeunesse pense nouveaux modes de production, coopératives, économie sociale et solidaire, économie circulaire, lutte contre l’obsolescence programmée et mise en commun !

Ces nouveaux terrains de la lutte de classe, où l’on prépare une alternative au monde numérique capitalistique tel qu’il est conçu aujourd’hui, on les retrouve dans les ateliers coopératifs de fabrication et de création numériques, au sein des communautés de développement de logiciels libres, mais aussi dans les plateformes numériques coopératives. Ces tiers lieux préfigurent une possible République des communs.

Oui, mes chers collègues, cette révolution numérique, à l’œuvre depuis des années déjà, nous place au pied du mur du dépassement de la condition salariale. Mais aujourd’hui, nous devons choisir : est-ce pour aller vers une société d’« entrepreneurs de soi-même », sur le modèle des chauffeurs Uber esclaves du diktat du marché, ou est-ce pour construire la société de libres producteurs associés que Marx, d’ailleurs, appelait de ses vœux ?

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de ChatGPT à Midjourney en passant par DeepMind, l'intelligence artificielle a franchi des étapes inimaginables il y a encore quelques années, une évolution qui suscite à la fois intérêt et inquiétudes.

Intérêt, car l'intelligence artificielle dite « générative » – celle qui nous intéresse aujourd'hui – est une nouvelle révolution industrielle, porteuse d'innovations à venir tant pour les biens que pour les services.

Inquiétudes, car son mode de fonctionnement est de prendre ses propres décisions indépendamment de l'homme. Dit ainsi, cela peut faire peur. À force de progrès, dans quel univers allons-nous basculer ? Sera-ce celui dépeint par Aldous Huxley dans Le meilleur des mondes, où technologie et humanité se fondent ?

Nous n'en sommes pas là, heureusement, mais n'attendons pas que certains des enjeux de l'intelligence artificielle soient hors de contrôle. Au moment où nous parlons, je ne pense pas que la question soit encore celle de savoir si cette technologie est souhaitable ou non. Elle est déjà à l'œuvre, et les investisseurs s'y engouffrent avec allégresse. Par conséquent, nous en sommes plutôt à savoir comment l'encadrer, afin de ne pas la subir.

L'éthique est un des premiers enjeux de l'intelligence artificielle générative. Par exemple, doit-on permettre ses usages pour des prescriptions médicales, des fonctions d'encadrement du travail, ou encore des programmes de surveillance ? Ce dernier point me conduit à celui de la protection des données personnelles.

Tout d'abord, on doit se réjouir que deux plaintes aient été récemment déposées en France auprès de la Commission nationale de l'informatique et des libertés, la Cnil, par deux spécialistes de la protection des données personnelles.

Ensuite, faisons confiance à l'Union européenne, qui travaille aussi sur ce sujet au travers de l'Artificial Intelligence Act.

Bien entendu, on sait que la mise en place d'un cadre réglementaire va prendre du temps, alors que le caractère exponentiel de cette technologie lui est presque intrinsèque. L'Italie a purement et simplement interdit ChatGPT. Quelle est aujourd'hui votre position, monsieur le ministre, sur le principe d'un moratoire ?

À une autre échelle que celle des pays, on observe également que des institutions se mobilisent. Je pense par exemple à l'interdiction par Sciences Po d'utiliser le robot conversationnel d'OpenAI en dehors d'un encadrement pédagogique.

En effet, l'une des grandes craintes suscitées par cette technologie est l'appauvrissement des cerveaux, dans la mesure où l'intelligence artificielle générative inviterait à la paresse de l'esprit critique et de l'effort de construction intellectuelle. Une vaste réflexion menée au sein de l'éducation nationale pourrait permettre d'en circonscrire l'usage, au moins durant le temps scolaire. Il faut en tout cas rapidement s'intéresser à cet enjeu.

Le RDSE, attaché à l'esprit des Lumières, souhaite que la question des sources soit également bien appréhendée vis-à-vis de cette technologie, qui peut alimenter contre-vérités et mauvaises informations. Dans nos sociétés démocratiques, le rapport à la vérité est essentiel. On le sait, il doit absolument être maîtrisé, ce qui est complexe quand on ne connaît pas le cheminement de l'intelligence artificielle générative dans la confrontation des sources.

Enfin, je n'oublie pas une autre question cruciale : l'intelligence artificielle peut-elle être une réponse à la pénurie de compétences dans certains secteurs, ou est-ce au contraire une terrible promesse de destruction d'emplois ?

Les avis des experts sont partagés. Selon certains, près de 46 % des tâches administratives et 44 % des emplois juridiques seraient susceptibles d'être automatisés. D'autres études affirment que les développements de l'intelligence artificielle créeraient de nouveaux métiers en compensation de ces pertes, ne serait-ce que pour accompagner le développement de cette technologie et ses impacts.

Au fond, la question est celle-ci : comment partager équitablement les gains de productivité ? On se demande aussi ce que cette innovation peut offrir à la société : une nouvelle organisation du travail, par exemple une semaine de quatre jours ? Il faut en tout cas se préparer à une évolution des emplois, le plus important étant d'éviter leur précarisation, cette ubérisation que l'on a pu regretter dans certains secteurs.

Aussi, monsieur le ministre, il revient à la puissance publique de s'engager fermement sur ce chantier, afin de rappeler que tout n'est pas permis à l'intelligence artificielle et que sa vocation devrait être de supprimer des tâches et non des métiers.

En attendant, mon groupe ne souhaite pas verser dans la technophobie, sous réserve que l'humanisme reste la valeur centrale du progrès.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le développement exponentiel de la technologie signifie-t-il la fin programmée de l’humanité, telle que nous la connaissons ?

Sans être aussi pessimiste, on peut être inquiet des menaces que l’intelligence artificielle générative fait peser, avec l’automatisation croissante, sur l’emploi dans tous les secteurs, sur l’éducation et la création, ainsi que sur nos modèles sociaux, politiques et démocratiques, notamment par de possibles abus en matière de désinformation, de manipulation des opinions ou de contrôle des individus.

Si la presse se fait, jour après jour, l’écho des nouvelles prouesses de ChatGPT, des pays comme l’Italie ou le Canada l’ont interdit, tout comme d’autres ont banni TikTok.

Faut-il mettre en pause la recherche sur l’intelligence artificielle, comme l’ont demandé Elon Musk et un millier de scientifiques ? Peut-être, mais ne soyons pas dupes : au-delà des considérations éthiques, il y a là pour le dirigeant de SpaceX et de Twitter une occasion de régler ses comptes avec OpenAI dans la course effrénée à laquelle se livrent les entreprises pour la captation du marché.

Faut-il de la régulation et une intervention des pouvoirs publics pour mieux encadrer ces futures applications ? Assurément. Je le demande depuis dix ans, rapport après rapport, car je mesure la puissance transformatrice des nouvelles technologies, mais aussi leurs effets incertains et potentiellement dangereux sur la mise en réseau du monde.

En matière de régulation, après le règlement général sur la protection des données (RGPD), l’Europe légifère de nouveau, avec le Digital Markets Act (DMA), le Digital Services Act (DSA), puis la proposition de règlement sur l’intelligence artificielle en cours d’examen.

Rapporteure de ce dernier texte pour notre commission des affaires européennes, avec André Gattolin, Cyril Pellevat et Elsa Schalck, et co-auteure à ce titre d’une proposition de résolution européenne, je veux en souligner le caractère précurseur, l’Europe étant la première à se doter d’un cadre juridique en la matière.

Cependant, si son approche par le risque est pertinente, cette proposition de règlement ne résout pas, hélas, les questions éthiques que posent les algorithmes gourmands de nos données et les modèles économiques qui les sous-tendent.

Comme je le réclamais pour le DSA, il faut exiger la transparence absolue, des audits indépendants et, tant avant la mise sur le marché d’une application ou d’un logiciel que tout au long de leur cycle de vie, une évaluation des possibles effets dangereux, en somme un safety by design.

Je n’ai pas le temps d’évoquer en détail à cette tribune les mesures que nous avons suggérées pour hisser la proposition de règlement à un haut niveau de protection et pallier certaines lacunes. Nous avons pris en considération, comme l’a rappelé André Gattolin, les risques de l’intelligence artificielle, mais également les progrès fulgurants qu’elle rend possibles. Elle n’est en effet ni positive ni négative : en réalité, sa valeur dépend intrinsèquement de l’usage qui en est fait.

L’intelligence artificielle peut nous aider à résoudre des questions environnementales, de santé, de productivité, toutes questions stratégiques ; d’où la nécessité, pour l’Europe, de soutenir l’innovation !

Or par manque de stratégie industrielle ces dernières années, l’Europe a été largement distancée par les États-Unis et la Chine, car ces États ont massivement investi dans la recherche et le développement de leurs propres entreprises, qui dominent aujourd’hui le monde.

Si l’Europe ne veut pas totalement disparaître de la carte des technologies de demain, monsieur le ministre, elle doit se réveiller et sortir de ces dépendances dangereuses.

Avec l’Inflation Reduction Act, les États-Unis vont investir près de 348 milliards de dollars. On en est loin en Europe ! Il nous faut pourtant un minimum d’investissements dans l’intelligence artificielle, dans le cloud et dans les réseaux, ce qui n’est pas vraiment prévu dans la boussole numérique pour 2030, qui est censée constituer le plan d’action de l’Union en la matière.

Il faut donc une réglementation exigeante, mais aussi une formation et une information de tous, pour ne pas se laisser dominer par une élite technologique seule capable de décider de notre avenir, ainsi qu’un investissement dans la recherche et un soutien assumé à notre écosystème européen, grâce à un Buy European Act : tel est le triptyque pour lequel je ne cesse de plaider.

La maîtrise des technologies les plus avancées est devenue un enjeu géopolitique. Cette approche n’est donc pas du protectionnisme ; c’est la seule manière de promouvoir un monde fondé sur nos valeurs fondamentales, un monde qui n’exprime ni le modèle business above all de la big tech – le profit avant la sécurité – ni le modèle du contrôle social par le parti communiste chinois.

L’Europe doit aussi peser dans les instances mondiales où s’élaborent les protocoles et les standards. Elle doit peser, monsieur le ministre, dans l’élaboration du Pacte numérique mondial proposé par les Nations unies pour 2024.

Ce cadre d’engagement universel, au sujet duquel j’ai défendu, au nom de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), un rapport devant l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), doit absolument comprendre des mesures claires en faveur d’une intelligence artificielle qui soit au service de l’humain, fiable et éthique. Il y a là un enjeu de civilisation.

Debut de section - PermalienPhoto de Catherine Morin-Desailly

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, le développement exponentiel de la technologie signifie-t-il la fin programmée de l’humanité, telle que nous la connaissons ?

Sans être aussi pessimiste, on peut être inquiet des menaces que l’intelligence artificielle générative fait peser, avec l’automatisation croissante, sur l’emploi dans tous les secteurs, sur l’éducation et la création, ainsi que sur nos modèles sociaux, politiques et démocratiques, notamment par de possibles abus en matière de désinformation, de manipulation des opinions ou de contrôle des individus.

Si la presse se fait, jour après jour, l’écho des nouvelles prouesses de ChatGPT, des pays comme l’Italie ou le Canada l’ont interdit, tout comme d’autres ont banni TikTok.

Faut-il mettre en pause la recherche sur l’intelligence artificielle, comme l’ont demandé Elon Musk et un millier de scientifiques ? Peut-être, mais ne soyons pas dupes : au-delà des considérations éthiques, il y a là pour le dirigeant de SpaceX et de Twitter une occasion de régler ses comptes avec OpenAI dans la course effrénée à laquelle se livrent les entreprises pour la captation du marché.

Faut-il de la régulation et une intervention des pouvoirs publics pour mieux encadrer ces futures applications ? Assurément. Je le demande depuis dix ans, rapport après rapport, car je mesure la puissance transformatrice des nouvelles technologies, mais aussi leurs effets incertains et potentiellement dangereux sur la mise en réseau du monde.

En matière de régulation, après le règlement général sur la protection des données (RGPD), l’Europe légifère de nouveau, avec le Digital Markets Act (DMA), le Digital Services Act (DSA), puis la proposition de règlement sur l’intelligence artificielle en cours d’examen.

Rapporteure de ce dernier texte pour notre commission des affaires européennes, avec André Gattolin, Cyril Pellevat et Elsa Schalck, et coauteure à ce titre d’une proposition de résolution européenne, je veux en souligner le caractère précurseur, l’Europe étant la première à se doter d’un cadre juridique en la matière.

Cependant, si son approche par le risque est pertinente, cette proposition de règlement ne résout pas, hélas, les questions éthiques que posent les algorithmes gourmands de nos données et les modèles économiques qui les sous-tendent.

Comme je le réclamais pour le DSA, il faut exiger la transparence absolue, des audits indépendants et, tant avant la mise sur le marché d’une application ou d’un logiciel que tout au long de leur cycle de vie, une évaluation des possibles effets dangereux, en somme un safety by design.

Je n’ai pas le temps d’évoquer en détail à cette tribune les mesures que nous avons suggérées pour hisser la proposition de règlement à un haut niveau de protection et pallier certaines lacunes. Nous avons pris en considération, comme l’a rappelé André Gattolin, les risques de l’intelligence artificielle, mais également les progrès fulgurants qu’elle rend possibles. Elle n’est en effet ni positive ni négative : en réalité, sa valeur dépend intrinsèquement de l’usage qui en est fait.

L’intelligence artificielle peut nous aider à résoudre des questions environnementales, de santé, de productivité, toutes questions stratégiques ; d’où la nécessité, pour l’Europe, de soutenir l’innovation !

Or par manque de stratégie industrielle ces dernières années, l’Europe a été largement distancée par les États-Unis et la Chine, car ces États ont massivement investi dans la recherche et le développement de leurs propres entreprises, qui dominent aujourd’hui le monde.

Si l’Europe ne veut pas totalement disparaître de la carte des technologies de demain, monsieur le ministre, elle doit se réveiller et sortir de ces dépendances dangereuses.

Avec l’Inflation Reduction Act, les États-Unis vont investir près de 348 milliards de dollars. On en est loin en Europe ! Il nous faut pourtant un minimum d’investissements dans l’intelligence artificielle, dans le cloud et dans les réseaux, ce qui n’est pas vraiment prévu dans la boussole numérique pour 2030, qui est censée constituer le plan d’action de l’Union en la matière.

Il faut donc une réglementation exigeante, mais aussi une formation et une information de tous, pour ne pas se laisser dominer par une élite technologique seule capable de décider de notre avenir, ainsi qu’un investissement dans la recherche et un soutien assumé à notre écosystème européen, grâce à un Buy European Act : tel est le triptyque pour lequel je ne cesse de plaider.

La maîtrise des technologies les plus avancées est devenue un enjeu géopolitique. Cette approche n’est donc pas du protectionnisme ; c’est la seule manière de promouvoir un monde fondé sur nos valeurs fondamentales, un monde qui n’exprime ni le modèle business above all de la big tech – le profit avant la sécurité – ni le modèle du contrôle social par le parti communiste chinois.

L’Europe doit aussi peser dans les instances mondiales où s’élaborent les protocoles et les standards. Elle doit peser, monsieur le ministre, dans l’élaboration du Pacte numérique mondial proposé par les Nations unies pour 2024.

Ce cadre d’engagement universel, au sujet duquel j’ai défendu, au nom de l’Assemblée parlementaire de la francophonie (APF), un rapport devant l’Organisation internationale de la francophonie (OIF), doit absolument comprendre des mesures claires en faveur d’une intelligence artificielle qui soit au service de l’humain, fiable et éthique. Il y a là un enjeu de civilisation.

Mme Sylvie Robert et M. André Gattolin applaudissent.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis quelques mois, les intelligences artificielles sont au centre de l'actualité.

Qu'il s'agisse de logiciels conversationnels tels que ChatGPT ou Eliza, de modèles de génération d'images et de vidéos, ou encore d'auto-encodeurs, pas une semaine ne passe sans que l'on mette à la une les prouesses de ces nouvelles technologies pouvant produire des contenus de manière autonome, suscitant tour à tour admiration et inquiétudes.

En réalité, la très probable révolution industrielle que représentent les intelligences artificielles s'est amorcée il y a plusieurs années déjà. Nous en utilisons chaque jour sans le savoir. Au fil des mises à jour et de la collecte toujours plus massive de données, elles ne cessent de se perfectionner.

Si elles partagent des similitudes avec les intelligences artificielles plus traditionnelles, les IA génératives soulèvent des problèmes spécifiques, notamment en matière d'éthique, de désinformation, de protection des données, ou encore de productivité et d'impact sur les emplois.

Bien que des améliorations soient encore nécessaires pour qu'elles soient utilisables à une échelle industrielle, de nombreuses études montrent que leur éventuelle généralisation aura des impacts d'une ampleur inédite depuis l'arrivée de l'ordinateur.

Ainsi, une étude menée par OpenAI, Open Research et l'université de Pennsylvanie avance que 80 % de la main-d'œuvre américaine pourraient voir au moins 10 % de leurs tâches réalisées par une intelligence artificielle générative. Pour 19 % des travailleurs, 50 % de leurs tâches pourraient être prises en charge par ces nouvelles technologies, en particulier dans les domaines des services administratifs et juridiques, du management, des services financiers, du marketing, de la communication, ou encore du graphisme et de la conception.

D'après une autre étude de la banque Goldman Sachs, 300 millions d'emplois pourraient à terme être menacés, mais la productivité au travail pourrait progresser de 1, 5 point chaque année pendant dix ans, tandis que la hausse annuelle du PIB mondial pourrait atteindre 7 %, contre 2, 9 % prévus pour 2023 par le FMI.

Sans qu'il puisse être affirmé que certains métiers disparaîtront inévitablement, puisqu'un gain de productivité n'entraîne pas nécessairement la disparition d'un emploi, il est certain que le marché du travail sera bouleversé.

De même, de nouveaux métiers apparaîtront et compenseront probablement le nombre de postes supprimés. Si une étude du Forum économique mondial estime que 87 millions d'emplois seront remplacés par des intelligences artificielles, elle met en exergue que celles-ci permettront la création de 95 millions d'emplois.

Bien sûr, il ne s'agit à ce stade que de prévisions ; les effets de ces technologies sur le marché du travail devront de toute évidence être suivis de près, afin que nous puissions nous adapter à des conséquences imprévues de leur usage.

En outre, si la France veut profiter pleinement des externalités positives de l'intelligence artificielle générative, il ne faut pas qu'elle loupe le coche en matière d'innovation comme de formation à ces nouveaux métiers.

Les géants de la tech sont déjà dans les starting - blocks et, malgré l'existence de certaines start-up françaises prometteuses, notre pays et, plus largement, l'Europe font bien pâle figure face aux compagnies américaines et chinoises, qui investissent des milliards de dollars dans ces technologies.

Ma première question, monsieur le ministre, porte donc sur les moyens que le Gouvernement compte mettre en œuvre, pour, d'une part, soutenir l'innovation des entreprises françaises dans le domaine de l'intelligence artificielle, et, d'autre part, favoriser la formation à ces métiers d'avenir, ainsi que la reconversion pour les travailleurs dont l'emploi deviendrait obsolète.

Abordons désormais certains aspects de l'intelligence artificielle générative qui sont autrement moins réjouissants que la hausse de la productivité et que la création de nouveaux emplois.

Il apparaît en effet que des usages malveillants de ce type d'IA, ainsi que des erreurs du programme lui-même, peuvent avoir des conséquences dramatiques pour les libertés fondamentales, notamment le droit à la protection des données personnelles.

Les expériences de ces dernières semaines, voire de ces dernières années, nous prouvent que ces dangers sont réels : qu'il s'agisse du non-respect du RGPD par ChatGPT, du jeune homme poussé au suicide par le chatbot Eliza en Belgique, des images devenues virales du Président de la République et du pape, créées par intelligence artificielle, des deep fakes de personnalités publiques, du logiciel de recrutement d'Amazon qui s'est révélé discriminatoire envers les femmes, ou encore du scandale des allocations familiales aux Pays-Bas, où un algorithme d'auto-apprentissage ciblait les minorités et les accusait à tort de fraude, les exemples sont nombreux et se multiplient.

Que ces problèmes découlent d'une non-conformité du logiciel avec la réglementation, d'erreurs faites par l'intelligence artificielle ou d'usages sciemment malveillants qu'en font ses utilisateurs, il est nécessaire de trouver des solutions et de légiférer pour éviter ces effets de bord, sans pour autant interdire les intelligences artificielles génératives.

Il s'agirait en effet d'une grave erreur d'un point de vue économique, qui ferait une nouvelle fois perdre à la France du temps dans la course effrénée à l'innovation. Les entreprises développant des intelligences artificielles sont elles-mêmes en faveur de l'élaboration d'une réglementation, comme l'a récemment fait savoir OpenAI, car ce n'est qu'avec un cadre clair, assurant une sécurité juridique, que les potentialités économiques et sociétales de l'intelligence artificielle pourront pleinement se réaliser.

Le RGPD apporte un premier échelon de réponse en matière de protection des données utilisées par les intelligences artificielles, mais il n'est pas suffisant pour éviter l'ensemble des potentielles externalités négatives et peut, parfois, se révéler contre-productif en matière d'innovation, notamment parce que ce n'est qu'en traitant certaines données personnelles que les entreprises pourront lutter contre les biais de certains systèmes d'intelligence artificielle.

Des dérogations au RGPD devront donc être prévues, mais il faut qu'elles soient encadrées strictement pour nous prémunir de toute utilisation détournée de ces données sensibles, notamment à des fins commerciales.

Ces dangers réels ou prévisibles des IA et cette inadaptation du RGPD ont conduit l'Union européenne à se saisir de la question des intelligences artificielles au sens large, par le biais d'une proposition de règlement.

Avec mes collègues André Gattolin, Catherine Morin-Desailly et Elsa Schalk, dans le cadre des travaux de la commission des affaires européennes, j'ai été chargé d'élaborer une proposition de résolution européenne et un rapport relatif à ce règlement. Ce dernier est assurément un pas dans la bonne direction pour sécuriser les intelligences artificielles, mais mes corapporteurs et moi avons relevé certaines lacunes.

Faute de temps, je ne m'arrêterai pas sur chacune d'entre elles, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître la position du Gouvernement sur nos propositions, ainsi que les points principaux que vous souhaitez soutenir au Conseil au sein de ce règlement.

En outre, j'insiste sur l'absolue nécessité pour la France comme pour l'UE d'engager des discussions avec les pays tiers au sein des instances internationales de normalisation, pour les inviter à adopter des réglementations similaires. En effet, si nous sommes les seuls États à imposer des normes aussi ambitieuses, cela protégera certes les citoyens européens, mais cela pourrait nous désavantager d'un point de vue concurrentiel.

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous m'indiquer si des échanges ont déjà été entamés avec d'autres pays, notamment les États-Unis et la Chine, afin de promouvoir l'élaboration de législations similaires dans ces États ?

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

L’avenir, la liberté et la souveraineté : voilà, monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, les défis majeurs que suscite l’essor de l’intelligence artificielle générative.

À l’heure où 100 millions de personnes ont les yeux rivés sur leur écran pour admirer les prouesses aussi extraordinaires qu’effrayantes du robot ChatGPT, la société semble programmée pour une forme d’obsolescence de ses modes de production et d’éducation.

Monsieur le ministre, vous avez qualifié l’intelligence artificielle générative, de façon assez légère et péremptoire, de « perroquet approximatif »… Je crois que vous n’avez pas pris la mesure de la révolution en cours.

Les balbutiements de cette technologie – car nous n’en sommes qu’aux balbutiements – dépassent déjà les performances de tous les outils que nous connaissions jusqu’ici. Les équilibres économiques du monde vont être bouleversés, et Google pourrait être remisé au rang de curiosité du passé.

Alors que la parole publique et les fonctions électives sont plus que jamais remises en question dans notre pays, le peuple va chercher les réponses à ses questions auprès d’algorithmes pré-entraînés dont la capacité stupéfiante à singer l’intelligence humaine crée les conditions d’une dystopie nouvelle.

Les craintes que nous éprouvons, mais aussi les chances que nous entrevoyons avec une telle technologie ne font que rappeler l’intrusion du numérique dans nos vies depuis de nombreuses années.

Nous assistons à l’extension de l’ubérisation au domaine de la pensée. Cela pose la question de la liberté et du rapport à la réalité. Créées dans la Silicon Valley, ces technologies diffusent un conformisme idéologique fidèle au progressisme de ses concepteurs et aux références anglo-saxonnes. C’est donc l’esprit critique et notre souveraineté qui sont menacés.

L’intelligence artificielle générative représente aussi une occasion de développer le secteur de la santé et de refondre l’éducation nationale en un système d’instruction tourné vers l’innovation et l’ingénierie. Le monde accélère. Monsieur le ministre, il faudrait vous mettre, ou vous remettre, en marche !

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.

Sourires.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Aussi, qu’avez-vous prévu pour promouvoir le développement des entreprises françaises dans ce domaine et réfléchir aux limites éthiques que nous devons mettre en place pour empêcher l’effondrement de notre pays et assurer notre compétitivité ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2017, le groupe Les Indépendants – République et Territoires avait organisé en ces murs un débat sur le thème : « Intelligence artificielle, enjeux économiques et cadres légaux ».

Au vu de l'accélération de ces technologies et des enjeux y afférents, nous avons jugé opportun de proposer de nouveau un débat sur ce thème. Je salue donc le choix collectif d'évoquer, ensemble, les défis de l'intelligence artificielle dite « générative ».

J'ai eu personnellement la chance d'assister, dans ma pratique professionnelle, au forum mondial sur l'intelligence artificielle qui s'est tenu en Chine, à Wuzhen, en 2017, avec d'éminents chercheurs du monde entier, dont Yuval Noah Harari, que vous connaissez tous, mes chers collègues. J'ai cru y comprendre que la différence majeure entre l'intelligence artificielle et le cerveau humain était l'intention, apanage de ce dernier. C'est sur cet élément, me semble-t-il, que nous devons nous concentrer d'un point de vue éthique, monsieur le ministre.

Dès 2016, l'OCDE, l'Organisation de coopération et de développement économiques, prévenait que 9 % des emplois en France présentaient un « risque élevé de substitution » par des robots. Avec l'amélioration permanente de l'intelligence artificielle, cette proportion augmentera.

Cette vérité est à nuancer, car ces prévisions pessimistes n'évoquent que les destructions et non les nouvelles créations d'emplois. J'ai un exemple frappant de cette dynamique positive dans mon département de l'Aube, où l'entreprise familiale Gamba et Rota a investi 10 millions d'euros pour robotiser son outil logistique via l'IA, ce qui permettra d'envisager la création d'une centaine d'emplois.

Nous sommes à l'aube d'une vaste révolution de l'emploi et du rapport au travail. Cela vaut particulièrement pour les jeunes, qui sont plus que jamais en quête de sens dans leur vie professionnelle.

La dichotomie entre technophiles béats et détracteurs outranciers est bien évidemment dépassée. L'immense défi de l'intelligence artificielle nous invite, au contraire, à la nuance et à la précision, dans un univers en perpétuelle mutation.

Il s'agit d'anticiper les grandes évolutions sociétales, économiques et politiques qui en découleront. L'importance des progrès permanents entraînés par l'intelligence artificielle fait écho à l'ampleur des craintes qu'elle nous inspire.

À ces inquiétudes, il nous faut répondre avec pédagogie, pour tirer profit des perspectives positives ouvertes par cette technologie. Il nous faut aussi répondre avec lucidité, pour anticiper les changements d'ampleur qui surviendront, notamment sur le marché du travail. Il nous faut enfin répondre avec fermeté, par un cadre réglementaire solide, pour garantir à nos concitoyens une intelligence artificielle fiable et sûre.

L'Europe doit développer une approche éthique des données, avec une méthode et un cadre réglementaire propres. Cela implique de s'affranchir de la Chine et des États-Unis, qui nous imposent, depuis un certain temps, leur calendrier et leurs objectifs.

Les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – conservent leur puissance par les supports qu'ils fournissent au monde depuis tant d'années. ChatGPT est d'ailleurs financé par Microsoft. L'Europe a perdu la bataille des données personnelles ; celle des données professionnelles est en cours. Les géants y abusent de leur position dominante.

Nous devons aborder avec une grande vigilance le recours à l'intelligence artificielle, via des outils tels que ChatGPT, dans nos entreprises. Les gains de productivité espérés ne doivent pas masquer l'aspirateur à données qu'est cet outil.

La France est également pénalisée par la fuite de certains de ses cerveaux, alors même que leur formation a été assurée sur les deniers publics. Nous finançons, en partie, notre propre dépendance.

Notre pays dispose pourtant d'atouts essentiels et d'un vivier d'acteurs spécialisés. Selon l'association France Digitale, l'écosystème français rassemble 590 start-up et plus de 80 laboratoires de recherche en intelligence artificielle, ce qui nous place en pole position à l'échelle européenne.

Nous avons des compétences réelles et pointues dans certaines niches. Cela fait notre force. Nous pouvons également dynamiser ces forces grâce au droit. Nous attendons ainsi beaucoup de l'Artificial Intelligence Act. Ce cadre nouveau doit nous redonner une longueur d'avance.

Je profite de cette occasion pour saluer la mobilisation de Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, sous l'impulsion duquel nous avons, en deux ans – un temps record ! – bâti une réglementation de l'intelligence artificielle dont la précision et la complétude sont inégalées.

Les prochaines années s'annoncent décisives. Il n'est pas question de se laisser distancer davantage, sous peine de rater définitivement l'occasion de rester dans la course.

Dès lors, monsieur le ministre, comment la France s'engage-t-elle pour ériger l'Europe en chef de file, tout en garantissant la sécurité et les droits des utilisateurs ? Que pensez-vous à cet égard des récentes positions de l'Italie ? Et pouvez-vous nous indiquer précisément notre feuille de route sur ce sujet, à l'échelle tant nationale qu'européenne ?

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de ChatGPT à Midjourney en passant par DeepMind, l’intelligence artificielle a franchi des étapes inimaginables il y a encore quelques années, une évolution qui suscite à la fois intérêt et inquiétudes.

Intérêt, car l’intelligence artificielle dite « générative » – celle qui nous intéresse aujourd’hui – est une nouvelle révolution industrielle, porteuse d’innovations à venir tant pour les biens que pour les services.

Inquiétudes, car son mode de fonctionnement est de prendre ses propres décisions indépendamment de l’homme. Dit ainsi, cela peut faire peur. À force de progrès, dans quel univers allons-nous basculer ? Sera-ce celui dépeint par Aldous Huxley dans Le meilleur des mondes, où technologie et humanité se fondent ?

Nous n’en sommes pas là, heureusement, mais n’attendons pas que certains des enjeux de l’intelligence artificielle soient hors de contrôle. Au moment où nous parlons, je ne pense pas que la question soit encore celle de savoir si cette technologie est souhaitable ou non. Elle est déjà à l’œuvre, et les investisseurs s’y engouffrent avec allégresse. Par conséquent, nous en sommes plutôt à savoir comment l’encadrer, afin de ne pas la subir.

L’éthique est un des premiers enjeux de l’intelligence artificielle générative. Par exemple, doit-on permettre ses usages pour des prescriptions médicales, des fonctions d’encadrement du travail, ou encore des programmes de surveillance ? Ce dernier point me conduit à celui de la protection des données personnelles.

Tout d’abord, on doit se réjouir que deux plaintes aient été récemment déposées en France auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la Cnil, par deux spécialistes de la protection des données personnelles.

Ensuite, faisons confiance à l’Union européenne, qui travaille aussi sur ce sujet au travers de l’Artificial Intelligence Act.

Bien entendu, on sait que la mise en place d’un cadre réglementaire va prendre du temps, alors que le caractère exponentiel de cette technologie lui est presque intrinsèque. L’Italie a purement et simplement interdit ChatGPT. Quelle est aujourd’hui votre position, monsieur le ministre, sur le principe d’un moratoire ?

À une autre échelle que celle des pays, on observe également que des institutions se mobilisent. Je pense par exemple à l’interdiction par Sciences Po d’utiliser le robot conversationnel d’OpenAI en dehors d’un encadrement pédagogique.

En effet, l’une des grandes craintes suscitées par cette technologie est l’appauvrissement des cerveaux, dans la mesure où l’intelligence artificielle générative inviterait à la paresse de l’esprit critique et de l’effort de construction intellectuelle. Une vaste réflexion menée au sein de l’éducation nationale pourrait permettre d’en circonscrire l’usage, au moins durant le temps scolaire. Il faut en tout cas rapidement s’intéresser à cet enjeu.

Le RDSE, attaché à l’esprit des Lumières, souhaite que la question des sources soit également bien appréhendée vis-à-vis de cette technologie, qui peut alimenter contre-vérités et mauvaises informations. Dans nos sociétés démocratiques, le rapport à la vérité est essentiel. On le sait, il doit absolument être maîtrisé, ce qui est complexe quand on ne connaît pas le cheminement de l’intelligence artificielle générative dans la confrontation des sources.

Enfin, je n’oublie pas une autre question cruciale : l’intelligence artificielle peut-elle être une réponse à la pénurie de compétences dans certains secteurs, ou est-ce au contraire une terrible promesse de destruction d’emplois ?

Les avis des experts sont partagés. Selon certains, près de 46 % des tâches administratives et 44 % des emplois juridiques seraient susceptibles d’être automatisés. D’autres études affirment que les développements de l’intelligence artificielle créeraient de nouveaux métiers en compensation de ces pertes, ne serait-ce que pour accompagner le développement de cette technologie et ses impacts.

Au fond, la question est celle-ci : comment partager équitablement les gains de productivité ? On se demande aussi ce que cette innovation peut offrir à la société : une nouvelle organisation du travail, par exemple une semaine de quatre jours ? Il faut en tout cas se préparer à une évolution des emplois, le plus important étant d’éviter leur précarisation, cette ubérisation que l’on a pu regretter dans certains secteurs.

Aussi, monsieur le ministre, il revient à la puissance publique de s’engager fermement sur ce chantier, afin de rappeler que tout n’est pas permis à l’intelligence artificielle et que sa vocation devrait être de supprimer des tâches et non des métiers.

En attendant, mon groupe ne souhaite pas verser dans la technophobie, sous réserve que l’humanisme reste la valeur centrale du progrès.

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Claude Requier

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, de ChatGPT à Midjourney en passant par DeepMind, l’intelligence artificielle a franchi des étapes inimaginables il y a encore quelques années, une évolution qui suscite à la fois intérêt et inquiétudes.

Intérêt, car l’intelligence artificielle dite « générative » – celle qui nous intéresse aujourd’hui – est une nouvelle révolution industrielle, porteuse d’innovations à venir tant pour les biens que pour les services.

Inquiétudes, car son mode de fonctionnement est de prendre ses propres décisions indépendamment de l’homme. Dit ainsi, cela peut faire peur. À force de progrès, dans quel univers allons-nous basculer ? Sera-ce celui dépeint par Aldous Huxley dans Le meilleur des mondes, où technologie et humanité se fondent ?

Nous n’en sommes pas là, heureusement, mais n’attendons pas que certains des enjeux de l’intelligence artificielle soient hors de contrôle. Au moment où nous parlons, je ne pense pas que la question soit encore celle de savoir si cette technologie est souhaitable ou non. Elle est déjà à l’œuvre, et les investisseurs s’y engouffrent avec allégresse. Par conséquent, nous en sommes plutôt à savoir comment l’encadrer, afin de ne pas la subir.

L’éthique est un des premiers enjeux de l’intelligence artificielle générative. Par exemple, doit-on permettre ses usages pour des prescriptions médicales, des fonctions d’encadrement du travail, ou encore des programmes de surveillance ? Ce dernier point me conduit à celui de la protection des données personnelles.

Tout d’abord, on doit se réjouir que deux plaintes aient été récemment déposées en France auprès de la Commission nationale de l’informatique et des libertés, la Cnil, par deux spécialistes de la protection des données personnelles.

Ensuite, faisons confiance à l’Union européenne, qui travaille aussi sur ce sujet au travers de l’Artificial Intelligence Act.

Bien entendu, on sait que la mise en place d’un cadre réglementaire va prendre du temps, alors que le caractère exponentiel de cette technologie lui est presque intrinsèque. L’Italie a purement et simplement interdit ChatGPT. Quelle est aujourd’hui votre position, monsieur le ministre, sur le principe d’un moratoire ?

À une autre échelle que celle des pays, on observe également que des institutions se mobilisent. Je pense par exemple à l’interdiction par Sciences Po d’utiliser le robot conversationnel d’OpenAI en dehors d’un encadrement pédagogique.

En effet, l’une des grandes craintes suscitées par cette technologie est l’appauvrissement des cerveaux, dans la mesure où l’intelligence artificielle générative inviterait à la paresse de l’esprit critique et de l’effort de construction intellectuelle. Une vaste réflexion menée au sein de l’éducation nationale pourrait permettre d’en circonscrire l’usage, au moins durant le temps scolaire. Il faut en tout cas rapidement s’intéresser à cet enjeu.

Le RDSE, attaché à l’esprit des Lumières, souhaite que la question des sources soit également bien appréhendée vis-à-vis de cette technologie, qui peut alimenter contre-vérités et mauvaises informations. Dans nos sociétés démocratiques, le rapport à la vérité est essentiel. On le sait, il doit absolument être maîtrisé, ce qui est complexe quand on ne connaît pas le cheminement de l’intelligence artificielle générative dans la confrontation des sources.

Enfin, je n’oublie pas une autre question cruciale : l’intelligence artificielle peut-elle être une réponse à la pénurie de compétences dans certains secteurs, ou est-ce au contraire une terrible promesse de destruction d’emplois ?

Les avis des experts sont partagés. Selon certains, près de 46 % des tâches administratives et 44 % des emplois juridiques seraient susceptibles d’être automatisés. D’autres études affirment que les développements de l’intelligence artificielle créeraient de nouveaux métiers en compensation de ces pertes, ne serait-ce que pour accompagner le développement de cette technologie et ses impacts.

Au fond, la question est celle-ci : comment partager équitablement les gains de productivité ? On se demande aussi ce que cette innovation peut offrir à la société : une nouvelle organisation du travail, par exemple une semaine de quatre jours ? Il faut en tout cas se préparer à une évolution des emplois, le plus important étant d’éviter leur précarisation, cette ubérisation que l’on a pu regretter dans certains secteurs.

Aussi, monsieur le ministre, il revient à la puissance publique de s’engager fermement sur ce chantier, afin de rappeler que tout n’est pas permis à l’intelligence artificielle et que sa vocation devrait être de supprimer des tâches et non des métiers.

En attendant, le groupe RDSE ne souhaite pas verser dans la technophobie, sous réserve que l’humanisme reste la valeur centrale du progrès.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

En revanche, je l'avais fait il y a quelques mois pour rédiger la question d'actualité que j'avais posée au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse afin de l'alerter sur la suppression de la technologie en classe de sixième, alors même que cette matière est directement liée aux enjeux du numérique. En effet, la France a plus que jamais besoin d'une jeunesse ouverte aux sciences et aux technologies.

En tant qu'enseignante, je suis impressionnée par les résultats obtenus par le recours à l'intelligence artificielle. Les perspectives semblent sans limite, dans des domaines aussi variés que l'agriculture, la logistique ou la santé.

À l'inverse, en tant que citoyenne, l'essor fulgurant de ces nouvelles technologies m'interroge : dans quel cadre les circonscrire, par quelle réglementation, pour quels objectifs et avec quelles conséquences pour notre société ?

Aussi, en tant que parlementaires, devons-nous mener un travail colossal sur ce sujet.

À cet égard, je salue les parlementaires européens, qui examinent en ce moment même l'Artificial Intelligence Act (AI Act), une proposition de règlement pour encadrer l'usage et la commercialisation des intelligences artificielles.

De même, je regarde avec intérêt la décision de l'Italie, qui vient de bloquer ChatGPT pour respecter la législation sur les données personnelles. L'interdiction n'est probablement pas la bonne solution, mais elle doit nous interroger sur les limites de cet outil.

Malgré la fascination que suscitent de telles innovations technologiques, nous devons garder les pieds sur terre et légiférer dans l'intérêt général.

Il y a dix ans, nous nourrissions de grands espoirs vis-à-vis des assistants numériques comme Siri ou Alexa ; il y a encore quelques mois, nous parlions des cryptomonnaies avec des étoiles dans les yeux. Pourtant, ces innovations n'ont fait que créer de nouveaux besoins, sans apporter de solutions concrètes.

Malgré la révolution informatique et la généralisation d'internet, la croissance de la productivité ralentit depuis trente ans. Si certains prophétisent de formidables gains de productivité et voient l'intelligence artificielle comme une poule aux œufs d'or, la réalité sera certainement tout autre.

Par ailleurs, nous devons nous interroger sur les conséquences sociales d'un développement massif de l'intelligence artificielle. Dans une récente étude, Goldman Sachs estimait que 300 millions d'emplois seraient menacés par l'essor de l'intelligence artificielle.

S'il ne sert à rien de crier au loup, nous ne pouvons ignorer cette alerte, d'autant qu'une partie des emplois qui sont créés par ces nouvelles technologies sont ingrats et mal payés. Derrière les ingénieurs, les petites mains de l'intelligence artificielle sont à l'ouvrage.

Des Kenyans employés par OpenAI sont ainsi payés entre 1 et 2 dollars par jour pour repérer les contenus toxiques, à un rythme soutenu et dans des conditions de travail déplorables. Si l'intelligence artificielle ne remplace pas nos emplois, elle pourrait être à l'origine d'une nouvelle dégradation du travail.

Enfin, l'intitulé de notre débat oublie un aspect fondamental, qu'il n'est plus acceptable d'ignorer au XXe siècle : je parle bien sûr de l'impact environnemental et climatique de l'intelligence artificielle.

En effet, le numérique représente d'ores et déjà 4 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, dont une partie est imputable à l'intelligence artificielle. Entraîner un modèle tel que celui de ChatGPT pendant quatre à sept jours émettrait autant de gaz à effet de serre qu'un être humain en produit en 57 ans, et cette estimation progresse à mesure que les modèles d'intelligence artificielle se perfectionnent et accumulent des connaissances.

Derrière la chimère d'un numérique durable, dont les applications feraient disparaître par magie les risques environnementaux, il y a la réalité des chiffres. Ainsi, si les possibilités permises par l'intelligence artificielle nous font rêver, nous devons être pleinement conscients des impacts économiques, sociaux et environnementaux de cette technologie.

L'intelligence artificielle est là, elle fait déjà partie de nos vies. Il n'est donc pas question de l'interdire ou de la réserver à une élite. Toutefois, nous devons la réguler et la conditionner à sa plus-value sociale et environnementale. La technique n'est pas neutre, mais elle n'est ni bonne ni mauvaise en soi non plus. Elle est, comme l'a souligné le penseur Jacques Ellul, « ambivalente ». §

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

La parole est à Mme Sylvie Robert. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis quelques mois, les intelligences artificielles sont au centre de l’actualité.

Qu’il s’agisse de logiciels conversationnels tels que ChatGPT ou Eliza, de modèles de génération d’images et de vidéos, ou encore d’auto-encodeurs, pas une semaine ne passe sans que l’on mette à la une les prouesses de ces nouvelles technologies pouvant produire des contenus de manière autonome, suscitant tour à tour admiration et inquiétudes.

En réalité, la très probable révolution industrielle que représentent les intelligences artificielles s’est amorcée il y a plusieurs années déjà. Nous en utilisons chaque jour sans le savoir. Au fil des mises à jour et de la collecte toujours plus massive de données, elles ne cessent de se perfectionner.

Si elles partagent des similitudes avec les intelligences artificielles plus traditionnelles, les IA génératives soulèvent des problèmes spécifiques, notamment en matière d’éthique, de désinformation, de protection des données, ou encore de productivité et d’impact sur les emplois.

Bien que des améliorations soient encore nécessaires pour qu’elles soient utilisables à une échelle industrielle, de nombreuses études montrent que leur éventuelle généralisation aura des impacts d’une ampleur inédite depuis l’arrivée de l’ordinateur.

Ainsi, une étude menée par OpenAI, Open Research et l’université de Pennsylvanie avance que 80 % de la main-d’œuvre américaine pourraient voir au moins 10 % de leurs tâches réalisées par une intelligence artificielle générative. Pour 19 % des travailleurs, 50 % de leurs tâches pourraient être prises en charge par ces nouvelles technologies, en particulier dans les domaines des services administratifs et juridiques, du management, des services financiers, du marketing, de la communication, ou encore du graphisme et de la conception.

D’après une autre étude de la banque Goldman Sachs, 300 millions d’emplois pourraient à terme être menacés, mais la productivité au travail pourrait progresser de 1, 5 point chaque année pendant dix ans, tandis que la hausse annuelle du PIB mondial pourrait atteindre 7 %, contre 2, 9 % prévus pour 2023 par le FMI.

Sans qu’il puisse être affirmé que certains métiers disparaîtront inévitablement, puisqu’un gain de productivité n’entraîne pas nécessairement la disparition d’un emploi, il est certain que le marché du travail sera bouleversé.

De même, de nouveaux métiers apparaîtront et compenseront probablement le nombre de postes supprimés. Si une étude du Forum économique mondial estime que 87 millions d’emplois seront remplacés par des intelligences artificielles, elle met en exergue que celles-ci permettront la création de 95 millions d’emplois.

Bien sûr, il ne s’agit à ce stade que de prévisions ; les effets de ces technologies sur le marché du travail devront de toute évidence être suivis de près, afin que nous puissions nous adapter à des conséquences imprévues de leur usage.

En outre, si la France veut profiter pleinement des externalités positives de l’intelligence artificielle générative, il ne faut pas qu’elle loupe le coche en matière d’innovation comme de formation à ces nouveaux métiers.

Les géants de la tech sont déjà dans les starting-blocks et, malgré l’existence de certaines start-up françaises prometteuses, notre pays et, plus largement, l’Europe font bien pâle figure face aux compagnies américaines et chinoises, qui investissent des milliards de dollars dans ces technologies.

Ma première question, monsieur le ministre, porte donc sur les moyens que le Gouvernement compte mettre en œuvre, pour, d’une part, soutenir l’innovation des entreprises françaises dans le domaine de l’intelligence artificielle, et, d’autre part, favoriser la formation à ces métiers d’avenir, ainsi que la reconversion pour les travailleurs dont l’emploi deviendrait obsolète.

Abordons désormais certains aspects de l’intelligence artificielle générative qui sont autrement moins réjouissants que la hausse de la productivité et que la création de nouveaux emplois.

Il apparaît en effet que des usages malveillants de ce type d’IA, ainsi que des erreurs du programme lui-même, peuvent avoir des conséquences dramatiques pour les libertés fondamentales, notamment le droit à la protection des données personnelles.

Les expériences de ces dernières semaines, voire de ces dernières années, nous prouvent que ces dangers sont réels : qu’il s’agisse du non-respect du RGPD par ChatGPT, du jeune homme poussé au suicide par le chatbot Eliza en Belgique, des images devenues virales du Président de la République et du pape, créées par intelligence artificielle, des deep fakes de personnalités publiques, du logiciel de recrutement d’Amazon qui s’est révélé discriminatoire envers les femmes, ou encore du scandale des allocations familiales aux Pays-Bas, où un algorithme d’auto-apprentissage ciblait les minorités et les accusait à tort de fraude, les exemples sont nombreux et se multiplient.

Que ces problèmes découlent d’une non-conformité du logiciel avec la réglementation, d’erreurs faites par l’intelligence artificielle ou d’usages sciemment malveillants qu’en font ses utilisateurs, il est nécessaire de trouver des solutions et de légiférer pour éviter ces effets de bord, sans pour autant interdire les intelligences artificielles génératives.

Il s’agirait en effet d’une grave erreur d’un point de vue économique, qui ferait une nouvelle fois perdre à la France du temps dans la course effrénée à l’innovation. Les entreprises développant des intelligences artificielles sont elles-mêmes en faveur de l’élaboration d’une réglementation, comme l’a récemment fait savoir OpenAI, car ce n’est qu’avec un cadre clair, assurant une sécurité juridique, que les potentialités économiques et sociétales de l’intelligence artificielle pourront pleinement se réaliser.

Le RGPD apporte un premier échelon de réponse en matière de protection des données utilisées par les intelligences artificielles, mais il n’est pas suffisant pour éviter l’ensemble des potentielles externalités négatives et peut, parfois, se révéler contre-productif en matière d’innovation, notamment parce que ce n’est qu’en traitant certaines données personnelles que les entreprises pourront lutter contre les biais de certains systèmes d’intelligence artificielle.

Des dérogations au RGPD devront donc être prévues, mais il faut qu’elles soient encadrées strictement pour nous prémunir de toute utilisation détournée de ces données sensibles, notamment à des fins commerciales.

Ces dangers réels ou prévisibles des IA et cette inadaptation du RGPD ont conduit l’Union européenne à se saisir de la question des intelligences artificielles au sens large, par le biais d’une proposition de règlement.

Avec mes collègues André Gattolin, Catherine Morin-Desailly et Elsa Schalck, dans le cadre des travaux de la commission des affaires européennes, j’ai été chargé d’élaborer une proposition de résolution européenne et un rapport relatif à ce règlement. Ce dernier est assurément un pas dans la bonne direction pour sécuriser les intelligences artificielles, mais mes corapporteurs et moi avons relevé certaines lacunes.

Faute de temps, je ne m’arrêterai pas sur chacune d’entre elles, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître la position du Gouvernement sur nos propositions, ainsi que les points principaux que vous souhaitez soutenir au Conseil au sein de ce règlement.

En outre, j’insiste sur l’absolue nécessité pour la France comme pour l’UE d’engager des discussions avec les pays tiers au sein des instances internationales de normalisation, pour les inviter à adopter des réglementations similaires. En effet, si nous sommes les seuls États à imposer des normes aussi ambitieuses, cela protégera certes les citoyens européens, mais cela pourrait nous désavantager d’un point de vue concurrentiel.

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous m’indiquer si des échanges ont déjà été entamés avec d’autres pays, notamment les États-Unis et la Chine, afin de promouvoir l’élaboration de législations similaires dans ces États ?

Debut de section - PermalienPhoto de Cyril Pellevat

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis quelques mois, les intelligences artificielles sont au centre de l’actualité.

Qu’il s’agisse de logiciels conversationnels tels que ChatGPT ou Eliza, de modèles de génération d’images et de vidéos, ou encore d’auto-encodeurs, pas une semaine ne passe sans que l’on mette à la une les prouesses de ces nouvelles technologies pouvant produire des contenus de manière autonome, suscitant tour à tour admiration et inquiétudes.

En réalité, la très probable révolution industrielle que représentent les intelligences artificielles s’est amorcée il y a plusieurs années déjà. Nous en utilisons chaque jour sans le savoir. Au fil des mises à jour et de la collecte toujours plus massive de données, elles ne cessent de se perfectionner.

Si elles partagent des similitudes avec les intelligences artificielles plus traditionnelles, les IA génératives soulèvent des problèmes spécifiques, notamment en matière d’éthique, de désinformation, de protection des données, ou encore de productivité et d’impact sur les emplois.

Bien que des améliorations soient encore nécessaires pour qu’elles soient utilisables à une échelle industrielle, de nombreuses études montrent que leur éventuelle généralisation aura des impacts d’une ampleur inédite depuis l’arrivée de l’ordinateur.

Ainsi, une étude menée par OpenAI, Open Research et l’université de Pennsylvanie avance que 80 % de la main-d’œuvre américaine pourraient voir au moins 10 % de leurs tâches réalisées par une intelligence artificielle générative. Pour 19 % des travailleurs, 50 % de leurs tâches pourraient être prises en charge par ces nouvelles technologies, en particulier dans les domaines des services administratifs et juridiques, du management, des services financiers, du marketing, de la communication, ou encore du graphisme et de la conception.

D’après une autre étude de la banque Goldman Sachs, 300 millions d’emplois pourraient à terme être menacés, mais la productivité au travail pourrait progresser de 1, 5 point chaque année pendant dix ans, tandis que la hausse annuelle du PIB mondial pourrait atteindre 7 %, contre 2, 9 % prévus pour 2023 par le FMI.

Sans qu’il puisse être affirmé que certains métiers disparaîtront inévitablement, puisqu’un gain de productivité n’entraîne pas nécessairement la disparition d’un emploi, il est certain que le marché du travail sera bouleversé.

De même, de nouveaux métiers apparaîtront et compenseront probablement le nombre de postes supprimés. Si une étude du Forum économique mondial estime que 87 millions d’emplois seront remplacés par des intelligences artificielles, elle met en exergue que celles-ci permettront la création de 95 millions d’emplois.

Bien sûr, il ne s’agit à ce stade que de prévisions ; les effets de ces technologies sur le marché du travail devront de toute évidence être suivis de près, afin que nous puissions nous adapter à des conséquences imprévues de leur usage.

En outre, si la France veut profiter pleinement des externalités positives de l’intelligence artificielle générative, il ne faut pas qu’elle loupe le coche en matière d’innovation comme de formation à ces nouveaux métiers.

Les géants de la tech sont déjà dans les starting-blocks et, malgré l’existence de certaines start-up françaises prometteuses, notre pays et, plus largement, l’Europe font bien pâle figure face aux compagnies américaines et chinoises, qui investissent des milliards de dollars dans ces technologies.

Ma première question, monsieur le ministre, porte donc sur les moyens que le Gouvernement compte mettre en œuvre, pour, d’une part, soutenir l’innovation des entreprises françaises dans le domaine de l’intelligence artificielle, et, d’autre part, favoriser la formation à ces métiers d’avenir, ainsi que la reconversion pour les travailleurs dont l’emploi deviendrait obsolète.

Abordons désormais certains aspects de l’intelligence artificielle générative qui sont autrement moins réjouissants que la hausse de la productivité et que la création de nouveaux emplois.

Il apparaît en effet que des usages malveillants de ce type d’IA, ainsi que des erreurs du programme lui-même, peuvent avoir des conséquences dramatiques pour les libertés fondamentales, notamment le droit à la protection des données personnelles.

Les expériences de ces dernières semaines, voire de ces dernières années, nous prouvent que ces dangers sont réels : qu’il s’agisse du non-respect du RGPD par ChatGPT, du jeune homme poussé au suicide par le chatbot Eliza en Belgique, des images devenues virales du Président de la République et du pape, créées par intelligence artificielle, des deep fakes de personnalités publiques, du logiciel de recrutement d’Amazon qui s’est révélé discriminatoire envers les femmes, ou encore du scandale des allocations familiales aux Pays-Bas, où un algorithme d’auto-apprentissage ciblait les minorités et les accusait à tort de fraude, les exemples sont nombreux et se multiplient.

Que ces problèmes découlent d’une non-conformité du logiciel avec la réglementation, d’erreurs faites par l’intelligence artificielle ou d’usages sciemment malveillants qu’en font ses utilisateurs, il est nécessaire de trouver des solutions et de légiférer pour éviter ces effets de bord, sans pour autant interdire les intelligences artificielles génératives.

Il s’agirait en effet d’une grave erreur d’un point de vue économique, qui ferait une nouvelle fois perdre à la France du temps dans la course effrénée à l’innovation. Les entreprises développant des intelligences artificielles sont elles-mêmes en faveur de l’élaboration d’une réglementation, comme l’a récemment fait savoir OpenAI, car ce n’est qu’avec un cadre clair, assurant une sécurité juridique, que les potentialités économiques et sociétales de l’intelligence artificielle pourront pleinement se réaliser.

Le RGPD apporte un premier échelon de réponse en matière de protection des données utilisées par les intelligences artificielles, mais il n’est pas suffisant pour éviter l’ensemble des potentielles externalités négatives et peut, parfois, se révéler contre-productif en matière d’innovation, notamment parce que ce n’est qu’en traitant certaines données personnelles que les entreprises pourront lutter contre les biais de certains systèmes d’intelligence artificielle.

Des dérogations au RGPD devront donc être prévues, mais il faut qu’elles soient encadrées strictement pour nous prémunir de toute utilisation détournée de ces données sensibles, notamment à des fins commerciales.

Ces dangers réels ou prévisibles des IA et cette inadaptation du RGPD ont conduit l’Union européenne à se saisir de la question des intelligences artificielles au sens large, par le biais d’une proposition de règlement.

Avec mes collègues André Gattolin, Catherine Morin-Desailly et Elsa Schalck, dans le cadre des travaux de la commission des affaires européennes, j’ai été chargé d’élaborer une proposition de résolution européenne et un rapport relatif à ce règlement. Ce dernier est assurément un pas dans la bonne direction pour sécuriser les intelligences artificielles, mais mes corapporteurs et moi avons relevé certaines lacunes.

Faute de temps, je ne m’arrêterai pas sur chacune d’entre elles, mais je souhaiterais, monsieur le ministre, connaître la position du Gouvernement sur nos propositions, ainsi que les points principaux que vous souhaitez soutenir au Conseil au sein de ce règlement.

En outre, j’insiste sur l’absolue nécessité pour la France comme pour l’UE d’engager des discussions avec les pays tiers au sein des instances internationales de normalisation, pour les inviter à adopter des réglementations similaires. En effet, si nous sommes les seuls États à imposer des normes aussi ambitieuses, cela protégera certes les citoyens européens, mais cela pourrait nous désavantager d’un point de vue concurrentiel.

Aussi, monsieur le ministre, pourriez-vous m’indiquer si des échanges ont déjà été entamés avec d’autres pays, notamment les États-Unis et la Chine, afin de promouvoir l’élaboration de législations similaires dans ces États ?

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2018, le Grand Palais organisait une exposition intitulée « Artistes & Robots ». En 2019, c'était au tour du Barbican Centre, à Londres, de présenter au public une exposition interactive intitulée « AI : More than Human ».

À la curiosité et à l'enthousiasme suscités par l'émergence de ces nouvelles technologies, d'abord perçues comme récréatives et utiles en matière de productivité, ont succédé l'inquiétude, la méfiance et, surtout, les questionnements.

Ne soyons pas dupes des intentions cachées de l'entrepreneur qui a orchestré la tribune tonitruante cosignée par plus de 1 000 experts du secteur de l'IA, même si elle a eu une vertu, celle de frapper les esprits en évoquant un moratoire. Il nous faut vraiment prendre du recul sur l'IA générative afin d'en mesurer les conséquences et de la réguler en mettant en place des garde-fous.

C'est d'ailleurs le sens de la décision de l'équivalent italien de la Cnil, qui a temporairement bloqué ChatGPT, pour deux motifs principaux. D'une part, aucun mécanisme de vérification de l'âge des mineurs n'est prévu, alors que le droit et la protection des mineurs en ligne sont un sujet politique majeur. D'autre part, ChatGPT a récolté indûment les données personnelles des utilisateurs italiens.

La protection des données personnelles et le respect de la vie privée des utilisateurs d'IA génératives sont des enjeux fondamentaux, au cœur de la régulation et du contrôle de ces dernières par les autorités de protection des données personnelles des différents États.

La difficulté de réguler l'IA – et les outils numériques dans leur ensemble – procède du fait que les usages se développent bien plus vite que la réglementation. Ainsi, ChatGPT est apparu dans le débat public après avoir été utilisé par les étudiants pour rédiger divers devoirs.

À cet égard, en matière éducative, l'IA générative pose plusieurs questions sérieuses.

Tout d'abord, elle est très souvent configurée pour fonctionner selon la technique du machine learning. En d'autres termes, elle est nourrie de contenus dont la fiabilité et la véracité peuvent être sujettes à caution, voire complètement fantaisistes.

Ensuite, ces contenus pouvant être orientés, l'IA peut apporter des réponses comportant des biais importants, notamment sociaux, raciaux et de genre, ce qui peut avoir des conséquences dramatiques dans la formation des élèves et dans leurs représentations.

Enfin, en l'état, l'usage d'IA génératives est contradictoire avec deux fondements essentiels de l'instruction, qui doit reposer sur des faits – et non de fausses informations – et favoriser l'acquisition d'aptitudes et de compétences par l'expérience. Dans le domaine de l'éducation, l'encadrement du recours aux IA se révèle donc primordial ; le fait de recourir à la médiation constitue un préalable minimal.

Par ailleurs, l'une des incidences les plus visibles de l'IA générative a trait au secteur culturel, singulièrement à la définition de l'acte de création et à la protection du droit d'auteur.

Sur ce point, je tiens à affirmer une position claire et sans ambiguïté : le cadre juridique, notamment européen, n'est ni adapté ni suffisant. Il est indispensable que l'Artificial Intelligence Act, en cours de discussion au Parlement européen et percuté de plein fouet par l'émergence des IA génératives, comporte des dispositions qui protègent les artistes-auteurs.

Au regard de la révolution que constituent ces IA, il n'est pas possible d'en rester à une simple possibilité d'opt-out pour les titulaires de droits qui ne souhaitent pas que leurs œuvres alimentent ces machines. Le statu quo serait synonyme de déséquilibre et de renoncement à l'effectivité du droit d'auteur.

Néanmoins, cet impératif de protection renforcée des créateurs, qui concerne l'ensemble des champs culturels, n'épuise aucunement la réflexion sur l'impact culturel de l'IA générative. À ce titre, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a produit en 2020 un rapport sur l'intelligence artificielle et la culture, dans lequel il soulevait deux questions majeures, qui devront être traitées : quel statut accorder aux créations réalisées à partir d'une IA et aux personnes qui en sont à l'origine ? Surtout, un processus créatif est-il réellement à l'œuvre lorsque l'IA est utilisée ?

Ainsi, l'IA générative bouscule et interroge jusqu'à notre conception même de l'acte de création. Bien qu'elle en soit encore à ses prémices, il me semble que nous partageons l'intuition et la conviction qu'il nous faut impérativement l'encadrer, de sorte qu'elle soit porteuse du meilleur et non du pire. À nous de lui donner du sens ! §

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Franck Menonville applaudit également.

Debut de section - PermalienPhoto de Pierre-Antoine Levi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l'émergence de l'intelligence artificielle dans nos vies, le monde va vivre une quatrième révolution industrielle. Il la vit d'ailleurs déjà, des outils conversationnels ou de génération d'images particulièrement innovants et bluffants d'efficacité ayant vu le jour ces dernières semaines.

Nous aurions d'ailleurs tous pu demander à ChatGPT-4 de préparer ce discours – cela nous aurait fait gagner du temps. §Au-delà du temps gagné, je pense que nous nous serions tous – ou presque – retrouvés avec le même discours, ce qui aurait rendu ce débat d'actualité fort ennuyeux.

Face aux capacités extrêmement impressionnantes de l'intelligence artificielle, nous voyons naître de nombreuses inquiétudes – et cela est légitime. L'humain sera-t-il dépossédé de son travail au fur et à mesure du développement de l'IA ? Penserons-nous de moins en moins ? Allons-nous vers un monde où nous ne serons plus maîtres de nos avis et de nos destins ?

Monsieur le ministre, il y a quelques semaines, vous avez qualifié ChatGPT de « perroquet approximatif ». Peut-être aviez-vous testé la version 3, car je peux vous assurer que de nombreuses réponses, dans la version 4, sont teintées de bon sens, de réflexion et de précision.

Aussi, je n'ose pas imaginer ce que donnera la version 5 de ChatGPT, dont la mise en ligne est annoncée pour le mois de décembre prochain et qui, d'après OpenAI, son développeur, serait d'un niveau équivalant l'intelligence humaine.

Il y a donc de quoi avoir peur : que vont devenir les secteurs dont des milliers d'emplois pourront être remplacés efficacement par les intelligences artificielles ? Comment allons-nous apprendre, maintenant que l'intelligence artificielle est censée savoir faire à peu près tout ce qui demande de la réflexion ?

Si elles sont réelles, ces craintes doivent être nuancées, car notre perception de l'intelligence artificielle varie selon les pays. Les chiffres suivants proviennent d'un sondage international réalisé par Ipsos en 2022 : en Chine, 79 % des personnes sondées considèrent que l'intelligence artificielle est plus bénéfique que nocive ; elles sont 71 % en Inde, 65 % en Malaisie, seulement 31 % en France, et c'est à peine mieux chez nos voisins européens…

Ce chiffre, symptomatique de notre rapport à l'innovation et aux nouvelles technologies, me fait penser à la phrase de la dirigeante de la Confindustria – le patronat italien – Emma Marcegaglia : « Lorsqu'il y a une innovation, les Américains en font commerce, les Chinois la copient, et nous, Européens, nous en faisons un règlement. »

En effet, le commissaire européen Thierry Breton a annoncé, avec une grande fierté, que, en moins de deux ans, l'Union européenne aura créé une réglementation pour encadrer les intelligences artificielles. Je vous avoue que j'aurais tout de même préféré qu'il annonce le lancement d'un grand projet de création d'un champion européen de l'intelligence artificielle.

Nous pouvons faire tous les règlements, toutes les lois, cette nouvelle révolution industrielle est lancée et elle ne pourra pas être arrêtée. Nous avons le choix de l'utiliser comme un merveilleux outil, notamment au service de la médecine et de l'éducation. Dans le monde du travail, les gains de productivité seront énormes.

Ne soyons pas à la traîne, accompagnons le mouvement. Apprenons à nos jeunes à se servir de cet outil de façon intelligente, comme un assistant d'éducation, un instrument au service du savoir et non un producteur de plagiats.

Monsieur le ministre, je salue vos propos refusant d'interdire a priori, comme l'ont fait temporairement nos voisins italiens, l'utilisation de ChatGPT, interdiction qui, du reste, est contournée par l'utilisation de VPN (Virtual Private Network).

Je salue également les travaux colossaux réalisés par nos chercheurs à Paris-Saclay sur Bloom, l'outil français d'intelligence artificielle. Google, qui a lancé sa propre intelligence artificielle pour concurrencer OpenAI a reconnu que ChatGPT était une Ferrari, alors que la sienne était, au mieux, « une Honda Civic améliorée ». §

Ma crainte est donc la suivante : n'avons-nous pas déjà pris trop de retard sur les entreprises américaines ? Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur le fait que la France sera au rendez-vous de cette quatrième révolution industrielle ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Jean-Jacques Panunzi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis quelques mois, les intelligences artificielles génératives influencent notre quotidien et monopolisent l'espace médiatique : ChatGPT, Lensa ou Midjourney sont autant de logiciels d'IA engagés dans une course frénétique pour devenir la référence en la matière.

Qu'est-ce que l'intelligence artificielle générative ? Elle est un sous-domaine de l'intelligence artificielle, qui crée des contenus tels que des textes, des images, des vidéos, des programmes informatiques. C'est à l'IAG que l'on doit notamment les photos truquées du pape François en doudoune blanche ou de l'ancien président américain Donald Trump menotté, qui ont beaucoup circulé.

Moins de deux mois après son lancement, en janvier 2023, ChatGPT, développé par l'entreprise californienne OpenAI, dépassait les 100 millions d'utilisateurs, ce qui en fait à ce jour l'application ayant connu la croissance la plus rapide.

La nouvelle version GPT-4, dévoilée à la mi-mars, comporte d'incroyables améliorations et nous conduit à nous poser la grande question : l'IA remplacera-t-elle les humains par les machines ?

L'intelligence artificielle est déjà en train de changer le monde du travail. Les machines sont capables d'apprendre et de s'adapter à des tâches qui étaient auparavant réservées aux humains. La question des conséquences sur l'emploi se pose, comme à chaque grande révolution technologique, ce qui déclenche appréhensions et crispations.

Ainsi, dans les rédactions, se posera la question suivante : aura-t-on encore besoin des journalistes et des illustrateurs ? Dans les cabinets d'avocats ou de conseil, on se demandera s'il est encore nécessaire d'avoir des juristes et des consultants. En effet, OpenAI a fait passer le concours du barreau américain à ChatGPT, qui a été brillamment reçu. Les experts de Goldman Sachs estiment ainsi que les IA génératives pourraient supprimer jusqu'à 300 millions d'emplois dans le monde.

Au cours de l'histoire, les grandes innovations ont souvent eu des conséquences sur les emplois. Le cabinet américain McKinsey souligne que le fossé risque de se creuser entre les travailleurs et entre les pays. Les principaux pays qui tireront parti de l'IA seront sans doute les États-Unis et la Chine. Toutefois, la France, le Royaume-Uni ou la Corée du Sud seraient relativement bien positionnés.

D'un point de vue économique en général, l'IA générative peut avoir des impacts considérables. Selon les économistes de Goldman Sachs, l'adoption généralisée de l'IA pourrait accroître la productivité et augmenter le PIB mondial de 7 % par an.

L'IAG, nous l'avons vu, peut être utilisée pour produire des contenus à grande échelle en un temps record ou pour créer des produits et des services personnalisés. Néanmoins, l'utilisation de l'IAG dans les affaires doit être éthique et responsable, afin de minimiser les impacts négatifs potentiels.

Des fake news propagées grâce à l'intelligence artificielle, des images truquées, de fausses révélations, peuvent avoir des répercussions très importantes sur les cours des Bourses mondiales et les faire chuter.

D'un point de vue social ou sociétal, les effets de l'IA générative peuvent également se révéler positifs comme négatifs. Si celle-ci peut contribuer à la création de contenus artistiques et culturels innovants, elle peut aussi, par de faux contenus, semer la désinformation.

En outre, l'IAG peut être utilisée pour propager des discours de haine ou du cyberharcèlement et favoriser la violence des campagnes mensongères. C'est pourquoi la Cnil commence à s'intéresser au cas de ChatGPT et a défini un plan d'action, plaidant pour « une clarification du cadre légal ».

D'un point de vue politique, l'IAG peut avoir des conséquences importantes. Elle peut aider à la prise de décision, mais elle peut aussi véhiculer insidieusement des idéologies dans de très nombreux domaines – santé, environnement… – ou encore être utilisée pour surveiller les citoyens.

Le Parlement européen a créé une commission sur l'intelligence artificielle à l'ère numérique. La Commission européenne a lancé, au mois d'avril 2021, un règlement sur l'IA, qui est en cours d'examen au Parlement européen, et n'a pas fermé la porte à l'usage d'IA recourant à la biométrie. Elle s'est gardé la possibilité d'utiliser la reconnaissance faciale a posteriori, sous contrôle judiciaire.

En France, le ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques a affirmé que le recours à la reconnaissance faciale était exclu par le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions. Seules seront utilisées des caméras usant d'algorithmes intelligents.

Par ailleurs, l'agence de police européenne Europol a averti que les criminels étaient prêts à tirer parti de l'intelligence artificielle.

En somme, l'IAG peut avoir une incidence très importante sur la politique, en offrant de nouvelles aubaines. Toutefois, il est nécessaire de veiller à ce qu'elle soit utilisée dans des limites clairement établies et validées légalement.

À l'échelle internationale, une compétition acharnée est prévisible. La Chine est très en avance et déploie de gros moyens, tandis que le président russe Vladimir Poutine estimait dès 2017 que quiconque deviendrait le leader dans ce domaine deviendrait le dirigeant du monde.

Aux États-Unis, Elon Musk, cofondateur d'OpenAI avec Sam Altman, l'inventeur de ChatGPT, a réclamé une pause de six mois dans la recherche sur l'IA, en évoquant « des risques majeurs pour l'humanité ». Le 4 avril dernier, le président Joe Biden a évoqué les risques liés à l'intelligence artificielle et a demandé au Congrès de fixer des « limites strictes » aux données personnelles collectées et d'interdire la publicité ciblée visant les enfants.

En tant que pays leader en matière de technologie et de recherche, la France a un rôle important à jouer. Elle doit continuer de soutenir la recherche, tout en élaborant une réglementation adaptée, et investir dans la formation, tout en assurant la sécurité et la protection des droits des individus.

Monsieur le ministre, compte tenu de ces éléments, estimez-vous que la France a la capacité d'être suffisamment réactive en matière d'IAG ? A-t-elle pris du retard ? Le cas échéant, de quelle manière et avec quels moyens allons-nous le combler ? §

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2017, le groupe Les Indépendants – République et Territoires avait organisé en ces murs un débat sur le thème : « Intelligence artificielle, enjeux économiques et cadres légaux ».

Au vu de l’accélération de ces technologies et des enjeux y afférents, nous avons jugé opportun de proposer de nouveau un débat sur ce thème. Je salue donc le choix collectif d’évoquer, ensemble, les défis de l’intelligence artificielle dite « générative ».

J’ai eu personnellement la chance d’assister, dans ma pratique professionnelle, au forum mondial sur l’intelligence artificielle qui s’est tenu en Chine, à Wuzhen, en 2017, avec d’éminents chercheurs du monde entier, dont Yuval Noah Harari, que vous connaissez tous, mes chers collègues. J’ai cru y comprendre que la différence majeure entre l’intelligence artificielle et le cerveau humain était l’intention, apanage de ce dernier. C’est sur cet élément, me semble-t-il, que nous devons nous concentrer d’un point de vue éthique, monsieur le ministre.

Dès 2016, l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, prévenait que 9 % des emplois en France présentaient un « risque élevé de substitution » par des robots. Avec l’amélioration permanente de l’intelligence artificielle, cette proportion augmentera.

Cette vérité est à nuancer, car ces prévisions pessimistes n’évoquent que les destructions et non les nouvelles créations d’emplois. J’ai un exemple frappant de cette dynamique positive dans mon département de l’Aube, où l’entreprise familiale Gamba et Rota a investi 10 millions d’euros pour robotiser son outil logistique via l’IA, ce qui permettra d’envisager la création d’une centaine d’emplois.

Nous sommes à l’aube d’une vaste révolution de l’emploi et du rapport au travail. Cela vaut particulièrement pour les jeunes, qui sont plus que jamais en quête de sens dans leur vie professionnelle.

La dichotomie entre technophiles béats et détracteurs outranciers est bien évidemment dépassée. L’immense défi de l’intelligence artificielle nous invite, au contraire, à la nuance et à la précision, dans un univers en perpétuelle mutation.

Il s’agit d’anticiper les grandes évolutions sociétales, économiques et politiques qui en découleront. L’importance des progrès permanents entraînés par l’intelligence artificielle fait écho à l’ampleur des craintes qu’elle nous inspire.

À ces inquiétudes, il nous faut répondre avec pédagogie, pour tirer profit des perspectives positives ouvertes par cette technologie. Il nous faut aussi répondre avec lucidité, pour anticiper les changements d’ampleur qui surviendront, notamment sur le marché du travail. Il nous faut enfin répondre avec fermeté, par un cadre réglementaire solide, pour garantir à nos concitoyens une intelligence artificielle fiable et sûre.

L’Europe doit développer une approche éthique des données, avec une méthode et un cadre réglementaire propres. Cela implique de s’affranchir de la Chine et des États-Unis, qui nous imposent, depuis un certain temps, leur calendrier et leurs objectifs.

Les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – conservent leur puissance par les supports qu’ils fournissent au monde depuis tant d’années. ChatGPT est d’ailleurs financé par Microsoft. L’Europe a perdu la bataille des données personnelles ; celle des données professionnelles est en cours. Les géants y abusent de leur position dominante.

Nous devons aborder avec une grande vigilance le recours à l’intelligence artificielle, via des outils tels que ChatGPT, dans nos entreprises. Les gains de productivité espérés ne doivent pas masquer l’aspirateur à données qu’est cet outil.

La France est également pénalisée par la fuite de certains de ses cerveaux, alors même que leur formation a été assurée sur les deniers publics. Nous finançons, en partie, notre propre dépendance.

Notre pays dispose pourtant d’atouts essentiels et d’un vivier d’acteurs spécialisés. Selon l’association France Digitale, l’écosystème français rassemble 590 start-up et plus de 80 laboratoires de recherche en intelligence artificielle, ce qui nous place en pole position à l’échelle européenne.

Nous avons des compétences réelles et pointues dans certaines niches. Cela fait notre force. Nous pouvons également dynamiser ces forces grâce au droit. Nous attendons ainsi beaucoup de l’Artificial Intelligence Act. Ce cadre nouveau doit nous redonner une longueur d’avance.

Je profite de cette occasion pour saluer la mobilisation de Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, sous l’impulsion duquel nous avons, en deux ans – un temps record ! – bâti une réglementation de l’intelligence artificielle dont la précision et la complétude sont inégalées.

Les prochaines années s’annoncent décisives. Il n’est pas question de se laisser distancer davantage, sous peine de rater définitivement l’occasion de rester dans la course.

Dès lors, monsieur le ministre, comment la France s’engage-t-elle pour ériger l’Europe en chef de file, tout en garantissant la sécurité et les droits des utilisateurs ? Que pensez-vous à cet égard des récentes positions de l’Italie ? Et pouvez-vous nous indiquer précisément notre feuille de route sur ce sujet, à l’échelle tant nationale qu’européenne ?

Debut de section - PermalienPhoto de Vanina Paoli-Gagin

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2017, le groupe Les Indépendants – République et Territoires avait organisé en ces murs un débat sur le thème : « Intelligence artificielle, enjeux économiques et cadres légaux ».

Au vu de l’accélération de ces technologies et des enjeux y afférents, nous avons jugé opportun de proposer de nouveau un débat sur ce thème. Je salue donc le choix collectif d’évoquer, ensemble, les défis de l’intelligence artificielle générative.

J’ai eu personnellement la chance d’assister, dans ma pratique professionnelle, au forum mondial sur l’intelligence artificielle qui s’est tenu en Chine, à Wuzhen, en 2017, avec d’éminents chercheurs du monde entier, dont Yuval Noah Harari, que vous connaissez tous, mes chers collègues. J’ai cru y comprendre que la différence majeure entre l’intelligence artificielle et le cerveau humain était l’intention, apanage de ce dernier. C’est sur cet élément, me semble-t-il, que nous devons nous concentrer d’un point de vue éthique, monsieur le ministre.

Dès 2016, l’OCDE, l’Organisation de coopération et de développement économiques, prévenait que 9 % des emplois en France présentaient un « risque élevé de substitution » par des robots. Avec l’amélioration permanente de l’intelligence artificielle, cette proportion augmentera.

Cette vérité est à nuancer, car ces prévisions pessimistes n’évoquent que les destructions et non les nouvelles créations d’emplois. J’ai un exemple frappant de cette dynamique positive dans mon département de l’Aube, où l’entreprise familiale Gamba et Rota a investi 10 millions d’euros pour robotiser son outil logistique via l’IA, ce qui permettra d’envisager la création d’une centaine d’emplois.

Nous sommes à l’aube d’une vaste révolution de l’emploi et du rapport au travail. Cela vaut particulièrement pour les jeunes, qui sont plus que jamais en quête de sens dans leur vie professionnelle.

La dichotomie entre technophiles béats et détracteurs outranciers est bien évidemment dépassée. L’immense défi de l’intelligence artificielle nous invite, au contraire, à la nuance et à la précision, dans un univers en perpétuelle mutation.

Il s’agit d’anticiper les grandes évolutions sociétales, économiques et politiques qui en découleront. L’importance des progrès permanents entraînés par l’intelligence artificielle fait écho à l’ampleur des craintes qu’elle nous inspire.

À ces inquiétudes, il nous faut répondre avec pédagogie, pour tirer profit des perspectives positives ouvertes par cette technologie. Il nous faut aussi répondre avec lucidité, pour anticiper les changements d’ampleur qui surviendront, notamment sur le marché du travail. Il nous faut enfin répondre avec fermeté, par un cadre réglementaire solide, pour garantir à nos concitoyens une intelligence artificielle fiable et sûre.

L’Europe doit développer une approche éthique des données, avec une méthode et un cadre réglementaire propres. Cela implique de s’affranchir de la Chine et des États-Unis, qui nous imposent, depuis un certain temps, leur calendrier et leurs objectifs.

Les Gafam – Google, Apple, Facebook, Amazon et Microsoft – conservent leur puissance par les supports qu’ils fournissent au monde depuis tant d’années. ChatGPT est d’ailleurs financé par Microsoft. L’Europe a perdu la bataille des données personnelles ; celle des données professionnelles est en cours. Les géants y abusent de leur position dominante.

Nous devons aborder avec une grande vigilance le recours à l’intelligence artificielle, via des outils tels que ChatGPT, dans nos entreprises. Les gains de productivité espérés ne doivent pas masquer l’aspirateur à données qu’est cet outil.

La France est également pénalisée par la fuite de certains de ses cerveaux, alors même que leur formation a été assurée sur les deniers publics. Nous finançons, en partie, notre propre dépendance.

Notre pays dispose pourtant d’atouts essentiels et d’un vivier d’acteurs spécialisés. Selon l’association France Digitale, l’écosystème français rassemble 590 start-up et plus de 80 laboratoires de recherche en intelligence artificielle, ce qui nous place en pole position à l’échelle européenne.

Nous avons des compétences réelles et pointues dans certaines niches. Cela fait notre force. Nous pouvons également dynamiser ces forces grâce au droit. Nous attendons ainsi beaucoup de l’Artificial Intelligence Act. Ce cadre nouveau doit nous redonner une longueur d’avance.

Je profite de cette occasion pour saluer la mobilisation de Thierry Breton, commissaire européen au marché intérieur, sous l’impulsion duquel nous avons, en deux ans – un temps record ! – bâti une réglementation de l’intelligence artificielle dont la précision et la complétude sont inégalées.

Les prochaines années s’annoncent décisives. Il n’est pas question de se laisser distancer davantage, sous peine de rater définitivement l’occasion de rester dans la course.

Dès lors, monsieur le ministre, comment la France s’engage-t-elle pour ériger l’Europe en chef de file, tout en garantissant la sécurité et les droits des utilisateurs ? Que pensez-vous à cet égard des récentes positions de l’Italie ? Et pouvez-vous nous indiquer précisément notre feuille de route sur ce sujet, à l’échelle tant nationale qu’européenne ?

Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j'ai suivi l'exemple de Monique de Marco et de Pierre-Antoine Levi en ne faisant pas appel à ChatGPT pour répondre à vos interventions – la preuve : papier, crayon !

M. le ministre délégué brandit un feuillet manuscrit.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

Mme Monique de Marco . Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, vous connaissez mon appétence pour l’intelligence artificielle. J’ai d’ailleurs moi aussi tenté de rédiger mon intervention avec ChatGPT, mais j’ai trouvé le résultat décevant.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications

Pourquoi ? Pour bien légiférer, il faut bien comprendre l'intelligence artificielle générative, sujet de notre débat, dire ce qu'elle est, mais aussi ce qu'elle n'est pas. Ce qu'elle n'est pas, ou ne devrait pas être, c'est une nouvelle Pythie qui rendrait des oracles sur tous les sujets du monde.

Elle est une intelligence générative, plutôt que créative, en cela qu'elle réagence des contenus préexistants sans avoir une connaissance structurée du monde, ce qui fait d'elle un perroquet stochastique – ou, en langage commun, un perroquet approximatif, n'en déplaise à Stéphane Ravier qui, restant dans le registre animalier, a évoqué la capacité de ChatGPT à singer les comportements humains.

La différence fondamentale entre l'intelligence humaine et l'intelligence artificielle générative, comme l'a évoquée Vanina Paoli-Gagin et comme l'a soulevée il y a quatre siècles Blaise Pascal, inventeur de la première machine d'intelligence artificielle – la pascaline – est l'intention, c'est-à-dire la capacité de volonté.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous entendons apporter à l'irruption de systèmes du type de ChatGPT, que vous avez abondamment cité, des réponses volontaristes, qui reposent sur une position équilibrée. Christian Redon-Sarrazy et Monique de Marco l'ont souligné, la technologie n'est, intrinsèquement, ni poison ni remède. Pour notre part, nous ne sommes donc ni technolâtres ni technophobes : nous considérons que la technologie doit être placée au service de l'homme.

Certes, l'émergence très rapide de cette technologie suscite des questions qui demeurent sans réponse. Cyril Pellevat et Jean-Jacques Panunzi, entre autres, ont par exemple évoqué les effets ambigus que l'on pouvait attendre de cette technologie sur le marché du travail. Si des travailleurs seront soulagés de tâches pénibles, répétitives et fastidieuses, des professions entières seront bousculées.

Aussi devons-nous évidemment donner tous les moyens à nos concitoyens de se saisir de ces outils, afin qu'ils puissent en bénéficier. Nous devons nous assurer que l'adoption de ces technologies se fasse dans la justice sociale. Nous ne comptons pas sur la technologie pour nous dicter le cours des choses ; au contraire, nous avons la volonté de dicter le cours des choses à la technologie.

Par ailleurs, l'intelligence artificielle générative n'exclut pas les communs numériques, que Pascal Savoldelli a abordés. Pour preuve, avant ChatGPT est né un modèle open source, collaboratif, et fonctionnant notamment en Français : le modèle Bloom, qui a pu être conçu grâce au soutien du supercalculateur Jean Zay.

Faut-il marquer une pause ou décider d'un moratoire, comme l'a suggéré Catherine Morin-Desailly ? Si la question mérite d'être posée, la réponse apportée par les signataires de la récente pétition est mauvaise. À bien des égards, il nous faut accélérer, car la France dispose de tous les atouts pour maîtriser ces technologies d'intelligence artificielle générative.

Notre action en la matière n'est pas nouvelle, puisque le Président de la République a lancé il y a cinq ans une stratégie nationale pour l'intelligence artificielle, dotée de 1, 5 milliard d'euros. Ainsi, nous avons déjà fait émerger des instituts interdisciplinaires d'intelligence artificielle (3IA) à Nice, à Toulouse, à Grenoble et à Paris, qui ont permis d'établir 190 chaires de recherche pour l'intelligence artificielle, de multiplier par deux le nombre de diplômés en intelligence artificielle et d'augmenter de 500 le nombre de doctorants.

Cette stratégie se couple à une stratégie d'accélération pour l'intelligence artificielle inscrite au cœur de France 2030, ce qui répond aux questions de Cyril Pellevat, Jean-Jacques Panunzi ou Pierre-Antoine Lévi relatives à nos ambitions en la matière.

Faut-il ou non réguler ? Évidemment qu'il faut le faire. Le règlement sur l'intelligence artificielle impose non seulement des obligations de transparence, de manière à permettre à nos concitoyens de toujours faire la différence entre l'humain et la machine, mais aussi un régime de responsabilité pour les concepteurs des systèmes d'intelligence artificielle en fonction des risques associés aux usages de ces systèmes.

Ainsi, pour certains usages, le recours à l'intelligence artificielle sera proscrit. Pour d'autres, il sera encadré par des obligations de transparence et d'audit préalables à la mise sur le marché de ce type de solution. Pour d'autres encore, l'intelligence artificielle sera plus librement mobilisable.

Ce règlement couvre-t-il tous les sujets ? Non, certains d'entre eux ont d'ailleurs été cités par certains orateurs. C'est notamment le cas de l'empreinte carbone, mentionnée par Sylvie Robert. De même, en ce qui concerne la normalisation avec les États-Unis et la Chine, abordée par Cyril Pellevat et Catherine Morin-Desailly, des discussions ont d'ores et déjà eu lieu avec les États-Unis au sein du Conseil du commerce et des technologies (TTC, pour Trade and Technology Council), mais elles doivent être approfondies.

De plus, nous devrons être vigilants sur la question de l'exploitation des travailleurs des pays du Sud, évoquée par Monique de Marco et Pascal Savoldelli. Nous devrons également traiter la question des droits d'auteur, soulevée par Sylvie Robert et Jean-Claude Requier, ainsi que celle de la protection des données personnelles, qui est la raison invoquée par l'équivalent italien de la Cnil pour interdire ChatGPT sur le sol italien.

Les modèles d'intelligence artificielle sont entraînés sur des jeux de données assemblés sur internet. Or des données personnelles qui alimentent des jeux d'entraînement ont été collectées à une époque où aucun consentement n'était prévu. Il va donc nous falloir concilier la réglementation que nous construisons pour l'intelligence artificielle et celle que nous avons construite – et dont nous sommes très fiers – pour la protection des données personnelles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du temps que vous avez consacré à ce débat. Certaines de vos préoccupations sont d'ores et déjà prises en considération dans la réglementation sur laquelle nous avançons et par le plan d'investissement souhaité par le Président de la République, tandis que d'autres nourriront, à n'en pas douter, les travaux du Sénat dans les mois et les années à venir.

Sourires.

MM. Franck Menonville et Jean-Claude Requier applaudissent.

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

En revanche, je l’avais fait il y a quelques mois pour rédiger la question d’actualité que j’avais posée au ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse afin de l’alerter sur la suppression de la technologie en classe de sixième, alors même que cette matière est directement liée aux enjeux du numérique. En effet, la France a plus que jamais besoin d’une jeunesse ouverte aux sciences et aux technologies.

En tant qu’enseignante, je suis impressionnée par les résultats obtenus par le recours à l’intelligence artificielle. Les perspectives semblent sans limite, dans des domaines aussi variés que l’agriculture, la logistique ou la santé.

À l’inverse, en tant que citoyenne, l’essor fulgurant de ces nouvelles technologies m’interroge : dans quel cadre les circonscrire, par quelle réglementation, pour quels objectifs et avec quelles conséquences pour notre société ?

Aussi, en tant que parlementaires, devons-nous mener un travail colossal sur ce sujet.

À cet égard, je salue les parlementaires européens, qui examinent en ce moment même l’Artificial Intelligence Act (AI Act), une proposition de règlement pour encadrer l’usage et la commercialisation des intelligences artificielles.

De même, je regarde avec intérêt la décision de l’Italie, qui vient de bloquer ChatGPT pour respecter la législation sur les données personnelles. L’interdiction n’est probablement pas la bonne solution, mais elle doit nous interroger sur les limites de cet outil.

Malgré la fascination que suscitent de telles innovations technologiques, nous devons garder les pieds sur terre et légiférer dans l’intérêt général.

Il y a dix ans, nous nourrissions de grands espoirs vis-à-vis des assistants numériques comme Siri ou Alexa ; il y a encore quelques mois, nous parlions des cryptomonnaies avec des étoiles dans les yeux. Pourtant, ces innovations n’ont fait que créer de nouveaux besoins, sans apporter de solutions concrètes.

Malgré la révolution informatique et la généralisation d’internet, la croissance de la productivité ralentit depuis trente ans. Si certains prophétisent de formidables gains de productivité et voient l’intelligence artificielle comme une poule aux œufs d’or, la réalité sera certainement tout autre.

Par ailleurs, nous devons nous interroger sur les conséquences sociales d’un développement massif de l’intelligence artificielle. Dans une récente étude, Goldman Sachs estimait que 300 millions d’emplois seraient menacés par l’essor de l’intelligence artificielle.

S’il ne sert à rien de crier au loup, nous ne pouvons ignorer cette alerte, d’autant qu’une partie des emplois qui sont créés par ces nouvelles technologies sont ingrats et mal payés. Derrière les ingénieurs, les petites mains de l’intelligence artificielle sont à l’ouvrage.

Des Kenyans employés par OpenAI sont ainsi payés entre 1 et 2 dollars par jour pour repérer les contenus toxiques, à un rythme soutenu et dans des conditions de travail déplorables. Si l’intelligence artificielle ne remplace pas nos emplois, elle pourrait être à l’origine d’une nouvelle dégradation du travail.

Enfin, l’intitulé de notre débat oublie un aspect fondamental, qu’il n’est plus acceptable d’ignorer au XXe siècle : je parle bien sûr de l’impact environnemental et climatique de l’intelligence artificielle.

En effet, le numérique représente d’ores et déjà 4 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, dont une partie est imputable à l’intelligence artificielle. Entraîner un modèle tel que celui de ChatGPT pendant quatre à sept jours émettrait autant de gaz à effet de serre qu’un être humain en produit en 57 ans, et cette estimation progresse à mesure que les modèles d’intelligence artificielle se perfectionnent et accumulent des connaissances.

Derrière la chimère d’un numérique durable, dont les applications feraient disparaître par magie les risques environnementaux, il y a la réalité des chiffres. Ainsi, si les possibilités permises par l’intelligence artificielle nous font rêver, nous devons être pleinement conscients des impacts économiques, sociaux et environnementaux de cette technologie.

L’intelligence artificielle est là, elle fait déjà partie de nos vies. Il n’est donc pas question de l’interdire ou de la réserver à une élite. Toutefois, nous devons la réguler et la conditionner à sa plus-value sociale et environnementale. La technique n’est pas neutre, mais elle n’est ni bonne ni mauvaise en soi non plus. Elle est, comme l’a souligné le penseur Jacques Ellul, « ambivalente ».

Debut de section - PermalienPhoto de Monique de Marco

En revanche, je l’avais fait il y a quelques mois pour rédiger la question d’actualité que j’avais posée au ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse afin de l’alerter sur la suppression de la technologie en classe de sixième, alors même que cette matière est directement liée aux enjeux du numérique. En effet, la France a plus que jamais besoin d’une jeunesse ouverte aux sciences et aux technologies.

En tant qu’enseignante, je suis impressionnée par les résultats obtenus par le recours à l’intelligence artificielle. Les perspectives semblent sans limites, dans des domaines aussi variés que l’agriculture, la logistique ou la santé.

À l’inverse, en tant que citoyenne, l’essor fulgurant de ces nouvelles technologies m’interroge : dans quel cadre les circonscrire, par quelle réglementation, pour quels objectifs et avec quelles conséquences pour notre société ?

Aussi, en tant que parlementaires, devons-nous mener un travail colossal sur ce sujet.

À cet égard, je salue les parlementaires européens, qui examinent en ce moment même l’Artificial Intelligence Act (AI Act), une proposition de règlement pour encadrer l’usage et la commercialisation des intelligences artificielles.

De même, je regarde avec intérêt la décision de l’Italie, qui vient de bloquer ChatGPT pour respecter la législation sur les données personnelles. L’interdiction n’est probablement pas la bonne solution, mais elle doit nous interroger sur les limites de cet outil.

Malgré la fascination que suscitent de telles innovations technologiques, nous devons garder les pieds sur terre et légiférer dans l’intérêt général.

Il y a dix ans, nous nourrissions de grands espoirs vis-à-vis des assistants numériques comme Siri ou Alexa ; il y a encore quelques mois, nous parlions des cryptomonnaies avec des étoiles dans les yeux. Pourtant, ces innovations n’ont fait que créer de nouveaux besoins, sans apporter de solutions concrètes.

Malgré la révolution informatique et la généralisation d’internet, la croissance de la productivité ralentit depuis trente ans. Si certains prophétisent de formidables gains de productivité et voient l’intelligence artificielle comme une poule aux œufs d’or, la réalité sera certainement tout autre.

Par ailleurs, nous devons nous interroger sur les conséquences sociales d’un développement massif de l’intelligence artificielle. Dans une récente étude, Goldman Sachs estimait que 300 millions d’emplois seraient menacés par l’essor de l’intelligence artificielle.

S’il ne sert à rien de crier au loup, nous ne pouvons ignorer cette alerte, d’autant qu’une partie des emplois qui sont créés par ces nouvelles technologies sont ingrats et mal payés. Derrière les ingénieurs, les petites mains de l’intelligence artificielle sont à l’ouvrage.

Des Kenyans employés par OpenAI sont ainsi payés entre 1 et 2 dollars par jour pour repérer les contenus toxiques, à un rythme soutenu et dans des conditions de travail déplorables. Si l’intelligence artificielle ne remplace pas nos emplois, elle pourrait être à l’origine d’une nouvelle dégradation du travail.

Enfin, l’intitulé de notre débat oublie un aspect fondamental, qu’il n’est plus acceptable d’ignorer au XXe siècle : je parle bien sûr de l’impact environnemental et climatique de l’intelligence artificielle.

En effet, le numérique représente d’ores et déjà 4 % des émissions de gaz à effet de serre dans le monde, dont une partie est imputable à l’intelligence artificielle. Entraîner un modèle tel que celui de ChatGPT pendant quatre à sept jours émettrait autant de gaz à effet de serre qu’un être humain en produit en 57 ans, et cette estimation progresse à mesure que les modèles d’intelligence artificielle se perfectionnent et accumulent des connaissances.

Derrière la chimère d’un numérique durable, dont les applications feraient disparaître par magie les risques environnementaux, il y a la réalité des chiffres. Ainsi, si les possibilités permises par l’intelligence artificielle nous font rêver, nous devons être pleinement conscients des impacts économiques, sociaux et environnementaux de cette technologie.

L’intelligence artificielle est là, elle fait déjà partie de nos vies. Il n’est donc pas question de l’interdire ou de la réserver à une élite. Toutefois, nous devons la réguler et la conditionner à sa plus-value sociale et environnementale. La technique n’est pas neutre, mais elle n’est ni bonne ni mauvaise en soi non plus. Elle est, comme l’a souligné le penseur Jacques Ellul, « ambivalente ».

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

Nous en avons terminé avec le débat d'actualité sur le thème : « Impacts économique, social et politique de l'intelligence artificielle générative ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Applaudissements sur les travées des groupes GEST et SER. – Mme Catherine Morin-Desailly applaudit également.

La séance, suspendue à dix-sept heures quarante, est reprise à dix-sept heures quarante-cinq.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

La parole est à Mme Sylvie Robert. (Applaudissements sur les travées du groupe SER.)

Debut de section - PermalienPhoto de Sylvie Robert

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, en 2018, le Grand Palais organisait une exposition intitulée « Artistes & Robots ». En 2019, c’était au tour du Barbican Centre, à Londres, de présenter au public une exposition interactive intitulée « AI : More than Human ».

À la curiosité et à l’enthousiasme suscités par l’émergence de ces nouvelles technologies, d’abord perçues comme récréatives et utiles en matière de productivité, ont succédé l’inquiétude, la méfiance et, surtout, les questionnements.

Ne soyons pas dupes des intentions cachées de l’entrepreneur qui a orchestré la tribune tonitruante cosignée par plus de 1 000 experts du secteur de l’IA, même si elle a eu une vertu, celle de frapper les esprits en évoquant un moratoire. Il nous faut vraiment prendre du recul sur l’IA générative afin d’en mesurer les conséquences et de la réguler en mettant en place des garde-fous.

C’est d’ailleurs le sens de la décision de l’équivalent italien de la Cnil, qui a temporairement bloqué ChatGPT, pour deux motifs principaux. D’une part, aucun mécanisme de vérification de l’âge des mineurs n’est prévu, alors que le droit et la protection des mineurs en ligne sont un sujet politique majeur. D’autre part, ChatGPT a récolté indûment les données personnelles des utilisateurs italiens.

La protection des données personnelles et le respect de la vie privée des utilisateurs d’IA génératives sont des enjeux fondamentaux, au cœur de la régulation et du contrôle de ces dernières par les autorités de protection des données personnelles des différents États.

La difficulté de réguler l’IA – et les outils numériques dans leur ensemble – procède du fait que les usages se développent bien plus vite que la réglementation. Ainsi, ChatGPT est apparu dans le débat public après avoir été utilisé par les étudiants pour rédiger divers devoirs.

À cet égard, en matière éducative, l’IA générative pose plusieurs questions sérieuses.

Tout d’abord, elle est très souvent configurée pour fonctionner selon la technique du machine learning. En d’autres termes, elle est nourrie de contenus dont la fiabilité et la véracité peuvent être sujettes à caution, voire complètement fantaisistes.

Ensuite, ces contenus pouvant être orientés, l’IA peut apporter des réponses comportant des biais importants, notamment sociaux, raciaux et de genre, ce qui peut avoir des conséquences dramatiques dans la formation des élèves et dans leurs représentations.

Enfin, en l’état, l’usage d’IA génératives est contradictoire avec deux fondements essentiels de l’instruction, qui doit reposer sur des faits – et non de fausses informations – et favoriser l’acquisition d’aptitudes et de compétences par l’expérience. Dans le domaine de l’éducation, l’encadrement du recours aux IA se révèle donc primordial ; le fait de recourir à la médiation constitue un préalable minimal.

Par ailleurs, l’une des incidences les plus visibles de l’IA générative a trait au secteur culturel, singulièrement à la définition de l’acte de création et à la protection du droit d’auteur.

Sur ce point, je tiens à affirmer une position claire et sans ambiguïté : le cadre juridique, notamment européen, n’est ni adapté ni suffisant. Il est indispensable que l ’ Artificial Intelligence Act, en cours de discussion au Parlement européen et percuté de plein fouet par l’émergence des IA génératives, comporte des dispositions qui protègent les artistes-auteurs.

Au regard de la révolution que constituent ces IA, il n’est pas possible d’en rester à une simple possibilité d ’ opt-out pour les titulaires de droits qui ne souhaitent pas que leurs œuvres alimentent ces machines. Le statu quo serait synonyme de déséquilibre et de renoncement à l’effectivité du droit d’auteur.

Néanmoins, cet impératif de protection renforcée des créateurs, qui concerne l’ensemble des champs culturels, n’épuise aucunement la réflexion sur l’impact culturel de l’IA générative. À ce titre, le Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique a produit en 2020 un rapport sur l’intelligence artificielle et la culture, dans lequel il soulevait deux questions majeures, qui devront être traitées : quel statut accorder aux créations réalisées à partir d’une IA et aux personnes qui en sont à l’origine ? Surtout, un processus créatif est-il réellement à l’œuvre lorsque l’IA est utilisée ?

Ainsi, l’IA générative bouscule et interroge jusqu’à notre conception même de l’acte de création. Bien qu’elle en soit encore à ses prémices, il me semble que nous partageons l’intuition et la conviction qu’il nous faut impérativement l’encadrer, de sorte qu’elle soit porteuse du meilleur et non du pire. À nous de lui donner du sens !

Photo de Alain Richard

M. le président. La parole est à M. Pierre-Antoine Levi.

Photo de Franck Menonville

Lors du scrutin n° 270 portant sur les amendements identiques n° 24, 25 rectifié bis, 44, 55 et 68 tendant à supprimer l'article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l'égalité des chances et de la laïcité, MM. Emmanuel Capus, Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Pierre-Jean Verzelen, Dany Wattebled et Franck Menonville souhaitaient voter contre et MM. Joël Guerriau, Claude Malhuret et Mme Colette Mélot souhaitaient voter pour.

Photo de Alain Richard

Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l'analyse politique du scrutin concerné.

Photo de Pierre-Antoine Levi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avec l’émergence de l’intelligence artificielle dans nos vies, le monde va vivre une quatrième révolution industrielle. Il la vit d’ailleurs déjà, des outils conversationnels ou de génération d’images particulièrement innovants et bluffants d’efficacité ayant vu le jour ces dernières semaines.

Nous aurions d’ailleurs tous pu demander à ChatGPT-4 de préparer ce discours – cela nous aurait fait gagner du temps. §Au-delà du temps gagné, je pense que nous nous serions tous – ou presque – retrouvés avec le même discours, ce qui aurait rendu ce débat d’actualité fort ennuyeux.

Face aux capacités extrêmement impressionnantes de l’intelligence artificielle, nous voyons naître de nombreuses inquiétudes – et cela est légitime. L’humain sera-t-il dépossédé de son travail au fur et à mesure du développement de l’IA ? Penserons-nous de moins en moins ? Allons-nous vers un monde où nous ne serons plus maîtres de nos avis et de nos destins ?

Monsieur le ministre, il y a quelques semaines, vous avez qualifié ChatGPT de « perroquet approximatif ». Peut-être aviez-vous testé la version 3, car je peux vous assurer que de nombreuses réponses, dans la version 4, sont teintées de bon sens, de réflexion et de précision.

Aussi, je n’ose pas imaginer ce que donnera la version 5 de ChatGPT, dont la mise en ligne est annoncée pour le mois de décembre prochain et qui, d’après OpenAI, son développeur, serait d’un niveau équivalant l’intelligence humaine.

Il y a donc de quoi avoir peur : que vont devenir les secteurs dont des milliers d’emplois pourront être remplacés efficacement par les intelligences artificielles ? Comment allons-nous apprendre, maintenant que l’intelligence artificielle est censée savoir faire à peu près tout ce qui demande de la réflexion ?

Si elles sont réelles, ces craintes doivent être nuancées, car notre perception de l’intelligence artificielle varie selon les pays. Les chiffres suivants proviennent d’un sondage international réalisé par Ipsos en 2022 : en Chine, 79 % des personnes sondées considèrent que l’intelligence artificielle est plus bénéfique que nocive ; elles sont 71 % en Inde, 65 % en Malaisie, seulement 31 % en France, et c’est à peine mieux chez nos voisins européens…

Ce chiffre, symptomatique de notre rapport à l’innovation et aux nouvelles technologies, me fait penser à la phrase de la dirigeante de la Confindustria – le patronat italien – Emma Marcegaglia : « Lorsqu’il y a une innovation, les Américains en font commerce, les Chinois la copient, et nous, Européens, nous en faisons un règlement. »

En effet, le commissaire européen Thierry Breton a annoncé, avec une grande fierté, que, en moins de deux ans, l’Union européenne aura créé une réglementation pour encadrer les intelligences artificielles. Je vous avoue que j’aurais tout de même préféré qu’il annonce le lancement d’un grand projet de création d’un champion européen de l’intelligence artificielle.

Nous pouvons faire tous les règlements, toutes les lois, cette nouvelle révolution industrielle est lancée et elle ne pourra pas être arrêtée. Nous avons le choix de l’utiliser comme un merveilleux outil, notamment au service de la médecine et de l’éducation. Dans le monde du travail, les gains de productivité seront énormes.

Ne soyons pas à la traîne, accompagnons le mouvement. Apprenons à nos jeunes à se servir de cet outil de façon intelligente, comme un assistant d’éducation, un instrument au service du savoir et non un producteur de plagiats.

Monsieur le ministre, je salue vos propos refusant d’interdire a priori, comme l’ont fait temporairement nos voisins italiens, l’utilisation de ChatGPT, interdiction qui, du reste, est contournée par l’utilisation de VPN (Virtual Private Network).

Je salue également les travaux colossaux réalisés par nos chercheurs à Paris-Saclay sur Bloom, l’outil français d’intelligence artificielle. Google, qui a lancé sa propre intelligence artificielle pour concurrencer OpenAI a reconnu que ChatGPT était une Ferrari, alors que la sienne était, au mieux, « une Honda Civic améliorée ».

Photo de Alain Richard

La parole est à M. Guy Benarroche, pour un rappel au règlement.

Photo de Pierre-Antoine Levi

Ma crainte est donc la suivante : n’avons-nous pas déjà pris trop de retard sur les entreprises américaines ? Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous nous rassurer sur le fait que la France sera au rendez-vous de cette quatrième révolution industrielle ?

Photo de Guy Benarroche

Ce rappel au règlement est fondé sur l'article 44 de notre règlement relatif aux motions de procédure.

Sur la proposition de résolution exprimant la gratitude et la reconnaissance du Sénat aux membres des forces de l'ordre déployées sur tout le territoire national, qui sera examinée dans quelques instants, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a déposé une motion tendant à opposer la question préalable. Celle-ci a été rejetée.

Pourtant, l'alinéa 3 de l'article 44 du règlement du Sénat ne dispose pas que l'emploi de ce type de motion est limité aux seuls projets ou aux propositions de loi. En outre, l'article 50 quater, qui prévoit l'interdiction de déposer des amendements sur une proposition de résolution (PPR), ne traite pas des motions de procédure.

Par conséquent, nous nous interrogeons sur le motif de ce rejet et nous constatons, une nouvelle fois, une certaine imprécision de notre règlement, qui peut devenir problématique.

Nous souhaitions déposer une motion tendant à opposer la question préalable afin de rejeter la proposition de résolution, qui nous paraît à la fois caricaturale et manichéenne. Au-delà des outrances et des attaques graves et infondées dirigées contre nombre de nos collègues parlementaires, ce qui nous paraît le plus inquiétant est l'agenda dangereux, mais délibéré, d'examen de ce texte.

Mes chers collègues, dans cette période de tensions sociales et politiques extrêmes, notre rôle de représentant de la Nation n'est pas de créer de la division.

La violence que connaît notre pays et que nous condamnons est le symptôme d'une démocratie malade. Il n'est plus possible de voter des lois contre la majorité du pays ni de réprimer la contestation sociale par la force.

Il nous faut donc appeler le pouvoir exécutif à l'apaisement, plutôt que de l'inviter à poursuivre sa dérive autoritaire et illibérale.

Contrairement aux intentions des auteurs de cette proposition de résolution, ce n'est pas rendre service à nos forces de l'ordre, qui ne font que respecter les consignes de leur autorité.

À l'opposé de cette démarche contre-productive, nous demandons au Gouvernement de faire des gestes d'apaisement pour protéger à la fois les forces de l'ordre et les manifestants.

Nous lui demandons également de revoir de fond en comble la doctrine de maintien de l'ordre pour revenir à un usage proportionné de la force, afin de restaurer la confiance entre la police et la population.

Pour toutes ces raisons, nous ne participerons pas au débat qui va s'ouvrir et nous ne prendrons pas part au vote.

Photo de Alain Richard

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Panunzi.

Un sénateur du groupe Les Républicains

Courage, fuyons !

Photo de Jean-Jacques Panunzi

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis quelques mois, les intelligences artificielles génératives influencent notre quotidien et monopolisent l’espace médiatique : ChatGPT, Lensa ou Midjourney sont autant de logiciels d’IA engagés dans une course frénétique pour devenir la référence en la matière.

Qu’est-ce que l’intelligence artificielle générative ? Elle est un sous-domaine de l’intelligence artificielle, qui crée des contenus tels que des textes, des images, des vidéos, des programmes informatiques. C’est à l’IAG que l’on doit notamment les photos truquées du pape François en doudoune blanche ou de l’ancien président américain Donald Trump menotté, qui ont beaucoup circulé.

Moins de deux mois après son lancement, en janvier 2023, ChatGPT, développé par l’entreprise californienne OpenAI, dépassait les 100 millions d’utilisateurs, ce qui en fait à ce jour l’application ayant connu la croissance la plus rapide.

La nouvelle version GPT-4, dévoilée à la mi-mars, comporte d’incroyables améliorations et nous conduit à nous poser la grande question : l’IA remplacera-t-elle les humains par les machines ?

L’intelligence artificielle est déjà en train de changer le monde du travail. Les machines sont capables d’apprendre et de s’adapter à des tâches qui étaient auparavant réservées aux humains. La question des conséquences sur l’emploi se pose, comme à chaque grande révolution technologique, ce qui déclenche appréhensions et crispations.

Ainsi, dans les rédactions, se posera la question suivante : aura-t-on encore besoin des journalistes et des illustrateurs ? Dans les cabinets d’avocats ou de conseil, on se demandera s’il est encore nécessaire d’avoir des juristes et des consultants. En effet, OpenAI a fait passer le concours du barreau américain à ChatGPT, qui a été brillamment reçu. Les experts de Goldman Sachs estiment ainsi que les IA génératives pourraient supprimer jusqu’à 300 millions d’emplois dans le monde.

Au cours de l’histoire, les grandes innovations ont souvent eu des conséquences sur les emplois. Le cabinet américain McKinsey souligne que le fossé risque de se creuser entre les travailleurs et entre les pays. Les principaux pays qui tireront parti de l’IA seront sans doute les États-Unis et la Chine. Toutefois, la France, le Royaume-Uni ou la Corée du Sud seraient relativement bien positionnés.

D’un point de vue économique en général, l’IA générative peut avoir des impacts considérables. Selon les économistes de Goldman Sachs, l’adoption généralisée de l’IA pourrait accroître la productivité et augmenter le PIB mondial de 7 % par an.

L’IAG, nous l’avons vu, peut être utilisée pour produire des contenus à grande échelle en un temps record ou pour créer des produits et des services personnalisés. Néanmoins, l’utilisation de l’IAG dans les affaires doit être éthique et responsable, afin de minimiser les impacts négatifs potentiels.

Des fake news propagées grâce à l’intelligence artificielle, des images truquées, de fausses révélations, peuvent avoir des répercussions très importantes sur les cours des Bourses mondiales et les faire chuter.

D’un point de vue social ou sociétal, les effets de l’IA générative peuvent également se révéler positifs comme négatifs. Si celle-ci peut contribuer à la création de contenus artistiques et culturels innovants, elle peut aussi, par de faux contenus, semer la désinformation.

En outre, l’IAG peut être utilisée pour propager des discours de haine ou du cyberharcèlement et favoriser la violence des campagnes mensongères. C’est pourquoi la Cnil commence à s’intéresser au cas de ChatGPT et a défini un plan d’action, plaidant pour « une clarification du cadre légal ».

D’un point de vue politique, l’IAG peut avoir des conséquences importantes. Elle peut aider à la prise de décision, mais elle peut aussi véhiculer insidieusement des idéologies dans de très nombreux domaines – santé, environnement… – ou encore être utilisée pour surveiller les citoyens.

Le Parlement européen a créé une commission sur l’intelligence artificielle à l’ère numérique. La Commission européenne a lancé, au mois d’avril 2021, un règlement sur l’IA, qui est en cours d’examen au Parlement européen, et n’a pas fermé la porte à l’usage d’IA recourant à la biométrie. Elle s’est gardé la possibilité d’utiliser la reconnaissance faciale a posteriori, sous contrôle judiciaire.

En France, le ministère des sports et des jeux Olympiques et Paralympiques a affirmé que le recours à la reconnaissance faciale était exclu par le projet de loi relatif aux jeux Olympiques et Paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions. Seules seront utilisées des caméras usant d’algorithmes intelligents.

Par ailleurs, l’agence de police européenne Europol a averti que les criminels étaient prêts à tirer parti de l’intelligence artificielle.

En somme, l’IAG peut avoir une incidence très importante sur la politique, en offrant de nouvelles aubaines. Toutefois, il est nécessaire de veiller à ce qu’elle soit utilisée dans des limites clairement établies et validées légalement.

À l’échelle internationale, une compétition acharnée est prévisible. La Chine est très en avance et déploie de gros moyens, tandis que le président russe Vladimir Poutine estimait dès 2017 que quiconque deviendrait le leader dans ce domaine deviendrait le dirigeant du monde.

Aux États-Unis, Elon Musk, cofondateur d’OpenAI avec Sam Altman, l’inventeur de ChatGPT, a réclamé une pause de six mois dans la recherche sur l’IA, en évoquant « des risques majeurs pour l’humanité ». Le 4 avril dernier, le président Joe Biden a évoqué les risques liés à l’intelligence artificielle et a demandé au Congrès de fixer des « limites strictes » aux données personnelles collectées et d’interdire la publicité ciblée visant les enfants.

En tant que pays leader en matière de technologie et de recherche, la France a un rôle important à jouer. Elle doit continuer de soutenir la recherche, tout en élaborant une réglementation adaptée, et investir dans la formation, tout en assurant la sécurité et la protection des droits des individus.

Monsieur le ministre, compte tenu de ces éléments, estimez-vous que la France a la capacité d’être suffisamment réactive en matière d’IAG ? A-t-elle pris du retard ? Le cas échéant, de quelle manière et avec quels moyens allons-nous le combler ?

Photo de Alain Richard

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Sur la partie de votre intervention relative au règlement, une réponse sera apportée par la présidence.

Photo de Alain Richard

La parole est à M. le ministre délégué.

Jean-Noël Barrot

M. Jean-Noël Barrot, ministre délégué auprès du ministre de l ’ économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, chargé de la transition numérique et des télécommunications. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, j’ai suivi l’exemple de Monique de Marco et de Pierre-Antoine Levi en ne faisant pas appel à ChatGPT pour répondre à vos interventions – la preuve : papier, crayon !

Photo de Alain Richard

L'ordre du jour appelle, à la demande des groupes Les Républicains et Union Centriste, l'examen de la proposition de résolution exprimant la gratitude et la reconnaissance du Sénat aux membres des forces de l'ordre déployées sur tout le territoire national, présentée, en application de l'article 34-1 de la Constitution, par M. Bruno Retailleau et les membres du groupe Les Républicains, M. Hervé Marseille et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 479).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution. §

Photo de Bruno Retailleau

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, le dépôt de cette proposition de résolution, par mon collègue du groupe Union Centriste Hervé Marseille et moi-même, n'est pas uniquement un acte symbolique : c'est également un acte politique.

Face au déchaînement de violence et de haine dont sont victimes nos forces de l'ordre – en un peu plus d'un mois, quelque 1 000 policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers ont ainsi été blessés, parfois grièvement –, nous avons le devoir, en tant qu'élus, non pas de nous taire, mais de nommer les choses, de prendre parti et, finalement, de choisir notre camp, celui de l'ordre républicain ou celui d'une certaine forme d'ambiguïté, voire de complicité.

Jean-Noël Barrot

Pourquoi ? Pour bien légiférer, il faut bien comprendre l’intelligence artificielle générative, sujet de notre débat, dire ce qu’elle est, mais aussi ce qu’elle n’est pas. Ce qu’elle n’est pas, ou ne devrait pas être, c’est une nouvelle Pythie qui rendrait des oracles sur tous les sujets du monde.

Elle est une intelligence générative, plutôt que créative, en cela qu’elle réagence des contenus préexistants sans avoir une connaissance structurée du monde, ce qui fait d’elle un perroquet stochastique – ou, en langage commun, un perroquet approximatif, n’en déplaise à Stéphane Ravier qui, restant dans le registre animalier, a évoqué la capacité de ChatGPT à singer les comportements humains.

La différence fondamentale entre l’intelligence humaine et l’intelligence artificielle générative, comme l’a évoquée Vanina Paoli-Gagin et comme l’a soulevée il y a quatre siècles Blaise Pascal, inventeur de la première machine d’intelligence artificielle – la pascaline – est l’intention, c’est-à-dire la capacité de volonté.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous entendons apporter à l’irruption de systèmes du type de ChatGPT, que vous avez abondamment cité, des réponses volontaristes, qui reposent sur une position équilibrée. Christian Redon-Sarrazy et Monique de Marco l’ont souligné, la technologie n’est, intrinsèquement, ni poison ni remède. Pour notre part, nous ne sommes donc ni technolâtres ni technophobes : nous considérons que la technologie doit être placée au service de l’homme.

Certes, l’émergence très rapide de cette technologie suscite des questions qui demeurent sans réponse. Cyril Pellevat et Jean-Jacques Panunzi, entre autres, ont par exemple évoqué les effets ambigus que l’on pouvait attendre de cette technologie sur le marché du travail. Si des travailleurs seront soulagés de tâches pénibles, répétitives et fastidieuses, des professions entières seront bousculées.

Aussi devons-nous évidemment donner tous les moyens à nos concitoyens de se saisir de ces outils, afin qu’ils puissent en bénéficier. Nous devons nous assurer que l’adoption de ces technologies se fasse dans la justice sociale. Nous ne comptons pas sur la technologie pour nous dicter le cours des choses ; au contraire, nous avons la volonté de dicter le cours des choses à la technologie.

Par ailleurs, l’intelligence artificielle générative n’exclut pas les communs numériques, que Pascal Savoldelli a abordés. Pour preuve, avant ChatGPT est né un modèle open source, collaboratif, et fonctionnant notamment en Français : le modèle Bloom, qui a pu être conçu grâce au soutien du supercalculateur Jean Zay.

Faut-il marquer une pause ou décider d’un moratoire, comme l’a suggéré Catherine Morin-Desailly ? Si la question mérite d’être posée, la réponse apportée par les signataires de la récente pétition est mauvaise. À bien des égards, il nous faut accélérer, car la France dispose de tous les atouts pour maîtriser ces technologies d’intelligence artificielle générative.

Notre action en la matière n’est pas nouvelle, puisque le Président de la République a lancé il y a cinq ans une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle, dotée de 1, 5 milliard d’euros. Ainsi, nous avons déjà fait émerger des instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle (3IA) à Nice, à Toulouse, à Grenoble et à Paris, qui ont permis d’établir 190 chaires de recherche pour l’intelligence artificielle, de multiplier par deux le nombre de diplômés en intelligence artificielle et d’augmenter de 500 le nombre de doctorants.

Cette stratégie se couple à une stratégie d’accélération pour l’intelligence artificielle inscrite au cœur de France 2030, ce qui répond aux questions de Cyril Pellevat, Jean-Jacques Panunzi ou Pierre-Antoine Lévi relatives à nos ambitions en la matière.

Faut-il ou non réguler ? Évidemment qu’il faut le faire. Le règlement sur l’intelligence artificielle impose non seulement des obligations de transparence, de manière à permettre à nos concitoyens de toujours faire la différence entre l’humain et la machine, mais aussi un régime de responsabilité pour les concepteurs des systèmes d’intelligence artificielle en fonction des risques associés aux usages de ces systèmes.

Ainsi, pour certains usages, le recours à l’intelligence artificielle sera proscrit. Pour d’autres, il sera encadré par des obligations de transparence et d’audit préalables à la mise sur le marché de ce type de solution. Pour d’autres encore, l’intelligence artificielle sera plus librement mobilisable.

Ce règlement couvre-t-il tous les sujets ? Non, certains d’entre eux ont d’ailleurs été cités par certains orateurs. C’est notamment le cas de l’empreinte carbone, mentionnée par Sylvie Robert. De même, en ce qui concerne la normalisation avec les États-Unis et la Chine, abordée par Cyril Pellevat et Catherine Morin-Desailly, des discussions ont d’ores et déjà eu lieu avec les États-Unis au sein du Conseil du commerce et des technologies (TTC, pour Trade and Technology Council), mais elles doivent être approfondies.

De plus, nous devrons être vigilants sur la question de l’exploitation des travailleurs des pays du Sud, évoquée par Monique de Marco et Pascal Savoldelli. Nous devrons également traiter la question des droits d’auteur, soulevée par Sylvie Robert et Jean-Claude Requier, ainsi que celle de la protection des données personnelles, qui est la raison invoquée par l’équivalent italien de la Cnil pour interdire ChatGPT sur le sol italien.

Les modèles d’intelligence artificielle sont entraînés sur des jeux de données assemblés sur internet. Or des données personnelles qui alimentent des jeux d’entraînement ont été collectées à une époque où aucun consentement n’était prévu. Il va donc nous falloir concilier la réglementation que nous construisons pour l’intelligence artificielle et celle que nous avons construite – et dont nous sommes très fiers – pour la protection des données personnelles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du temps que vous avez consacré à ce débat. Certaines de vos préoccupations sont d’ores et déjà prises en considération dans la réglementation sur laquelle nous avançons et par le plan d’investissement souhaité par le Président de la République, tandis que d’autres nourriront, à n’en pas douter, les travaux du Sénat dans les mois et les années à venir.

Debut de section - Permalien
Jean-Noël Barrot

Pourquoi ? Pour bien légiférer, il faut bien comprendre l’intelligence artificielle générative, sujet de notre débat, dire ce qu’elle est, mais aussi ce qu’elle n’est pas. Ce qu’elle n’est pas, ou ne devrait pas être, c’est une nouvelle Pythie qui rendrait des oracles sur tous les sujets du monde.

Elle est une intelligence générative, plutôt que créative, en cela qu’elle réagence des contenus préexistants sans avoir une connaissance structurée du monde, ce qui fait d’elle un perroquet stochastique – ou, en langage commun, un perroquet approximatif, n’en déplaise à Stéphane Ravier qui, restant dans le registre animalier, a évoqué la capacité de ChatGPT à singer les comportements humains.

La différence fondamentale entre l’intelligence humaine et l’intelligence artificielle générative, évoquée par Vanina Paoli-Gagin et soulevée il y a quatre siècles par Blaise Pascal, inventeur de la première machine d’intelligence artificielle – la pascaline –, est l’intention, c’est-à-dire la capacité de volonté.

Mesdames, messieurs les sénateurs, nous entendons apporter à l’irruption de systèmes du type de ChatGPT, que vous avez abondamment cité, des réponses volontaristes, qui reposent sur une position équilibrée. Christian Redon-Sarrazy et Monique de Marco l’ont souligné, la technologie n’est, intrinsèquement, ni poison ni remède. Pour notre part, nous ne sommes donc ni technolâtres ni technophobes : nous considérons que la technologie doit être placée au service de l’homme.

Certes, l’émergence très rapide de cette technologie suscite des questions qui demeurent sans réponse. Cyril Pellevat et Jean-Jacques Panunzi, entre autres, ont par exemple évoqué les effets ambigus que l’on pouvait attendre de cette technologie sur le marché du travail. Des travailleurs seront sans doute soulagés de tâches pénibles, répétitives et fastidieuses, mais des professions entières seront bousculées.

Aussi devons-nous évidemment donner tous les moyens à nos concitoyens de se saisir de ces outils, afin qu’ils puissent en bénéficier. Nous devons nous assurer que l’adoption de ces technologies se fasse dans la justice sociale. Nous ne comptons pas sur la technologie pour nous dicter le cours des choses ; au contraire, nous avons la volonté de dicter le cours des choses à la technologie.

Par ailleurs, l’intelligence artificielle générative n’exclut pas les communs numériques, que Pascal Savoldelli a abordés. Pour preuve, avant ChatGPT est né un modèle open source, collaboratif, et fonctionnant notamment en Français : le modèle Bloom, qui a pu être conçu grâce au soutien du supercalculateur Jean Zay.

Faut-il marquer une pause ou décider d’un moratoire, comme l’a suggéré Catherine Morin-Desailly ? Si la question mérite d’être posée, la réponse apportée par les signataires de la récente pétition est mauvaise. À bien des égards, il nous faut accélérer, car la France dispose de tous les atouts pour maîtriser ces technologies d’intelligence artificielle générative.

Notre action en la matière n’est pas nouvelle, puisque le Président de la République a lancé il y a cinq ans une stratégie nationale pour l’intelligence artificielle, dotée de 1, 5 milliard d’euros. Ainsi, nous avons déjà fait émerger des instituts interdisciplinaires d’intelligence artificielle (3IA) à Nice, à Toulouse, à Grenoble et à Paris, qui ont permis d’établir 190 chaires de recherche pour l’intelligence artificielle, de multiplier par deux le nombre de diplômés en intelligence artificielle et d’augmenter de 500 le nombre de doctorants.

Cette stratégie se couple à une stratégie d’accélération pour l’intelligence artificielle inscrite au cœur de France 2030, ce qui répond aux questions de Cyril Pellevat, Jean-Jacques Panunzi ou Pierre-Antoine Levi relatives à nos ambitions en la matière.

Faut-il ou non réguler ? Évidemment qu’il faut le faire. Le règlement sur l’intelligence artificielle impose non seulement des obligations de transparence, de manière à permettre à nos concitoyens de toujours faire la différence entre l’humain et la machine, mais aussi un régime de responsabilité pour les concepteurs des systèmes d’intelligence artificielle en fonction des risques associés aux usages de ces systèmes.

Ainsi, pour certains usages, le recours à l’intelligence artificielle sera proscrit. Pour d’autres, il sera encadré par des obligations de transparence et d’audit préalables à la mise sur le marché de ce type de solution. Pour d’autres encore, l’intelligence artificielle sera plus librement mobilisable.

Ce règlement couvre-t-il tous les sujets ? Non, certains d’entre eux ont d’ailleurs été cités par certains orateurs. C’est notamment le cas de l’empreinte carbone, mentionnée par Sylvie Robert. De même, en ce qui concerne la normalisation avec les États-Unis et la Chine, abordée par Cyril Pellevat et Catherine Morin-Desailly, des discussions ont d’ores et déjà eu lieu avec les États-Unis au sein du Conseil du commerce et des technologies (TTC, pour Trade and Technology Council), mais elles doivent être approfondies.

De plus, nous devrons être vigilants sur la question de l’exploitation des travailleurs des pays du Sud, évoquée par Monique de Marco et Pascal Savoldelli. Nous devrons également traiter la question des droits d’auteur, soulevée par Sylvie Robert et Jean-Claude Requier, ainsi que celle de la protection des données personnelles, qui est la raison invoquée par l’équivalent italien de la Cnil pour interdire ChatGPT sur le sol italien.

Les modèles d’intelligence artificielle sont entraînés sur des jeux de données assemblés sur internet. Or des données personnelles qui alimentent des jeux d’entraînement ont été collectées à une époque où aucun consentement n’était prévu. Il va donc nous falloir concilier la réglementation que nous construisons pour l’intelligence artificielle et celle que nous avons construite – et dont nous sommes très fiers – pour la protection des données personnelles.

Mesdames, messieurs les sénateurs, je vous remercie du temps que vous avez consacré à ce débat. Certaines de vos préoccupations sont d’ores et déjà prises en considération dans la réglementation sur laquelle nous avançons et par le plan d’investissement souhaité par le Président de la République, tandis que d’autres nourriront, à n’en pas douter, les travaux du Sénat dans les mois et les années à venir.

Photo de Bruno Retailleau

La présence d'élus – aussi bien maires que parlementaires – ceints de leur écharpe tricolore, à Sainte-Soline, une manifestation interdite dont tout le monde savait qu'elle allait mal se terminer, ne peut en effet être perçue autrement que comme un signe de complicité qui n'est pas admissible. En tant qu'élu de la République, notre écharpe tricolore ne peut servir à couvrir les exactions des cagoules noires. Ce n'est pas possible !

De même, tout fonctionnaire, qui plus est quand il est magistrat, doit s'en tenir à l'obligation de réserve qui lui incombe. J'ai été stupéfait du communiqué de presse du Syndicat de la magistrature évoquant une répression sociale et un état de violence. Il s'agit d'un débordement qui n'est pas justifiable et qui alimente la défiance des Français envers la justice.

À un moment donné, il est donc nécessaire de réaffirmer calmement qu'il faut mettre un terme à un certain nombre de dérives et que cela suffit ! Cela vaut notamment pour cette culture de l'excuse, qui confine à une fascination pour le chaos, le désordre ou la violence. Ceux qui lancent des pierres cloutées sur les policiers, ceux qui brûlent les voitures de la gendarmerie, ceux qui attaquent des sapeurs-pompiers ne sont pas les nouveaux damnés de la terre ; au contraire, ce sont des nouveaux incendiaires et adversaires de la République.

N'ayez pas la naïveté de croire, ne serait-ce qu'un seul instant, que la question des retraites ou celle des réserves de substitution les concernent. Ils s'en fichent ! Ils ne veulent on pas mettre « l'économie française à l'arrêt », ils veulent mettre à bas l'État et la démocratie. Il faut réagir !

De la même façon, cette fausse équivalence établie entre l'usage légitime de la force – si des dérives ont lieu, elles doivent être sanctionnées et elles le sont toujours – et un usage illégitime, illégal de la violence devient insupportable.

Il ne saurait exister, mes chers collègues, d'équivalence entre ce qui est illégitime et ce qui est illégal. Il ne saurait exister d'équivalence entre ce qui vise à protéger les citoyens, les biens ou les personnes et ce qui relève de l'illégalité. Il n'existe aucune équivalence entre ce qui vise à blesser, parfois à tuer ou à « casser du flic », et ce qui vise, au contraire, à protéger.

Nous avons pour notre part choisi notre camp. Ce ne sera jamais celui du nihilisme, dans lequel une certaine ultragauche, voire une extrême gauche, se complaît, chevauchant ainsi les passions les plus autodestructrices. Ceux qui en font partie sont en réalité les mêmes – et je remercie ceux qui sont à gauche de cet hémicycle de ne pas y avoir participé à l'époque – qui ont battu le pavé parisien au mois de novembre 2019 aux côtés des islamistes.

Photo de Alain Richard

Nous en avons terminé avec le débat d’actualité sur le thème : « Impacts économique, social et politique de l’intelligence artificielle générative ».

Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.

La séance est suspendue.

Photo de Bruno Retailleau

Ce sont les mêmes qui aujourd'hui battent la campagne melloise des Deux-Sèvres, aux côtés des anarchistes et des cagoules noires.

Mes chers collègues, nous devons prendre parti. Nous avons choisi notre camp, celui de l'ordre républicain et d'un ordre juste, calme, mais néanmoins déterminé.

« L'ordre, et l'ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. » Vous connaissez sans doute cette jolie formule de Charles Péguy.

Nous ne devons pas céder à cette forme de dérive ou de terrorisme intellectuel qui inciterait à aller dans le sens des radicalités et de ceux qui veulent enchaîner, asservir la République et l'entraîner vers la chienlit.

Nous sommes dans le camp de l'ordre républicain, celui des forces de l'ordre. Soyons aux côtés de celles et de ceux qui servent, parfois au péril de leur vie, la République et notre démocratie française.

Leur uniforme, que certains exècrent ou veulent salir, est le même que celui que portait Arnaud Beltrame.

Photo de Bruno Retailleau

Ils ont prêté serment de servir et de défendre la loi – cette loi que nous votons au Sénat – revêtus de cet uniforme. Nombre d'entre eux le portent au quotidien.

Mes chers collègues, madame la secrétaire d'État, nous avons une dette envers eux lorsqu'ils sont agressés, une dette d'honneur aussi lorsque leur honneur est injustement attaqué.

Défendons-les !

Défendons-les avec des mots, en ne cédant rien aux discours pleins d'ambiguïtés.

Défendons-les avec des actes, en leur donnant les moyens d'exercer leur mission.

Défendons-les aussi, madame la secrétaire d'État, en faisant preuve de constance et de cohérence.

On ne peut pas donner raison aux zadistes de Notre-Dame-des-Landes, pour, le surlendemain, combattre ceux de Sainte-Soline. Tout se tient ou rien ne tient.

Mes chers collègues, défendons nos forces de l'ordre. Exprimons-leur notre gratitude, quelles que soient nos travées. Ce qu'ils représentent transcende tous nos clivages et l'ordre n'appartient à aucun parti, si ce n'est celui de la République.

Nous devons être à leurs côtés et leur exprimer la gratitude, la reconnaissance de la République, celle de la nation que nous servons et qu'ils servent quotidiennement, bien souvent et de plus en plus fréquemment, au péril de leur vie. §

Photo de Franck Menonville

Lors du scrutin n° 270 portant sur les amendements identiques n° 24, 25 rectifié bis, 44, 55 et 68 tendant à supprimer l’article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, MM. Emmanuel Capus, Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Pierre-Jean Verzelen, Dany Wattebled et Franck Menonville souhaitaient voter contre et MM. Joël Guerriau, Claude Malhuret et Mme Colette Mélot souhaitaient voter pour.

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Lors du scrutin n° 270 portant sur les amendements identiques tendant à supprimer l’article 11 de la proposition de loi pour une école de la liberté, de l’égalité des chances et de la laïcité, MM. Emmanuel Capus, Daniel Chasseing, Jean-Pierre Decool, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Pierre-Jean Verzelen, Dany Wattebled et Franck Menonville souhaitaient voter contre et MM. Joël Guerriau, Claude Malhuret et Mme Colette Mélot souhaitaient voter pour.

Photo de Jérôme Durain

Monsieur le président, mes chers collègues, M. Retailleau a décidé de nous réunir cet après-midi pour examiner une proposition de résolution politique.

Photo de Alain Richard

Acte est donné de cette mise au point, mon cher collègue. Elle sera publiée au Journal officiel et figurera dans l’analyse politique du scrutin concerné.

Photo de Jérôme Durain

M. Jérôme Durain. Il y est question de gratitude et de reconnaissance aux membres des forces de l'ordre. J'ignore si ce texte sera accueilli avec la même gratitude et la même reconnaissance par ces mêmes forces de l'ordre, qui n'ont pas oublié la suppression de 13 000 postes de policiers et de gendarmes au cours du dernier quinquennat pendant lequel Les Républicains étaient au pouvoir – une saignée des années Sarkozy

Photo de Alain Richard

La parole est à M. Guy Benarroche, pour un rappel au règlement.

Photo de Guy Benarroche

Ce rappel au règlement est fondé sur l’article 44 de notre règlement relatif aux motions de procédure.

Sur la proposition de résolution exprimant la gratitude et la reconnaissance du Sénat aux membres des forces de l’ordre déployées sur tout le territoire national, qui sera examinée dans quelques instants, le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires a déposé une motion tendant à opposer la question préalable. Celle-ci a été rejetée.

Pourtant, l’alinéa 3 de l’article 44 du règlement du Sénat ne dispose pas que l’emploi de ce type de motion est limité aux seuls projets ou aux propositions de loi. En outre, l’article 50 quater, qui prévoit l’interdiction de déposer des amendements sur une proposition de résolution (PPR), ne traite pas des motions de procédure.

Par conséquent, nous nous interrogeons sur le motif de ce rejet et nous constatons, une nouvelle fois, une certaine imprécision de notre règlement, qui peut devenir problématique.

Nous souhaitions déposer une motion tendant à opposer la question préalable afin de rejeter la proposition de résolution, qui nous paraît à la fois caricaturale et manichéenne. Au-delà des outrances et des attaques graves et infondées dirigées contre nombre de nos collègues parlementaires, ce qui nous paraît le plus inquiétant est l’agenda dangereux, mais délibéré, d’examen de ce texte.

Mes chers collègues, dans cette période de tensions sociales et politiques extrêmes, notre rôle de représentant de la Nation n’est pas de créer de la division.

La violence que connaît notre pays et que nous condamnons est le symptôme d’une démocratie malade. Il n’est plus possible de voter des lois contre la majorité du pays ni de réprimer la contestation sociale par la force.

Il nous faut donc appeler le pouvoir exécutif à l’apaisement, plutôt que de l’inviter à poursuivre sa dérive autoritaire et illibérale.

Contrairement aux intentions des auteurs de cette proposition de résolution, ce n’est pas rendre service à nos forces de l’ordre, qui ne font que respecter les consignes de leur autorité.

À l’opposé de cette démarche contre-productive, nous demandons au Gouvernement de faire des gestes d’apaisement pour protéger à la fois les forces de l’ordre et les manifestants.

Nous lui demandons également de revoir de fond en comble la doctrine de maintien de l’ordre pour revenir à un usage proportionné de la force, afin de restaurer la confiance entre la police et la population.

Pour toutes ces raisons, nous ne participerons pas au débat qui va s’ouvrir et nous ne prendrons pas part au vote.

Photo de Jérôme Durain

La gratitude semblerait aujourd'hui plus convaincante, sincère et cohérente, si l'ingratitude d'alors n'avait existé.

Il est vrai que vous ne prenez pas de risques importants avec cette proposition de résolution opportuniste. Vous indiquerez peut-être que c'était le but recherché. En effet, pour une précédente proposition de loi présentée par M. Retailleau, visant à renforcer et garantir le maintien de l'ordre public lors des manifestations, qui avait trait aux casseurs, l'histoire s'est mal terminée devant le Conseil constitutionnel.

Photo de Bruno Retailleau

L'article 3 était un ajout de M. Castaner !

Photo de Jérôme Durain

Au moins, pour ce texte, ce ne sera clairement pas le cas. Quand bien même le Conseil constitutionnel s'intéresserait-il à cette proposition de résolution, je ne vois pas bien ce qu'il pourrait en dire.

En effet, cette proposition de résolution « invite le Gouvernement à prendre toutes les mesures qui s'imposent pour […] ramener l'ordre dans notre pays », alors que « la période récente a vu s'établir une corrélation entre la violence politique et la violence physique ». Monsieur Retailleau, avez-vous aussi envisagé d'inviter le Gouvernement à gouverner, voire de lui rappeler les vertus du dialogue ?

Jeudi après-midi, j'ai passé quatre heures avec des policiers.

Un sénateur du groupe Les Républicains

Courage, fuyons !

Photo de Alain Richard

Acte vous est donné de votre rappel au règlement, mon cher collègue.

Sur la partie de votre intervention relative au règlement, une réponse sera apportée par la présidence.

Photo de Jérôme Durain

Aucun ne m'a demandé quel serait mon vote sur ce texte. En revanche, ils étaient heureux de me transmettre leurs doléances précises, satisfaits que les sénateurs socialistes aient voté la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'intérieur (Lopmi), curieux d'entendre les critiques sur certains points de doctrine.

Il ne leur serait pas venu à l'idée de me demander si je soutenais les forces de l'ordre, alors qu'ils savaient tous que j'étais de gauche. En outre, je vous rassure, ils ne m'ont même pas confondu avec un sympathisant de l'ultragauche !

Adoption d’une proposition de résolution

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

L’ordre du jour appelle, à la demande des groupes Les Républicains et Union Centriste, l’examen de la proposition de résolution exprimant la gratitude et la reconnaissance du Sénat aux membres des forces de l’ordre déployées sur tout le territoire national, présentée, en application de l’article 34-1 de la Constitution, par M. Bruno Retailleau et les membres du groupe Les Républicains, M. Hervé Marseille et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 479).

Dans la discussion générale, la parole est à M. Bruno Retailleau, auteur de la proposition de résolution.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Ils ne m'ont pas non plus demandé si je dénonçais les casseurs et, à aucun moment, je n'ai été accusé de terrorisme intellectuel.

Notre assemblée a su montrer qu'elle savait voter des initiatives pour le bien commun, mais cette proposition de résolution n'apporte rien au débat.

Oui, la majorité des policiers et des gendarmes est exemplaire. Oui, le maintien de l'ordre est une matière difficile. Mais non, votre proposition de résolution ne prend pas en compte la réalité complexe des dernières semaines.

Vous tentez de réduire la situation à un état de guerre de tous contre tous, bien manichéen.

Le Gouvernement doit bien sûr maintenir l'ordre. Là où nous percevons avant tout une immense colère sociale et une profonde inquiétude écologique relayées, pour l'essentiel, par des millions de manifestants pacifistes, vous ne retenez que les débordements, que nous condamnons également, de quelques dizaines d'abrutis dangereux armés de mauvaises intentions.

En réalité, ce n'est pas la faute des manifestants si la pression ne redescend pas. Ce n'est pas la faute des manifestants si des journalistes se font parfois agresser par les forces de l'ordre. Ce n'est pas la faute des manifestants si l'on n'ose plus manifester en famille.

Les responsabilités sont d'abord à chercher du côté du Gouvernement. À force de mépriser les corps intermédiaires, de nier l'utilité des syndicats ou de vouloir caricaturer les oppositions, l'exécutif a participé à la montée de la température sociale.

Ce réchauffement politique, comme le réchauffement climatique, n'est pas inéluctable. Pour calmer les esprits, il faut entendre les avis contraires, prendre en considération les manifestants quand ils sont nombreux, éviter d'accroître la colère lors de passages au journal télévisé.

Crier que tout le monde adore la police pendant cette période est aussi stupide que de déclarer que la police tue. La majorité de nos concitoyennes et nos concitoyens soutiennent les forces de l'ordre.

Toutefois, vous avez oublié le contexte. Si cette proposition de résolution politique avait été soumise à nos suffrages après Magnanville ou l'attentat de Charlie Hebdo, celle-ci n'aurait pas eu la même portée. Déposer ce texte alors que le travail des forces de l'ordre est questionné revient à déclarer à ceux qui le critiquent : « Circulez, il n'y a rien à voir ».

Or la critique de la police est légitime et souhaitable. C'est même l'honneur d'une démocratie que d'interroger l'ensemble de ses institutions. On peut évidemment dénoncer les affirmations de ceux pour qui le maintien de l'ordre en France évoque celui qui a cours au Venezuela, où une vague de manifestations a causé 115 morts, mais il est impossible de balayer les interrogations de nos voisins européens sur notre police, autrefois un modèle et qui devient actuellement un objet de polémiques §venant de toutes parts.

Je ne suis cependant en rien opposé à la tenue de ce débat, que je ne crains aucunement.

Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, le dépôt de cette proposition de résolution, par mon collègue du groupe Union Centriste Hervé Marseille et moi-même, n’est pas uniquement un acte symbolique : c’est également un acte politique.

Face au déchaînement de violence et de haine dont sont victimes nos forces de l’ordre – en un peu plus d’un mois, quelque 1 000 policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers ont ainsi été blessés, parfois grièvement –, nous avons le devoir, en tant qu’élus, non pas de nous taire, mais de nommer les choses, de prendre parti et, finalement, de choisir notre camp, celui de l’ordre républicain ou celui d’une certaine forme d’ambiguïté, voire de complicité.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

En ce sens, ma position diverge de celle qu'a exprimée, la semaine dernière, la majorité composée de la droite et du centre à l'Assemblée nationale, qui a souhaité classer la pétition demandant la dissolution de la Brav-M. Je ne suis pas certain de partager les termes de cette pétition, éminemment politique, mais je n'aurais jamais jeté ainsi au rebut plusieurs centaines de milliers de signatures de citoyens, qui s'inquiètent de la manière dont le maintien de l'ordre est assuré en France. On n'est jamais gagnant quand on refuse le débat.

Avant la journée du 6 avril dernier, selon un sondage YouGov, 51 % des Français interrogés déclaraient avoir une bonne opinion des gardiens de la paix, quand ils étaient 61 % à l'affirmer au mois de novembre 2020, selon un autre sondage pourtant réalisé immédiatement après l'affaire dite Michel Zecler, du nom de ce producteur violenté par des policiers dans son studio de musique.

Selon un sondage Elabe du 29 mars dernier, 62 % des Français estiment que les violences policières sont marginales et que les dérapages sont le fait d'une minorité de policiers. À l'inverse, 37 % d'entre eux considèrent que ces violences ne sont pas marginales et sont représentatives d'un phénomène plus général au sein de la police. Je vous laisse disserter sur le verre à moitié plein ou à moitié vide. Pour ma part, je crois que le verre est à deux doigts de tomber par terre.

J'évoquais, un peu plus tôt, le regard de nos partenaires internationaux. Alors que les jeux Olympiques (JO) approchent, cela devrait tous nous inquiéter. Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, n'a pas le profil d'un casseur. Fort de sa connaissance de la façon dont le maintien de l'ordre peut être quotidiennement assuré par la police en Seine-Saint-Denis, comme à l'occasion des événements du Stade de France, il s'inquiète pour les JO et demande un débat apaisé.

Je ne suis pas convaincu que cette proposition de résolution participe de ce débat apaisé.

Pour autant, tout n'est pas à jeter dans votre texte.

Ainsi, vous évoquez « la montée de la violence en France, dans le discours politique et dans les manifestations ». « Cette violence a prospéré depuis plusieurs années, en raison à la fois de l'immobilisme, de la tolérance et parfois de la bienveillance de certains responsables politiques à l'égard de ses auteurs », soulignez-vous. La violence « est aujourd'hui légitimée et encouragée par des élus qui tiennent des discours ambivalents ». En outre, « la violence physique est désormais précédée jusque dans nos institutions d'une violence verbale qui tente de justifier des comportements aussi illégaux qu'inadmissibles ».

Sur l'ensemble de ces points, vous avez raison s'il s'agit bien de dénoncer l'ultradroite et pas uniquement l'ultragauche, s'il s'agit de dénoncer les manifestations racistes à Callac et pas seulement les manifestations écologiques à Sainte-Soline, s'il s'agit de dénoncer les remarques racistes du Rassemblement national (RN) au Palais-Bourbon et pas seulement les discours militants des Insoumis, s'il s'agit de dénoncer la résurrection du GUD (Groupe union défense) au travers de commandos qui se baptisent « Waffen-Assas » et pas seulement les étudiants bloqueurs, s'il s'agit de dénoncer la présence de policiers adjoints sur des boucles Telegram d'extrême droite qui menacent de commettre des attentats d'extrême droite et pas seulement de dénoncer la Ligue des droits de l'homme (LDH).

Pour ces raisons, mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et moi-même avons déposé une proposition de résolution qui plagie votre texte, …

Murmures sur les travées du groupe SER.

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

M. François Bonhomme. Ah, il y a des droits d'auteur !

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

La présence d’élus – aussi bien maires que parlementaires – ceints de leur écharpe tricolore, à Sainte-Soline, une manifestation interdite dont tout le monde savait qu’elle allait mal se terminer, ne peut en effet être perçue autrement que comme un signe de complicité qui n’est pas admissible. En tant qu’élu de la République, notre écharpe tricolore ne peut servir à couvrir les exactions des cagoules noires. Ce n’est pas possible !

De même, tout fonctionnaire, qui plus est quand il est magistrat, doit s’en tenir à l’obligation de réserve qui lui incombe. J’ai été stupéfait du communiqué de presse du Syndicat de la magistrature évoquant une répression sociale et un état de violence. Il s’agit d’un débordement qui n’est pas justifiable et qui alimente la défiance des Français envers la justice.

À un moment donné, il est donc nécessaire de réaffirmer calmement qu’il faut mettre un terme à un certain nombre de dérives et que cela suffit ! Cela vaut notamment pour cette culture de l’excuse, qui confine à une fascination pour le chaos, le désordre ou la violence. Ceux qui lancent des pierres cloutées sur les policiers, ceux qui brûlent les voitures de la gendarmerie, ceux qui attaquent des sapeurs-pompiers ne sont pas les nouveaux damnés de la terre ; au contraire, ce sont des nouveaux incendiaires et adversaires de la République.

N’ayez pas la naïveté de croire, ne serait-ce qu’un seul instant, que la question des retraites ou celle des réserves de substitution les concernent. Ils s’en fichent ! Ils ne veulent on pas mettre « l’économie française à l’arrêt », ils veulent mettre à bas l’État et la démocratie. Il faut réagir !

De la même façon, cette fausse équivalence établie entre l’usage légitime de la force – si des dérives ont lieu, elles doivent être sanctionnées et elles le sont toujours – et un usage illégitime, illégal de la violence devient insupportable.

Il ne saurait exister, mes chers collègues, d’équivalence entre ce qui est illégitime et ce qui est illégal. Il ne saurait exister d’équivalence entre ce qui vise à protéger les citoyens, les biens ou les personnes et ce qui relève de l’illégalité. Il n’existe aucune équivalence entre ce qui vise à blesser, parfois à tuer ou à « casser du flic », et ce qui vise, au contraire, à protéger.

Nous avons pour notre part choisi notre camp. Ce ne sera jamais celui du nihilisme, dans lequel une certaine ultragauche, voire une extrême gauche, se complaît, chevauchant ainsi les passions les plus autodestructrices. Ceux qui en font partie sont en réalité les mêmes – et je remercie ceux qui sont à gauche de cet hémicycle de ne pas y avoir participé à l’époque – qui ont battu le pavé parisien au mois de novembre 2019 aux côtés des islamistes.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

La présence d’élus – aussi bien maires que parlementaires – ceints de leur écharpe tricolore, à Sainte-Soline, une manifestation interdite dont tout le monde savait qu’elle allait mal se terminer, ne peut en effet être perçue autrement que comme un signe de complicité qui n’est pas admissible. En tant qu’élu de la République, notre écharpe tricolore ne peut servir à couvrir les exactions des cagoules noires. Ce n’est pas possible !

De même, tout fonctionnaire, qui plus est quand il est magistrat, doit s’en tenir à l’obligation de réserve qui lui incombe. J’ai été stupéfait du communiqué de presse du Syndicat de la magistrature évoquant une répression sociale et un état de violence. Il s’agit d’un débordement qui n’est pas justifiable et qui alimente la défiance des Français envers la justice.

À un moment donné, il est donc nécessaire de réaffirmer calmement qu’il faut mettre un terme à un certain nombre de dérives et que cela suffit ! Cela vaut notamment pour cette culture de l’excuse, qui confine à une fascination pour le chaos, le désordre ou la violence. Ceux qui lancent des pierres cloutées sur les policiers, ceux qui brûlent les voitures de la gendarmerie, ceux qui attaquent des sapeurs-pompiers ne sont pas les nouveaux damnés de la terre ; au contraire, ce sont de nouveaux incendiaires et des adversaires de la République.

N’ayez pas la naïveté de croire, ne serait-ce qu’un seul instant, que la question des retraites ou celle des réserves de substitution les concernent. Ils s’en fichent ! Ils ne veulent pas mettre « l’économie française à l’arrêt », ils veulent mettre à bas l’État et la démocratie. Il faut réagir !

De la même façon, cette fausse équivalence établie entre l’usage légitime de la force – si des dérives ont lieu, elles doivent être sanctionnées et elles le sont toujours – et un usage illégitime, illégal de la violence devient insupportable.

Il ne saurait exister, mes chers collègues, d’équivalence entre ce qui est illégitime et ce qui est illégal. Il ne saurait exister d’équivalence entre ce qui vise à protéger les citoyens, les biens ou les personnes et ce qui relève de l’illégalité. Il n’existe aucune équivalence entre ce qui vise à blesser, parfois à tuer ou à « casser du flic », et ce qui vise, au contraire, à protéger.

Nous avons pour notre part choisi notre camp. Ce ne sera jamais celui du nihilisme, dans lequel une certaine ultragauche, voire une extrême gauche, se complaît, chevauchant ainsi les passions les plus autodestructrices. Ceux qui en font partie sont en réalité les mêmes – et je remercie ceux qui sont à gauche de cet hémicycle de ne pas y avoir participé à l’époque – qui ont battu le pavé parisien au mois de novembre 2019 aux côtés des islamistes.

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ce sont les mêmes qui aujourd’hui battent la campagne melloise des Deux-Sèvres, aux côtés des anarchistes et des cagoules noires.

Mes chers collègues, nous devons prendre parti. Nous avons choisi notre camp, celui de l’ordre républicain et d’un ordre juste, calme, mais néanmoins déterminé.

« L’ordre, et l’ordre seul, fait en définitive la liberté. Le désordre fait la servitude. » Vous connaissez sans doute cette jolie formule de Charles Péguy.

Nous ne devons pas céder à cette forme de dérive ou de terrorisme intellectuel qui inciterait à aller dans le sens des radicalités et de ceux qui veulent enchaîner, asservir la République et l’entraîner vers la chienlit.

Nous sommes dans le camp de l’ordre républicain, celui des forces de l’ordre. Soyons aux côtés de celles et de ceux qui servent, parfois au péril de leur vie, la République et notre démocratie française.

Leur uniforme, que certains exècrent ou veulent salir, est le même que celui que portait Arnaud Beltrame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

… plutôt que d'appeler à un bien peu coûteux soutien aux forces de l'ordre.

Ce texte a été signé par l'ensemble des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. J'ignore si nous l'inscrirons à l'ordre du jour de l'un des espaces réservés à notre groupe, mais l'actualité récente le justifierait peut-être.

Nous n'avons aucune difficulté à affirmer que nous soutenons la police. Puisque vous dénoncez les casseurs et autres menaces d'ultragauche, nous comptons sur vous pour dénoncer de la même façon l'ultradroite.

Mes chers collègues, nous ne prendrons pas part au vote sur ce texte.

Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Bruno Retailleau

Ils ont prêté serment de servir et de défendre la loi – cette loi que nous votons au Sénat – revêtus de cet uniforme. Nombre d’entre eux le portent au quotidien.

Mes chers collègues, madame la secrétaire d’État, nous avons une dette envers eux lorsqu’ils sont agressés, une dette d’honneur aussi lorsque leur honneur est injustement attaqué.

Défendons-les !

Défendons-les avec des mots, en ne cédant rien aux discours pleins d’ambiguïtés.

Défendons-les avec des actes, en leur donnant les moyens d’exercer leur mission.

Défendons-les aussi, madame la secrétaire d’État, en faisant preuve de constance et de cohérence.

On ne peut pas donner raison aux zadistes de Notre-Dame-des-Landes, pour, le surlendemain, combattre ceux de Sainte-Soline. Tout se tient ou rien ne tient.

Mes chers collègues, défendons nos forces de l’ordre. Exprimons-leur notre gratitude, quelles que soient nos travées. Ce qu’ils représentent transcende tous nos clivages et l’ordre n’appartient à aucun parti, si ce n’est celui de la République.

Nous devons être à leurs côtés et leur exprimer la gratitude, la reconnaissance de la République, celle de la nation que nous servons et qu’ils servent quotidiennement, bien souvent et de plus en plus fréquemment, au péril de leur vie.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Nous appartenons à une famille politique qui a donné à la République de grands ministres de l'intérieur, Pierre Joxe figurant en tête.

Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC. – MM. Franck Menonville et Jean-Claude Requier applaudissent également.

Mêmes mouvements sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. le président. La parole est à M. Jérôme Durain.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Nous ne nous résignons pas à une police composée de fonctionnaires mal recrutés, insuffisamment formés et mal utilisés sur le terrain.

Par ce texte, vous avez choisi d'exprimer une gratitude inconditionnelle, souvent un peu pavlovienne, une gratitude d'ailleurs assez stérile

Applaudissements sur les travées du groupe SER.

MM. Jérôme Bascher et Guillaume Chevrollier s'exclament .

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Monsieur le président, mes chers collègues, M. Retailleau a décidé de nous réunir cet après-midi pour examiner une proposition de résolution politique.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

En tant que membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous préférons exprimer notre soutien de principe, parce que nous ne sommes pas contre la police, et notre exigence de principe, parce que nous avons une haute idée du rôle républicain des forces de l'ordre.

Cela nous permet d'exprimer notre inquiétude quand les circonstances l'exigent. C'est le cas en ce moment s'agissant du maintien de l'ordre.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

M. Jérôme Durain. Il y est question de gratitude et de reconnaissance aux membres des forces de l’ordre. J’ignore si ce texte sera accueilli avec la même gratitude et la même reconnaissance par ces mêmes forces de l’ordre, qui n’ont pas oublié la suppression de 13 000 postes de policiers et de gendarmes au cours du dernier quinquennat pendant lequel Les Républicains étaient au pouvoir – une saignée des années Sarkozy

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, c'est avec un certain étonnement, qui s'est rapidement mué en affliction, que nous avons découvert l'inscription de cette proposition de résolution à l'ordre du jour des travaux du Sénat.

Notre pays connaît une crise sociale et démocratique d'une ampleur rare. Cette crise, vous le savez, n'aurait pas eu lieu si un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale visant à reculer l'âge de départ à la retraite n'avait pas été présenté par le Gouvernement.

Sans concertation, contre l'avis unanime des syndicats, contre une large majorité – qui n'a jamais fléchi – de l'opinion publique, sans entendre les mobilisations considérables et pacifiques pendant de longues semaines, le Président de la République tente d'imposer par la contrainte institutionnelle ce texte qui, pour ceux qui en subiront les effets, représente une violence considérable. L'obstination du Président de la République et de son gouvernement a durci le débat et a fait monter les tensions.

Mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, nous vous appelons au sérieux et au respect.

Nul à gauche de cet hémicycle ne souhaite la violence.

M. François Bonhomme rit.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

La gratitude semblerait aujourd’hui plus convaincante, sincère et cohérente, si l’ingratitude d’alors n’avait existé.

Il est vrai que vous ne prenez pas de risques importants avec cette proposition de résolution opportuniste. Vous indiquerez peut-être que c’était le but recherché. En effet, pour une précédente proposition de loi présentée par M. Retailleau, visant à renforcer et garantir le maintien de l’ordre public lors des manifestations, qui avait trait aux casseurs, l’histoire s’est mal terminée devant le Conseil constitutionnel.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Chacun connaît la difficulté du métier de policier, de ces policiers détenteurs de missions de service public, qui doivent faire face à des situations créées par des choix politiques, dont ils ne sont nullement responsables.

Vous le savez, c'est au soir du 49.3 que le climat a changé. La tension a atteint un sommet, la colère a explosé. C'est un fait, vous ne pouvez le nier.

Des feux ont été allumés, des projectiles lancés, des membres des forces de l'ordre blessés et nous le regrettons, bien entendu. Nous avons toujours condamné – je l'ai toujours fait – l'action des groupes violents qui caricaturent et pourrissent le mouvement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Au moins, pour ce texte, ce ne sera clairement pas le cas. Quand bien même le Conseil constitutionnel s’intéresserait-il à cette proposition de résolution, je ne vois pas bien ce qu’il pourrait en dire.

En effet, cette proposition de résolution « invite le Gouvernement à prendre toutes les mesures qui s’imposent pour […] ramener l’ordre dans notre pays », alors que « la période récente a vu s’établir une corrélation entre la violence politique et la violence physique ». Monsieur Retailleau, avez-vous aussi envisagé d’inviter le Gouvernement à gouverner, voire de lui rappeler les vertus du dialogue ?

Jeudi après-midi, j’ai passé quatre heures avec des policiers.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Comment pouvez-vous fermer les yeux face à l'arrestation massive de centaines de jeunes « nassés », gardés à vue, dans des conditions juridiques contestables et contestées ? Combien de manifestants ont été blessés, parfois gravement ?

Est-il décent de déposer un tel texte, alors que, dans un autre cadre, à Sainte-Soline, certains ont été gravement blessés et qu'un homme est toujours dans le coma ?

Alors que l'apaisement, le retour au dialogue, le retrait de ce projet de loi qui a provoqué le chaos, offrant à certains le terrain de leurs excès, …

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Aucun ne m’a demandé quel serait mon vote sur ce texte. En revanche, ils étaient heureux de me transmettre leurs doléances précises, satisfaits que les sénateurs socialistes aient voté la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), curieux d’entendre les critiques sur certains points de doctrine.

Il ne leur serait pas venu à l’idée de me demander si je soutenais les forces de l’ordre, alors qu’ils savaient tous que j’étais de gauche. En outre, je vous rassure, ils ne m’ont même pas confondu avec un sympathisant de l’ultragauche !

Exclamations ironiques sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… devraient être des priorités absolues, vous adoptez, au travers de l'examen de cette proposition de résolution outrancière, une posture dangereuse pour notre démocratie, une posture d'amalgame, de menaces voilées, de mise en cause de vos adversaires politiques sur un terrain inquiétant, celui de l'affrontement.

Il n'existe pas de camps du bien et du mal, ni de l'ordre et du désordre. Vous ne représentez pas le camp du bien et de l'ordre, en ayant contribué largement à enfoncer notre pays dans la crise par votre vote sur ce projet de loi.

Votre proposition de résolution est un prétexte à une attaque grave contre les partis de la gauche…

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Ils ne m’ont pas non plus demandé si je dénonçais les casseurs et, à aucun moment, je n’ai été accusé de terrorisme intellectuel.

Notre assemblée a su montrer qu’elle savait voter des initiatives pour le bien commun, mais cette proposition de résolution n’apporte rien au débat.

Oui, la majorité des policiers et des gendarmes est exemplaire. Oui, le maintien de l’ordre est une matière difficile. Mais non, votre proposition de résolution ne prend pas en compte la réalité complexe des dernières semaines.

Vous tentez de réduire la situation à un état de guerre de tous contre tous, bien manichéen.

Le Gouvernement doit bien sûr maintenir l’ordre. Là où nous percevons avant tout une immense colère sociale et une profonde inquiétude écologique relayées, pour l’essentiel, par des millions de manifestants pacifistes, vous ne retenez que les débordements, que nous condamnons également, de quelques dizaines d’abrutis dangereux armés de mauvaises intentions.

En réalité, ce n’est pas la faute des manifestants si la pression ne redescend pas. Ce n’est pas la faute des manifestants si des journalistes se font parfois agresser par les forces de l’ordre. Ce n’est pas la faute des manifestants si l’on n’ose plus manifester en famille.

Les responsabilités sont d’abord à chercher du côté du Gouvernement. À force de mépriser les corps intermédiaires, de nier l’utilité des syndicats ou de vouloir caricaturer les oppositions, l’exécutif a participé à la montée de la température sociale.

Ce réchauffement politique, comme le réchauffement climatique, n’est pas inéluctable. Pour calmer les esprits, il faut entendre les avis contraires, prendre en considération les manifestants quand ils sont nombreux, éviter d’accroître la colère lors de passages au journal télévisé.

Crier que tout le monde adore la police pendant cette période est aussi stupide que de déclarer que la police tue. La majorité de nos concitoyennes et nos concitoyens soutiennent les forces de l’ordre.

Toutefois, vous avez oublié le contexte. Si cette proposition de résolution politique avait été soumise à nos suffrages après Magnanville ou l’attentat de Charlie Hebdo, celle-ci n’aurait pas eu la même portée. Déposer ce texte alors que le travail des forces de l’ordre est questionné revient à déclarer à ceux qui le critiquent : « Circulez, il n’y a rien à voir ».

Or la critique de la police est légitime et souhaitable. C’est même l’honneur d’une démocratie que d’interroger l’ensemble de ses institutions. On peut évidemment dénoncer les affirmations de ceux pour qui le maintien de l’ordre en France évoque celui qui a cours au Venezuela, où une vague de manifestations a causé 115 morts, mais il est impossible de balayer les interrogations de nos voisins européens sur notre police, autrefois un modèle et qui devient actuellement un objet de polémiques

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… qui soutiennent le mouvement social.

Monsieur Bruno Retailleau, qui visez-vous quand vous considérez, dans cette proposition de résolution, que la violence est « légitimée et encouragée par des élus qui tiennent des discours ambivalents » ou lorsque vous évoquez « la bienveillance de certains responsables politiques à l'égard de ses auteurs » ?

Nous-mêmes, sommes-nous une menace à l'ordre public

M. Roger Karoutchi s ’ exclame

Non ! sur des travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Je ne suis cependant en rien opposé à la tenue de ce débat, que je ne crains aucunement.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

, quand nous alertons, aux côtés de nombreuses associations, dont la LDH

M. François Bonhomme s'exclame .

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

En ce sens, ma position diverge de celle qu’a exprimée, la semaine dernière, la majorité composée de la droite et du centre à l’Assemblée nationale, qui a souhaité classer la pétition demandant la dissolution de la Brav-M. Je ne suis pas certain de partager les termes de cette pétition, éminemment politique, mais je n’aurais jamais jeté ainsi au rebut plusieurs centaines de milliers de signatures de citoyens, qui s’inquiètent de la manière dont le maintien de l’ordre est assuré en France. On n’est jamais gagnant quand on refuse le débat.

Avant la journée du 6 avril dernier, selon un sondage YouGov, 51 % des Français interrogés déclaraient avoir une bonne opinion des gardiens de la paix, quand ils étaient 61 % à l’affirmer au mois de novembre 2020, selon un autre sondage pourtant réalisé immédiatement après l’affaire dite Michel Zecler, du nom de ce producteur violenté par des policiers dans son studio de musique.

Selon un sondage Elabe du 29 mars dernier, 62 % des Français estiment que les violences policières sont marginales et que les dérapages sont le fait d’une minorité de policiers. À l’inverse, 37 % d’entre eux considèrent que ces violences ne sont pas marginales et sont représentatives d’un phénomène plus général au sein de la police. Je vous laisse disserter sur le verre à moitié plein ou à moitié vide. Pour ma part, je crois que le verre est à deux doigts de tomber par terre.

J’évoquais, un peu plus tôt, le regard de nos partenaires internationaux. Alors que les jeux Olympiques (JO) approchent, cela devrait tous nous inquiéter. Stéphane Troussel, président du conseil départemental de Seine-Saint-Denis, n’a pas le profil d’un casseur. Fort de sa connaissance de la façon dont le maintien de l’ordre peut être quotidiennement assuré par la police en Seine-Saint-Denis, comme à l’occasion des événements du Stade de France, il s’inquiète pour les JO et demande un débat apaisé.

Je ne suis pas convaincu que cette proposition de résolution participe de ce débat apaisé.

Pour autant, tout n’est pas à jeter dans votre texte.

Ainsi, vous évoquez « la montée de la violence en France, dans le discours politique et dans les manifestations ». « Cette violence a prospéré depuis plusieurs années, en raison à la fois de l’immobilisme, de la tolérance et parfois de la bienveillance de certains responsables politiques à l’égard de ses auteurs », soulignez-vous. La violence « est aujourd’hui légitimée et encouragée par des élus qui tiennent des discours ambivalents ». En outre, « la violence physique est désormais précédée jusque dans nos institutions d’une violence verbale qui tente de justifier des comportements aussi illégaux qu’inadmissibles ».

Sur l’ensemble de ces points, vous avez raison s’il s’agit bien de dénoncer l’ultradroite et pas uniquement l’ultragauche, s’il s’agit de dénoncer les manifestations racistes à Callac et pas seulement les manifestations écologiques à Sainte-Soline, s’il s’agit de dénoncer les remarques racistes du Rassemblement national (RN) au Palais-Bourbon et pas seulement les discours militants des Insoumis, s’il s’agit de dénoncer la résurrection du GUD (Groupe union défense) au travers de commandos qui se baptisent « Waffen-Assas » et pas seulement les étudiants bloqueurs, s’il s’agit de dénoncer la présence de policiers adjoints sur des boucles Telegram d’extrême droite qui menacent de commettre des attentats d’extrême droite et pas seulement de dénoncer la Ligue des droits de l’homme (LDH).

Pour ces raisons, mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et moi-même avons déposé une proposition de résolution qui plagie votre texte, …

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

La République, mesdames, messieurs de la droite sénatoriale et de la majorité sénatoriale, ne se résume pas à l'ordre qui – c'est le moins que l'on puisse dire – n'a pas été son creuset.

La République, c'est la démocratie et la justice sociale.

Démocratie et justice sociale, c'est le projet que nous défendons aujourd'hui face à vous, que nous opposons à votre proposition de résolution profondément archaïque et réactionnaire

Debut de section - PermalienPhoto de François Bonhomme

M. François Bonhomme. Ah, il y a des droits d’auteur !

Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Pascal Martin

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, 1 143 : c'est le nombre de policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers blessés depuis le début des manifestations contre la réforme des retraites.

À ce chiffre alarmant, derrière lequel se cachent tant de réalités humaines, s'ajoutent les 47 gendarmes pris en charge par les secours lors du dramatique épisode de Sainte-Soline, le 25 mars dernier.

Depuis plusieurs années, les forces de sécurité de notre pays sont la cible d'un nombre inédit d'actes violents et brutaux. Dans le sillage des épisodes Notre-Dame-des-Landes et « gilets jaunes », ces agressions ont atteint un degré d'intensité rarement observé et particulièrement préoccupant.

Ces violences sont souvent le fait d'individus instrumentalisant dangereusement le droit de manifester pour s'attaquer aux symboles et aux institutions de la République, quand il ne s'agit pas tout simplement de « casser du flic ».

Par leurs actes, ces professionnels de l'affrontement violent nuisent à l'image de celles et ceux qui exercent très légitimement un droit fondamental de notre démocratie, celui de manifester. Pis, ils rendent impossible l'exercice serein de ce droit en s'attaquant volontairement à nos forces de l'ordre et aux services de secours.

Nous n'aurons de cesse de défendre les femmes et les hommes qui protègent nos institutions et nos concitoyens. À ce titre, je salue l'initiative conjointe des deux présidents des groupes de la majorité sénatoriale, Bruno Retailleau et Hervé Marseille, permettant l'examen aujourd'hui de la présente proposition de résolution.

Celle-ci est un écho puissant à ce que de nombreux Français ressentent et constatent quotidiennement. En dépit de ce que veulent nous faire croire les professionnels de l'agitation et du désordre, les Français ne sont pas dupes. À l'occasion d'un récent sondage, 85 % des Français condamnaient les violences contre les forces de l'ordre.

Personne ne nous fera croire que nous vivons dans un État policier.

Personne ne nous fera croire non plus que nos forces de l'ordre sont des agents du chaos.

Personne ne nous fera croire que nos policiers doivent « aller se faire soigner », pour reprendre les mots révoltants de M. Mélenchon.

Mes chers collègues, il relève de notre responsabilité d'apporter un soutien clair et sans ambiguïté à ces femmes et ces hommes qui font la République au quotidien. Notre engagement à leurs côtés est total. Pour autant, il n'est pas aveugle.

Dans le monde où nous vivons, policiers et gendarmes sont particulièrement exposés et soumis à une pression constante. Face aux provocations, aux insultes, aux crachats ou aux coups, des dérapages ont pu avoir lieu, inutile de le nier.

Ces incidents doivent faire l'objet d'investigations et, le cas échéant, être sanctionnés. Ainsi, depuis les premières manifestations contre la réforme des retraites, trente-six enquêtes ont été ouvertes par l'inspection générale de la police nationale (IGPN) et deux, par l'inspection générale de la gendarmerie nationale (IGGN). Je souhaite qu'elles permettent de faire toute la lumière sur des actes qui, bien que regrettables, n'en demeurent pas moins isolés.

De la même manière, il est normal que la justice ait été saisie après les affrontements de Sainte-Soline. Des personnes ont été blessées ; il est légitime qu'elles veuillent savoir comment on en est arrivé là.

Si des incidents existent, ils ne reflètent en rien l'exemplarité et le sang-froid dont font preuve l'écrasante majorité de nos forces de l'ordre, alors qu'elles ont été particulièrement sollicitées, parfois plusieurs jours d'affilée, au cours des derniers mois. Quelques agitateurs de premier ordre aimeraient nous faire croire que, dans toute cette histoire, les casseurs sont les victimes et les policiers, les bourreaux ; que, sans gendarmes, il n'y aurait pas eu de dégradations à Sainte-Soline ; que, sans policiers, il n'y aurait pas eu d'incendie à la brasserie La Rotonde.

Encore une fois, les Français ne sont pas dupes. Ils savent que le maintien de l'ordre est un exercice très compliqué, qui impose parfois l'emploi de la force publique. Les appels à la dispersion ne suffisent pas toujours face aux jets de pavés, aux mortiers d'artifice, aux lancers de cocktails Molotov et de boules de pétanque.

Bien sûr, l'utilisation des armes dont disposent les forces de l'ordre pour maintenir l'ordre doit être proportionnée et encadrée. Je pense notamment aux lanceurs de balles de défense (LBD) et aux grenades de désencerclement. Comme lors des manifestations des « gilets jaunes », nous avons vu resurgir des polémiques sur l'utilisation des LBD.

Nous considérons que le problème n'est pas le LBD en lui-même : c'est l'usage qui peut malheureusement en être fait par des agents insuffisamment formés à son maniement. Il serait irresponsable de priver compagnies républicaines de sécurité (CRS) et gendarmes mobiles de cette arme intermédiaire sans proposer aucune solution de remplacement. De tels outils doivent être confiés à des professionnels du maintien de l'ordre, capables de les employer avec précision dans des situations complexes d'affrontement.

Ces situations d'affrontement reflètent, dans tous les cas, l'échec d'un dialogue et l'achoppement d'une concertation. Pour autant, qui refuse le dialogue et la concertation dans notre pays ?

Prenons l'exemple de Sainte-Soline.

Tout se passe comme si les manifestants les plus radicaux incarnaient une forme de résistance à un pouvoir arbitraire, justifiant les violences dont ils se sont rendus coupables.

Tout se passe comme s'il n'y avait pas eu d'études d'impact sur les mégabassines concluant à leur utilité dans l'adaptation au changement climatique et pour la souveraineté alimentaire de la France.

Tout se passe comme si l'ensemble des parties intéressées n'avaient pas été entendues dans le cadre des comités de bassin et des commissions locales de l'eau, dont la représentativité n'est mise en doute par personne.

Tout se passe comme si, à tous les niveaux de la gestion de l'eau, les responsables élus n'avaient pas tranché en faveur de l'aménagement des bassines, conformément au mandat leur ayant été confié.

Tout se passe, enfin, comme si les convictions ou plutôt l'idéologie de certains devaient prévaloir, par la violence, sur des décisions de justice, sans que la police de la République puisse légitimement intervenir.

Mes chers collègues, oui, les affrontements de Sainte-Soline incarnent une forme de résistance à l'arbitraire, mais la résistance de décisions démocratiques, confirmées par la justice et défendues par nos forces de l'ordre, à l'arbitraire d'une mouvance extrêmement violente, persuadée qu'elle détient une légitimité venant d'on ne sait où et qu'elle voudrait imposer à tous, au nom d'un prétendu intérêt supérieur.

Mes chers collègues, 1 143 blessés, c'est le coût humain de cet aveuglement ; 1143 policiers, gendarmes et sapeurs-pompiers blessés depuis un mois, c'est le triste bilan de cette rage, de cette haine contre l'État et ses représentants.

Ayant moi-même été sapeur-pompier professionnel dans une vie antérieure, je tiens également à adresser un hommage particulier à l'ensemble des agents qui participent aux secours et à la sécurité civile dans notre pays. Ils sont là pour protéger la vie de nos concitoyens : force est de constater que, pour cela, ils risquent chaque jour la leur.

Les casseurs professionnels que j'évoquais précédemment n'ont aucun scrupule : ils n'hésitent plus à s'en prendre à des sapeurs-pompiers tentant d'éteindre un incendie ou à des urgentistes soignant un manifestant blessé. Pourtant, sans ces sapeurs-pompiers et sans ces urgentistes, le bilan humain des manifestations serait autrement plus dramatique ! Par leur dévouement et leur sens du service, ils contribuent à apaiser la situation.

C'est pourquoi, en responsabilité, en tant que défenseurs de l'ordre républicain, mes collègues du groupe Union centriste et moi-même voterons en faveur de cette proposition de résolution, exprimant, par là même, notre profonde gratitude, notre reconnaissance et notre soutien aux policiers et gendarmes.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

… plutôt que d’appeler à un bien peu coûteux soutien aux forces de l’ordre.

Ce texte a été signé par l’ensemble des membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain. J’ignore si nous l’inscrirons à l’ordre du jour de l’un des espaces réservés à notre groupe, mais l’actualité récente le justifierait peut-être.

Nous n’avons aucune difficulté à affirmer que nous soutenons la police. Puisque vous dénoncez les casseurs et autres menaces d’ultragauche, nous comptons sur vous pour dénoncer de la même façon l’ultradroite.

Mes chers collègues, nous ne prendrons pas part au vote sur ce texte.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, après avoir œuvré récemment, avec vous, pour la création de 200 nouvelles brigades de gendarmerie dans le pays, je tenais à prendre la parole pour exprimer ma gratitude et ma reconnaissance aux membres des forces de l'ordre déployées sur tout le territoire national, en particulier sur le territoire marseillais.

Je tiens à saluer avec vous la mémoire d'Arnaud Blanc, gendarme du groupe d'intervention de la gendarmerie nationale (GIGN), tué le 25 mars dans une opération contre l'orpaillage illégal en Guyane.

C'est dans cette même Amérique centrale et du Sud que l'extrême gauche dite française, ennemie de l'ordre et de l'autorité dans son propre pays, trouve ses meilleurs amis : les Chavez, Maduro, Castro, apôtres de l'effondrement économique, de la suppression des libertés fondamentales et de la répression policière sanglante.

En effet, il faut dire les choses, si nous subissons un tel niveau de violence envers les forces de l'ordre, n'en déplaise aux falsificateurs et aux menteurs, c'est principalement l'œuvre de la nouvelle union révolutionnaire des gauches, …

Exclamations ironiques sur les travées du groupe Les Républicains.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Nous appartenons à une famille politique qui a donné à la République de grands ministres de l’intérieur, Pierre Joxe figurant en tête.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

… cette gauche des hémicycles qui légitime l'extrême gauche activiste et zadiste. À Paris, à Sainte-Soline, à Bordeaux, à Marseille, ils sont présents dans les rues et dans les facs, aux côtés de la racaille Antifa et autres Black Blocs.

Nous avons vu cet ancien dealer, devenu député, cracher verbalement sur la police, tandis que des agents assuraient sa sécurité et protégeaient son domicile jour et nuit.

Mêmes mouvements sur les mêmes travées.

M. Jérôme Durain s'exclame.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

Nous ne nous résignons pas à une police composée de fonctionnaires mal recrutés, insuffisamment formés et mal utilisés sur le terrain.

Par ce texte, vous avez choisi d’exprimer une gratitude inconditionnelle, souvent un peu pavlovienne, une gratitude d’ailleurs assez stérile

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Nous avons entendu M. Mélenchon en appeler à la « rééducation des policiers ». Il est temps de rappeler à Fidel-Hugo Mélenchon que « la République, c'est eux ! » §Le Lider Maximo de l'islamo-gauchisme ferait mieux de se rééduquer lui-même et de rééduquer ses députés, qui hurlent aux prétendues violences policières, mais qui réintègrent l'un de leurs collègues qui frappe son épouse. M. Quatennens, on le sait, est pour que toute la France soit insoumise, sauf sa femme…

MM. Jérôme Bascher et Guillaume Chevrollier s ’ exclament.

Debut de section - PermalienPhoto de Jérôme Durain

En tant que membres du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous préférons exprimer notre soutien de principe, parce que nous ne sommes pas contre la police, et notre exigence de principe, parce que nous avons une haute idée du rôle républicain des forces de l’ordre.

Cela nous permet d’exprimer notre inquiétude quand les circonstances l’exigent. C’est le cas en ce moment s’agissant du maintien de l’ordre.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

Pour que la République et la France, surtout, ne sombrent pas dans le chaos auquel rêve et œuvre la nébuleuse gauchiste, 6 700 policiers et 3 300 gendarmes ont été blessés en service en 2020.

Le seul racisme systémique qui existe dans notre pays…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. le président. La parole est à Mme Éliane Assassi.

Debut de section - PermalienPhoto de Stéphane Ravier

… est le racisme anti-flics vociféré par une certaine gauche et l'extrême gauche. Cette haine des forces de l'ordre est largement partagée dans les cités de la diversité, où la police est perçue non seulement comme les représentants de l'ordre, mais aussi comme les représentants de la France que la racaille déteste plus que tout.

Cette extrême gauche anarchiste anti-française embrigade les révoltés des causes sociales et du racisme anti-français pour en faire des soldats de la haine anti-flics.

Notre pays, qui a vibré à la mort héroïque d'Arnaud Beltrame, est l'écrin précieux d'un processus de civilisation qui nous a transmis l'idéal chevaleresque. Ce sont ces figures d'abnégation qui fédèrent le pays et continuent d'écrire le récit national. Comme le 24 mars 2018, je salue ici tous ceux qui sont prêts à sacrifier leur vie pour protéger la nôtre.

Cette proposition de résolution a le mérite d'identifier et de mettre face à face ceux qui se trouvent dans le camp de la Nation et ceux qui sont dans le camp de ses ennemis. Que chacun choisisse !

Pour ma part, face aux rouges et à leurs supplétifs §je suis et je serai toujours dans le camp…

Applaudissements sur les travées du groupe CRCE.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, c’est avec un certain étonnement, qui s’est rapidement mué en affliction, que nous avons découvert l’inscription de cette proposition de résolution à l’ordre du jour des travaux du Sénat.

Notre pays connaît une crise sociale et démocratique d’une ampleur rare. Cette crise, vous le savez, n’aurait pas eu lieu si un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale visant à reculer l’âge de départ à la retraite n’avait pas été présenté par le Gouvernement.

Sans concertation, contre l’avis unanime des syndicats, contre une large majorité – qui n’a jamais fléchi – de l’opinion publique, sans entendre les mobilisations considérables et pacifiques pendant de longues semaines, le Président de la République tente d’imposer par la contrainte institutionnelle ce texte qui, pour ceux qui en subiront les effets, représente une violence considérable. L’obstination du Président de la République et de son gouvernement a durci le débat et a fait monter les tensions.

Mesdames, messieurs de la majorité sénatoriale, nous vous appelons au sérieux et au respect.

Nul à gauche de cet hémicycle ne souhaite la violence.

Exclamations sur les mêmes travées.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Chacun connaît la difficulté du métier de policier, de ces policiers détenteurs de missions de service public, qui doivent faire face à des situations créées par des choix politiques, dont ils ne sont nullement responsables.

Vous le savez, c’est au soir du 49.3 que le climat a changé. La tension a atteint un sommet, la colère a explosé. C’est un fait, vous ne pouvez le nier.

Des feux ont été allumés, des projectiles lancés, des membres des forces de l’ordre blessés et nous le regrettons, bien entendu. Nous avons toujours condamné – je l’ai toujours fait – l’action des groupes violents qui caricaturent et pourrissent le mouvement social.

Debut de section - PermalienPhoto de Nathalie Delattre

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, je veux tenir ici une position sans équivoque : le groupe RDSE condamne sans détour tous les actes de violence commis notamment par des casseurs lors des manifestations qui ont eu lieu ces dernières semaines.

Très largement, nous condamnons toutes les attaques portées à l'encontre des policiers, des gendarmes et parfois même des pompiers et de notre sécurité civile sur notre territoire.

Tout le monde se souvient de l'hommage rendu aux forces de l'ordre pendant les manifestations contre le terrorisme en 2015. Nous étions déjà convaincus, avant ces drames, du courage et du dévouement de nos agents. Rien n'a changé depuis.

Cependant, j'observe, chez certains de nos concitoyens, un sentiment de colère, de plus en plus tranché, un rejet de l'État et de la collectivité.

J'aimerais toutefois redire à ceux qui doutent de l'intérêt de nos institutions qu'ils ne doivent pas oublier tous les services qu'elles nous rendent au quotidien.

Policiers et gendarmes s'inscrivent dans un ensemble de services publics qui va des hôpitaux aux établissements scolaires, en passant par les réseaux routiers ou les services d'assurance chômage notamment.

Ceux qui hurlent des slogans anti-police ont-ils conscience d'y englober le reste ? Ces slogans sont, à nos yeux, de même nature que les violences à l'égard des enseignants.

Le groupe RDSE s'est saisi du sujet de la violence à l'égard des institutions en défendant la proposition de loi visant à permettre aux différentes associations d'élus de se constituer partie civile pour soutenir pleinement, au pénal, un édile victime d'agression, que j'ai déposée.

Le rejet de toute autorité institutionnelle ne saurait être admis, en même temps qu'il doit nous interroger.

Vivre en société, c'est aussi se soumettre à la contrainte sociale. Pour reprendre une formule du juriste bordelais Léon Duguit, « une société ne pourrait exister s'il n'y avait pas de discipline sociale, si une règle ne défendait pas certaines choses et n'ordonnait pas certaines autres aux individus qui la composent ».

Je considère que la désobéissance civile n'est pas une option dans notre République et qu'elle est choquante quand elle est prônée par des élus, qui se devraient de la défendre. Elle est d'autant moins une option qu'elle est souvent sous-tendue par des idéologies douteuses, entre obscurantisme et complotisme. Nous n'y adhérons pas.

Dans son exposé des motifs, la proposition de résolution indique qu'il est « inacceptable et dangereux de renvoyer dos à dos forces de l'ordre et casseurs ». Évidemment !

Toutefois, ne pas accepter la comparaison n'implique pas de renoncer à toute observation critique.

Certaines images restent choquantes et peuvent mettre mal à l'aise. Il est possible d'être révolté face à l'incendie de la porte de la mairie de Bordeaux et de ne pas être absolument serein en voyant tourner en boucle des images de tirs de LBD et de jets de grenades.

Oui, nous pouvons être reconnaissants du travail quotidien des agents de police et de gendarmerie, tout en nous inquiétant de la dérive d'une poignée d'entre eux lorsque nous entendons certains enregistrements.

Cependant, s'inquiéter d'une augmentation, même marginale, des violences policières, c'est s'inquiéter, plus largement, de l'augmentation de la violence dans notre société.

Il nous faut donc nous préoccuper de la santé mentale de nos agents, de leur état d'épuisement, des situations auxquelles ils sont confrontés quotidiennement. Il nous faut aussi veiller à ce que notre police soit irréprochable et que chaque dérive soit sanctionnée avec la plus grande fermeté.

En notre qualité de parlementaires, nous devons les accompagner et les soutenir, par exemple en leur accordant les moyens nécessaires à l'exercice de leur métier dans des conditions décentes.

En conclusion, mes chers collègues, le groupe RDSE veut réaffirmer avec force sa gratitude et sa reconnaissance aux membres des forces de l'ordre. Aussi, ses membres voteront pour cette proposition de résolution. §

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

Comment pouvez-vous fermer les yeux face à l’arrestation massive de centaines de jeunes « nassés », gardés à vue, dans des conditions juridiques contestables et contestées ? Combien de manifestants ont été blessés, parfois gravement ?

Est-il décent de déposer un tel texte, alors que, dans un autre cadre, à Sainte-Soline, certains ont été gravement blessés et qu’un homme est toujours dans le coma ?

Alors que l’apaisement, le retour au dialogue, le retrait de ce projet de loi qui a provoqué le chaos, offrant à certains le terrain de leurs excès, …

Debut de section - PermalienPhoto de Olivier Paccaud

« Sans bouclier, tu n'es rien. » Tout gladiateur, tout chevalier le sait bien.

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, j'aimerais à mon tour rappeler combien la place des forces de l'ordre est cruciale dans nos sociétés démocratiques, combien nous leur sommes redevables. Cette place a quelque chose à voir avec ce qui est au fondement de nos sociétés civilisées : le contrat social, lequel ne serait qu'un vœu pieux s'il n'y avait une force à même de le rendre exécutoire, de contraindre, au besoin par la coercition physique, les individus qui refusent de le respecter. C'est parce que nous savons qu'il existe une force capable d'imposer le respect des lois que nous pouvons jouir paisiblement de nos existences.

La police apporte la force au droit. Elle arme l'ordre démocratique contre ceux qui voudraient s'y soustraire ou lui en substituer un autre, injuste et arbitraire. En somme, pour paraphraser Blaise Pascal, elle permet à ce qui est juste d'être fort. Sans police pour en assurer le respect, point de contrat social : le droit ne serait que de vaines taches d'encre sur d'insignifiantes pages de codes. Même s'il est imparfait, c'est donc tout notre ordre social démocratique qui repose sur l'existence de cette force permettant d'éviter la « guerre de tous contre tous », comme l'a si bien décrit Thomas Hobbes.

Que cela soit clair, manifester son soutien aux policiers et sa reconnaissance pour leur engagement ne revient pas à prendre parti contre la liberté de manifester. La rhétorique stérile qui voudrait dresser les manifestants contre les forces de l'ordre est inepte. Les unes sont là non pour entraver la liberté des autres, mais, au contraire, pour la garantir, notamment contre le noyautage des manifestations pacifiques par des perturbateurs qui y trouvent une couverture à leurs méfaits.

C'est ce dernier risque qui, de nos jours, met le plus en péril à la fois la sécurité des manifestants et l'intégrité des forces de l'ordre. Avant l'irruption des Black Blocs dans les cortèges syndicaux, tous les observateurs relevaient le faible nombre d'incidents et saluaient le bon déroulement des rassemblements, la coopération des organisateurs. C'est donc aux agresseurs de policiers, aux incendiaires de poubelles, aux briseurs de vitrines, aux lanceurs de pavés qu'il faut jeter la pierre. Ils sont les seuls fautifs des effusions de violence que l'on a observées de Sainte-Soline à Paris. La réprobation à leur endroit doit être unanime.

En effet, le droit de manifester n'est pas le droit à la chienlit. Qui pourrait en disconvenir ? Qui s'offusquera que la force doive rester à la loi ? Certainement pas nos devanciers ! Revenons à nos vieux textes. Jérôme Durain a cité la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Pour ma part, je citerai les constitutions de 1791, 1793 et 1848, qui consacrent le droit de manifester, mais en l'assortissant systématiquement d'une exigence : la non-violence. La seule liberté alors reconnue est celle de « s'assembler paisiblement et sans armes, en satisfaisant aux lois de police », dans le respect de « la liberté d'autrui et de la sécurité publique ».

Cette conciliation entre liberté et ordre public est un invariant dans notre tradition juridique. Elle structure la façon dont notre droit conçoit l'étendue et les limites de la liberté de manifester. Devrions-nous considérer avec mansuétude les violences des Black Blocs et pousser des cris d'orfraie lorsque la police intervient pour y mettre fin ? Quel triste enchantement a conduit certains esprits à cette inversion des coupables et des victimes, des fauteurs de troubles et des gardiens de la paix civile ?

Qu'est-il reproché à la police ? De riposter lorsque l'on s'en prend à elle ? De se défendre lorsqu'un millier de ses agents sont blessés, plus ou moins gravement, par des assauts pénalement et moralement inacceptables ? Lui en veut-on de ne pas abandonner nos rues à une poignée de casseurs ? De s'interposer lorsque des commerces sont saccagés ? D'escorter des pompiers venant éteindre des incendies ?

Ce que ses contempteurs reprochent à la police, c'est bel et bien de ne pas désarmer face à une violence qu'ils cautionnent peut-être dans le secret de leurs cœurs. Ils blâment la police de faire ce pour quoi elle a été instituée : préserver l'ordre républicain établi par les lois que notre société s'est prescrites au travers de ses institutions démocratiques. Ce faisant, ils répudient le contrat social qui nous lie.

C'est pourquoi nous devons, nous autres sénateurs, témoigner notre gratitude envers les défenseurs des droits que sont les policiers et leur redire notre confiance quand traîner la police dans la boue, la couvrir d'accusations infamantes est devenu le fonds de commerce médiatique d'une partie de la classe politique.

Non, nous n'accepterons pas que le bruit et la fureur soient des codicilles au contrat social.

Non, les CRS n'ont pas vocation à devenir de la chair à Black Blocs.

Non, nous ne laisserons pas la police être livrée à quelque vindicte que ce soit dans l'opinion publique.

Sans bouclier, nous sommes faibles. Toute démocratie le sait bien ! §

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… devraient être des priorités absolues, vous adoptez, au travers de l’examen de cette proposition de résolution outrancière, une posture dangereuse pour notre démocratie, une posture d’amalgame, de menaces voilées, de mise en cause de vos adversaires politiques sur un terrain inquiétant, celui de l’affrontement.

Il n’existe pas de camps du bien et du mal, ni de l’ordre et du désordre. Vous ne représentez pas le camp du bien et de l’ordre, en ayant contribué largement à enfoncer notre pays dans la crise par votre vote sur ce projet de loi.

Votre proposition de résolution est un prétexte à une attaque grave contre les partis de la gauche…

Debut de section - PermalienPhoto de Alain Richard

M. le président. La parole est à M. Franck Menonville.

M. Bruno Belin applaudit.

Debut de section - PermalienPhoto de Éliane Assassi

… qui soutiennent le mouvement social.

Monsieur Bruno Retailleau, qui visez-vous quand vous considérez, dans cette proposition de résolution, que la violence est « légitimée et encouragée par des élus qui tiennent des discours ambivalents » ou lorsque vous évoquez « la bienveillance de certains responsables politiques à l’égard de ses auteurs » ?

Nous-mêmes, sommes-nous une menace à l’ordre public

Debut de section - PermalienPhoto de Franck Menonville

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État, mes chers collègues, nous avons assisté, ces dernières semaines, à un véritable déchaînement de violence dans notre pays. Des mairies ont été incendiées. De très nombreux parlementaires ont été la cible d'attaques, y compris dans leur domicile. On ne compte plus les devantures de magasins et les véhicules incendiés et détruits. Voilà l'image que nous livrons au monde.

Chaque jour de manifestations, les forces de l'ordre affrontent des individus armés, décidés à casser, à incendier, voire à tuer. Ce sont des cocktails Molotov, des boules de pétanque et des battes de baseball qui ont été employés contre nos policiers et nos gendarmes le 26 mars dernier à Sainte-Soline – tout cela bien évidemment pour une manifestation non violente…

Force est de constater que l'ultragauche attaque aujourd'hui délibérément notre République et notre démocratie. La France doit cesser d'être la terre de jeu européenne de ces factions extrémistes. §Les mouvements d'ultragauche doivent être démantelés. Il faut lutter contre la complaisance intellectuelle et politico-médiatique envers ces groupuscules.

La réponse pénale en cas d'agression contre un dépositaire de l'autorité publique doit absolument être renforcée dans notre pays, afin d'être enfin dissuasive.

Ceux-là mêmes qui avaient promis de transformer l'Assemblée nationale en zone à défendre (ZAD) ont empêché le débat démocratique par une guérilla indigne du Parlement et sont aujourd'hui dans la rue aux côtés des casseurs.

Les Français ont des opinions diverses. Il est un point sur lequel ils sont néanmoins accordés, c'est que la démocratie doit nous gouverner.

« Ce qui préserve de l'arbitraire, c'est l'observance des formes », disait Benjamin Constant. En tant que représentants de la nation, il est de notre devoir de réaffirmer que la violence n'est pas un moyen d'expression légitime dans notre démocratie et dans notre République. Nous avons et nous aurons des désaccords : c'est normal. Les gouvernements feront toujours face à une opposition : c'est naturel et c'est là le principe de la démocratie. Il importe cependant que cette opposition s'exprime par la voie démocratique.

Alors que notre pays connaît des accès de violence, je veux rendre hommage, au nom du groupe Les Indépendants – République et Territoires, aux hommes et aux femmes qui dédient leur vie à la protection de nos concitoyens et de nos institutions. Ce sont eux qui protègent la France contre la délinquance et le terrorisme, eux qui sécuriseront les grands événements que notre pays s'apprête à accueillir, eux encore qui doivent faire face aujourd'hui à une violence encouragée par quelques irresponsables politiques. Prises pour cible par des révolutionnaires de salon, les forces de l'ordre le sont ensuite dans la rue.

Depuis le début des manifestations, on compte plusieurs centaines de blessés – il y en a eu 154 pour la seule journée de jeudi dernier.

Malgré l'intensité des tensions, malgré le risque qu'ils encourent, nos policiers et nos gendarmes continuent d'exercer leur métier avec un grand professionnalisme. Avec courage et sang-froid, ils font face à des individus qui cherchent en permanence à provoquer l'embrasement.

À la veille d'une nouvelle journée de mobilisation, je veux, au nom de mon groupe, leur dire qu'ils peuvent compter sur notre soutien. Nous exprimons, aujourd'hui encore, notre reconnaissance aux gardiens de l'ordre républicain.

Contrairement aux manifestants, la police et la gendarmerie ne sont les défenseurs d'aucune idéologie. Ils sont au service de tous les Français et de nos institutions républicaines.

Beaucoup de nos collègues s'étaient levés, à la suite de la question d'actualité au Gouvernement du président de notre groupe, Claude Malhuret, pour rendre hommage à nos forces de l'ordre. La proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui fait donc partie des textes qui doivent nous réunir et réunir les républicains.

Le groupe Les Indépendants – République et Territoires en soutiendra donc bien évidemment l'adoption, à l'unanimité de ses membres.

Mes chers collègues, permettez-moi, pour conclure, de saluer l'initiative conjointe des présidents