La séance est ouverte à quatorze heures trente.
Le compte rendu intégral de la séance du mercredi 17 mai 2023 a été publié sur le site internet du Sénat.
Il n’y a pas d’observation ?…
Le procès-verbal est adopté.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, nous avons appris avec beaucoup d’émotion le terrible accident qui a eu lieu dimanche matin dans le Nord, près de Villeneuve-d’Ascq. Un choc entre deux véhicules a entraîné la mort d’une policière et de deux policiers du commissariat de Roubaix dans le cadre de leurs fonctions. Ils étaient âgés de 24 ans et 25 ans.
C’est avec la même émotion que nous avons appris la violente agression au couteau d’une secrétaire médicale et d’une infirmière le lundi 22 mai dernier au centre hospitalier universitaire (CHU) de Reims. La première est grièvement blessée ; la seconde est malheureusement décédée la nuit dernière.
Au nom du Sénat tout entier, je souhaite leur rendre hommage et présenter à leurs familles nos condoléances les plus attristées.
Monsieur le ministre, mes chers collègues, je vous propose d’observer un instant de recueillement.
Mmes et MM. les sénateurs, ainsi que M. le ministre de l ’ agriculture et de la souveraineté alimentaire, se lèvent et observent un moment de recueillement.
J’ai le regret de vous faire part du décès de notre ancien collègue Jean Madelain, qui fut sénateur d’Ille-et-Vilaine de 1980 à 1998.
L’ordre du jour appelle les explications de vote des groupes et le vote par scrutin public solennel sur la proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, présentée par MM. Laurent Duplomb, Pierre Louault, Serge Mérillou et plusieurs de leurs collègues (proposition n° 349, texte de la commission n° 590, rapport n° 589).
Mes chers collègues, je vous rappelle que ce scrutin s’effectuera depuis les terminaux de vote. Je vous invite donc à vous assurer que vous disposez bien de votre carte de vote et à vérifier que celle-ci fonctionne correctement en l’insérant dans votre terminal de vote. En cas de difficulté, vous pourrez vous rapprocher des huissiers.
Avant de passer au vote, je vais donner la parole à ceux de nos collègues qui ont été inscrits pour expliquer leur vote.
J’indique au Sénat que, compte tenu de l’organisation du débat décidée par la conférence des présidents, chacun des groupes dispose de sept minutes pour ces explications de vote, à raison d’un orateur par groupe, l’orateur de la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe disposant de trois minutes.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il va de soi que, sur ces travées, nous ne proposons pas tous les mêmes solutions et n'avons pas tous la même vision de l'agriculture française.
Les débats de la semaine dernière l'ont du reste montré : sur plusieurs articles, les positions défendues étaient clairement antagonistes, au point que certains en ont proposé la suppression.
Toutefois, je crois en la liberté d'opinion et dans les vertus de la confrontation des idées. Il est bon et sain que ces divergences aient pu s'exprimer. C'est peut-être d'ailleurs ce qui nous a manqué ces six dernières années, période au cours de laquelle un pouvoir omniscient a prétendu dépasser tout clivage.
Mme la présidente. La parole est à M. Laurent Duplomb, pour le groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Claude Malhuret applaudit également.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – M. Claude Malhuret applaudit également.
Je veux donc saluer ici la courtoisie républicaine avec laquelle ces débats se sont tenus, malgré des désaccords marqués et en dépit d'une offensive médiatique injuste, qui a qualifié ce texte de « profonde régression consumériste et environnementale », …
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il va de soi que, sur ces travées, nous ne proposons pas tous les mêmes solutions et n'avons pas tous la même vision de l'agriculture française.
Les débats de la semaine dernière l'ont du reste montré : sur plusieurs articles, les positions défendues étaient clairement antagonistes, au point que certains en ont proposé la suppression.
Toutefois, je crois en la liberté d'opinion et dans les vertus de la confrontation des idées. Il est bon et sain que ces divergences aient pu s'exprimer. C'est peut-être d'ailleurs ce qui nous a manqué ces six dernières années, période au cours de laquelle un pouvoir omniscient a prétendu dépasser tout clivage.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, il va de soi que, sur ces travées, nous ne proposons pas tous les mêmes solutions et n’avons pas tous la même vision de l’agriculture française.
Les débats de la semaine dernière l’ont du reste montré : sur plusieurs articles, les positions défendues étaient clairement antagonistes, au point que certains en ont proposé la suppression.
Toutefois, je crois en la liberté d’opinion et dans les vertus de la confrontation des idées. Il est bon et sain que ces divergences aient pu s’exprimer. C’est peut-être d’ailleurs ce qui nous a manqué ces six dernières années, période au cours de laquelle un pouvoir omniscient a prétendu dépasser tout clivage.
Je veux donc saluer ici la courtoisie républicaine avec laquelle ces débats se sont tenus, malgré des désaccords marqués et en dépit d'une offensive médiatique injuste, qui a qualifié ce texte de « profonde régression consumériste et environnementale », …
Je veux donc saluer ici la courtoisie républicaine avec laquelle ces débats se sont tenus, malgré des désaccords marqués et en dépit d’une offensive médiatique injuste, qui a qualifié ce texte de « profonde régression consumériste et environnementale », …
… ou encore de « lettre au père Noël de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) ».
À rebours de ces caricatures, nous avons su montrer l'exemple.
Le monde agricole et la ruralité nous seront reconnaissants d'avoir discuté jusque tard dans la nuit de leurs problèmes de charges et de normes, ainsi que des impasses techniques auxquelles ils font face, en nous appuyant sur des arguments et des chiffres sérieux, tirés de la réalité et de leur quotidien.
À défaut d'un vote unanime sur les propositions, il est dommage que nous ne nous entendions pas sur le diagnostic, vécu au quotidien par les agriculteurs.
Si le constat de la désindustrialisation de la France ou de sa dépendance énergétique est aujourd'hui bien admis, je regrette qu'une forme de déni ait empêché certains d'y voir aussi clair pour notre agriculture. Sur ces travées ou ailleurs, certains pèchent encore par une naïveté trop coupable… D'autres sont peut-être frappés de cécité idéologique.
… ou encore de « lettre au père Noël de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles) ».
… ou encore de « lettre au père Noël de la FNSEA (Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles) ».
Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Risques de blackout cet hiver, ruptures d'approvisionnement en composants industriels critiques et même en paracétamol... Nous connaissons les mêmes glissements aujourd'hui dans le domaine agricole.
L'histoire pourrait ressembler, comme l'a écrit Géraldine Woessner, à un conte pour enfants dans lequel les habitants d'un pays comblé par la nature, croulant sous ses bienfaits, en seraient curieusement venus à se persuader que les richesses les entourant sont le fruit, non pas de siècles de labeur des générations précédentes, du climat ou de la géographie, mais de leur propre vertu, et qui, à force de s'aveugler sur eux-mêmes, en viendraient à détruire leur trésor.
À rebours de ces caricatures, nous avons su montrer l'exemple.
Le monde agricole et la ruralité nous seront reconnaissants d'avoir discuté jusque tard dans la nuit de leurs problèmes de charges et de normes, ainsi que des impasses techniques auxquelles ils font face, en nous appuyant sur des arguments et des chiffres sérieux, tirés de la réalité et de leur quotidien.
À défaut d'un vote unanime sur les propositions, il est dommage que nous ne nous entendions pas sur le diagnostic, vécu au quotidien par les agriculteurs.
Si le constat de la désindustrialisation de la France ou de sa dépendance énergétique est aujourd'hui bien admis, je regrette qu'une forme de déni ait empêché certains d'y voir aussi clair pour notre agriculture. Sur ces travées ou ailleurs, certains pèchent encore par une naïveté trop coupable… D'autres sont peut-être frappés de cécité idéologique.
À rebours de ces caricatures, nous avons su montrer l’exemple.
Le monde agricole et la ruralité nous seront reconnaissants d’avoir discuté jusque tard dans la nuit de leurs problèmes de charges et de normes, ainsi que des impasses techniques auxquelles ils font face, en nous appuyant sur des arguments et des chiffres sérieux, tirés de la réalité et de leur quotidien.
À défaut d’un vote unanime sur les propositions, il est dommage que nous ne nous entendions pas sur le diagnostic, vécu au quotidien par les agriculteurs.
Si le constat de la désindustrialisation de la France ou de sa dépendance énergétique est aujourd’hui bien admis, je regrette qu’une forme de déni ait empêché certains d’y voir aussi clair pour notre agriculture. Sur ces travées ou ailleurs, certains pèchent encore par une naïveté trop coupable… D’autres sont peut-être frappés de cécité idéologique.
Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
M. Laurent Duplomb . La recommandation faite hier par la Cour des comptes de réduire le cheptel de vaches françaises est la preuve de cet aveuglement.
Risques de blackout cet hiver, ruptures d'approvisionnement en composants industriels critiques et même en paracétamol... Nous connaissons les mêmes glissements aujourd'hui dans le domaine agricole.
L'histoire pourrait ressembler, comme l'a écrit Géraldine Woessner, à un conte pour enfants dans lequel les habitants d'un pays comblé par la nature, croulant sous ses bienfaits, en seraient curieusement venus à se persuader que les richesses les entourant sont le fruit, non pas de siècles de labeur des générations précédentes, du climat ou de la géographie, mais de leur propre vertu, et qui, à force de s'aveugler sur eux-mêmes, en viendraient à détruire leur trésor.
Risques de blackout cet hiver, ruptures d’approvisionnement en composants industriels critiques et même en paracétamol… Nous connaissons les mêmes glissements aujourd’hui dans le domaine agricole.
L’histoire pourrait ressembler, comme l’a écrit Géraldine Woessner, à un conte pour enfants dans lequel les habitants d’un pays comblé par la nature, croulant sous ses bienfaits, en seraient curieusement venus à se persuader que les richesses les entourant sont le fruit, non pas de siècles de labeur des générations précédentes, du climat ou de la géographie, mais de leur propre vertu, et qui, à force de s’aveugler sur eux-mêmes, en viendraient à détruire leur trésor.
Marques d'approbation sur l es travées du groupe Les Républicains.
Après une telle injonction contradictoire, cette technocratie abrutissante fera mine de s'étonner de la hausse croissante du déficit de la balance commerciale, sans faire le lien avec notre excédent de produits laitiers…
Le message de la Cour des comptes me rappelle ces phrases de Tocqueville : « Cet État se veut si bienveillant envers ses citoyens qu'il entend se substituer à eux dans l'organisation de leur propre vie.
« Ira-t-il jusqu'à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d'eux-mêmes ? Le plus grand soin d'un bon gouvernement devrait être d'habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. »
Est-ce vraiment à la Cour des comptes de s'occuper de ce que les Français doivent manger
M. Laurent Duplomb . La recommandation faite hier par la Cour des comptes de réduire le cheptel de vaches françaises est la preuve de cet aveuglement.
M. Laurent Duplomb. La recommandation faite hier par la Cour des comptes de réduire le cheptel de vaches françaises est la preuve de cet aveuglement.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
Marques d'approbation sur l es travées du groupe Les Républicains.
Marques d ’ approbation sur les travées du groupe Les Républicains.
, alors qu'elle est incapable depuis des années d'inverser la spirale de la dette, du déficit public et de l'appauvrissement de la France ?
Après une telle injonction contradictoire, cette technocratie abrutissante fera mine de s'étonner de la hausse croissante du déficit de la balance commerciale, sans faire le lien avec notre excédent de produits laitiers…
Le message de la Cour des comptes me rappelle ces phrases de Tocqueville : « Cet État se veut si bienveillant envers ses citoyens qu'il entend se substituer à eux dans l'organisation de leur propre vie.
« Ira-t-il jusqu'à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d'eux-mêmes ? Le plus grand soin d'un bon gouvernement devrait être d'habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. »
Est-ce vraiment à la Cour des comptes de s'occuper de ce que les Français doivent manger
Après une telle injonction contradictoire, cette technocratie abrutissante fera mine de s’étonner de la hausse croissante du déficit de la balance commerciale, sans faire le lien avec notre excédent de produits laitiers…
Le message de la Cour des comptes me rappelle ces phrases de Tocqueville : « Cet État se veut si bienveillant envers ses citoyens qu’il entend se substituer à eux dans l’organisation de leur propre vie.
« Ira-t-il jusqu’à les empêcher de vivre pour mieux les protéger d’eux-mêmes ? Le plus grand soin d’un bon gouvernement devrait être d’habituer peu à peu les peuples à se passer de lui. »
Est-ce vraiment à la Cour des comptes de s’occuper de ce que les Français doivent manger
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe SER.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi que sur des travées du groupe UC.
, alors qu'elle est incapable depuis des années d'inverser la spirale de la dette, du déficit public et de l'appauvrissement de la France ?
, alors qu’elle est incapable depuis des années d’inverser la spirale de la dette, du déficit public et de l’appauvrissement de la France ?
Le diagnostic du déclassement de la ferme France est posé depuis au moins quatre ans et le rapport que j'ai présenté en 2019 sur le sujet.
Le rapport que j'ai écrit en 2022 avec mes collègues Pierre Louault et Serge Mérillou n'est que la démonstration, à une échelle plus fine, sur la base de cinq produits emblématiques, de l'érosion continue de nos parts de marché, notamment au sein de l'Union européenne, ainsi que de la baisse tendancielle de notre taux d'auto-approvisionnement.
À ce stade, permettez-moi de saluer le courage de Serge Mérillou, qui a vu et compris au travers de nos auditions et de nos visites à quel point notre agriculture était mal en point, et qui n'a rien cédé à l'intimidation de l'écologisme dogmatique !
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe SER.
Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – Protestations sur les travées du groupe SER.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.
Par son courage, il démontre que nous ne sommes à la solde de quiconque, comme l'a écrit le président de l'UFC-Que Choisir, qui d'ailleurs ferait mieux de rester dans le cadre de ses prérogatives en s'occupant du pouvoir d'achat des Français et, tout particulièrement, des 16 % de nos concitoyens qui, aujourd'hui, à cause de l'inflation et du « tout montée en gamme », déclarent ne plus manger à leur faim !
Le diagnostic du déclassement de la ferme France est posé depuis au moins quatre ans et le rapport que j'ai présenté en 2019 sur le sujet.
Le rapport que j'ai écrit en 2022 avec mes collègues Pierre Louault et Serge Mérillou n'est que la démonstration, à une échelle plus fine, sur la base de cinq produits emblématiques, de l'érosion continue de nos parts de marché, notamment au sein de l'Union européenne, ainsi que de la baisse tendancielle de notre taux d'auto-approvisionnement.
À ce stade, permettez-moi de saluer le courage de Serge Mérillou, qui a vu et compris au travers de nos auditions et de nos visites à quel point notre agriculture était mal en point, et qui n'a rien cédé à l'intimidation de l'écologisme dogmatique !
Le diagnostic du déclassement de la ferme France est posé depuis au moins quatre ans et le rapport que j’ai présenté en 2019 sur le sujet.
Le rapport que j’ai écrit en 2022 avec mes collègues Pierre Louault et Serge Mérillou n’est que la démonstration, à une échelle plus fine, sur la base de cinq produits emblématiques, de l’érosion continue de nos parts de marché, notamment au sein de l’Union européenne, ainsi que de la baisse tendancielle de notre taux d’auto-approvisionnement.
À ce stade, permettez-moi de saluer le courage de Serge Mérillou, qui a vu et compris au travers de nos auditions et de nos visites à quel point notre agriculture était mal en point, et qui n’a rien cédé à l’intimidation de l’écologisme dogmatique !
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Menonville, Daniel Chasseing et Pierre Louault applaudissent également.
Exclamations ironiques sur les travées du groupe GEST.
Oui, cette proposition de loi est le remède que nous voulons appliquer. Je me réjouis de son caractère transpartisan jusqu'au bout.
Par son courage, il démontre que nous ne sommes à la solde de quiconque, comme l'a écrit le président de l'UFC-Que Choisir, qui d'ailleurs ferait mieux de rester dans le cadre de ses prérogatives en s'occupant du pouvoir d'achat des Français et, tout particulièrement, des 16 % de nos concitoyens qui, aujourd'hui, à cause de l'inflation et du « tout montée en gamme », déclarent ne plus manger à leur faim !
Par son courage, il démontre que nous ne sommes à la solde de quiconque, comme l’a écrit le président de l’UFC-Que Choisir, qui d’ailleurs ferait mieux de rester dans le cadre de ses prérogatives en s’occupant du pouvoir d’achat des Français et, tout particulièrement, des 16 % de nos concitoyens qui, aujourd’hui, à cause de l’inflation et du « tout montée en gamme », déclarent ne plus manger à leur faim !
Par son courage, il démontre que nous ne sommes à la solde de personne, contrairement à ce qu'a écrit le président de l’UFC-Que Choisir, qui d’ailleurs ferait mieux de rester dans le cadre de ses prérogatives en s’occupant du pouvoir d’achat des Français et, tout particulièrement, des 16 % de nos concitoyens qui, aujourd’hui, à cause de l’inflation et du « tout montée en gamme », déclarent ne plus manger à leur faim !
Par son courage, il démontre que nous ne sommes à la solde de personne, contrairement à ce qu’a écrit le président de l’UFC-Que Choisir, qui d’ailleurs ferait mieux de rester dans le cadre de ses prérogatives en s’occupant du pouvoir d’achat des Français et, tout particulièrement, des 16 % de nos concitoyens qui, aujourd’hui, à cause de l’inflation et du « tout montée en gamme », déclarent ne plus manger à leur faim !
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Menonville, Daniel Chasseing et Pierre Louault applaudissent également.
Bravo ! et applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains. – MM. Franck Menonville, Daniel Chasseing et Pierre Louault applaudissent également.
Venons-en à la suite. En effet, si l'adoption de ce texte aujourd'hui serait en soi une très bonne nouvelle pour le monde agricole, il serait bien dommage de s'arrêter en si bon chemin.
Pourra-t-on considérer, dès lors que la proposition de loi aura été adoptée en première lecture au Sénat, que notre œuvre sera achevée et notre tâche accomplie ? Non !
Oui, cette proposition de loi est le remède que nous voulons appliquer. Je me réjouis de son caractère transpartisan jusqu'au bout.
Oui, cette proposition de loi est le remède que nous voulons appliquer. Je me réjouis de son caractère transpartisan jusqu’au bout.
M. Rachid Temal feint de s'en étonner.
Certains journalistes ont vu dans ce texte une simple tentative de la part de la droite sénatoriale de déplacer le débat, …
Venons-en à la suite. En effet, si l'adoption de ce texte aujourd'hui serait en soi une très bonne nouvelle pour le monde agricole, il serait bien dommage de s'arrêter en si bon chemin.
Pourra-t-on considérer, dès lors que la proposition de loi aura été adoptée en première lecture au Sénat, que notre œuvre sera achevée et notre tâche accomplie ? Non !
Venons-en à la suite. En effet, si l’adoption de ce texte aujourd’hui serait en soi une très bonne nouvelle pour le monde agricole, il serait bien dommage de s’arrêter en si bon chemin.
Pourra-t-on considérer, dès lors que la proposition de loi aura été adoptée en première lecture au Sénat, que notre œuvre sera achevée et notre tâche accomplie ? Non !
Venons-en à la suite. En effet, si l’adoption de ce texte aujourd’hui est en soi une très bonne nouvelle pour le monde agricole, il serait bien dommage de s’arrêter en si bon chemin.
Pourra-t-on considérer, dès lors que la proposition de loi aura été adoptée en première lecture au Sénat, que notre œuvre sera achevée et notre tâche accomplie ? Non !
M. Rachid Temal feint de s'en étonner.
M. Rachid Temal feint de s ’ en étonner.
… de décaler le champ de ce qui est acceptable ou ne l'est pas, du dicible et de l'indicible. Je leur réponds très clairement : ce n'est pas la fenêtre d'Overton, mais les yeux que nous avons ouverts devant la réalité !
Comme je l'ai rappelé la semaine dernière, il ne faut pas avoir peur. Par vos votes de la semaine dernière, vous avez prouvé, dans votre grande majorité, que vous n'aviez pas peur.
Certains journalistes ont vu dans ce texte une simple tentative de la part de la droite sénatoriale de déplacer le débat, …
M. Laurent Duplomb . J'appelle les parlementaires de tous bords, notamment à l'Assemblée nationale, à faire de même. Je le dis aussi au ministre de l'agriculture, dont le soutien n'a pas été à toute épreuve la semaine dernière
… de décaler le champ de ce qui est acceptable ou ne l'est pas, du dicible et de l'indicible. Je leur réponds très clairement : ce n'est pas la fenêtre d'Overton, mais les yeux que nous avons ouverts devant la réalité !
Comme je l'ai rappelé la semaine dernière, il ne faut pas avoir peur. Par vos votes de la semaine dernière, vous avez prouvé, dans votre grande majorité, que vous n'aviez pas peur.
… de décaler le champ de ce qui est acceptable ou ne l’est pas, du dicible et de l’indicible. Je leur réponds très clairement : ce n’est pas la fenêtre d’Overton, mais les yeux que nous avons ouverts devant la réalité !
Comme je l’ai rappelé la semaine dernière, il ne faut pas avoir peur. Par vos votes de la semaine dernière, vous avez prouvé, dans votre grande majorité, que vous n’aviez pas peur.
Marques d'ironie sur les travées du groupe SER. – M. le ministre hausse les épaules.
En effet, il va nous falloir trouver une traduction concrète aux propositions que, dans sa grande majorité et dans sa non moins grande sagesse, le Sénat s'apprête à adopter. Cela prendra-t-il la forme d'une inscription du texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ? Ou celle d'une insertion dans une loi d'orientation et d'avenir agricoles attendue pour l'automne ? L'avenir nous le dira.
En tout cas, soyez-en sûrs : je ne lâcherai rien. Nous ne lâcherons rien et ferons en sorte que ce texte poursuive son chemin, celui de l'espoir et de la fierté retrouvés !
M. Laurent Duplomb . J'appelle les parlementaires de tous bords, notamment à l'Assemblée nationale, à faire de même. Je le dis aussi au ministre de l'agriculture, dont le soutien n'a pas été à toute épreuve la semaine dernière
M. Laurent Duplomb. J’appelle les parlementaires de tous bords, notamment à l’Assemblée nationale, à faire de même. Je le dis aussi au ministre de l’agriculture, dont le soutien n’a pas été à toute épreuve la semaine dernière
Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Marques d'ironie sur les travées du groupe SER. – M. le ministre hausse les épaules.
Marques d ’ ironie sur les travées du groupe SER. – M. le ministre hausse les épaules.
Votons ce texte pour que notre agriculture française reste fière et continue de vivre !
En effet, il va nous falloir trouver une traduction concrète aux propositions que, dans sa grande majorité et dans sa non moins grande sagesse, le Sénat s'apprête à adopter. Cela prendra-t-il la forme d'une inscription du texte à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale ? Ou celle d'une insertion dans une loi d'orientation et d'avenir agricoles attendue pour l'automne ? L'avenir nous le dira.
En tout cas, soyez-en sûrs : je ne lâcherai rien. Nous ne lâcherons rien et ferons en sorte que ce texte poursuive son chemin, celui de l'espoir et de la fierté retrouvés !
En effet, il va nous falloir trouver une traduction concrète aux propositions que, dans sa grande majorité et dans sa non moins grande sagesse, le Sénat s’apprête à adopter. Cela prendra-t-il la forme d’une inscription du texte à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale ? Ou celle d’une insertion dans une loi d’orientation et d’avenir agricoles attendue pour l’automne ? L’avenir nous le dira.
En tout cas, soyez-en sûrs : je ne lâcherai rien. Nous ne lâcherons rien et ferons en sorte que ce texte poursuive son chemin, celui de l’espoir et de la fierté retrouvés !
Vifs applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.
Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Protestations sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer la délégation de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) de Nouvelle-Aquitaine, qui est présente dans nos tribunes cette après-midi.
Votons ce texte pour que notre agriculture française reste fière et continue de vivre !
Applaudissements.
Vifs applaudissements prolongés sur les travées des groupes Les Républicains, UC et INDEP.
Dans la suite des explications de vote, la parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer la délégation de l'Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) de Nouvelle-Aquitaine, qui est présente dans nos tribunes cette après-midi.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer la délégation de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) de Nouvelle-Aquitaine, qui est présente dans nos tribunes cette après-midi.
Mme la présidente. Monsieur le ministre, mes chers collègues, je tiens à saluer la délégation de l’Institut des hautes études de défense nationale (IHEDN) de Nouvelle-Aquitaine, qui est présente dans nos tribunes cet après-midi.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.
Applaudissements.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2019, la France ne produit plus ce qu'elle consomme. Cette situation inédite, totalement indigne de notre potentiel de production agricole, ne peut que nous interroger. Comment en est-on arrivé à une telle aberration ?
Au pays de Sully, est-il normal de voir nos agriculteurs attaqués et stigmatisés continuellement ?
Est-il normal de subir l'intégrisme écologique qui nous empêche de profiter des dernières innovations agrotechnologiques ?
Est-il normal de livrer nos agriculteurs en pâture aux agités du bocal incompétents des réseaux sociaux, qui, dans un délire utopiste, nous éloignent des réalités économiques et terriennes de cette noble profession ?
Est-il normal de décider de surtranspositions de directives, qui ne font que pénaliser nos agriculteurs français face à la concurrence européenne ?
Est-il normal, enfin, de devoir toujours batailler pour faire admettre des mesures évidentes et de bon sens ?
Face à la guerre en Ukraine, qui a bouleversé les marchés agricoles mondiaux, au réchauffement climatique et à la diminution des surfaces cultivables dans le monde, et compte tenu des prévisions démographiques actuelles, notre agriculture doit absolument prendre un nouveau virage.
Après la révolution de l'après-guerre qu'ont provoqué le remembrement et la mécanisation, nous allons devoir relever un nouveau défi : produire plus et mieux, alors que le stress hydrique, la sécheresse et les catastrophes naturelles ne font que s'accentuer.
Trop souvent, la presse et les médias n'écoutent que les détracteurs de notre modèle agricole et ne relaient que les commentaires des marchands de peur et de sensationnel.
Il est trop facile de s'émouvoir des contrats signés avec les autres continents, comme l'accord économique et commercial global (Ceta) ou l'accord conclu dans le cadre du Mercosur, alors que l'on en connaît pas le contenu exact.
Comme l'a souligné M. le ministre, le danger ne vient pas toujours des autres continents. Si je prends l'exemple des productions bovine ou maraîchère, nos principaux concurrents sont aux portes de notre pays.
L'Europe doit se doter à court terme d'un cadre législatif harmonisé si elle veut peser de tout son poids sur les marchés mondiaux : c'est un préalable indispensable à la survie de nos productions agricoles nationales et européennes.
J'en viens maintenant plus précisément au contenu de la proposition de loi.
Le titre Ier montre clairement que la recherche de compétitivité de la ferme France et des investissements que nous devons lui consacrer sont une priorité absolue. L'un des premiers amendements que nous avons soutenus tend d'ailleurs à consacrer la souveraineté alimentaire comme intérêt fondamental de la Nation.
De même, nous ne pouvons que nous féliciter de la constitution d'un fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté.
L'investissement, la modernisation, le « produire local » et la réorganisation des filières doivent nous permettre de relancer la productivité de la ferme France. Notre agriculture pourra ainsi retrouver la place qui était la sienne dans notre balance commerciale extérieure.
Je tiens d'ailleurs à saluer tout particulièrement certaines mesures qui figurent au titre II, notamment la création du livret Agri et la mise en place de crédits d'impôt pour les investissements en agriculture, qui contribueront à réduire les coûts de production et à faire progresser la compétitivité prix, seul moyen de réussir la modernisation indispensable de nos exploitations.
Nous ne pouvons plus nous en tenir aux discours rétrogrades de certaines organisations, comme la Confédération paysanne, ou des adeptes de l'agriculture de grand-papa !
Cessons de trembler devant des exploitations de dimension plus importante, car seule la rentabilité de ces structures favorisera l'attrait de la profession. Trop d'agriculteurs sont isolés, manquent de soutien et renoncent, hélas, dans de nombreux cas, à leur projet d'installation ou d'évolution.
Permettez-moi également d'évoquer la dérogation à l'interdiction de pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques. Elle est encore un bel exemple des effets délétères du refus du progrès et du modernisme.
Ce système permet pourtant d'épandre moins de produits et représente une sécurité indispensable, notamment dans les zones collinaires.
Les instituts comme l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) ou les écoles d'agriculture et d'agronomie ne cessent de démontrer tout le bénéfice des évolutions scientifiques et technologiques, autant de progrès qui semblent être ignorés par beaucoup. La surveillance satellitaire des cultures, par exemple, permet d'épandre beaucoup moins de produits sanitaires en ne traitant que les zones infestées.
Au cours de nos débats, nous sommes revenus longuement sur le cas de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et sur son rôle.
Les prérogatives et les missions de cette agence, qui nous est enviée par bien des pays, ont fait l'objet de vives discussions. Pour rappel, cette agence d'expertise scientifique évalue tous les risques sanitaires, alimentaires et environnementaux. Elle est notamment à l'origine du concept révolutionnaire à l'époque de phyto-pharmacovigilance.
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi Égalim 1, j'avais loué le caractère indispensable de cette agence et demandé qu'aucune interdiction en matière de produits phytopharmaceutiques ne soit décidée sans l'avis de l'Anses.
En cas de litige, qu'il y ait une discussion avec le ministre sur le rapport bénéfice-risque me semble judicieux, mais je suis beaucoup plus partagé sur le droit de veto.
De même, il serait nécessaire d'augmenter les crédits alloués à l'Anses, afin de débloquer plusieurs dossiers d'autorisation de mise sur le marché de nouvelles start-up qui présentent des molécules pourtant très novatrices, notamment dans le domaine des biocontrôles.
La parole est à M. Pierre Médevielle, pour le groupe Les Indépendants – République et Territoires.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.
Nous retombons dans l'éternel débat sur les produits phytopharmaceutiques. Si de graves erreurs ont été commises par le passé, la qualité et l'objectivité des expertises progresse continuellement.
Se figurer aujourd'hui, comme certains le font, que l'on peut vider complètement la « trousse à pharmacie » relève de l'idéologie pure et du fantasme. Il existera toujours des attaques bactériennes, fongiques ou d'insectes sur nos cultures. Et quand on voit la taille actuelle des parcelles, ainsi que leur proximité, on imagine aisément les conséquences d'attaques qui ne feraient l'objet d'aucune réaction ciblée de notre part. Les attaques de la pyrale du buis dans le sud-ouest du pays en ont offert, hélas, une triste illustration.
Pour conclure, mes chers collègues, cessons de polémiquer autour de blocages purement idéologiques, dont la profession a trop souffert ces dernières décennies. Ce texte comporte plusieurs mesures de bon sens, nécessaires à la modernisation de notre agriculture.
Nous aurons rapidement des débats sur d'autres sujets primordiaux, tels que celui de l'eau.
Le Sénat, en tant que fin connaisseur des territoires et des sujets agricoles, devra jouer à plein son rôle de créateur de solutions. Seul l'intérêt de l'agriculture française doit guider notre action.
Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette proposition de loi.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2019, la France ne produit plus ce qu'elle consomme. Cette situation inédite, totalement indigne de notre potentiel de production agricole, ne peut que nous interroger. Comment en est-on arrivé à une telle aberration ?
Au pays de Sully, est-il normal de voir nos agriculteurs attaqués et stigmatisés continuellement ?
Est-il normal de subir l'intégrisme écologique, qui nous empêche de profiter des dernières innovations agrotechnologiques ?
Est-il normal de livrer nos agriculteurs en pâture aux agités du bocal incompétents des réseaux sociaux, qui, dans un délire utopiste, nous éloignent des réalités économiques et terriennes de cette noble profession ?
Est-il normal de décider de surtranspositions de directives, qui ne font que pénaliser nos agriculteurs français face à la concurrence européenne ?
Est-il normal, enfin, de devoir toujours batailler pour faire admettre des mesures évidentes et de bon sens ?
Face à la guerre en Ukraine, qui a bouleversé les marchés agricoles mondiaux, au réchauffement climatique et à la diminution des surfaces cultivables dans le monde, et compte tenu des prévisions démographiques, notre agriculture doit absolument prendre un nouveau virage.
Après la révolution de l'après-guerre qu'ont provoqué le remembrement et la mécanisation, nous allons devoir relever un nouveau défi : produire plus et mieux, alors que le stress hydrique, la sécheresse et les catastrophes naturelles ne font que s'accentuer.
Trop souvent, la presse et les médias n'écoutent que les détracteurs de notre modèle agricole et ne relaient que les commentaires des marchands de peur et de sensationnel.
Il est trop facile de s'émouvoir des contrats signés avec les autres continents, comme l'accord économique et commercial global (Ceta) ou l'accord conclu dans le cadre du Mercosur (Marché commun sud-américain), alors que l'on n'en connaît pas le contenu exact.
Comme l'a souligné M. le ministre, le danger ne vient pas toujours des autres continents. Si je prends l'exemple des productions bovine ou maraîchère, nos principaux concurrents sont aux portes de notre pays.
L'Europe doit se doter à court terme d'un cadre législatif harmonisé si elle veut peser de tout son poids sur les marchés mondiaux : c'est un préalable indispensable à la survie de nos productions agricoles nationales et européennes.
J'en viens maintenant plus précisément au contenu de la proposition de loi.
Le titre Ier montre clairement que la recherche de compétitivité de la ferme France et des investissements que nous devons lui consacrer sont une priorité absolue. L'un des premiers amendements que nous avons soutenus tend d'ailleurs à consacrer la souveraineté alimentaire comme intérêt fondamental de la Nation.
De même, nous ne pouvons que nous féliciter de la constitution d'un fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté.
L'investissement, la modernisation, le « produire local » et la réorganisation des filières doivent nous permettre de relancer la productivité de la ferme France. Notre agriculture pourra ainsi retrouver la place qui était la sienne dans notre balance commerciale extérieure.
Je tiens d'ailleurs à saluer tout particulièrement certaines mesures qui figurent au titre II, notamment la création du livret Agri et la mise en place de crédits d'impôt pour les investissements en agriculture, qui contribueront à réduire les coûts de production et à faire progresser la compétitivité-prix, seul moyen de réussir la modernisation indispensable de nos exploitations.
Nous ne pouvons plus nous en tenir aux discours rétrogrades de certaines organisations, comme la Confédération paysanne, ou des adeptes de l'agriculture de grand-papa !
Cessons de trembler devant des exploitations de dimension plus importante, car seule la rentabilité de ces structures favorisera l'attrait de la profession. Trop d'agriculteurs sont isolés, manquent de soutien et renoncent, hélas, dans de nombreux cas, à leur projet d'installation ou d'évolution.
Permettez-moi également d'évoquer la dérogation à l'interdiction de pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques. Elle est encore un bel exemple des effets délétères du refus du progrès et du modernisme.
Ce système permet pourtant d'épandre moins de produits et représente une sécurité indispensable, notamment dans les zones collinaires.
Les instituts comme l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae) ou les écoles d'agriculture et d'agronomie ne cessent de démontrer tout le bénéfice des évolutions scientifiques et technologiques, autant de progrès qui semblent être ignorés par beaucoup. La surveillance satellitaire des cultures, par exemple, permet d'épandre beaucoup moins de produits sanitaires, en ne traitant que les zones infestées.
Au cours de nos débats, nous sommes revenus longuement sur le cas de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) et sur son rôle.
Les prérogatives et les missions de cette agence, qui nous est enviée par bien des pays, ont fait l'objet de vives discussions. Pour rappel, cette agence d'expertise scientifique évalue tous les risques sanitaires, alimentaires et environnementaux. Elle est notamment à l'origine du concept révolutionnaire à l'époque de phyto-pharmacovigilance.
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi Égalim 1, j'avais loué le caractère indispensable de cette agence et demandé qu'aucune interdiction en matière de produits phytopharmaceutiques ne soit décidée sans l'avis de l'Anses.
En cas de litige, qu'il y ait une discussion avec le ministre sur le rapport bénéfice-risque me semble judicieux, mais je suis beaucoup plus partagé sur le droit de veto.
De même, il serait nécessaire d'augmenter les crédits alloués à l'Anses, afin de débloquer plusieurs dossiers d'autorisation de mise sur le marché de nouvelles start-up qui présentent des molécules pourtant très novatrices, notamment dans le domaine des biocontrôles.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2019, la France ne produit plus ce qu’elle consomme. Cette situation inédite, totalement indigne de notre potentiel de production agricole, ne peut que nous interroger. Comment en est-on arrivé à une telle aberration ?
Au pays de Sully, est-il normal de voir nos agriculteurs attaqués et stigmatisés continuellement ?
Est-il normal de subir l’intégrisme écologique, qui nous empêche de profiter des dernières innovations agrotechnologiques ?
Est-il normal de livrer nos agriculteurs en pâture aux agités du bocal incompétents des réseaux sociaux, qui, dans un délire utopiste, nous éloignent des réalités économiques et terriennes de cette noble profession ?
Est-il normal de décider de surtranspositions de directives, qui ne font que pénaliser nos agriculteurs français face à la concurrence européenne ?
Est-il normal, enfin, de devoir toujours batailler pour faire admettre des mesures évidentes et de bon sens ?
Face à la guerre en Ukraine, qui a bouleversé les marchés agricoles mondiaux, au réchauffement climatique et à la diminution des surfaces cultivables dans le monde, et compte tenu des prévisions démographiques, notre agriculture doit absolument prendre un nouveau virage.
Après la révolution de l’après-guerre qu’ont provoqué le remembrement et la mécanisation, nous allons devoir relever un nouveau défi : produire plus et mieux, alors que le stress hydrique, la sécheresse et les catastrophes naturelles ne font que s’accentuer.
Trop souvent, la presse et les médias n’écoutent que les détracteurs de notre modèle agricole et ne relaient que les commentaires des marchands de peur et de sensationnel.
Il est trop facile de s’émouvoir des contrats signés avec les autres continents, comme l’accord économique et commercial global (Ceta) ou l’accord conclu dans le cadre du Mercosur (Marché commun sud-américain), alors que l’on n’en connaît pas le contenu exact.
Comme l’a souligné M. le ministre, le danger ne vient pas toujours des autres continents. Si je prends l’exemple des productions bovine ou maraîchère, nos principaux concurrents sont aux portes de notre pays.
L’Europe doit se doter à court terme d’un cadre législatif harmonisé si elle veut peser de tout son poids sur les marchés mondiaux : c’est un préalable indispensable à la survie de nos productions agricoles nationales et européennes.
J’en viens maintenant plus précisément au contenu de la proposition de loi.
Le titre Ier montre clairement que la recherche de compétitivité de la ferme France et des investissements que nous devons lui consacrer sont une priorité absolue. L’un des premiers amendements que nous avons soutenus tend d’ailleurs à consacrer la souveraineté alimentaire comme intérêt fondamental de la Nation.
De même, nous ne pouvons que nous féliciter de la constitution d’un fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté.
L’investissement, la modernisation, le « produire local » et la réorganisation des filières doivent nous permettre de relancer la productivité de la ferme France. Notre agriculture pourra ainsi retrouver la place qui était la sienne dans notre balance commerciale extérieure.
Je tiens d’ailleurs à saluer tout particulièrement certaines mesures qui figurent au titre II, notamment la création du livret Agri et la mise en place de crédits d’impôt pour les investissements en agriculture, qui contribueront à réduire les coûts de production et à faire progresser la compétitivité-prix, seul moyen de réussir la modernisation indispensable de nos exploitations.
Nous ne pouvons plus nous en tenir aux discours rétrogrades de certaines organisations, comme la Confédération paysanne, ou des adeptes de l’agriculture de grand-papa !
Cessons de trembler devant des exploitations de dimension plus importante, car seule la rentabilité de ces structures favorisera l’attrait de la profession. Trop d’agriculteurs sont isolés, manquent de soutien et renoncent, hélas, dans de nombreux cas, à leur projet d’installation ou d’évolution.
Permettez-moi également d’évoquer la dérogation à l’interdiction de pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques. Elle est encore un bel exemple des effets délétères du refus du progrès et du modernisme.
Ce système permet pourtant d’épandre moins de produits et représente une sécurité indispensable, notamment dans les zones collinaires.
Les instituts comme l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ou les écoles d’agriculture et d’agronomie ne cessent de démontrer tout le bénéfice des évolutions scientifiques et technologiques, autant de progrès qui semblent être ignorés par beaucoup. La surveillance satellitaire des cultures, par exemple, permet d’épandre beaucoup moins de produits sanitaires, en ne traitant que les zones infestées.
Au cours de nos débats, nous sommes revenus longuement sur le cas de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et sur son rôle.
Les prérogatives et les missions de cette agence, qui nous est enviée par bien des pays, ont fait l’objet de vives discussions. Pour rappel, cette agence d’expertise scientifique évalue tous les risques sanitaires, alimentaires et environnementaux. Elle est notamment à l’origine du concept révolutionnaire à l’époque de phyto-pharmacovigilance.
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi Égalim 1, j’avais loué le caractère indispensable de cette agence et demandé qu’aucune interdiction en matière de produits phytopharmaceutiques ne soit décidée sans l’avis de l’Anses.
En cas de litige, qu’il y ait une discussion avec le ministre sur le rapport bénéfice-risque me semble judicieux, mais je suis beaucoup plus partagé sur le droit de veto.
De même, il serait nécessaire d’augmenter les crédits alloués à l’Anses, afin de débloquer plusieurs dossiers d’autorisation de mise sur le marché de nouvelles start-up qui présentent des molécules pourtant très novatrices, notamment dans le domaine des biocontrôles.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2019, la France ne produit plus ce qu’elle consomme. Cette situation inédite, totalement indigne de notre potentiel de production agricole, ne peut que nous interroger. Comment en est-on arrivé à une telle aberration ?
Au pays de Sully, est-il normal de voir nos agriculteurs attaqués et stigmatisés continuellement ?
Est-il normal de subir l’intégrisme écologique, qui nous empêche de profiter des dernières innovations agrotechnologiques ?
Est-il normal de livrer nos agriculteurs en pâture aux agités du bocal incompétents des réseaux sociaux, qui, dans un délire utopiste, nous éloignent des réalités économiques et terriennes de cette noble profession ?
Est-il normal de décider de surtranspositions de directives, qui ne font que pénaliser nos agriculteurs français face à la concurrence européenne ?
Est-il normal, enfin, de devoir toujours batailler pour faire admettre des mesures évidentes et de bon sens ?
Face à la guerre en Ukraine, qui a bouleversé les marchés agricoles mondiaux, au réchauffement climatique et à la diminution des surfaces cultivables dans le monde, et compte tenu des prévisions démographiques, notre agriculture doit absolument prendre un nouveau virage.
Après la révolution de l’après-guerre qu’ont provoqué le remembrement et la mécanisation, nous allons devoir relever un nouveau défi : produire plus et mieux, alors que le stress hydrique, la sécheresse et les catastrophes naturelles ne font que s’accentuer.
Trop souvent, la presse et les médias n’écoutent que les détracteurs de notre modèle agricole et ne relaient que les commentaires des marchands de peur et de sensationnel.
Il est trop facile de s’émouvoir des contrats signés avec les autres continents, comme l’accord économique et commercial global (Ceta) ou l’accord conclu dans le cadre du Mercosur (Marché commun sud-américain), alors que l’on n’en connaît pas le contenu exact.
Comme l’a souligné M. le ministre, le danger ne vient pas toujours des autres continents. Si je prends l’exemple des productions bovine ou maraîchère, nos principaux concurrents sont aux portes de notre pays.
L’Europe doit se doter à court terme d’un cadre législatif harmonisé si elle veut peser de tout son poids sur les marchés mondiaux : c’est un préalable indispensable à la survie de nos productions agricoles nationales et européennes.
J’en viens maintenant plus précisément au contenu de la proposition de loi.
Le titre Ier montre clairement que la recherche de compétitivité de la ferme France et les investissements que nous devons lui consacrer sont une priorité absolue. L’un des premiers amendements que nous avons soutenus tend d’ailleurs à consacrer la souveraineté alimentaire comme intérêt fondamental de la Nation.
De même, nous ne pouvons que nous féliciter de la constitution d’un fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté.
L’investissement, la modernisation, le « produire local » et la réorganisation des filières doivent nous permettre de relancer la productivité de la ferme France. Notre agriculture pourra ainsi retrouver la place qui était la sienne dans notre balance commerciale extérieure.
Je tiens d’ailleurs à saluer tout particulièrement certaines mesures qui figurent au titre II, notamment la création du livret Agri et la mise en place de crédits d’impôt pour les investissements en agriculture, qui contribueront à réduire les coûts de production et à faire progresser la compétitivité-prix, seul moyen de réussir la modernisation indispensable de nos exploitations.
Nous ne pouvons plus nous en tenir aux discours rétrogrades de certaines organisations, comme la Confédération paysanne, ou des adeptes de l’agriculture de grand-papa !
Cessons de trembler devant des exploitations de dimension plus importante, car seule la rentabilité de ces structures favorisera l’attrait de la profession. Trop d’agriculteurs sont isolés, manquent de soutien et renoncent, hélas, dans de nombreux cas, à leur projet d’installation ou d’évolution.
Permettez-moi également d’évoquer la dérogation à l’interdiction de pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques. Elle est encore un bel exemple des effets délétères du refus du progrès et du modernisme.
Ce système permet pourtant d’épandre moins de produits et représente une sécurité indispensable, notamment dans les zones collinaires.
Les instituts comme l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ou les écoles d’agriculture et d’agronomie ne cessent de démontrer tout le bénéfice des évolutions scientifiques et technologiques, autant de progrès qui semblent être ignorés par beaucoup. La surveillance satellitaire des cultures, par exemple, permet d’épandre beaucoup moins de produits sanitaires, en ne traitant que les zones infestées.
Au cours de nos débats, nous sommes revenus longuement sur le cas de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et sur son rôle.
Les prérogatives et les missions de cette agence, qui nous est enviée par bien des pays, ont fait l’objet de vives discussions. Pour rappel, cette agence d’expertise scientifique évalue tous les risques sanitaires, alimentaires et environnementaux. Elle est notamment à l’origine du concept révolutionnaire à l’époque de phyto-pharmacovigilance.
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi Égalim 1, j’avais loué le caractère indispensable de cette agence et demandé qu’aucune interdiction en matière de produits phytopharmaceutiques ne soit décidée sans l’avis de l’Anses.
En cas de litige, qu’il y ait une discussion avec le ministre sur le rapport bénéfice-risque me semble judicieux, mais je suis beaucoup plus partagé sur le droit de veto.
De même, il serait nécessaire d’augmenter les crédits alloués à l’Anses, afin de débloquer plusieurs dossiers d’autorisation de mise sur le marché de nouvelles start-up qui présentent des molécules pourtant très novatrices, notamment dans le domaine des biocontrôles.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis 2019, la France ne produit plus ce qu’elle consomme. Cette situation inédite, totalement indigne de notre potentiel de production agricole, ne peut que nous interroger. Comment en est-on arrivé à une telle aberration ?
Au pays de Sully, est-il normal de voir nos agriculteurs attaqués et stigmatisés continuellement ?
Est-il normal de subir l’intégrisme écologique, qui nous empêche de profiter des dernières innovations agrotechnologiques ?
Est-il normal de livrer nos agriculteurs en pâture aux agités du bocal incompétents des réseaux sociaux, qui, dans un délire utopiste, nous éloignent des réalités économiques et terriennes de cette noble profession ?
Est-il normal de décider de surtranspositions de directives, qui ne font que pénaliser nos agriculteurs français face à la concurrence européenne ?
Est-il normal, enfin, de devoir toujours batailler pour faire admettre des mesures évidentes et de bon sens ?
Face à la guerre en Ukraine, qui a bouleversé les marchés agricoles mondiaux, au réchauffement climatique et à la diminution des surfaces cultivables dans le monde, et compte tenu des prévisions démographiques, notre agriculture doit absolument prendre un nouveau virage.
Après la révolution de l’après-guerre qu’ont provoqué le remembrement et la mécanisation, nous allons devoir relever un nouveau défi : produire plus et mieux, alors que le stress hydrique, la sécheresse et les catastrophes naturelles ne font que s’accentuer.
Trop souvent, la presse et les médias n’écoutent que les détracteurs de notre modèle agricole et ne relaient que les commentaires des marchands de peur et de sensationnel.
Il est trop facile de s’émouvoir des contrats signés avec les autres continents, comme l’accord économique et commercial global (Ceta) ou l’accord conclu dans le cadre du Mercosur (Marché commun sud-américain), alors que l’on n’en connaît pas le contenu exact.
Comme l’a souligné M. le ministre, le danger ne vient pas toujours des autres continents. Si je prends l’exemple des productions bovine ou maraîchère, nos principaux concurrents sont aux portes de notre pays.
L’Europe doit se doter à court terme d’un cadre législatif harmonisé si elle veut peser de tout son poids sur les marchés mondiaux : c’est un préalable indispensable à la survie de nos productions agricoles nationales et européennes.
J’en viens maintenant plus précisément au contenu de la proposition de loi.
Le titre Ier montre clairement que la recherche de compétitivité de la ferme France et les investissements que nous devons lui consacrer sont une priorité absolue. L’un des premiers amendements que nous avons soutenus tend d’ailleurs à consacrer la souveraineté alimentaire comme intérêt fondamental de la Nation.
De même, nous ne pouvons que nous féliciter de la constitution d’un fonds spécial de soutien à la compétitivité des filières agricoles en difficulté.
L’investissement, la modernisation, le « produire local » et la réorganisation des filières doivent nous permettre de relancer la productivité de la ferme France. Notre agriculture pourra ainsi retrouver la place qui était la sienne dans notre balance commerciale extérieure.
Je tiens d’ailleurs à saluer tout particulièrement certaines mesures qui figurent au titre II, notamment la création du livret Agri et la mise en place de crédits d’impôt pour les investissements en agriculture, qui contribueront à réduire les coûts de production et à faire progresser la compétitivité-prix, seul moyen de réussir la modernisation indispensable de nos exploitations.
Nous ne pouvons plus nous en tenir aux discours rétrogrades de certaines organisations, comme la Confédération paysanne, ou des adeptes de l’agriculture de grand-papa !
Cessons de trembler devant des exploitations de dimension plus importante, car seule la rentabilité de ces structures favorisera l’attrait de la profession. Trop d’agriculteurs sont isolés, manquent de soutien et renoncent, hélas, dans de nombreux cas, à leur projet d’installation ou d’évolution.
Permettez-moi également d’évoquer la dérogation à l’interdiction de pulvérisation aérienne de produits phytopharmaceutiques. Elle est encore un bel exemple des effets délétères du refus du progrès et du modernisme.
Ce système permet pourtant d’épandre moins de produits et représente une sécurité indispensable, notamment dans les zones collinaires.
Les instituts comme l’Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement (Inrae) ou les écoles d’agriculture et d’agronomie ne cessent de démontrer tout le bénéfice des évolutions scientifiques et technologiques, autant de progrès qui semblent être ignorés par beaucoup. La surveillance satellitaire des cultures, par exemple, permet d’épandre beaucoup moins de produits sanitaires, en ne traitant que les zones infestées.
Au cours de nos débats, nous sommes revenus longuement sur le cas de l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) et sur son rôle.
Les prérogatives et les missions de cette agence, qui nous est enviée par bien des pays, ont fait l’objet de vives discussions. Pour rappel, cette agence d’expertise scientifique évalue tous les risques sanitaires, alimentaires et environnementaux. Elle est notamment à l’origine du concept révolutionnaire à l’époque de phyto-pharmacovigilance.
En tant que rapporteur pour avis du projet de loi pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous (Égalim 1), j’avais loué le caractère indispensable de cette agence et demandé qu’aucune interdiction en matière de produits phytopharmaceutiques ne soit décidée sans l’avis de l’Anses.
En cas de litige, qu’il y ait une discussion avec le ministre sur le rapport bénéfice-risque me semble judicieux, mais je suis beaucoup plus partagé sur le droit de veto.
De même, il serait nécessaire d’augmenter les crédits alloués à l’Anses, afin de débloquer plusieurs dossiers d’autorisation de mise sur le marché de nouvelles start-up qui présentent des molécules pourtant très novatrices, notamment dans le domaine des biocontrôles.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
Nous retombons dans l'éternel débat sur les produits phytopharmaceutiques. Si de graves erreurs ont été commises par le passé, la qualité et l'objectivité des expertises progresse continuellement.
Se figurer aujourd'hui, comme certains le font, que l'on peut vider complètement la « trousse à pharmacie » relève de l'idéologie pure et du fantasme. Il existera toujours des attaques bactériennes, fongiques ou d'insectes sur nos cultures. Et quand on voit la taille actuelle des parcelles, ainsi que leur proximité, on imagine aisément les conséquences d'attaques qui ne feraient l'objet d'aucune réaction ciblée de notre part. Les attaques de la pyrale du buis dans le sud-ouest du pays en ont offert, hélas, une triste illustration.
Pour conclure, mes chers collègues, cessons de polémiquer autour de blocages purement idéologiques, dont la profession a trop souffert ces dernières décennies. Ce texte comporte plusieurs mesures de bon sens, nécessaires à la modernisation de notre agriculture.
Nous aurons rapidement des débats sur d'autres sujets primordiaux, tels que celui de l'eau.
Le Sénat, en tant que fin connaisseur des territoires et des sujets agricoles, devra jouer à plein son rôle de créateur de solutions. Seul l'intérêt de l'agriculture française doit guider notre action.
Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette proposition de loi.
Nous retombons dans l’éternel débat sur les produits phytopharmaceutiques. Si de graves erreurs ont été commises par le passé, la qualité et l’objectivité des expertises progresse continuellement.
Se figurer aujourd’hui, comme certains le font, que l’on peut vider complètement la « trousse à pharmacie » relève de l’idéologie pure et du fantasme. Il existera toujours des attaques bactériennes, fongiques ou d’insectes sur nos cultures. Et quand on voit la taille actuelle des parcelles, ainsi que leur proximité, on imagine aisément les conséquences d’attaques qui ne feraient l’objet d’aucune réaction ciblée de notre part. Les attaques de la pyrale du buis dans le sud-ouest du pays en ont offert, hélas, une triste illustration.
Pour conclure, mes chers collègues, cessons de polémiquer autour de blocages purement idéologiques, dont la profession a trop souffert ces dernières décennies. Ce texte comporte plusieurs mesures de bon sens, nécessaires à la modernisation de notre agriculture.
Nous aurons rapidement des débats sur d’autres sujets primordiaux, tels que celui de l’eau.
Le Sénat, en tant que fin connaisseur des territoires et des sujets agricoles, devra jouer à plein son rôle de créateur de solutions. Seul l’intérêt de l’agriculture française doit guider notre action.
Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette proposition de loi.
Nous retombons dans l’éternel débat sur les produits phytopharmaceutiques. Si de graves erreurs ont été commises par le passé, la qualité et l’objectivité des expertises progressent continuellement.
Se figurer aujourd’hui, comme certains le font, que l’on peut vider complètement la « trousse à pharmacie » relève de l’idéologie pure et du fantasme. Il existera toujours des attaques bactériennes, fongiques ou d’insectes sur nos cultures. Et quand on voit la taille actuelle des parcelles, ainsi que leur proximité, on imagine aisément les conséquences d’attaques qui ne feraient l’objet d’aucune réaction ciblée de notre part. Les attaques de la pyrale du buis dans le sud-ouest du pays en ont offert, hélas, une triste illustration.
Pour conclure, mes chers collègues, cessons de polémiquer autour de blocages purement idéologiques, dont la profession a trop souffert ces dernières décennies. Ce texte comporte plusieurs mesures de bon sens, nécessaires à la modernisation de notre agriculture.
Nous aurons rapidement des débats sur d’autres sujets primordiaux, tels que celui de l’eau.
Le Sénat, en tant que fin connaisseur des territoires et des sujets agricoles, devra jouer à plein son rôle de créateur de solutions. Seul l’intérêt de l’agriculture française doit guider notre action.
Pour ces raisons, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera en faveur de cette proposition de loi.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP, ainsi que sur des travées du groupe Les Républicains.
Mme la présidente. La parole est à M. Joël Labbé, pour le groupe Écologiste – Solidarité et Territoires.
« Choc de régression », « cheval de Troie de l'agroindustrie », « proposition de loi d'un autre temps » : ces mots sont ceux des associations paysannes, environnementales et de consommateurs, …
Applaudissements sur les travées du groupe GEST.
M. Joël Labbé. Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir écouté les deux premiers orateurs, je ne puis que constater que nos avis sont particulièrement divergents…
… pour décrire les reculs inacceptables qu'entraînerait ce texte, qui a choqué, à juste titre, l'ensemble des acteurs travaillant depuis des années à construire un modèle agricole et alimentaire plus durable et plus équitable.
De fait, les reculs, que nous continuons de dénoncer, sont nombreux dans ce texte : parmi eux, la remise en cause de l'Anses, ainsi que la proposition de mettre en balance la santé et l'environnement avec les enjeux économiques pour le retrait des pesticides nous semblent particulièrement graves.
L'autorisation d'épandage de pesticides par drone, malgré les risques sanitaires pointés par l'Anses, constitue également un recul majeur.
La séparation entre vente et conseil en matière de pesticides est une régression et un très mauvais signal adressé à tous ceux qui croient en la nécessité de développer un conseil indépendant auprès des agriculteurs, lequel contribuera à la réduction – parce que c'est le but –, puis à la fin du recours à ces produits.
De même, plutôt que de faire appel au volontarisme des acteurs pour appliquer la loi Égalim dans la restauration collective, l'article 11 acte là encore un retour en arrière, en repoussant l'échéance et en abaissant l'exigence de qualité.
« Choc de régression », « cheval de Troie de l'agroindustrie », « proposition de loi d'un autre temps » : ces mots sont ceux des associations paysannes, environnementales et de consommateurs, …
Sourires.
S'agissant de l'eau, le texte donne de façon très inquiétante la priorité au stockage pour l'irrigation, en le considérant d'intérêt général majeur, sans engager de réflexion sur le partage de cette ressource. Il prévoit aussi de soutenir massivement et sans conditionnalité l'investissement agricole.
Enfin, dans un contexte de tension sociale, on propose, alors qu'il s'agit d'un texte sur l'agriculture, de réformer Pôle emploi et de mettre en œuvre le cumul RSA-revenus d'activité au détriment des droits sociaux !
Les solutions figurant dans cette proposition de loi ne répondent pas aux questions cruciales touchant au revenu des agriculteurs et à la hausse des importations de produits alimentaires : se lancer dans la course au moins-disant ne permettra pas de construire notre souveraineté alimentaire. Cela accélérera notre dépendance aux intrants issus d'importations, dont les coûts explosent. Cela affaiblira également les écosystèmes, alors que les agriculteurs dépendent des sols, des pollinisateurs, du cycle de l'eau et du climat.
Les solutions se trouvent plutôt dans la régulation des marchés et la sortie des accords de libre-échange, ainsi que dans une répartition équitable de la valeur. Elles résident aussi dans un rééquilibrage des aides de la politique agricole commune (PAC), qui sont inégalement distribuées et dont la répartition se fait souvent au détriment des filières pour lesquelles les importations augmentent.
Il s'agit également de mener avec volontarisme une politique de relocalisation de notre alimentation.
À cette fin, il faut faire en sorte que toutes et tous accèdent à une alimentation de qualité : on ne peut que déplorer l'abandon du chèque alimentation durable, qui devrait être un premier pas vers le droit pour tous à une alimentation de qualité et locale, bénéfique pour les agriculteurs et nos concitoyens, en cette période d'explosion de la précarité.
Nous continuerons de défendre une sécurité sociale de l'alimentation, afin de conjuguer droit à une alimentation durable et rémunération équitable des agriculteurs. En effet, le modèle agroécologique, fondé sur des pratiques agronomiques permettant de se passer d'intrants, conjugué avec des politiques alimentaires fortes, permettra – nous en sommes convaincus – de relever le défi de la transition.
Pour y parvenir, nous avons cependant besoin d'un soutien massif des solutions de rechange, car, aujourd'hui, seul 1 % de la dépense publique agricole contribue à la sortie des pesticides.
Il faut également soutenir l'agriculture biologique, à laquelle cette proposition de loi n'a pas consacré une seule ligne. La transition se doit d'être accompagnée et organisée. Lors de son audition au Sénat, le directeur de l'Inrae a souligné que l'anticipation était préférable à l'attentisme face à l'arrivée de contraintes extérieures. Il a aussi insisté sur la stabilité et la cohérence des politiques publiques.
Selon l'Inrae, après un travail scientifique sérieux, la sortie des produits phytosanitaires à l'horizon de 2050 est possible. Pour cela, la recherche a besoin de moyens importants. Le directeur de l'Inrae nous a ainsi appris que le budget « recherche » de Bayer, l'un des piliers du funeste Phyteis, était quatre fois supérieur à celui de son institut. C'est dire si nous devons encore faire des efforts !
Avec ce texte, qui fait l'impasse sur les enjeux environnementaux et sanitaires à venir et qui revient sur le droit existant, c'est tout le contraire qui est proposé.
Malgré tout, les propositions que nous contribuons à défendre, bien qu'elles aient été caricaturées durant les débats, portent parfois leurs fruits.
Ainsi, alors que nous vous alertions, à l'occasion de l'examen de chaque texte budgétaire, sur l'absence d'application de la loi Égalim dans la restauration collective, les annonces récentes du Gouvernement, monsieur le ministre, semblent enfin aller dans le bon sens.
Idem pour le soutien à l'agriculture biologique au sujet duquel, en lien avec les filières, nous vous avertissons depuis des mois. Les financements annoncés sont nécessaires, même s'ils restent tardifs et encore insuffisants.
Alors que nous assistons avec regret et dépit au vote de ce texte, auquel nous nous opposons fermement, nous resterons vigilants et combatifs, de sorte que les futurs débats sur la loi d'orientation et d'avenir agricoles permettent d'offrir de véritables solutions pour notre agriculture.
Nous voterons farouchement contre ce texte.
… pour décrire les reculs inacceptables qu'entraînerait ce texte, qui a choqué, à juste titre, l'ensemble des acteurs travaillant depuis des années à construire un modèle agricole et alimentaire plus durable et plus équitable.
De fait, les reculs, que nous continuons de dénoncer, sont nombreux dans ce texte : parmi eux, la remise en cause de l'Anses, ainsi que la proposition de mettre en balance la santé et l'environnement avec les enjeux économiques pour le retrait des pesticides nous semblent particulièrement graves.
L'autorisation d'épandage de pesticides par drone, malgré les risques sanitaires pointés par l'Anses, constitue également un recul majeur.
La séparation entre vente et conseil en matière de pesticides est une régression et un très mauvais signal adressé à tous ceux qui croient en la nécessité de développer un conseil indépendant auprès des agriculteurs, lequel contribuera à la réduction – parce que c'est le but –, puis à la fin du recours à ces produits.
De même, plutôt que de faire appel au volontarisme des acteurs pour appliquer la loi Égalim dans la restauration collective, l'article 11 acte là encore un retour en arrière, en repoussant l'échéance et en abaissant l'exigence de qualité.
« Choc de régression », « cheval de Troie de l’agroindustrie », « proposition de loi d’un autre temps » : ces mots sont ceux des associations paysannes, environnementales et de consommateurs, …
« Choc de régression », « cheval de Troie de l’agro-industrie », « proposition de loi d’un autre temps » : ces mots sont ceux des associations paysannes, environnementales et de consommateurs, …
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Je profiterai des quelques minutes qu'il me reste pour évoquer les projets alimentaires territoriaux, obtenus de force dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014 : partout où ils ont été mis en place, ces projets jouent parfaitement leur rôle.
Permettez-moi, mes chers collègues, de formuler ce qui n'est pour l'instant qu'un vœu pieux : j'aimerais voir l'ensemble du territoire français couvert de projets alimentaires territoriaux, car ils contribuent à la souveraineté alimentaire des territoires,
S'agissant de l'eau, le texte donne de façon très inquiétante la priorité au stockage pour l'irrigation, en le considérant comme d'intérêt général majeur, sans engager de réflexion sur le partage de cette ressource. Il prévoit aussi de soutenir massivement et sans conditionnalité l'investissement agricole.
Enfin, dans un contexte de tensions sociales, on propose, alors qu'il s'agit d'un texte sur l'agriculture, de réformer Pôle emploi et de mettre en œuvre le cumul RSA-revenus d'activité au détriment des droits sociaux !
Les solutions figurant dans cette proposition de loi ne répondent pas aux questions cruciales touchant au revenu des agriculteurs et à la hausse des importations de produits alimentaires : se lancer dans la course au moins-disant ne permettra pas de construire notre souveraineté alimentaire. Cela accélérera notre dépendance aux intrants issus d'importations, dont les coûts explosent. Cela affaiblira également les écosystèmes, alors que les agriculteurs dépendent des sols, des pollinisateurs, du cycle de l'eau et du climat.
Les solutions se trouvent plutôt dans la régulation des marchés et la sortie des accords de libre-échange, ainsi que dans une répartition équitable de la valeur. Elles résident aussi dans un rééquilibrage des aides de la politique agricole commune (PAC), qui sont inégalement distribuées et dont la répartition se fait souvent au détriment des filières pour lesquelles les importations augmentent.
Il s'agit également de mener avec volontarisme une politique de relocalisation de notre alimentation.
À cette fin, il faut faire en sorte que toutes et tous accèdent à une alimentation de qualité : on ne peut que déplorer l'abandon du chèque alimentation durable, qui devrait être un premier pas vers le droit pour tous à une alimentation de qualité et locale, bénéfique pour les agriculteurs et nos concitoyens, en cette période d'explosion de la précarité.
Nous continuerons de défendre une sécurité sociale de l'alimentation, afin de conjuguer droit à une alimentation durable et rémunération équitable des agriculteurs. En effet, le modèle agroécologique, fondé sur des pratiques agronomiques permettant de se passer d'intrants, conjugué avec des politiques alimentaires fortes, permettra – nous en sommes convaincus – de relever le défi de la transition.
Pour y parvenir, nous avons cependant besoin d'un soutien massif des solutions de rechange, car, aujourd'hui, seul 1 % de la dépense publique agricole contribue à la sortie des pesticides.
Il faut également soutenir l'agriculture biologique, à laquelle cette proposition de loi n'a pas consacré une seule ligne. La transition se doit d'être accompagnée et organisée. Lors de son audition au Sénat, le directeur de l'Inrae a souligné que l'anticipation était préférable à l'attentisme face à l'arrivée de contraintes extérieures. Il a aussi insisté sur la stabilité et la cohérence des politiques publiques.
Selon l'Inrae, après un travail scientifique sérieux, la sortie des produits phytosanitaires à l'horizon de 2050 est possible. Pour cela, la recherche a besoin de moyens importants. Le directeur de l'Inrae nous a ainsi appris que le budget « recherche » de Bayer, l'un des piliers du funeste Phyteis, était quatre fois supérieur à celui de son institut. C'est dire si nous devons encore faire des efforts !
Avec ce texte, qui fait l'impasse sur les enjeux environnementaux et sanitaires à venir et qui revient sur le droit existant, c'est tout le contraire qui est proposé.
Malgré tout, les propositions que nous contribuons à défendre, bien qu'elles aient été caricaturées durant les débats, portent parfois leurs fruits.
Ainsi, alors que nous vous alertions, à l'occasion de l'examen de chaque texte budgétaire, sur l'absence d'application de la loi Égalim dans la restauration collective, les annonces récentes du Gouvernement, monsieur le ministre, semblent enfin aller dans le bon sens.
Idem pour le soutien à l'agriculture biologique au sujet duquel, en lien avec les filières, nous vous avertissons depuis des mois. Les financements annoncés sont nécessaires, même s'ils restent tardifs et encore insuffisants.
Alors que nous assistons avec regret et dépit au vote de ce texte, auquel nous nous opposons fermement, nous resterons vigilants et combatifs, de sorte que les futurs débats sur la loi d'orientation et d'avenir agricoles permettent d'offrir de véritables solutions pour notre agriculture.
Nous voterons farouchement contre ce texte.
… pour décrire les reculs inacceptables qu’entraînerait ce texte, qui a choqué, à juste titre, l’ensemble des acteurs travaillant depuis des années à construire un modèle agricole et alimentaire plus durable et plus équitable.
De fait, les reculs, que nous continuons de dénoncer, sont nombreux dans ce texte : parmi eux, la remise en cause de l’Anses, ainsi que la proposition de mettre en balance la santé et l’environnement avec les enjeux économiques pour le retrait des pesticides nous semblent particulièrement graves.
L’autorisation d’épandage de pesticides par drone, malgré les risques sanitaires pointés par l’Anses, constitue également un recul majeur.
La séparation entre vente et conseil en matière de pesticides est une régression et un très mauvais signal adressé à tous ceux qui croient en la nécessité de développer un conseil indépendant auprès des agriculteurs, lequel contribuera à la réduction – parce que c’est le but –, puis à la fin du recours à ces produits.
De même, plutôt que de faire appel au volontarisme des acteurs pour appliquer la loi Égalim dans la restauration collective, l’article 11 acte là encore un retour en arrière, en repoussant l’échéance et en abaissant l’exigence de qualité.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et RDPI.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Vous me direz peut-être – je vous entends déjà le dire – qu'il s'agit là d'une utopie. Eh bien, je vous répondrai que c'est justement l'utopie qui nous sauvera la vie !
Je profiterai des quelques minutes qu'il me reste pour évoquer les projets alimentaires territoriaux, obtenus de force dans le cadre de la loi d'avenir pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt de 2014 : partout où ils ont été mis en place, ces projets jouent parfaitement leur rôle.
Permettez-moi, mes chers collègues, de formuler ce qui n'est pour l'instant qu'un vœu pieux : voir l'ensemble du territoire français couvert de projets alimentaires territoriaux, car ils contribuent à la souveraineté alimentaire des territoires,
S’agissant de l’eau, le texte donne de façon très inquiétante la priorité au stockage pour l’irrigation, en le considérant comme d’intérêt général majeur, sans engager de réflexion sur le partage de cette ressource. Il prévoit aussi de soutenir massivement et sans conditionnalité l’investissement agricole.
Enfin, dans un contexte de tensions sociales, on propose, alors qu’il s’agit d’un texte sur l’agriculture, de réformer Pôle emploi et de mettre en œuvre le cumul RSA-revenus d’activité au détriment des droits sociaux !
Les solutions figurant dans cette proposition de loi ne répondent pas aux questions cruciales touchant au revenu des agriculteurs et à la hausse des importations de produits alimentaires : se lancer dans la course au moins-disant ne permettra pas de construire notre souveraineté alimentaire. Cela accélérera notre dépendance aux intrants issus d’importations, dont les coûts explosent. Cela affaiblira également les écosystèmes, alors que les agriculteurs dépendent des sols, des pollinisateurs, du cycle de l’eau et du climat.
Les solutions se trouvent plutôt dans la régulation des marchés et la sortie des accords de libre-échange, ainsi que dans une répartition équitable de la valeur. Elles résident aussi dans un rééquilibrage des aides de la politique agricole commune (PAC), qui sont inégalement distribuées et dont la répartition se fait souvent au détriment des filières pour lesquelles les importations augmentent.
Il s’agit également de mener avec volontarisme une politique de relocalisation de notre alimentation.
À cette fin, il faut faire en sorte que toutes et tous accèdent à une alimentation de qualité : on ne peut que déplorer l’abandon du chèque alimentation durable, qui devrait être un premier pas vers le droit pour tous à une alimentation de qualité et locale, bénéfique pour les agriculteurs et nos concitoyens, en cette période d’explosion de la précarité.
Nous continuerons de défendre une sécurité sociale de l’alimentation, afin de conjuguer droit à une alimentation durable et rémunération équitable des agriculteurs. En effet, le modèle agroécologique, fondé sur des pratiques agronomiques permettant de se passer d’intrants, conjugué avec des politiques alimentaires fortes, permettra – nous en sommes convaincus – de relever le défi de la transition.
Pour y parvenir, nous avons cependant besoin d’un soutien massif des solutions de rechange, car, aujourd’hui, seul 1 % de la dépense publique agricole contribue à la sortie des pesticides.
Il faut également soutenir l’agriculture biologique, à laquelle cette proposition de loi n’a pas consacré une seule ligne. La transition se doit d’être accompagnée et organisée. Lors de son audition au Sénat, le directeur de l’Inrae a souligné que l’anticipation était préférable à l’attentisme face à l’arrivée de contraintes extérieures. Il a aussi insisté sur la stabilité et la cohérence des politiques publiques.
Selon l’Inrae, après un travail scientifique sérieux, la sortie des produits phytosanitaires à l’horizon de 2050 est possible. Pour cela, la recherche a besoin de moyens importants. Le directeur de l’Inrae nous a ainsi appris que le budget « recherche » de Bayer, l’un des piliers du funeste Phyteis, était quatre fois supérieur à celui de son institut. C’est dire si nous devons encore faire des efforts !
Avec ce texte, qui fait l’impasse sur les enjeux environnementaux et sanitaires à venir et qui revient sur le droit existant, c’est tout le contraire qui est proposé.
Malgré tout, les propositions que nous contribuons à défendre, bien qu’elles aient été caricaturées durant les débats, portent parfois leurs fruits.
Ainsi, alors que nous vous alertions, à l’occasion de l’examen de chaque texte budgétaire, sur l’absence d’application de la loi Égalim dans la restauration collective, les annonces récentes du Gouvernement, monsieur le ministre, semblent enfin aller dans le bon sens.
Idem pour le soutien à l’agriculture biologique au sujet duquel, en lien avec les filières, nous vous avertissons depuis des mois. Les financements annoncés sont nécessaires, même s’ils restent tardifs et encore insuffisants.
Alors que nous assistons avec regret et dépit au vote de ce texte, auquel nous nous opposons fermement, nous resterons vigilants et combatifs, de sorte que les futurs débats sur la loi d’orientation et d’avenir agricoles permettent d’offrir de véritables solutions pour notre agriculture.
Nous voterons farouchement contre ce texte.
Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – M. Frédéric Marchand applaudit également.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et RDPI.
Exclamations sur les travées du groupe Les Républicains.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Vous me direz peut-être – je crois déjà vous entendre – qu'il s'agit là d'une utopie. Eh bien, je vous répondrai que c'est justement l'utopie qui nous sauvera la vie !
Je profiterai des quelques minutes qu’il me reste pour évoquer les projets alimentaires territoriaux, obtenus de force dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt de 2014 : partout où ils ont été mis en place, ces projets jouent parfaitement leur rôle.
Permettez-moi, mes chers collègues, de formuler ce qui n’est pour l’instant qu’un vœu pieux : voir l’ensemble du territoire français couvert de projets alimentaires territoriaux, car ils contribuent à la souveraineté alimentaire des territoires,
Je profiterai des quelques minutes qu’il me reste pour évoquer les projets alimentaires territoriaux, obtenus de force dans le cadre de la loi d’avenir pour l’agriculture, l’alimentation et la forêt de 2014 : partout où ils ont été mis en place, ces projets jouent parfaitement leur rôle.
Permettez-moi, mes chers collègues, de formuler ce qui n’est pour l’instant qu’un vœu pieux : voir l’ensemble du territoire français couvert de projets alimentaires territoriaux, car ils contribuent à la souveraineté alimentaire des territoires
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.
Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – M. Frédéric Marchand applaudit également.
Applaudissements sur les travées du groupe GEST, ainsi que sur des travées des groupes SER et RDPI.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la semaine dernière, nous avons achevé tard dans la nuit l'examen de cette proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, sur laquelle nous sommes invités à nous prononcer cette après-midi.
Du rapport de l'automne dernier à aujourd'hui, le chemin parcouru est positif. Aujourd'hui, nous nous accordons sur la nécessité de ne pas céder à l'opposition stérile entre les différents modèles, à la condamnation en bloc de la stratégie de montée en gamme ou à la caricature d'une agriculture dite « productiviste », car nous en sommes loin en France.
Le défi que doit relever notre modèle agricole n'est pas anodin : il s'agit de restaurer la puissance agricole de la France que plusieurs décennies de déclin ont abîmée, alors que la planète entière subit d'ores et déjà les conséquences du dérèglement climatique.
L'adaptation à ce dernier et aux évolutions de la disponibilité de la ressource en eau, le renouvellement des générations et la préservation de notre souveraineté alimentaire sont trois priorités qui se rejoignent et qui sont chacune vitales pour notre agriculture.
Le projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, autour duquel les concertations se déroulent encore, sera une nouvelle occasion d'aborder ces sujets, sur lesquels il nous faudra trouver un consensus.
De nombreux producteurs français ont fait le choix du bio ou d'une production sous signe de qualité, synonyme de valeur ajoutée, de prix plus rémunérateurs et de conquêtes de nouveaux marchés.
Les jeunes agriculteurs, installés ou en devenir, ont souvent la volonté de participer aux changements de paradigme que nous connaissons. Nous devons les accompagner, car leur réussite sera la nôtre.
Tel est le sens de l'annonce, faite par le ministre la semaine dernière, du renforcement du plan de soutien à l'agriculture biologique au travers de la mobilisation de 60 millions d'euros pour résoudre les difficultés urgentes, d'une nouvelle campagne de communication et, surtout, de l'engagement de l'État de respecter, d'ici à la fin de l'année, l'objectif de 50 % de produits sous signe de qualité et durables et d'un minimum de 20 % de produits biologiques servis en restauration collective, dans chaque établissement relevant de sa responsabilité.
Sur ce dernier point, nous saluons la volonté d'exemplarité de l'État.
Pour autant, il n'est pas question de ne traiter et de n'accompagner que l'agriculture biologique. Tous les agriculteurs ont à cœur leur métier et la volonté de nourrir les Français du mieux qu'ils le peuvent.
C'est pour les soutenir que nous souhaitons les accompagner dans leur adaptation et leur anticipation des conséquences du dérèglement climatique.
Notre objectif est clair : poser des bases durables à la puissance agricole et à la souveraineté alimentaire de la France au XXIe siècle.
Tel est le sens de notre engagement aux côtés du Gouvernement depuis six ans et de notre action en faveur d'un engagement rapide des transitions nécessaires, de façon pragmatique et efficace.
Sur le fond de la proposition de loi, nous sommes convaincus que certains de ses articles pourront être intégrés au projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles.
Ainsi en est-il de l'article 9, qui permet une meilleure reconnaissance des externalités positives de l'agriculture en matière de stockage du carbone et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou encore de l'article 16, qui renforce les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) et y introduit une concertation, concourant de cette façon à la nécessaire création de consensus en matière de gestion de l'eau.
Par ailleurs, je me réjouis de la version finale de l'article 8 de la proposition de loi, qui concerne l'épandage de produits phytopharmaceutiques par des drones. En effet, je rappelle que le dispositif, proposé par Mme le rapporteur, est très bien cadré. Ainsi, seules les surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % et l'agriculture de précision peuvent profiter de cette expérimentation.
En outre, une évaluation par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) est toujours prévue et peut déboucher sur l'accord d'une dérogation pour cinq ans, offrant potentiellement une décennie à la filière pour exploiter les possibilités de cette technologie en matière de réduction d'usage de produits phytosanitaires.
Nous avons trouvé un équilibre qui permet de préserver l'innovation, au service de la transition comme de la compétitivité de notre agriculture.
Cependant, des points de blocage subsistent, par exemple l'article 15. Nous considérons comme primordial d'adapter à la fois nos modes de production et l'aménagement de nos territoires aux conséquences du dérèglement climatique sur la disponibilité de l'eau.
Les ouvrages de stockage de l'eau auront une importance majeure pour remplir ces deux objectifs, tout comme la réutilisation d'eaux non conventionnelles et l'adaptation des systèmes de production.
Toutefois, chaque projet est différent et chaque territoire doit s'organiser. Ainsi, la déclaration d'intérêt général majeur, prévue à l'article 15 de la proposition de loi, nous paraît disproportionnée, de même qu'elle nous semble fermer la porte à la concertation locale.
Sur un autre plan, nous pourrions également évoquer les mesures liées au travail et à la fiscalité, qui, en dépit de leur intérêt et, pour certaines d'entre elles, de leur pertinence, relèvent des lois de finances ou d'une loi Travail. Je pense, en particulier, à la pérennisation du dispositif des travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE), à laquelle nous sommes attachés, afin d'offrir aux agriculteurs une meilleure visibilité sur un outil qui fonctionne.
Mes chers collègues, si cette proposition de loi ouvre des débats, que nous aurons de nouveau lors de l'examen du projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, ainsi que des projets de loi Travail et de finances, elle pose également des questions qui renvoient à notre rapport à l'agriculture et à la nature.
La compétitivité de l'agriculture n'est pas un gros mot ; la préservation de l'environnement, non plus. La souveraineté alimentaire de demain nécessitera que nous ayons pris, aujourd'hui, les décisions qui préserveront les qualités de nos sols, de nos savoir-faire et de nos produits.
Le groupe RDPI adopte une position de liberté individuelle de vote sur ce texte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Vous me direz peut-être – je crois déjà vous entendre – qu’il s’agit là d’une utopie. Eh bien, je vous répondrai que c’est justement l’utopie qui nous sauvera la vie !
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.
Bravo ! et applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE. – M. Frédéric Marchand applaudit également.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la semaine dernière, nous avons achevé tard dans la nuit l'examen de cette proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, sur laquelle nous sommes invités à nous prononcer cette après-midi.
Du rapport de l'automne dernier à aujourd'hui, le chemin parcouru est positif. Aujourd'hui, nous nous accordons sur la nécessité de ne pas céder à l'opposition stérile entre les différents modèles, à la condamnation en bloc de la stratégie de montée en gamme ou à la caricature d'une agriculture dite « productiviste », car nous en sommes loin en France.
Le défi que doit relever notre modèle agricole n'est pas anodin : il s'agit de restaurer la puissance agricole de la France que plusieurs décennies de déclin ont abîmée, alors que la planète entière subit d'ores et déjà les conséquences du dérèglement climatique. L'adaptation à ce dernier et aux évolutions de la disponibilité de la ressource en eau, le renouvellement des générations et la préservation de notre souveraineté alimentaire sont trois priorités qui se rejoignent et qui sont chacune vitales pour notre agriculture.
Le projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, autour duquel les concertations se déroulent encore, sera une nouvelle occasion d'aborder ces sujets, sur lesquels il nous faudra trouver un consensus.
De nombreux producteurs français ont fait le choix du bio ou d'une production sous signe de qualité, synonyme de valeur ajoutée, de prix plus rémunérateurs et de conquêtes de nouveaux marchés.
Les jeunes agriculteurs, installés ou en devenir, ont souvent la volonté de participer aux changements de paradigme que nous connaissons. Nous devons les accompagner, car leur réussite sera la nôtre.
Tel est le sens de l'annonce, faite par le ministre la semaine dernière, du renforcement du plan de soutien à l'agriculture biologique au travers de la mobilisation de 60 millions d'euros pour résoudre les difficultés urgentes, d'une nouvelle campagne de communication et, surtout, de l'engagement de l'État de respecter, d'ici à la fin de l'année, l'objectif de 50 % de produits sous signe de qualité et durables et d'un minimum de 20 % de produits biologiques servis en restauration collective, dans chaque établissement relevant de sa responsabilité.
Sur ce dernier point, nous saluons la volonté d'exemplarité de l'État.
Pour autant, il n'est pas question de ne traiter et de n'accompagner que l'agriculture biologique. Tous les agriculteurs ont à cœur leur métier et la volonté de nourrir les Français du mieux qu'ils le peuvent.
C'est pour les soutenir que nous souhaitons les accompagner dans leur adaptation et leur anticipation des conséquences du dérèglement climatique.
Notre objectif est clair : poser des bases durables à la puissance agricole et à la souveraineté alimentaire de la France au XXIe siècle.
Tel est le sens de notre engagement aux côtés du Gouvernement depuis six ans et de notre action en faveur d'un engagement rapide des transitions nécessaires, de façon pragmatique et efficace.
Sur le fond de la proposition de loi, nous sommes convaincus que certains de ses articles pourront être intégrés au projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles.
Ainsi en est-il de l'article 9, qui permet une meilleure reconnaissance des externalités positives de l'agriculture en matière de stockage du carbone et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou encore de l'article 16, qui renforce les projets de territoire pour la gestion de l'eau (PTGE) et y introduit une concertation, concourant de cette façon à la nécessaire création de consensus en matière de gestion de l'eau.
Par ailleurs, je me réjouis de la version finale de l'article 8 de la proposition de loi, qui concerne l'épandage de produits phytopharmaceutiques par des drones. En effet, je rappelle que le dispositif, proposé par Mme le rapporteur, est très bien cadré. Ainsi, seules les surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % et l'agriculture de précision peuvent profiter de cette expérimentation.
En outre, une évaluation par l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (Anses) est toujours prévue et peut déboucher sur l'accord d'une dérogation pour cinq ans, offrant potentiellement une décennie à la filière pour exploiter les possibilités de cette technologie en matière de réduction d'usage de produits phytosanitaires.
Nous avons trouvé un équilibre qui permet de préserver l'innovation, au service de la transition comme de la compétitivité de notre agriculture.
Cependant, des points de blocage subsistent, par exemple l'article 15. Nous considérons comme primordial d'adapter à la fois nos modes de production et l'aménagement de nos territoires aux conséquences du dérèglement climatique sur la disponibilité de l'eau.
Les ouvrages de stockage de l'eau auront une importance majeure pour remplir ces deux objectifs, tout comme la réutilisation d'eaux non conventionnelles et l'adaptation des systèmes de production.
Toutefois, chaque projet est différent et chaque territoire doit s'organiser. Ainsi, la déclaration d'intérêt général majeur, prévue à l'article 15 de la proposition de loi, nous paraît disproportionnée, de même qu'elle nous semble fermer la porte à la concertation locale.
Sur un autre plan, nous pourrions également évoquer les mesures liées au travail et à la fiscalité, qui, en dépit de leur intérêt et, pour certaines d'entre elles, de leur pertinence, relèvent des lois de finances ou d'une loi Travail.
Je pense, en particulier, à la pérennisation du dispositif des travailleurs occasionnels-demandeurs d'emploi (TO-DE), à laquelle nous sommes attachés, afin d'offrir aux agriculteurs une meilleure visibilité sur un outil qui fonctionne.
Mes chers collègues, si cette proposition de loi ouvre des débats, que nous aurons de nouveau lors de l'examen du projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles, ainsi que des projets de loi Travail et de finances, elle pose également des questions qui renvoient à notre rapport à l'agriculture et à la nature.
La compétitivité de l'agriculture n'est pas un gros mot ; la préservation de l'environnement, non plus. La souveraineté alimentaire de demain nécessitera que nous ayons pris, aujourd'hui, les décisions qui préserveront les qualités de nos sols, de nos savoir-faire et de nos produits.
Le groupe RDPI adopte une position de liberté individuelle de vote sur ce texte.
Mme la présidente. La parole est à Mme Patricia Schillinger, pour le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants.
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les huit heures de débat que nous avons consacrées à cette proposition de loi auront clarifié les positions de la droite sénatoriale et de l'ensemble des groupes de gauche, comme leurs divergences.
S'agissant d'enjeux aussi importants que l'agriculture et l'alimentation, il est toutefois regrettable d'avoir dû débattre pendant un temps parlementaire si court, sans disposer d'étude d'impact sur des dispositions majeures et, surtout, avec de nombreuses imprécisions de définition de termes centraux de cette proposition de loi.
Dès la discussion générale, nous avions parfaitement compris la stratégie de la majorité sénatoriale qui, cherchant à prendre ses marques en vue de l'examen du projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles (LOA), a souhaité imposer un certain nombre de concepts dans le débat sur notre politique agricole.
À ce titre, il est malheureux que la grande majorité des dispositions de cette proposition de loi ne soient que des retours en arrière sur des législations ou des rapports adoptés dans cet hémicycle.
Face à cela, monsieur le ministre, vous avez pris le parti, dans un premier temps, de défendre cette proposition de loi de manière vigoureuse lors de la discussion générale, avant d'adopter une approche bien plus modérée au cours des débats.
J'en veux pour preuve les avis favorables que vous avez émis sur de nombreux amendements de suppression défendus par mon groupe et ayant trait aux articles 6, 7, 11, 13, 15, 17 et 22 de cette proposition de loi.
Nous saurons nous souvenir de ces positions lors de l'examen du projet de LOA.
Toutefois, lors des débats, monsieur le ministre, vous avez appelé, à de nombreuses reprises, à ne pas tomber dans la caricature au sujet de cette proposition de loi, en vous tournant principalement vers la gauche de cet hémicycle.
La lecture des comptes rendus de séance prouve que les interventions caricaturales ou simplistes ne se trouvaient pourtant pas de ce côté de l'hémicycle... Les nombreuses interruptions lors de la présentation de la motion tendant à opposer la question préalable en sont de bons exemples.
Mes chers collègues, présenter et défendre une autre vision de l'agriculture ne relève pas d'une caricature ; il s'agit simplement d'un avis émis dans le cadre d'un débat politique, auquel nous contribuons par nos approches techniques et concrètes, qui s'appuient sur nos compétences et nos expériences.
Pour nous aussi, « le mot compétitivité n'est pas un gros mot » ; nous l'avons clairement mis en avant en démontrant que les exploitations agroécologiques peuvent être parfaitement compétitives et rentables
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la semaine dernière, nous avons achevé tard dans la nuit l’examen de cette proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, sur laquelle nous sommes invités à nous prononcer cette après-midi.
Du rapport de l’automne dernier à aujourd’hui, le chemin parcouru est positif. Aujourd’hui, nous nous accordons sur la nécessité de ne pas céder à l’opposition stérile entre les différents modèles, à la condamnation en bloc de la stratégie de montée en gamme ou à la caricature d’une agriculture dite « productiviste », car nous en sommes loin en France.
Le défi que doit relever notre modèle agricole n’est pas anodin : il s’agit de restaurer la puissance agricole de la France que plusieurs décennies de déclin ont abîmée, alors que la planète entière subit d’ores et déjà les conséquences du dérèglement climatique. L’adaptation à ce dernier et aux évolutions de la disponibilité de la ressource en eau, le renouvellement des générations et la préservation de notre souveraineté alimentaire sont trois priorités qui se rejoignent et qui sont chacune vitales pour notre agriculture.
Le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, autour duquel les concertations se déroulent encore, sera une nouvelle occasion d’aborder ces sujets, sur lesquels il nous faudra trouver un consensus.
De nombreux producteurs français ont fait le choix du bio ou d’une production sous signe de qualité, synonyme de valeur ajoutée, de prix plus rémunérateurs et de conquêtes de nouveaux marchés.
Les jeunes agriculteurs, installés ou en devenir, ont souvent la volonté de participer aux changements de paradigme que nous connaissons. Nous devons les accompagner, car leur réussite sera la nôtre.
Tel est le sens de l’annonce, faite par le ministre la semaine dernière, du renforcement du plan de soutien à l’agriculture biologique au travers de la mobilisation de 60 millions d’euros pour résoudre les difficultés urgentes, d’une nouvelle campagne de communication et, surtout, de l’engagement de l’État de respecter, d’ici à la fin de l’année, l’objectif de 50 % de produits sous signe de qualité et durables et d’un minimum de 20 % de produits biologiques servis en restauration collective, dans chaque établissement relevant de sa responsabilité.
Sur ce dernier point, nous saluons la volonté d’exemplarité de l’État.
Pour autant, il n’est pas question de ne traiter et de n’accompagner que l’agriculture biologique. Tous les agriculteurs ont à cœur leur métier et la volonté de nourrir les Français du mieux qu’ils le peuvent.
C’est pour les soutenir que nous souhaitons les accompagner dans leur adaptation et leur anticipation des conséquences du dérèglement climatique.
Notre objectif est clair : poser des bases durables à la puissance agricole et à la souveraineté alimentaire de la France au XXIe siècle.
Tel est le sens de notre engagement aux côtés du Gouvernement depuis six ans et de notre action en faveur d’un engagement rapide des transitions nécessaires, de façon pragmatique et efficace.
Sur le fond de la proposition de loi, nous sommes convaincus que certains de ses articles pourront être intégrés au projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles.
Ainsi en est-il de l’article 9, qui permet une meilleure reconnaissance des externalités positives de l’agriculture en matière de stockage du carbone et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou encore de l’article 16, qui renforce les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) et y introduit une concertation, concourant de cette façon à la nécessaire création de consensus en matière de gestion de l’eau.
Par ailleurs, je me réjouis de la version finale de l’article 8 de la proposition de loi, qui concerne l’épandage de produits phytopharmaceutiques par des drones. En effet, je rappelle que le dispositif, proposé par Mme le rapporteur, est très bien cadré. Ainsi, seules les surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % et l’agriculture de précision peuvent profiter de cette expérimentation.
En outre, une évaluation par l’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses) est toujours prévue et peut déboucher sur l’accord d’une dérogation pour cinq ans, offrant potentiellement une décennie à la filière pour exploiter les possibilités de cette technologie en matière de réduction d’usage de produits phytosanitaires.
Nous avons trouvé un équilibre qui permet de préserver l’innovation, au service de la transition comme de la compétitivité de notre agriculture.
Cependant, des points de blocage subsistent, par exemple l’article 15. Nous considérons comme primordial d’adapter à la fois nos modes de production et l’aménagement de nos territoires aux conséquences du dérèglement climatique sur la disponibilité de l’eau.
Les ouvrages de stockage de l’eau auront une importance majeure pour remplir ces deux objectifs, tout comme la réutilisation d’eaux non conventionnelles et l’adaptation des systèmes de production.
Toutefois, chaque projet est différent et chaque territoire doit s’organiser. Ainsi, la déclaration d’intérêt général majeur, prévue à l’article 15 de la proposition de loi, nous paraît disproportionnée, de même qu’elle nous semble fermer la porte à la concertation locale.
Sur un autre plan, nous pourrions également évoquer les mesures liées au travail et à la fiscalité, qui, en dépit de leur intérêt et, pour certaines d’entre elles, de leur pertinence, relèvent des lois de finances ou d’une loi Travail.
Je pense, en particulier, à la pérennisation du dispositif des travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi (TO-DE), à laquelle nous sommes attachés, afin d’offrir aux agriculteurs une meilleure visibilité sur un outil qui fonctionne.
Mes chers collègues, si cette proposition de loi ouvre des débats, que nous aurons de nouveau lors de l’examen du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, ainsi que des projets de loi Travail et de finances, elle pose également des questions qui renvoient à notre rapport à l’agriculture et à la nature.
La compétitivité de l’agriculture n’est pas un gros mot ; la préservation de l’environnement, non plus. La souveraineté alimentaire de demain nécessitera que nous ayons pris, aujourd’hui, les décisions qui préserveront les qualités de nos sols, de nos savoir-faire et de nos produits.
Le groupe RDPI adopte une position de liberté individuelle de vote sur ce texte.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, la semaine dernière, nous avons achevé tard dans la nuit l’examen de cette proposition de loi pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France, sur laquelle nous sommes invités à nous prononcer cet après-midi.
Du rapport de l’automne dernier à aujourd’hui, le chemin parcouru est positif. Aujourd’hui, nous nous accordons sur la nécessité de ne pas céder à l’opposition stérile entre les différents modèles, à la condamnation en bloc de la stratégie de montée en gamme ou à la caricature d’une agriculture dite « productiviste », car nous en sommes loin en France.
Le défi que doit relever notre modèle agricole n’est pas anodin : il s’agit de restaurer la puissance agricole de la France que plusieurs décennies de déclin ont abîmée, alors que la planète entière subit d’ores et déjà les conséquences du dérèglement climatique. L’adaptation à ce dernier et aux évolutions de la disponibilité de la ressource en eau, le renouvellement des générations et la préservation de notre souveraineté alimentaire sont trois priorités qui se rejoignent et qui sont chacune vitales pour notre agriculture.
Le projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, autour duquel les concertations se déroulent encore, sera une nouvelle occasion d’aborder ces sujets, sur lesquels il nous faudra trouver un consensus.
De nombreux producteurs français ont fait le choix du bio ou d’une production sous signe de qualité, synonyme de valeur ajoutée, de prix plus rémunérateurs et de conquêtes de nouveaux marchés.
Les jeunes agriculteurs, installés ou en devenir, ont souvent la volonté de participer aux changements de paradigme que nous connaissons. Nous devons les accompagner, car leur réussite sera la nôtre.
Tel est le sens de l’annonce, faite par le ministre la semaine dernière, du renforcement du plan de soutien à l’agriculture biologique au travers de la mobilisation de 60 millions d’euros pour résoudre les difficultés urgentes, d’une nouvelle campagne de communication et, surtout, de l’engagement de l’État de respecter, d’ici à la fin de l’année, l’objectif de 50 % de produits sous signe de qualité et durables et d’un minimum de 20 % de produits biologiques servis en restauration collective, dans chaque établissement relevant de sa responsabilité.
Sur ce dernier point, nous saluons la volonté d’exemplarité de l’État.
Pour autant, il n’est pas question de ne traiter et de n’accompagner que l’agriculture biologique. Tous les agriculteurs ont à cœur leur métier et la volonté de nourrir les Français du mieux qu’ils le peuvent.
C’est pour les soutenir que nous souhaitons les accompagner dans leur adaptation et leur anticipation des conséquences du dérèglement climatique.
Notre objectif est clair : poser des bases durables à la puissance agricole et à la souveraineté alimentaire de la France au XXIe siècle.
Tel est le sens de notre engagement aux côtés du Gouvernement depuis six ans et de notre action en faveur d’un engagement rapide des transitions nécessaires, de façon pragmatique et efficace.
Sur le fond de la proposition de loi, nous sommes convaincus que certains de ses articles pourront être intégrés au projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles.
Ainsi en est-il de l’article 9, qui permet une meilleure reconnaissance des externalités positives de l’agriculture en matière de stockage du carbone et de réduction des émissions de gaz à effet de serre, ou encore de l’article 16, qui renforce les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) et y introduit une concertation, concourant de cette façon à la nécessaire création de consensus en matière de gestion de l’eau.
Par ailleurs, je me réjouis de la version finale de l’article 8 de la proposition de loi, qui concerne l’épandage de produits phytopharmaceutiques par des drones. En effet, je rappelle que le dispositif, proposé par Mme le rapporteur, est très bien cadré. Ainsi, seules les surfaces agricoles présentant une pente supérieure ou égale à 30 % et l’agriculture de précision peuvent profiter de cette expérimentation.
En outre, une évaluation par l’Anses est toujours prévue et peut déboucher sur l’accord d’une dérogation pour cinq ans, offrant potentiellement une décennie à la filière pour exploiter les possibilités de cette technologie en matière de réduction d’usage de produits phytosanitaires.
Nous avons trouvé un équilibre qui permet de préserver l’innovation, au service de la transition comme de la compétitivité de notre agriculture.
Cependant, des points de blocage subsistent, par exemple l’article 15. Nous considérons comme primordial d’adapter à la fois nos modes de production et l’aménagement de nos territoires aux conséquences du dérèglement climatique sur la disponibilité de l’eau.
Les ouvrages de stockage de l’eau auront une importance majeure pour remplir ces deux objectifs, tout comme la réutilisation d’eaux non conventionnelles et l’adaptation des systèmes de production.
Toutefois, chaque projet est différent et chaque territoire doit s’organiser. Ainsi, la déclaration d’intérêt général majeur, prévue à l’article 15 de la proposition de loi, nous paraît disproportionnée, de même qu’elle nous semble fermer la porte à la concertation locale.
Sur un autre plan, nous pourrions également évoquer les mesures liées au travail et à la fiscalité, qui, en dépit de leur intérêt et, pour certaines d’entre elles, de leur pertinence, relèvent des lois de finances ou d’une loi Travail.
Je pense, en particulier, à la pérennisation du dispositif des travailleurs occasionnels-demandeurs d’emploi (TO-DE), à laquelle nous sommes attachés, afin d’offrir aux agriculteurs une meilleure visibilité sur un outil qui fonctionne.
Mes chers collègues, si cette proposition de loi ouvre des débats, que nous aurons de nouveau lors de l’examen du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles, ainsi que des projets de loi Travail et de finances, elle pose également des questions qui renvoient à notre rapport à l’agriculture et à la nature.
La compétitivité de l’agriculture n’est pas un gros mot ; la préservation de l’environnement, non plus. La souveraineté alimentaire de demain nécessitera que nous ayons pris, aujourd’hui, les décisions qui préserveront les qualités de nos sols, de nos savoir-faire et de nos produits.
Le groupe RDPI adopte une position de liberté individuelle de vote sur ce texte.
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI.
Par conséquent, il est totalement anormal qu'un texte, ayant trait à notre modèle agricole au sens large, ne traite pas de toute une part de notre agriculture et que les notions d'agriculture biologique ou d'agroécologie ne soient citées à aucune reprise.
Les maigres ajouts que nous avons obtenus, que ce soit celui de la durabilité au sein des missions du haut-commissaire à la compétitivité ou celui de la demande d'un rapport sur les paiements pour services environnementaux (PSE), sont des premiers pas, mais ils ne contrebalancent pas la teneur générale de ce texte.
Une nouvelle fois, nous rappelons notre opposition aux mesures fiscales proposées, qui ne bénéficieront pas aux agriculteurs les plus en difficulté ni à ceux qui débutent dans le métier.
Si nous souhaitons favoriser l'installation d'agriculteurs et, ainsi, permettre une inversion de la courbe du nombre d'exploitations, alors réfléchissons davantage au renforcement des mesures ciblées et limitées dans le temps, comme la dotation jeunes agriculteurs (DJA), plutôt qu'à rehausser des plafonds en faveur d'agriculteurs ayant déjà la chance de mettre des sommes importantes de côté.
Mme la présidente. La parole est à M. Jean-Claude Tissot, pour le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les huit heures de débat que nous avons consacrées à cette proposition de loi auront clarifié les positions de la droite sénatoriale et de l'ensemble des groupes de gauche, comme leurs divergences.
S'agissant d'enjeux aussi importants que l'agriculture et l'alimentation, il est toutefois regrettable d'avoir dû débattre pendant un temps parlementaire si court, sans disposer d'étude d'impact sur des dispositions majeures et, surtout, avec de nombreuses imprécisions de définition de termes centraux de cette proposition de loi.
Dès la discussion générale, nous avions parfaitement compris la stratégie de la majorité sénatoriale, qui, cherchant à prendre ses marques en vue de l'examen du projet de loi d'orientation et d'avenir agricoles (LOA), a souhaité imposer un certain nombre de concepts dans le débat sur notre politique agricole.
À ce titre, il est malheureux que la grande majorité des dispositions de cette proposition de loi ne soient que des retours en arrière sur des législations ou des rapports adoptés dans cet hémicycle.
Face à cela, monsieur le ministre, vous avez pris le parti, dans un premier temps, de défendre cette proposition de loi de manière vigoureuse lors de la discussion générale, avant d'adopter une approche bien plus modérée au cours des débats.
J'en veux pour preuve les avis favorables que vous avez émis sur de nombreux amendements de suppression défendus par mon groupe et ayant trait aux articles 6, 7, 11, 13, 15, 17 et 22 de cette proposition de loi. Nous saurons nous souvenir de ces positions lors de l'examen du projet de LOA.
Toutefois, lors des débats, monsieur le ministre, vous avez appelé, à de nombreuses reprises, à ne pas tomber dans la caricature au sujet de cette proposition de loi, en vous tournant principalement vers la gauche de cet hémicycle.
La lecture des comptes rendus de séance prouve que les interventions caricaturales ou simplistes ne se trouvaient pourtant pas de ce côté de l'hémicycle... Les nombreuses interruptions lors de la présentation de la motion tendant à opposer la question préalable en sont de bons exemples.
Mes chers collègues, présenter et défendre une autre vision de l'agriculture ne relève pas d'une caricature ; il s'agit simplement d'un avis émis dans le cadre d'un débat politique, auquel nous contribuons par nos approches techniques et concrètes, qui s'appuient sur nos compétences et nos expériences.
Pour nous non plus, le mot compétitivité n'est pas un gros mot. Nous l'avons clairement mis en avant en démontrant que les exploitations agroécologiques peuvent être parfaitement compétitives et rentables
Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST
Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
En ce qui concerne la question des aides publiques, il est dommage, monsieur le ministre, cher collègue Duplomb, que nous n'ayons pas eu davantage de débats et d'échanges, dans le cadre du Parlement, sur le plan stratégique national (PSN) de la politique agricole commune (PAC), qui vient d'entrer en vigueur.
Sortir d'une réflexion uniquement centrée sur des aides à l'hectare pourrait être un axe d'évolution intéressant.
Ensuite, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous nous sommes opposés avec vigueur à l'ensemble des articles visant à réécrire allégrement le droit du travail.
Sans aucune caricature, nous avons parfaitement conscience des besoins spécifiques en main-d'œuvre d'un secteur comme l'agriculture, que ce soit en termes de temporalité ou de compétences. C'est la raison pour laquelle nous avons soutenu, une nouvelle fois, la pérennisation du dispositif TO-DE et proposé son élargissement aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf).
Toutefois, l'ajout de la notion de « secteurs prioritaires en tension » dans les missions de Pôle emploi, la généralisation du cumul RSA-emploi ou encore la création d'une exonération au sein du dispositif de bonus-malus portant sur les contrats courts nous paraissent aller complètement à contresens des attentes des agriculteurs et des salariés du secteur.
Les agriculteurs souhaitent disposer d'une main-d'œuvre formée et disponible dans les territoires. Pour cette raison, devrait être au cœur de nos débats la question de la formation agricole, et non pas celle d'une nouvelle précarisation du marché du travail, où les travailleurs seraient la variable d'ajustement d'un secteur intensif.
Sur ce point, l'absence d'opposition du Gouvernement à ces articles – ce dernier s'est rangé derrière un avis de sagesse – est particulièrement inquiétante. Espérons que le projet de loi Travail, tant annoncé, ne soit pas de cette teneur.
À ce titre, nous regrettons profondément, monsieur le ministre, la publication en catimini
Par conséquent, il est totalement anormal qu'un texte, ayant trait à notre modèle agricole au sens large, ne traite pas de toute une part de notre agriculture et que les notions d'agriculture biologique ou d'agroécologie ne soient citées à aucune reprise.
Les maigres ajouts que nous avons obtenus, que ce soit celui de la durabilité au sein des missions du haut-commissaire à la compétitivité ou celui de la demande d'un rapport sur les paiements pour services environnementaux (PSE), sont des premiers pas, mais ils ne contrebalancent pas la teneur générale de ce texte.
Une nouvelle fois, nous rappelons notre opposition aux mesures fiscales proposées, qui ne bénéficieront pas aux agriculteurs les plus en difficulté ni à ceux qui commencent dans le métier.
Si nous souhaitons favoriser l'installation d'agriculteurs et, ainsi, permettre une inversion de la courbe du nombre d'exploitations, alors réfléchissons davantage au renforcement des mesures ciblées et limitées dans le temps, comme la dotation jeunes agriculteurs (DJA), plutôt qu'à rehausser des plafonds en faveur d'agriculteurs ayant déjà la chance de mettre des sommes importantes de côté.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, les huit heures de débat que nous avons consacrées à cette proposition de loi auront clarifié les positions de la droite sénatoriale et de l’ensemble des groupes de gauche, comme leurs divergences.
S’agissant d’enjeux aussi importants que l’agriculture et l’alimentation, il est toutefois regrettable d’avoir dû débattre pendant un temps parlementaire si court, sans disposer d’étude d’impact sur des dispositions majeures et, surtout, avec de nombreuses imprécisions de définition de termes centraux de cette proposition de loi.
Dès la discussion générale, nous avions parfaitement compris la stratégie de la majorité sénatoriale, qui, cherchant à prendre ses marques en vue de l’examen du projet de loi d’orientation et d’avenir agricoles (LOA), a souhaité imposer un certain nombre de concepts dans le débat sur notre politique agricole.
À ce titre, il est malheureux que la grande majorité des dispositions de cette proposition de loi ne soient que des retours en arrière sur des législations ou des rapports adoptés dans cet hémicycle.
Face à cela, monsieur le ministre, vous avez pris le parti, dans un premier temps, de défendre cette proposition de loi de manière vigoureuse lors de la discussion générale, avant d’adopter une approche bien plus modérée au cours des débats.
J’en veux pour preuve les avis favorables que vous avez émis sur de nombreux amendements de suppression défendus par mon groupe et ayant trait aux articles 6, 7, 11, 13, 15, 17 et 22 de cette proposition de loi. Nous saurons nous souvenir de ces positions lors de l’examen du projet de LOA.
Toutefois, lors des débats, monsieur le ministre, vous avez appelé, à de nombreuses reprises, à ne pas tomber dans la caricature au sujet de cette proposition de loi, en vous tournant principalement vers la gauche de cet hémicycle.
La lecture des comptes rendus de séance prouve que les interventions caricaturales ou simplistes ne se trouvaient pourtant pas de ce côté de l’hémicycle… Les nombreuses interruptions lors de la présentation de la motion tendant à opposer la question préalable en sont de bons exemples.
Mes chers collègues, présenter et défendre une autre vision de l’agriculture ne relève pas d’une caricature ; il s’agit simplement d’un avis émis dans le cadre d’un débat politique, auquel nous contribuons par nos approches techniques et concrètes, qui s’appuient sur nos compétences et nos expériences.
Pour nous non plus, le mot compétitivité n’est pas un gros mot. Nous l’avons clairement mis en avant en démontrant que les exploitations agroécologiques peuvent être parfaitement compétitives et rentables
M. le ministre manifeste son étonnement.
Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST
Applaudissements sur les travées des groupes SER et GEST .
, le 13 mai, d'un décret, redéfinissant le statut d'agriculteur actif. C'est une porte ouverte, à mon sens comme à notre sens, à la financiarisation sans limites de l'agriculture et à une prise en main de nos exploitations par des investisseurs extérieurs, aux intérêts bien éloignés de ceux des paysans.
En ce qui concerne la question des aides publiques, il est dommage, monsieur le ministre, cher collègue Duplomb, que nous n'ayons pas eu davantage de débats et d'échanges, dans le cadre du Parlement, sur le plan stratégique national (PSN) de la politique agricole commune (PAC), qui vient d'entrer en vigueur.
Sortir d'une réflexion uniquement centrée sur des aides à l'hectare pourrait être un axe d'évolution intéressant.
Ensuite, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous nous sommes opposés avec vigueur à l'ensemble des articles visant à réécrire allégrement le droit du travail.
Sans aucune caricature, nous avons parfaitement conscience des besoins spécifiques en main-d'œuvre d'un secteur comme l'agriculture, que ce soit en termes de temporalité ou de compétences. C'est la raison pour laquelle nous avons soutenu, une nouvelle fois, la pérennisation du dispositif TO-DE et proposé son élargissement aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf).
Toutefois, l'ajout de la notion de « secteurs prioritaires en tension » dans les missions de Pôle emploi, la généralisation du cumul RSA-emploi ou encore la création d'une exonération au sein du dispositif de bonus-malus portant sur les contrats courts nous paraissent aller complètement à contresens des attentes des agriculteurs et des salariés du secteur.
Les agriculteurs souhaitent disposer d'une main-d'œuvre formée et disponible dans les territoires. Pour cette raison, devrait être au cœur de nos débats la question de la formation agricole, et non pas celle d'une nouvelle précarisation du marché du travail, où les travailleurs seraient la variable d'ajustement d'un secteur intensif.
Sur ce point, l'absence d'opposition du Gouvernement à ces articles – il s'est rangé derrière un avis de sagesse – est particulièrement inquiétante. Espérons que le projet de loi Travail, tant annoncé, ne soit pas de cette teneur.
À ce titre, nous regrettons profondément, monsieur le ministre, la publication en catimini
Par conséquent, il est totalement anormal qu’un texte, ayant trait à notre modèle agricole au sens large, ne traite pas de toute une part de notre agriculture et que les notions d’agriculture biologique ou d’agroécologie ne soient citées à aucune reprise.
Les maigres ajouts que nous avons obtenus, que ce soit celui de la durabilité au sein des missions du haut-commissaire à la compétitivité ou celui de la demande d’un rapport sur les paiements pour services environnementaux (PSE), sont des premiers pas, mais ils ne contrebalancent pas la teneur générale de ce texte.
Une nouvelle fois, nous rappelons notre opposition aux mesures fiscales proposées, qui ne bénéficieront pas aux agriculteurs les plus en difficulté ni à ceux qui commencent dans le métier.
Si nous souhaitons favoriser l’installation d’agriculteurs et, ainsi, permettre une inversion de la courbe du nombre d’exploitations, alors réfléchissons davantage au renforcement des mesures ciblées et limitées dans le temps, comme la dotation jeunes agriculteurs (DJA), plutôt qu’à rehausser des plafonds en faveur d’agriculteurs ayant déjà la chance de mettre des sommes importantes de côté.
Par conséquent, il est totalement anormal qu’un texte, ayant trait à notre modèle agricole au sens large, ne traite pas de toute une part de notre agriculture et que les notions d’agriculture biologique ou d’agroécologie ne soient citées à aucune reprise.
Les maigres ajouts que nous avons obtenus, que ce soit celui de la durabilité au sein des missions du haut-commissaire à la compétitivité ou celui de la demande d’un rapport sur les paiements pour services environnementaux (PSE), sont des premiers pas, mais ils ne contrebalancent pas la teneur générale de ce texte.
Une nouvelle fois, nous rappelons notre opposition aux mesures fiscales proposées, dont ne bénéficieront pas les agriculteurs le plus en difficulté ni ceux qui commencent dans le métier.
Si nous souhaitons favoriser l’installation d’agriculteurs et, ainsi, permettre une inversion de la courbe du nombre d’exploitations, alors réfléchissons davantage au renforcement des mesures ciblées et limitées dans le temps, comme la dotation jeunes agriculteurs (DJA), plutôt qu’à rehausser des plafonds en faveur d’agriculteurs ayant déjà la chance de mettre des sommes importantes de côté.
M. le ministre proteste.
M. le ministre manifeste son étonnement.
Enfin – nous le regrettons très sincèrement –, cette proposition de loi compte de nombreuses dispositions rétrogrades pour la préservation de notre environnement, mais aussi pour la santé humaine, celle des producteurs et des consommateurs.
Nous aurions pu espérer que l'examen du texte en commission, puis en séance publique, permette de revenir sur ces dispositions ou, à tout le moins, de les adoucir. Ce n'est malheureusement pas le cas.
Au contraire, à propos de l'article 8, la pérennisation de l'usage de drones en agriculture…
, le 13 mai dernier, d'un décret redéfinissant le statut d'agriculteur actif. C'est une porte ouverte, à mon sens comme à notre sens, à la financiarisation sans limites de l'agriculture et à une prise en main de nos exploitations par des investisseurs extérieurs, aux intérêts bien éloignés de ceux des paysans.
En ce qui concerne la question des aides publiques, il est dommage, monsieur le ministre, cher collègue Duplomb, que nous n’ayons pas eu davantage de débats et d’échanges, dans le cadre du Parlement, sur le plan stratégique national (PSN) de la politique agricole commune (PAC), qui vient d’entrer en vigueur.
Sortir d’une réflexion uniquement centrée sur des aides à l’hectare pourrait être un axe d’évolution intéressant.
Ensuite, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous nous sommes opposés avec vigueur à l’ensemble des articles visant à réécrire allégrement le droit du travail.
Sans aucune caricature, nous avons parfaitement conscience des besoins spécifiques en main-d’œuvre d’un secteur comme l’agriculture, que ce soit en termes de temporalité ou de compétences. C’est la raison pour laquelle nous avons soutenu, une nouvelle fois, la pérennisation du dispositif TO-DE et proposé son élargissement aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf).
Toutefois, l’ajout de la notion de « secteurs prioritaires en tension » dans les missions de Pôle emploi, la généralisation du cumul RSA-emploi ou encore la création d’une exonération au sein du dispositif de bonus-malus portant sur les contrats courts nous paraissent aller complètement à contresens des attentes des agriculteurs et des salariés du secteur.
Les agriculteurs souhaitent disposer d’une main-d’œuvre formée et disponible dans les territoires. Pour cette raison, devrait être au cœur de nos débats la question de la formation agricole, et non pas celle d’une nouvelle précarisation du marché du travail, où les travailleurs seraient la variable d’ajustement d’un secteur intensif.
Sur ce point, l’absence d’opposition du Gouvernement à ces articles – il s’est rangé derrière un avis de sagesse – est particulièrement inquiétante. Espérons que le projet de loi Travail, tant annoncé, ne soit pas de cette teneur.
À ce titre, nous regrettons profondément, monsieur le ministre, la publication en catimini
En ce qui concerne la question des aides publiques, il est dommage, monsieur le ministre, cher collègue Duplomb, que nous n’ayons pas eu davantage de débats et d’échanges, dans le cadre du Parlement, sur le plan stratégique national (PSN) de la politique agricole commune, qui vient d’entrer en vigueur.
Sortir d’une réflexion uniquement centrée sur des aides à l’hectare pourrait être un axe d’évolution intéressant.
Ensuite, au sein du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain, nous nous sommes opposés avec vigueur à l’ensemble des articles visant à réécrire allégrement le droit du travail.
Sans aucune caricature, nous avons parfaitement conscience des besoins spécifiques en main-d’œuvre d’un secteur comme l’agriculture, que ce soit en termes de temporalité ou de compétences. C’est la raison pour laquelle nous avons soutenu, une nouvelle fois, la pérennisation du dispositif TO-DE et proposé son élargissement aux entreprises de travaux et services agricoles, ruraux et forestiers (Etarf).
Toutefois, l’ajout de la notion de « secteurs prioritaires en tension » dans les missions de Pôle emploi, la généralisation du cumul RSA-emploi ou encore la création d’une exonération au sein du dispositif de bonus-malus portant sur les contrats courts nous paraissent aller complètement à contresens des attentes des agriculteurs et des salariés du secteur.
Les agriculteurs souhaitent disposer d’une main-d’œuvre formée et disponible dans les territoires. Pour cette raison, devrait être au cœur de nos débats la question de la formation agricole, et non pas celle d’une nouvelle précarisation du marché du travail, où les travailleurs seraient la variable d’ajustement d’un secteur intensif.
Sur ce point, l’absence d’opposition du Gouvernement à ces articles – il s’est rangé derrière un avis de sagesse – est particulièrement inquiétante. Espérons que le projet de loi Travail, tant annoncé, ne soit pas de cette teneur.
À ce titre, nous regrettons profondément, monsieur le ministre, la publication en catimini
M. le ministre proteste.
M. le ministre manifeste son étonnement.
… à l'issue de l'expérimentation prévue a été adoptée.
Sur ces sujets, monsieur le ministre, vous avez adopté des positions différentes, en soutenant l'article 8, tout en vous opposant aux articles 13 et 18.
Alors que le Gouvernement commence à réfléchir à des solutions pour adapter la France à une température de +4°C en 2100, il serait peut-être bon de tenir un discours plus cohérent sur un secteur qui représente 21 % des émissions de gaz à effet de serre, mais qui est aussi la première victime du changement climatique.
En ce qui concerne la question de l'eau, comme je l'avais indiqué lors de la discussion générale, nous considérons que traiter ce sujet de cette manière revient simplement à jeter de l'huile sur le feu, sans apporter de solution concrète au problème du stockage.
Déclarer d'intérêt général majeur un projet de stockage d'eau, par principe, et, parallèlement, réduire les contentieux ne font que prouver votre vision idéologique de l'eau, que vous souhaitez privatiser au profit de quelques-uns.
Enfin – nous le regrettons très sincèrement –, cette proposition de loi compte de nombreuses dispositions rétrogrades pour la préservation de notre environnement, mais aussi pour la santé humaine, celle des producteurs et des consommateurs.
Nous aurions pu espérer que l'examen du texte en commission, puis en séance publique, permette de revenir sur ces dispositions ou, à tout le moins, de les adoucir. Ce n'est malheureusement pas le cas.
Au contraire, à propos de l'article 8, la pérennisation de l'usage de drones en agriculture…
, le 13 mai dernier, d’un décret redéfinissant le statut d’agriculteur actif. C’est une porte ouverte, à mon sens comme à notre sens, à la financiarisation sans limites de l’agriculture et à une prise en main de nos exploitations par des investisseurs extérieurs, aux intérêts bien éloignés de ceux des paysans.
M. le ministre proteste.
Il s'agit, pourtant, d'un bien commun que nous devrions défendre collectivement. Notre souveraineté alimentaire passera aussi par le partage de l'eau.
En cohérence avec notre position pendant les débats, mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et moi-même nous opposerons à cette proposition de loi.
Nous aussi, nous souhaitons aider les 16 % de Français qui déclarent ne pas manger à leur faim et répondre à leurs attentes.
Toutefois, nous ne pouvons pas nous résoudre à leur fournir des aliments de faible qualité, qui ne sont que des bombes à retardement sanitaire, produits par des agriculteurs étranglés par le marché.
… à l'issue de l'expérimentation prévue a été adoptée.
Sur ces sujets, monsieur le ministre, vous avez adopté des positions différentes, en soutenant l'article 8 tout en vous opposant aux articles 13 et 18.
Alors que le Gouvernement commence à réfléchir à des solutions pour adapter la France à une température de +4 degrés en 2100, il serait peut-être bon de tenir un discours plus cohérent sur un secteur qui représente 21 % des émissions de gaz à effet de serre, mais qui est aussi la première victime du changement climatique.
En ce qui concerne la question de l'eau, comme je l'avais indiqué lors de la discussion générale, nous considérons que traiter ce sujet de cette manière revient simplement à jeter de l'huile sur le feu, sans apporter de solution concrète au problème du stockage.
Déclarer d'intérêt général majeur un projet de stockage d'eau, par principe, et parallèlement réduire les contentieux ne fait que prouver votre vision idéologique de l'eau, que vous souhaitez privatiser au profit de quelques-uns.
Enfin – nous le regrettons très sincèrement –, cette proposition de loi compte de nombreuses dispositions rétrogrades pour la préservation de notre environnement, mais aussi pour la santé humaine, celle des producteurs et des consommateurs.
Nous aurions pu espérer que l’examen du texte en commission, puis en séance publique, permette de revenir sur ces dispositions ou, à tout le moins, de les adoucir. Ce n’est malheureusement pas le cas.
Au contraire, à propos de l’article 8, la pérennisation de l’usage de drones en agriculture…
M. Laurent Duplomb s'exclame.
Au contraire, nous prônons une restructuration de notre modèle agricole, grâce à une véritable répartition de la valeur et à un accompagnement des pouvoirs publics à la hauteur des transitions nécessaires.
La compétitivité de l'agriculture française passera par cela. §
Il s'agit, pourtant, d'un bien commun que nous devrions défendre collectivement. Notre souveraineté alimentaire passera aussi par le partage de l'eau.
En cohérence avec notre position pendant les débats, mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et moi-même nous opposerons à cette proposition de loi.
Nous aussi, nous souhaitons aider les 16 % de Français qui déclarent ne pas manger à leur faim et répondre à leurs attentes. Toutefois, nous ne pouvons nous résoudre à leur fournir des aliments de faible qualité, qui ne sont que des bombes à retardement sanitaire, produits par des agriculteurs étranglés par le marché.
… à l’issue de l’expérimentation prévue a été adoptée.
Sur ces sujets, monsieur le ministre, vous avez adopté des positions différentes, en soutenant l’article 8 tout en vous opposant aux articles 13 et 18.
Alors que le Gouvernement commence à réfléchir à des solutions pour adapter la France à une température de +4 degrés en 2100, il serait peut-être bon de tenir un discours plus cohérent sur un secteur qui représente 21 % des émissions de gaz à effet de serre, mais qui est aussi la première victime du changement climatique.
En ce qui concerne la question de l’eau, comme je l’avais indiqué lors de la discussion générale, nous considérons que traiter ce sujet de cette manière revient simplement à jeter de l’huile sur le feu, sans apporter de solution concrète au problème du stockage.
Déclarer d’intérêt général majeur un projet de stockage d’eau, par principe, et parallèlement réduire les contentieux ne fait que prouver votre vision idéologique de l’eau, que vous souhaitez privatiser au profit de quelques-uns.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d'abord, je voudrais remercier les auteurs de cette proposition de loi.
M. Laurent Duplomb s'exclame.
Au contraire, nous prônons une restructuration de notre modèle agricole, grâce à une véritable répartition de la valeur et à un accompagnement des pouvoirs publics à la hauteur des transitions nécessaires.
La compétitivité de l'agriculture française passera par cela. §
Il s’agit, pourtant, d’un bien commun que nous devrions défendre collectivement. Notre souveraineté alimentaire passera aussi par le partage de l’eau.
En cohérence avec notre position pendant les débats, mes collègues du groupe Socialiste, Écologiste et Républicain et moi-même nous opposerons à cette proposition de loi.
Nous aussi, nous souhaitons aider les 16 % de Français qui déclarent ne pas manger à leur faim et répondre à leurs attentes. Toutefois, nous ne pouvons nous résoudre à leur fournir des aliments de faible qualité, qui ne sont que des bombes à retardement sanitaire, produits par des agriculteurs étranglés par le marché.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Applaudissements sur des travées du groupe CRCE. – M. Husse in Bourgi applaudit également.
Au contraire, nous prônons une restructuration de notre modèle agricole, grâce à une véritable répartition de la valeur et à un accompagnement des pouvoirs publics à la hauteur des transitions nécessaires.
La compétitivité de l’agriculture française passera par cela.
… pour ne pas dire aucune des propositions formulées, ni le projet de société défendu, ce texte a au moins une vertu : offrir l'occasion de parler de cette France rurale, agricole, celle des paysannes et des paysans, si souvent ignorés, méprisés, voire conspués, …
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d'abord, je voudrais remercier les auteurs de cette proposition de loi.
Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Mme la présidente. La parole est à M. Fabien Gay, pour le groupe communiste républicain citoyen et écologiste.
… et qui se sentent légitimement incompris.
Alors que nos paysans remplissent chaque jour une mission d'intérêt général – nous nourrir –, qu'ils sont en première ligne face au changement climatique et qu'ils sont les seuls ouvriers et artisans du vivant, ils ne décident pourtant pas des prix de vente et sont obligés de survivre pour nous nourrir.
Ils sont souvent, pour ne pas dire toujours, les premiers sacrifiés par les gouvernements successifs dans les traités de libre-échange, alors qu'un débat sur le droit à l'alimentation de qualité pour toutes et tous est, au contraire, nécessaire, au moment où une alimentation à deux vitesses existe déjà.
Non, il ne faut pas opposer agriculture conventionnelle et biologique.
La première, qui reste d'une grande qualité et qui nourrit la majorité de la Nation, est pourtant sans cesse stigmatisée. Oui, nos paysans sont soumis à des injonctions contradictoires : produire toujours plus, toujours mieux, toujours moins cher et toujours en concurrence avec des pays qui ne respectent pas nos normes sociales et environnementales.
C'est donc tout le logiciel qu'il faut changer, car on ne soigne pas le libéralisme par l'ultralibéralisme. Au contraire, nous devons accompagner la transition des agriculteurs, pas contre eux, mais avec eux, et les aider à sortir progressivement de l'agrobusiness recourant aux produits phytosanitaires, qui ont d'abord des effets néfastes sur eux et sur elles, puis sur les consommateurs.
À l'inverse, l'agriculture biologique doit être non plus moquée ou raillée, mais aidée et encouragée, pour qu'elle puisse être accessible à toutes et à tous et devienne, demain, la norme.
Oui, il faudra s'attaquer enfin à la puissance des centrales d'achat et des agroindustriels réalisant des marges, pour rémunérer les agriculteurs à des prix dépassant leurs coûts de production. De l'autre côté de la chaîne, il faudra augmenter les salaires des consommateurs, pour qu'ils puissent acheter des produits de meilleure qualité.
Ces grands objectifs, mes chers collègues, nous ne pensons pas les atteindre avec des recettes, dont l'inefficacité économique et sociale, comme la nocivité écologique, sont prouvées.
Non, continuer à appauvrir les sols en utilisant des insecticides et des pesticides n'est pas une vision de long terme.
Applaudissements sur des travées du groupe CRCE. – M. Hussein Bourgi applaudit également.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, tout d’abord, je voudrais remercier les auteurs de cette proposition de loi.
Sur ce point, l'usage de drones, pour aller plus vite, plus loin et plus fort en matière d'épandage, ne règlera pas quoi que ce soit.
Non, rejeter l'avis de l'Anses n'est pas sérieux, car si cette agence avait existé voilà quarante ans, nous aurions certainement interdit bien avant le chlordécone aux Antilles.
… pour ne pas dire aucune des propositions formulées, ni le projet de société défendu, ce texte a au moins une vertu : offrir l'occasion de parler de cette France rurale, agricole, celle des paysannes et des paysans, si souvent ignorés, méprisés, voire conspués, …
M. Victorin Lurel approuve.
Non, conditionner le versement du RSA à 15 heures ou à 20 heures de travail agricole ou obliger un travailleur privé d'emploi à accepter un travail saisonnier ne peut être l'horizon de la future entité France Travail.
… et qui se sentent légitimement incompris.
Alors que nos paysans remplissent chaque jour une mission d'intérêt général – nous nourrir –, qu'ils sont en première ligne face au changement climatique et qu'ils sont les seuls ouvriers et artisans du vivant, ils ne décident pourtant pas des prix de vente et sont obligés de survivre pour nous nourrir.
Ils sont souvent, pour ne pas dire toujours, les premiers sacrifiés par les gouvernements successifs dans les traités de libre-échange, alors qu'un débat sur le droit à l'alimentation de qualité pour toutes et tous est, au contraire, nécessaire au moment où une alimentation à deux vitesses existe déjà.
Non, il ne faut pas opposer agriculture conventionnelle et biologique.
La première, qui reste d'une grande qualité et qui nourrit la majorité de la Nation, est pourtant sans cesse stigmatisée.
Mme Laurence Cohen applaudit.
… pour ne pas dire aucune des propositions formulées, ni le projet de société défendu, ce texte a au moins une vertu : offrir l’occasion de parler de cette France rurale, agricole, celle des paysannes et des paysans, si souvent ignorés, méprisés, voire conspués, …
Pensez-vous véritablement résoudre la question du départ à le retraite de la moitié des exploitants agricoles d'ici à dix ans grâce à ces solutions d'un autre temps, en faisant l'économie d'une réflexion sur les conditions de travail, les salaires, le sens du travail, la formation dans les lycées agricoles, …
Oui, nos paysans sont soumis à des injonctions contradictoires : produire toujours plus, toujours mieux, toujours moins cher et toujours en concurrence avec des pays qui ne respectent pas nos normes sociales et environnementales.
C'est donc tout le logiciel qu'il faut changer, car on ne soigne pas le libéralisme par l'ultralibéralisme. Au contraire, nous devons accompagner la transition des agriculteurs, pas contre eux, mais avec eux, et les aider à sortir progressivement de l'agrobusiness recourant aux produits phytosanitaires, qui ont d'abord des effets néfastes sur eux et sur elles, puis sur les consommateurs.
À l'inverse, l'agriculture biologique doit être non plus moquée ou raillée, mais aidée et encouragée, pour qu'elle puisse être accessible à toutes et à tous et devienne, demain, la norme.
Oui, il faudra s'attaquer enfin à la puissance des centrales d'achat et des agroindustriels réalisant des marges, pour rémunérer les agriculteurs à des prix dépassant leurs coûts de production. De l'autre côté de la chaîne, il faudra augmenter les salaires des consommateurs, pour qu'ils puissent acheter des produits de meilleure qualité.
Ces grands objectifs, mes chers collègues, nous ne pensons pas les atteindre avec des recettes dont l'inefficacité économique et sociale, tout comme la nocivité écologique, est prouvée.
Non, continuer à appauvrir les sols en utilisant des insecticides et des pesticides n'est pas une vision de long terme.
… et qui se sentent légitimement incompris.
Alors que nos paysans remplissent chaque jour une mission d’intérêt général – nous nourrir –, qu’ils sont en première ligne face au changement climatique et qu’ils sont les seuls ouvriers et artisans du vivant, ils ne décident pourtant pas des prix de vente et sont obligés de survivre pour nous nourrir.
Ils sont souvent, pour ne pas dire toujours, les premiers sacrifiés par les gouvernements successifs dans les traités de libre-échange, alors qu’un débat sur le droit à l’alimentation de qualité pour toutes et tous est, au contraire, nécessaire au moment où une alimentation à deux vitesses existe déjà.
Non, il ne faut pas opposer agriculture conventionnelle et biologique.
La première, qui reste d’une grande qualité et qui nourrit la majorité de la Nation, est pourtant sans cesse stigmatisée.
… les aides à apporter à l'installation de nouveaux agriculteurs, ou encore sur la lutte contre l'accaparement des terres agricoles par des financiers.
Enfin, au moment où, déjà au mois de mai, quatre villages sont privés d'eau – l'an dernier, ils étaient cent villages à l'être au cœur l'été – et alors que nous avons connu des mégafeux l'été dernier, non, ce n'est pas sérieux d'autoriser toutes les bassines, qu'elles soient méga, de retenue ou de pompage.
Sur ce point, l'usage de drones, pour aller plus vite, plus loin et plus fort en matière d'épandage, ne réglera rien.
Non, rejeter l'avis de l'Anses n'est pas sérieux, car si cette agence avait existé voilà quarante ans, nous aurions certainement interdit bien avant le chlordécone aux Antilles.
M. Laurent Duplomb proteste.
M. Victorin Lurel approuve.
Oui, nos paysans sont soumis à des injonctions contradictoires : produire toujours plus, toujours mieux, toujours moins cher et toujours en concurrence avec des pays qui ne respectent pas nos normes sociales et environnementales.
C’est donc tout le logiciel qu’il faut changer, car on ne soigne pas le libéralisme par l’ultralibéralisme. Au contraire, nous devons accompagner la transition des agriculteurs, pas contre eux, mais avec eux, et les aider à sortir progressivement de l’agrobusiness recourant aux produits phytosanitaires, qui ont d’abord des effets néfastes sur eux et sur elles, puis sur les consommateurs.
À l’inverse, l’agriculture biologique doit être non plus moquée ou raillée, mais aidée et encouragée, pour qu’elle puisse être accessible à toutes et à tous et devienne, demain, la norme.
Oui, il faudra s’attaquer enfin à la puissance des centrales d’achat et des agroindustriels réalisant des marges, pour rémunérer les agriculteurs à des prix dépassant leurs coûts de production. De l’autre côté de la chaîne, il faudra augmenter les salaires des consommateurs, pour qu’ils puissent acheter des produits de meilleure qualité.
Ces grands objectifs, mes chers collègues, nous ne pensons pas les atteindre avec des recettes dont l’inefficacité économique et sociale, tout comme la nocivité écologique, est prouvée.
Non, continuer à appauvrir les sols en utilisant des insecticides et des pesticides n’est pas une vision de long terme.
Oui, nos paysans sont soumis à des injonctions contradictoires : produire toujours plus, toujours mieux, toujours moins cher et toujours en concurrence avec des pays qui ne respectent pas nos normes sociales et environnementales.
C’est donc tout le logiciel qu’il faut changer, car on ne soigne pas le libéralisme par l’ultralibéralisme. Au contraire, nous devons accompagner la transition des agriculteurs, pas contre eux, mais avec eux, et les aider à sortir progressivement de l’agrobusiness recourant aux produits phytosanitaires, qui ont d’abord des effets néfastes sur eux et sur elles, puis sur les consommateurs.
À l’inverse, l’agriculture biologique doit être non plus moquée ou raillée, mais aidée et encouragée, pour qu’elle puisse être accessible à toutes et à tous et devienne, demain, la norme.
Oui, il faudra s’attaquer enfin à la puissance des centrales d’achat et des agro-industriels réalisant des marges, pour rémunérer les agriculteurs à des prix dépassant leurs coûts de production. De l’autre côté de la chaîne, il faudra augmenter les salaires des consommateurs, pour qu’ils puissent acheter des produits de meilleure qualité.
Ces grands objectifs, mes chers collègues, nous ne pensons pas les atteindre avec des recettes dont l’inefficacité économique et sociale, tout comme la nocivité écologique, est prouvée.
Non, continuer à appauvrir les sols en utilisant des insecticides et des pesticides n’est pas une vision de long terme.
Oui, l'eau doit être reconnue comme un bien commun et sortie du secteur marchand.
Non, conditionner le versement du RSA à 15 heures ou à 20 heures de travail agricole ou obliger un travailleur privé d'emploi à accepter un travail saisonnier ne peut être l'horizon de la future entité France Travail.
Mme Émilienne Poumirol applaudit.
Mme Laurence Cohen applaudit.
Sur ce point, l’usage de drones, pour aller plus vite, plus loin et plus fort en matière d’épandage, ne réglera rien.
Non, rejeter l’avis de l’Anses n’est pas sérieux, car si cette agence avait existé voilà quarante ans, nous aurions certainement interdit bien avant le chlordécone aux Antilles.
Enfin, nous devrions nous rassembler pour refuser les accords de libre-échange, non pas parce que nous ne voulons plus commercer, monsieur le ministre, mais parce que nous souhaitons nouer des partenariats et des coopérations dans les domaines où ces accords poussent à la concurrence et au moins-disant social et environnemental.
Maintenant, le Gouvernement déclare vouloir être exemplaire grâce aux clauses miroir et refuser l'entrée des produits qui ne respecteraient pas nos normes. Nous en avons eu un bel exemple, très concret, pas plus tard que l'an dernier : celui de l'accord de libre-échange conclu avec la Nouvelle-Zélande.
Si le site du ministère de la transition écologique indique que la France s'est dotée d'une stratégie pour mettre un terme aux effets de ses importations sur la déforestation, la réalité est tout autre.
Ainsi, cela ne pose aucun problème de signer des accords avec la Nouvelle-Zélande, premier importateur mondial de tourteaux de palme, qui est une monoculture à l'origine de la déforestation des forêts d'Asie du Sud-Est, et tout cela sous la présidence française de l'Union européenne !
Il s'agit d'un dumping environnemental, dans lequel, concrètement, est toléré ailleurs, ou pire, encouragé, ce qui est interdit chez nous.
En outre, à propos de cet accord avec la Nouvelle-Zélande, sont distribuées des milliers de tonnes de viandes imprégnées d'atrazine et de diflubenzuron, des produits phytosanitaires interdits au sein de l'Union européenne depuis 2003, avant d'être classés cancérigènes et produits nocifs en 2021.
Voilà ce que sont, pour l'instant, les clauses miroirs : un leurre destiné à nous faire avaler ces traités antisociaux et climaticides !
Pensez-vous véritablement résoudre la question du départ à la retraite de la moitié des exploitants agricoles d'ici à dix ans grâce à ces solutions d'un autre temps, en faisant l'économie d'une réflexion sur les conditions de travail, les salaires, le sens du travail, la formation dans les lycées agricoles, …
M. Victorin Lurel approuve.
M. Laurent Duplomb s'exclame.
Non, conditionner le versement du RSA à 15 heures ou à 20 heures de travail agricole ou obliger un travailleur privé d’emploi à accepter un travail saisonnier ne peut être l’horizon de la future entité France Travail.
Le seul effet de ces accords de libre-échange sur nos territoires, outre d'organiser le dumping économique, est de pressuriser nos filières agricoles, tenues de respecter les normes, qui sont nécessaires et dont nous pouvons être fiers, mais qui les rendent moins compétitives que l'utilisation de n'importe quel produit cancérigène.
Ce sont là les enjeux structurants de l'agriculture, mais c'est aussi un enjeu démocratique. En effet, il est scandaleux que l'accord économique et commercial global (Ceta) soit appliqué à 90 %, sans ratification du Sénat ni de l'ensemble du Parlement.
… les aides à apporter à l'installation de nouveaux agriculteurs, ou encore sur la lutte contre l'accaparement des terres agricoles par des financiers.
Enfin, au moment où, déjà au mois de mai, quatre villages sont privés d'eau – l'an dernier, ils étaient cent à l'être au cœur de l'été –, et alors que nous avons connu des mégafeux l'été dernier, non, il n'est pas sérieux d'autoriser toutes les bassines, qu'elles soient méga, de retenue ou de pompage.
Mme Laurence Cohen applaudit.
M. Laurent Duplomb proteste.
Pensez-vous véritablement résoudre la question du départ à la retraite de la moitié des exploitants agricoles d’ici à dix ans grâce à ces solutions d’un autre temps, en faisant l’économie d’une réflexion sur les conditions de travail, les salaires, le sens du travail, la formation dans les lycées agricoles, …
Ces accords de nouvelle génération sont la dernière invention de la Commission européenne et ont des conséquences sur nos services publics, comme sur nos barrières tarifaires et non tarifaires.
Le Parlement est tenu à l'écart de ces négociations, tout comme il est empêché de voter sur le Ceta par ce gouvernement qui refuse toujours de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat.
Alors, dans le calme, je vous fais une dernière proposition : puisque ce projet est sur le bureau du Sénat et que nous y sommes tous opposés, allons au bout : inscrivons-le à l'ordre du jour d'une de nos niches parlementaires et votons contre !
Cela aura un double effet : premièrement, redonner du pouvoir au Parlement, si souvent piétiné par ce gouvernement ; deuxièmement, rendre un grand service aux agriculteurs en faisant tomber ce traité et en ouvrant une nouvelle ère pour nos relations commerciales.
Mes chers collègues, chiche ! Nous y sommes prêts. Pour le reste, nous voterons contre cette proposition de loi. §
Oui, l'eau doit être reconnue comme un bien commun et sortie du secteur marchand.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir remis un rapport d'information sur la compétitivité de la ferme France, j'ai rédigé avec mes collègues Serge Mérillou et Laurent Duplomb une proposition de loi, tout simplement parce que cela m'a semblé nécessaire pour tenter de remédier à la situation alarmante de notre agriculture.
Je tiens à saluer la qualité du travail de Mme le rapporteur, ainsi que celui de la commission, qui a consacré plusieurs heures à l'examen de ce texte.
Cette proposition de loi, qui avait donc déjà été améliorée et amendée, l'a été de nouveau en séance. Et même si, cher Laurent Duplomb, il est toujours possible de voir le verre à moitié plein ou le verre à moitié vide, je tiens à saluer l'esprit de collaboration de M. le ministre de l'agriculture, qui, en dépit de ses quelques réserves, a permis d'aller dans le bon sens.
Mme Émilienne Poumirol applaudit.
… les aides à apporter à l’installation de nouveaux agriculteurs, ou encore sur la lutte contre l’accaparement des terres agricoles par des financiers.
Enfin, au moment où, déjà au mois de mai, quatre villages sont privés d’eau – l’an dernier, ils étaient cent à l’être au cœur de l’été –, et alors que nous avons connu des mégafeux l’été dernier, non, il n’est pas sérieux d’autoriser toutes les bassines, qu’elles soient méga, de retenue ou de pompage.
M. Laurent Duplomb proteste.
Enfin, nous devrions nous rassembler pour refuser les accords de libre-échange, non pas parce que nous ne voulons plus commercer, monsieur le ministre, mais parce que nous souhaitons nouer des partenariats et des coopérations dans les domaines où ces accords poussent à la concurrence et au moins-disant social et environnemental.
Maintenant, le Gouvernement déclare vouloir être exemplaire grâce aux clauses miroir et refuser l'entrée des produits qui ne respecteraient pas nos normes. Nous en avons eu un bel exemple, très concret, pas plus tard que l'an dernier, avec l'accord de libre-échange conclu avec la Nouvelle-Zélande.
Si le site du ministère de la transition écologique indique que la France s'est dotée d'une stratégie pour mettre un terme aux effets de ses importations sur la déforestation, la réalité est tout autre.
Ainsi, cela ne pose aucun problème de signer des accords avec la Nouvelle-Zélande, premier importateur mondial de tourteaux de palme, qui est une monoculture à l'origine de la déforestation des forêts d'Asie du Sud-Est, et tout cela sous la présidence française de l'Union européenne !
Il s'agit d'un dumping environnemental, dans lequel, concrètement, est toléré ailleurs, ou pire, encouragé, ce qui est interdit chez nous.
En outre, à propos de cet accord avec la Nouvelle-Zélande, sont distribuées des milliers de tonnes de viandes imprégnées d'atrazine et de diflubenzuron, des produits phytosanitaires interdits au sein de l'Union européenne depuis 2003, avant d'être classés cancérigènes et produits nocifs en 2021.
Voilà ce que sont, pour l'instant, les clauses miroirs : un leurre destiné à nous faire avaler ces traités antisociaux et climaticides !
Je souhaite revenir sur un certain nombre de points qui font l'objet de débats et de critiques.
Tout d'abord, on nous dit que l'on revient sur le cadre normatif et qu'il ne faut pas s'occuper du droit européen. Or l'un des principaux maux de notre agriculture est bien, me semble-t-il, le cadre normatif et les surtranspositions réalisées avec beaucoup d'anticipation.
Un peu comme les entreprises françaises, les agriculteurs n'en peuvent plus de cette réglementation à n'en plus finir. Le Président de la République lui-même est favorable à un débat préalable aux travaux de deux ans, et non pas de trois, quatre, six ou dix ans, lorsqu'il s'agit de construire un bâtiment d'élevage ou de réaliser une retenue collinaire.
Tous les agriculteurs sont atteints par cette surréglementation. Ainsi, les producteurs bio du secteur de l'arboriculture n'en peuvent plus – je le sais, car j'en compte dans ma famille. En effet, lorsqu'il pleut, la production doit être protégée avec des produits bio. Or, comme ils ont été interdits par une loi scélérate– on veut toujours en faire plus dans l'imbécillité –, ces producteurs n'ont plus le droit de traiter et doivent laisser disparaître leur production.
Il me semble que c'est tout le débat. Certains s'imaginent qu'il est possible de nourrir les huit milliards d'habitants de cette planète avec les mêmes méthodes utilisées pour en nourrir un milliard.
Vous avez tous cité le Sri Lanka en exemple voilà quelques années.
M. Laurent Duplomb s'exclame.
Oui, l’eau doit être reconnue comme un bien commun et sortie du secteur marchand.
Le seul effet de ces accords de libre-échange sur nos territoires, hormis d'organiser le dumping économique, est de pressuriser nos filières agricoles, tenues de respecter les normes, qui sont nécessaires et dont nous pouvons être fiers, mais qui les rendent moins compétitives que l'utilisation de n'importe quel produit cancérigène.
Ce sont là les enjeux structurants de l'agriculture, mais c'est aussi un enjeu démocratique. En effet, il est scandaleux que l'accord économique et commercial global (Ceta) soit appliqué à 90 %, sans ratification du Sénat ni de l'ensemble du Parlement.
Mme Émilienne Poumirol applaudit.
M. Pierre Louault . Or l'expérience a duré deux ans, au terme desquels la production annuelle avait diminué de moitié et un tiers du pays subissait la famine. Aussi, de grâce, revenons aux réalités !
Enfin, nous devrions nous rassembler pour refuser les accords de libre-échange, non pas parce que nous ne voulons plus commercer, monsieur le ministre, mais parce que nous souhaitons nouer des partenariats et des coopérations dans les domaines où ces accords poussent à la concurrence et au moins-disant social et environnemental.
Maintenant, le Gouvernement déclare vouloir être exemplaire grâce aux clauses miroir et refuser l’entrée des produits qui ne respecteraient pas nos normes. Nous en avons eu un bel exemple, très concret, pas plus tard que l’an dernier, avec l’accord de libre-échange conclu avec la Nouvelle-Zélande.
Si le site du ministère de la transition écologique indique que la France s’est dotée d’une stratégie pour mettre un terme aux effets de ses importations sur la déforestation, la réalité est tout autre.
Ainsi, cela ne pose aucun problème de signer des accords avec la Nouvelle-Zélande, premier importateur mondial de tourteaux de palme, qui est une monoculture à l’origine de la déforestation des forêts d’Asie du Sud-Est, et tout cela sous la présidence française de l’Union européenne !
Il s’agit d’un dumping environnemental, dans lequel, concrètement, est toléré ailleurs, ou pire, encouragé, ce qui est interdit chez nous.
En outre, à propos de cet accord avec la Nouvelle-Zélande, sont distribuées des milliers de tonnes de viandes imprégnées d’atrazine et de diflubenzuron, des produits phytosanitaires interdits au sein de l’Union européenne depuis 2003, avant d’être classés cancérigènes et produits nocifs en 2021.
Voilà ce que sont, pour l’instant, les clauses miroirs : un leurre destiné à nous faire avaler ces traités antisociaux et climaticides !
Applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.
Ces accords de nouvelle génération sont la dernière invention de la Commission européenne et ont des conséquences sur nos services publics, comme sur nos barrières tarifaires et non tarifaires.
Le Parlement est tenu à l'écart de ces négociations, tout comme il est empêché de voter sur le Ceta par ce gouvernement qui refuse toujours de l'inscrire à l'ordre du jour du Sénat.
Alors, dans le calme, je vous fais une dernière proposition : puisque ce projet est sur le bureau du Sénat et que nous y sommes tous opposés, allons au bout : inscrivons-le à l'ordre du jour de l'une de nos niches parlementaires et votons contre !
Cela aura un double effet : premièrement, redonner du pouvoir au Parlement, si souvent piétiné par ce gouvernement ; deuxièmement, rendre un grand service aux agriculteurs en faisant tomber ce traité et en ouvrant une nouvelle ère pour nos relations commerciales.
Mes chers collègues, chiche ! Nous y sommes prêts. Pour le reste, nous voterons contre cette proposition de loi.
M. Laurent Duplomb s ’ exclame.
Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.
Le seul effet de ces accords de libre-échange sur nos territoires, hormis d’organiser le dumping économique, est de pressuriser nos filières agricoles, tenues de respecter les normes, qui sont nécessaires et dont nous pouvons être fiers, mais qui les rendent moins compétitives que l’utilisation de n’importe quel produit cancérigène.
Ce sont là les enjeux structurants de l’agriculture, mais c’est aussi un enjeu démocratique. En effet, il est scandaleux que l’accord économique et commercial global (Ceta) soit appliqué à 90 %, sans ratification du Sénat ni de l’ensemble du Parlement.
Le seul effet de ces accords de libre-échange sur nos territoires, hormis d’organiser le dumping économique, est de pressuriser nos filières agricoles, tenues de respecter les normes, qui sont nécessaires et dont nous pouvons être fiers, mais qui les rendent moins compétitives que l’utilisation de n’importe quel produit cancérigène.
Ce sont là les enjeux structurants de l’agriculture, mais c’est aussi un enjeu démocratique. En effet, il est scandaleux que le Ceta soit appliqué à 90 %, sans ratification du Sénat ni de l’ensemble du Parlement.
M. Pierre Louault . Je suis tout à fait favorable à faire évoluer l'agriculture dans un sens plus respectueux de l'environnement, en employant de nouvelles méthodes. Mais celles-ci ne consistent pas forcément à copier ce qui se faisait au XIXe siècle.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir remis un rapport d'information sur la compétitivité de la ferme France, j'ai rédigé avec mes collègues Serge Mérillou et Laurent Duplomb une proposition de loi, tout simplement parce que cela m'a semblé nécessaire pour tenter de remédier à la situation alarmante de notre agriculture.
Je tiens à saluer la qualité du travail de Mme le rapporteur, ainsi que celui de la commission, qui a consacré plusieurs heures à l'examen de ce texte.
Cette proposition de loi, qui avait donc déjà été améliorée et amendée, l'a été de nouveau en séance. Et même si, cher Laurent Duplomb, il est toujours possible de voir le verre à moitié plein ou le verre à moitié vide, je tiens à saluer l'esprit de collaboration de M. le ministre de l'agriculture, qui, en dépit de ses quelques réserves, a permis d'aller dans le bon sens.
Protestations sur les travées du groupe GEST.
M. Laurent Duplomb ironise.
Ces accords de nouvelle génération sont la dernière invention de la Commission européenne et ont des conséquences sur nos services publics, comme sur nos barrières tarifaires et non tarifaires.
Le Parlement est tenu à l’écart de ces négociations, tout comme il est empêché de voter sur le Ceta par ce gouvernement qui refuse toujours de l’inscrire à l’ordre du jour du Sénat.
Alors, dans le calme, je vous fais une dernière proposition : puisque ce projet est sur le bureau du Sénat et que nous y sommes tous opposés, allons au bout : inscrivons-le à l’ordre du jour de l’une de nos niches parlementaires et votons contre !
Cela aura un double effet : premièrement, redonner du pouvoir au Parlement, si souvent piétiné par ce gouvernement ; deuxièmement, rendre un grand service aux agriculteurs en faisant tomber ce traité et en ouvrant une nouvelle ère pour nos relations commerciales.
Mes chers collègues, chiche ! Nous y sommes prêts. Pour le reste, nous voterons contre cette proposition de loi.
Les nouvelles méthodes, vous les réfutez ! Or l'évolution de l'agriculture viendra de celle des technologies et de la résistance variétale.
Je souhaite revenir sur un certain nombre de points qui font l'objet de débats et de critiques.
Tout d'abord, on nous dit que l'on revient sur le cadre normatif et qu'il ne faut pas s'occuper du droit européen. Or l'un des principaux maux de notre agriculture est bien, me semble-t-il, le cadre normatif et les surtranspositions réalisées avec beaucoup d'anticipation.
Un peu comme les entreprises françaises, les agriculteurs n'en peuvent plus de cette réglementation à n'en plus finir. Le Président de la République lui-même est favorable à un débat préalable aux travaux de deux ans, et non pas de trois, quatre, six ou dix ans, lorsqu'il s'agit de construire un bâtiment d'élevage ou de réaliser une retenue collinaire.
Tous les agriculteurs sont atteints par cette surréglementation. Ainsi, les producteurs bio du secteur de l'arboriculture n'en peuvent plus – je le sais, car j'en compte dans ma famille. En effet, lorsqu'il pleut, la production doit être protégée avec des produits bio. Or, comme ils ont été interdits par une loi scélérate– on veut toujours en faire plus dans l'imbécillité –, ces producteurs n'ont plus le droit de traiter et doivent laisser disparaître leur production.
Il me semble que c'est tout le débat. Certains s'imaginent qu'il est possible de nourrir les huit milliards d'habitants de cette planète avec les mêmes méthodes utilisées pour en nourrir un milliard.
Vous avez tous cité le Sri Lanka en exemple voilà quelques années.
Applaudissements sur les travées des groupes CRCE, SER et GEST.
Mme Monique de Marco s'exclame .
Mme la présidente. La parole est à M. Pierre Louault, pour le groupe Union Centriste.
Le second point ayant fait l'objet de critiques est le volet fiscal, qui concerne tous les producteurs, aussi bien bio que les autres, parce que chacun a besoin d'investir pour trouver de nouvelles méthodes de production.
Aujourd'hui, les producteurs perçoivent des recettes tellement insuffisantes qu'ils ne peuvent plus investir, ce qui est un problème essentiel. Disposer d'une épargne consacrée aux agriculteurs permettra, je l'espère, de rapprocher ces derniers de l'ensemble des habitants du pays.
L'innovation doit également être encouragée, tout comme la productivité et la protection de l'environnement. Pourquoi être systématiquement contre la productivité ? Pourquoi être systématiquement contre l'utilisation de l'eau, alors que, depuis vingt ans, les gouvernements s'acharnent à mettre les rivières à sec et à vider les nappes phréatiques par siphonnage ? Et aujourd'hui, après avoir provoqué l'incendie, on crie au feu !
Faire montre d'un peu moins de doctrine et d'un peu plus de réalisme serait utile si nous voulons passer l'été prochain avec suffisamment d'eau pour répondre aux besoins de l'ensemble des citoyens français et de toute l'agriculture.
Je voudrais dire quelques mots des salariés agricoles. J'entends bien qu'il ne faut surtout pas remettre au travail les salariés…
M. Pierre Louault . Or l'expérience a duré deux ans, au terme desquels la production annuelle avait diminué de moitié et un tiers du pays subissait la famine. Aussi, de grâce, revenons aux réalités !
Applaudissements sur les travées du groupe UC.
Exclamations sur les travées des groupes GEST et CRCE.
Applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, après avoir remis un rapport d’information sur la compétitivité de la ferme France, j’ai rédigé avec mes collègues Serge Mérillou et Laurent Duplomb une proposition de loi, tout simplement parce que cela m’a semblé nécessaire pour tenter de remédier à la situation alarmante de notre agriculture.
Je tiens à saluer la qualité du travail de Mme le rapporteur, ainsi que celui de la commission, qui a consacré plusieurs heures à l’examen de ce texte.
Cette proposition de loi, qui avait donc déjà été améliorée et amendée, l’a été de nouveau en séance. Et même si, cher Laurent Duplomb, il est toujours possible de voir le verre à moitié plein ou le verre à moitié vide, je tiens à saluer l’esprit de collaboration de M. le ministre de l’agriculture, qui, en dépit de ses quelques réserves, a permis d’aller dans le bon sens.
M. Laurent Duplomb ironise.
M. Pierre Louault . Je suis tout à fait favorable à faire évoluer l'agriculture dans un sens plus respectueux de l'environnement, en employant de nouvelles méthodes. Mais celles-ci ne consistent pas forcément à copier ce qui se faisait au XIXe siècle.
Je souhaite revenir sur un certain nombre de points qui font l’objet de débats et de critiques.
Tout d’abord, on nous dit que l’on revient sur le cadre normatif et qu’il ne faut pas s’occuper du droit européen. Or l’un des principaux maux de notre agriculture est bien, me semble-t-il, le cadre normatif et les surtranspositions réalisées avec beaucoup d’anticipation.
Un peu comme les entreprises françaises, les agriculteurs n’en peuvent plus de cette réglementation à n’en plus finir. Le Président de la République lui-même est favorable à un débat préalable aux travaux de deux ans, et non pas de trois, quatre, six ou dix ans, lorsqu’il s’agit de construire un bâtiment d’élevage ou de réaliser une retenue collinaire.
Tous les agriculteurs sont atteints par cette surréglementation. Ainsi, les producteurs bio du secteur de l’arboriculture n’en peuvent plus – je le sais, car j’en compte dans ma famille. En effet, lorsqu’il pleut, la production doit être protégée avec des produits bio. Or, comme ils ont été interdits par une loi scélérate – on veut toujours en faire plus dans l’imbécillité –, ces producteurs n’ont plus le droit de traiter et doivent laisser disparaître leur production.
Il me semble que c’est tout le débat. Certains s’imaginent qu’il est possible de nourrir les huit milliards d’habitants de cette planète avec les mêmes méthodes utilisées pour en nourrir un milliard.
Vous avez tous cité le Sri Lanka en exemple voilà quelques années.
M. Pierre Louault . Pourtant, mes chers collègues, vous avez la mémoire courte ! Souvenez-vous de L'Internationale : « Ouvriers, Paysans, nous sommes le grand parti des travailleurs. / La terre n'appartient qu'aux hommes, / l'oisif ira loger ailleurs. »
Protestations sur les travées du groupe GEST.
Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Les nouvelles méthodes, vous les réfutez ! Or l'évolution de l'agriculture viendra de celle des technologies et de la résistance variétale.
M. Pierre Louault. Or l’expérience a duré deux ans, au terme desquels la production annuelle avait diminué de moitié et un tiers du pays subissait la famine. Aussi, de grâce, revenons aux réalités !
Mme Monique de Marco s'exclame .
Applaudissements sur des travées des groupes UC, INDEP et Les Républicains.
M. Pierre Louault . Nous vous proposons, tout simplement, de donner l'occasion aux oisifs de revenir au travail et de contribuer à nourrir la Nation.
Le second point ayant fait l'objet de critiques est le volet fiscal, qui concerne tous les producteurs, aussi bien bio que les autres, parce que chacun a besoin d'investir pour trouver de nouvelles méthodes de production.
Aujourd'hui, les producteurs perçoivent des recettes tellement insuffisantes qu'ils ne peuvent plus investir, ce qui est un problème essentiel. Disposer d'une épargne consacrée aux agriculteurs permettra, je l'espère, de rapprocher ces derniers de l'ensemble des habitants du pays.
L'innovation doit également être encouragée, tout comme la productivité et la protection de l'environnement. Pourquoi être systématiquement contre la productivité ? Pourquoi être systématiquement contre l'utilisation de l'eau, alors que, depuis vingt ans, les gouvernements s'acharnent à mettre les rivières à sec et à vider les nappes phréatiques par siphonnage ? Et aujourd'hui, après avoir provoqué l'incendie, on crie au feu !
Faire montre d'un peu moins de doctrine et d'un peu plus de réalisme serait utile si nous voulons passer l'été prochain avec suffisamment d'eau pour répondre aux besoins de l'ensemble des citoyens français et des agriculteurs.
Je voudrais dire quelques mots des salariés agricoles. J'entends bien qu'il ne faut surtout pas remettre au travail les salariés…
Exclamations sur les travées des groupes GEST et CRCE.
M. Pierre Louault. Je suis tout à fait favorable à faire évoluer l’agriculture dans un sens plus respectueux de l’environnement, en employant de nouvelles méthodes. Mais celles-ci ne consistent pas forcément à copier ce qui se faisait au XIXe siècle.
Protestations sur les travées du groupe GEST.
M. Pierre Louault . Enfin, de manière plus générale, la passion qui nous anime tous dans ce débat témoigne de l'importance que la Haute Assemblée accorde à l'agriculture et à sa compétitivité. Aussi, je salue tous ceux qui y ont participé.
Les nouvelles méthodes, vous les réfutez ! Or l’évolution de l’agriculture viendra de celle des technologies et de la résistance variétale.
Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que des travées des groupes INDEP et Les Républicains.
M. Pierre Louault . Pourtant, mes chers collègues, vous avez la mémoire courte ! Souvenez-vous de L'Internationale : « Ouvriers, Paysans, nous sommes / Le grand parti des travailleurs. / La terre n'appartient qu'aux hommes / L'oisif ira loger ailleurs. »
Mme Monique de Marco s ’ exclame.
Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Le second point ayant fait l’objet de critiques est le volet fiscal, qui concerne tous les producteurs, aussi bien bio que les autres, parce que chacun a besoin d’investir pour trouver de nouvelles méthodes de production.
Aujourd’hui, les producteurs perçoivent des recettes tellement insuffisantes qu’ils ne peuvent plus investir, ce qui est un problème essentiel. Disposer d’une épargne consacrée aux agriculteurs permettra, je l’espère, de rapprocher ces derniers de l’ensemble des habitants du pays.
L’innovation doit également être encouragée, tout comme la productivité et la protection de l’environnement. Pourquoi être systématiquement contre la productivité ? Pourquoi être systématiquement contre l’utilisation de l’eau, alors que, depuis vingt ans, les gouvernements s’acharnent à mettre les rivières à sec et à vider les nappes phréatiques par siphonnage ? Et aujourd’hui, après avoir provoqué l’incendie, on crie au feu !
Faire montre d’un peu moins de doctrine et d’un peu plus de réalisme serait utile si nous voulons passer l’été prochain avec suffisamment d’eau pour répondre aux besoins de l’ensemble des citoyens français et des agriculteurs.
Je voudrais dire quelques mots des salariés agricoles. J’entends bien qu’il ne faut surtout pas remettre au travail les salariés…
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
Exclamations sur les travées des groupes GEST et CRCE.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour des raisons de forme aussi bien que de fond, je suis assez réservé sur cette proposition de loi.
Sur la forme, tout d'abord, le site du Sénat, qui revêt un caractère officiel, présente cette proposition de loi comme étant transpartisane. Certes, cette terminologie est à la mode dans les médias. Cependant, pour qu'elle soit utilisée de manière officielle sur le site du Sénat, encore eût-il fallu que tous les sénateurs aient été traités sur un pied d'égalité, en ayant eu la possibilité de s'y associer.
Or, sur les 175 signataires de cette proposition de loi, 166 appartiennent à deux groupes, Les Républicains et l'Union Centriste. À titre personnel, je n'avais pas été informé de cette démarche, abusivement qualifiée de transpartisane.
M. Pierre Louault . Nous vous proposons, tout simplement, de donner l'occasion aux oisifs de revenir au travail et de contribuer à nourrir la Nation.
Protestations sur l es tr avées des groupes SER et CRCE.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
M. Pierre Louault. Pourtant, mes chers collègues, vous avez la mémoire courte ! Souvenez-vous de L ’ Internationale : « Ouvriers, Paysans, nous sommes / Le grand parti des travailleurs. / La terre n’appartient qu’aux hommes / L’oisif ira loger ailleurs. »
Cette politique est donc, en réalité, plus partisane que transpartisane.
(À suivre)
M. Pierre Louault . Enfin, de manière plus générale, la passion qui nous anime tous dans ce débat témoigne de l'importance que la Haute Assemblée accorde à l'agriculture et à sa compétitivité. Aussi, je salue tous ceux qui y ont participé.
Exclamations ironiques sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.
M. Pierre Louault. Nous vous proposons, tout simplement, de donner l’occasion aux oisifs de revenir au travail et de contribuer à nourrir la Nation.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d'aucun groupe.
Protestations sur les travées des groupes SER et CRCE.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour des raisons de forme aussi bien que de fond, je suis assez réservé sur cette proposition de loi.
Sur la forme, tout d'abord, le site du Sénat, qui revêt un caractère officiel, présente cette proposition de loi comme étant transpartisane. Certes, cette terminologie est à la mode dans les médias. Cependant, pour qu'elle soit utilisée de manière officielle sur le site du Sénat, encore eût-il fallu que tous les sénateurs aient été traités sur un pied d'égalité, en ayant eu la possibilité de s'y associer.
Or, sur les 175 signataires de cette proposition de loi, 166 appartiennent à deux groupes, Les Républicains et l'Union Centriste. À titre personnel, je n'avais pas été informé de cette démarche, abusivement qualifiée de transpartisane.
M. Pierre Louault. Enfin, de manière plus générale, la passion qui nous anime tous dans ce débat témoigne de l’importance que la Haute Assemblée accorde à l’agriculture et à sa compétitivité. Aussi, je salue tous ceux qui y ont participé.
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
Applaudissements sur les travées du groupe UC, ainsi que sur des travées des groupes INDEP et Les Républicains.
Cette politique est donc, en réalité, plus partisane que transpartisane.
(M. Olivier Paccaud proteste.) Il est vrai que nous aurons des élections sénatoriales dans quelques mois ; ceci explique peut-être cela…
Applaudissements sur des travées du groupe GEST.
La parole est à M. Jean Louis Masson, pour la réunion administrative des sénateurs ne figurant sur la liste d’aucun groupe.
Par ailleurs, la procédure du scrutin public solennel est en général utilisée pour les projets de loi très importants : je suis surpris qu'une simple proposition de loi, faussement qualifiée de « transpartisane », en bénéficie. §
Sur le fond, cette proposition de loi juxtapose des mesures ponctuelles dont je reconnais bien volontiers que certaines sont assez intéressantes.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, pour des raisons de forme aussi bien que de fond, je suis assez réservé sur cette proposition de loi.
Sur la forme, tout d’abord, le site du Sénat, qui revêt un caractère officiel, présente cette proposition de loi comme étant transpartisane. Certes, cette terminologie est à la mode dans les médias. Cependant, pour qu’elle soit utilisée de manière officielle sur le site du Sénat, encore eût-il fallu que tous les sénateurs aient été traités sur un pied d’égalité, en ayant eu la possibilité de s’y associer.
Or, sur les 175 signataires de cette proposition de loi, 166 appartiennent à deux groupes, Les Républicains et l’Union Centriste. À titre personnel, je n’avais pas été informé de cette démarche, abusivement qualifiée de transpartisane.
En revanche, d'autres ont un caractère un peu politicien.
De même que quand on veut étouffer une affaire, on crée une commission, quand on veut créer du vent médiatique, on désigne un haut-commissaire : c'est sans doute pour cela que l'article 1er crée un haut-commissaire auprès du ministre de l'agriculture. S'agira-t-il d'un magicien à même de résoudre tous les problèmes de l'agriculture ? Et à quoi sert le ministre de l'agriculture s'il faut encore lui adjoindre un haut-commissaire ?
Monsieur le ministre, à votre place, je serais très inquiet. §Vous allez vous retrouver au chômage !
Sourires sur les travées du groupe Les Républicains.
M. Marc Fesneau, ministre. Eh bien, j'aurai d'autres activités…
Cette politique est donc, en réalité, plus partisane que transpartisane.
( M. Olivier Paccaud proteste.) Il est vrai que nous aurons des élections sénatoriales dans quelques mois ; ceci explique peut-être cela…
Sourires
Applaudissements sur des travées du groupe GEST.
M. Jean Louis Masson. Il est temps de réfléchir à quoi va servir ce haut-commissaire. Vous voyez que je m'inquiète pour vous !
Par ailleurs, la procédure du scrutin public solennel est en général utilisée pour les projets de loi très importants : je suis surpris qu’une simple proposition de loi, faussement qualifiée de « transpartisane », en bénéficie. §
Sur le fond, cette proposition de loi juxtapose des mesures ponctuelles dont je reconnais bien volontiers que certaines sont assez intéressantes.
Mme Laurence Harribey applaudit.
En revanche, d’autres ont un caractère un peu politicien.
De même que quand on veut étouffer une affaire, on crée une commission, quand on veut créer du vent médiatique, on désigne un haut-commissaire : c’est sans doute pour cela que l’article 1er crée un haut-commissaire auprès du ministre de l’agriculture. S’agira-t-il d’un magicien à même de résoudre tous les problèmes de l’agriculture ? Et à quoi sert le ministre de l’agriculture s’il faut encore lui adjoindre un haut-commissaire ?
Monsieur le ministre, à votre place, je serais très inquiet. §Vous allez vous retrouver au chômage !
Souriressur les travées du groupe UC.
M. Marc Fesneau, ministre. Eh bien, j’aurai d’autres activités…
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Sourires sur les travées du groupe UC.
Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC.
M. Jean Louis Masson. Il est temps de réfléchir à quoi va servir ce haut-commissaire. Vous voyez que je m’inquiète pour vous !
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis une fois encore – je n'ose dire une fois de plus – pour parler d'agriculture.
Après avoir dressé le constat amer de notre déclin agricole, le présent texte en analyse les causes, qui sont multifactorielles : charges excessives, surtransposition, coût de l'innovation, sans compter l'absence depuis très longtemps d'une politique transversale.
Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, MM. Duplomb, Louault et Mérillou, de leur engagement constant. Toutefois, depuis des années, je milite pour une loi agricole qui englobe tous les enjeux de l'agriculture, et ils sont nombreux !
La santé publique, la valeur partagée, la protection de l'environnement, le foncier, la préservation de la ressource en eau, le maintien d'un métier non délocalisable, la transmission, l'adéquation à l'évolution des goûts et souhaits des consommateurs ou encore la sauvegarde des paysages : tous ces enjeux méritent d'être étudiés dans leur interconnexion. Les dissocier, comme on l'a fait, conduit inévitablement à des politiques morcelées qui, effectivement, font oublier la compétitivité.
En France, dans le monde syndical comme dans la sphère politique, on oppose souvent l'écologie à l'économie. Nos débats, trop fréquemment clivés, en témoignent. Je suis convaincu que c'est une erreur : on ne saurait concevoir les politiques agricoles en regardant par le petit bout de la lorgnette.
En effet, le constat du réchauffement climatique ou encore l'annonce de milliers d'espèces disparues ou menacées nous obligent à revoir nos modes de production et de consommation.
Je pense notamment à la rareté de l'eau. En l'occurrence, la situation devient très tendue. Dans nos territoires du sud, des communes sont régulièrement ravitaillées en eau potable, et les préfets ont déjà pris, à ce jour, des arrêtés pour limiter certains usages. On ne peut pas l'ignorer.
Il faut concevoir la gestion de l'eau, qui est source de vie, dans sa globalité, en sachant que l'agriculture, y compris l'agriculture bio, en a besoin.
Le triptyque santé/économie/environnement doit être au cœur de nos argumentations. Ces trois domaines doivent être pris en considération ensemble.
Nous avons un devoir moral envers les générations futures.
Un tel travail est complexe, mais possible. Mais la caricature consistant à limiter un modèle qualitatif à des niches et à faire peser sur lui tout le poids du déclin agricole n'est pas entendable.
Je suis persuadé qu'il y a de la place pour toutes les formes d'agriculture, à condition qu'elles soient sincères et qu'elles répondent aux enjeux.
Quand je parle de sincérité, je pense au bio, qui a suscité un véritable engouement. Les aides en témoignent, en particulier celles de la politique agricole commune, qui s'est verdie. Mais le bio traverse aujourd'hui la même crise que l'agriculture conventionnelle, au point que de nombreux agriculteurs pensent revenir à leurs anciens modes de production, car le seul filtre, ici, est le volet économique : ce serait une erreur.
Il faut prendre en compte les deux autres enjeux, la santé et l'environnement, qui sont indissociables du premier. Les gouvernants doivent soutenir la filière pour traverser cette crise conjoncturelle.
Comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire au risque de choquer, les organisations professionnelles doivent également se structurer et se solidariser.
Ainsi, dans le secteur du vin, que je connais bien, il n'existe pas en France de stratégie nationale. Les stratégies déployées se limitent aux bassins viticoles et certaines appellations d'un même territoire se concurrencent entre elles. Dans un contexte de crise, pouvons-nous encore nous offrir ce luxe ? Ne pouvons-nous pas nous réunir autour d'une table, comme l'ont fait nos voisins espagnols et italiens, pour élaborer des stratégies communes et offensives ?
Comment imaginer qu'un vin vendu 75 centimes le litre en sortie de cave se retrouve à 5 euros le verre de 15 centilitres dans nos restaurants ? Cherchez l'erreur !
Cet exemple vaut pour plusieurs filières agricoles. Tout le monde doit gagner de l'argent, à condition que la valeur soit partagée, ce qui n'est évidemment pas le cas.
Comment le présent texte nous permettra-t-il de mieux traiter cette problématique ? J'ai l'impression d'y retrouver le morcellement de nos politiques agricoles, pourtant largement critiqué. En effet, ses mesures sont conçues au seul prisme de la compétitivité, donc, essentiellement, de l'économie. Ou sont les autres enjeux ?
Pour entrer dans le détail de cette proposition de loi, le RDSE se réjouit de plusieurs avancées, qu'il s'agisse des clauses miroir, de la transposition, de la création du livret Agri ou du diagnostic carbone dans les exploitations.
Mes chers collègues, inutile de vous dire ma satisfaction au sujet de l'article 8 bis : les paiements pour services environnementaux exigent un rapport de bilan exhaustif.
Depuis 2016, mon collègue Franck Montaugé et moi-même n'avons cessé d'expliquer les services rendus les agriculteurs : stockage de carbone, lutte contre les incendies via le pastoralisme, ouverture des espaces, maintien des paysages, etc. Ces efforts doivent être pris en compte et récompensés.
À l'inverse, je déplore l'adoption de l'article 1er, car je ne vois pas en quoi un haut-commissaire à la compétitivité des filières agricoles serait nécessaire. Alors que l'on déplore la complexité administrative et que l'on prône la simplification, le texte ajoute encore une couche à l'organigramme du ministère de l'agriculture, du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et des chambres d'agriculture. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Cela signifie-t-il que ces structures n'ont pas de vision prospective ou d'objectifs en matière de compétitivité ? Si tel est le cas, c'est grave, car c'est le cœur même de leur mission : établir des évaluations et des stratégies.
De même, l'article 11 me choque. Il revient sur la loi Égalim en décalant de 2022 à 2025 l'échéance pour les produits de qualité durable, dont 20 % de bio, alors que nous n'avons pas assez de recul.
La solution ne serait-elle pas plutôt la relance des projets alimentaires territoriaux (PAT), qui structureraient la demande et l'offre locales autour de ces objectifs de qualité ? Par exemple, dans l'Hérault, qui figure parmi les départements précurseurs en la matière, le pari est presque gagné grâce à dix PAT, dont un départemental.
Enfin, je m'étonne de l'article 18, qui réhabilite le conseil et la vente de produits phytopharmaceutiques. Comment peut-on être à la fois juge et partie ?
Pour toutes ces raisons, je m'abstiendrai, de même que la grande majorité des membres de mon groupe.
Le présent texte – nous le savons – est éminemment politique, à l'heure où le projet de loi d'orientation agricole se profile. Ce dernier nous permettra, du moins je l'espère, d'examiner tous les enjeux – je dis bien tous les enjeux – et de concevoir les actions cohérentes à même d'y répondre.
Mme Laurence Harribey applaudit.
Il va être procédé dans les conditions prévues par l'article 56 du règlement au scrutin public solennel sur la proposition de loi, modifiée, pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Sourires sur les travées du groupe UC.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J'invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mme la présidente. La parole est à M. Henri Cabanel, pour le groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Applaudissements sur les travées du groupe RDSE et sur des travées du groupe UC.
Voici, compte tenu de l'ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 291 :
Nombre de votants332Nombre de suffrages exprimés304Pour l'adoption210Contre 94Le Sénat a adopté.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voici réunis une fois encore – je n’ose dire une fois de plus – pour parler d’agriculture.
Après avoir dressé le constat amer de notre déclin agricole, le présent texte en analyse les causes, qui sont multifactorielles : charges excessives, surtransposition, coût de l’innovation, sans compter l’absence depuis très longtemps d’une politique transversale.
Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, MM. Duplomb, Louault et Mérillou, de leur engagement constant. Toutefois, depuis des années, je milite pour une loi agricole qui englobe tous les enjeux de l’agriculture, et ils sont nombreux !
La santé publique, la valeur partagée, la protection de l’environnement, le foncier, la préservation de la ressource en eau, le maintien d’un métier non délocalisable, la transmission, l’adéquation à l’évolution des goûts et souhaits des consommateurs ou encore la sauvegarde des paysages : tous ces enjeux méritent d’être étudiés dans leur interconnexion. Les dissocier, comme on l’a fait, conduit inévitablement à des politiques morcelées qui, effectivement, font oublier la compétitivité.
En France, dans le monde syndical comme dans la sphère politique, on oppose souvent l’écologie à l’économie. Nos débats, trop fréquemment clivés, en témoignent. Je suis convaincu que c’est une erreur : on ne saurait concevoir les politiques agricoles en regardant par le petit bout de la lorgnette.
En effet, le constat du réchauffement climatique ou encore l’annonce de milliers d’espèces disparues ou menacées nous obligent à revoir nos modes de production et de consommation.
Je pense notamment à la rareté de l’eau. En l’occurrence, la situation devient très tendue. Dans nos territoires du sud, des communes sont régulièrement ravitaillées en eau potable, et les préfets ont déjà pris, à ce jour, des arrêtés pour limiter certains usages. On ne peut pas l’ignorer.
Il faut concevoir la gestion de l’eau, qui est source de vie, dans sa globalité, en sachant que l’agriculture, y compris l’agriculture bio, en a besoin.
Le triptyque santé/économie/environnement doit être au cœur de nos argumentations. Ces trois domaines doivent être pris en considération ensemble.
Nous avons un devoir moral envers les générations futures.
Un tel travail est complexe, mais possible. Mais la caricature consistant à limiter un modèle qualitatif à des niches et à faire peser sur lui tout le poids du déclin agricole n’est pas entendable.
Je suis persuadé qu’il y a de la place pour toutes les formes d’agriculture, à condition qu’elles soient sincères et qu’elles répondent aux enjeux.
Quand je parle de sincérité, je pense au bio, qui a suscité un véritable engouement. Les aides en témoignent, en particulier celles de la politique agricole commune, qui s’est verdie. Mais le bio traverse aujourd’hui la même crise que l’agriculture conventionnelle, au point que de nombreux agriculteurs pensent revenir à leurs anciens modes de production, car le seul filtre, ici, est le volet économique : ce serait une erreur.
Il faut prendre en compte les deux autres enjeux, la santé et l’environnement, qui sont indissociables du premier. Les gouvernants doivent soutenir la filière pour traverser cette crise conjoncturelle.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire au risque de choquer, les organisations professionnelles doivent également se structurer et se solidariser.
Ainsi, dans le secteur du vin, que je connais bien, il n’existe pas en France de stratégie nationale. Les stratégies déployées se limitent aux bassins viticoles et certaines appellations d’un même territoire se concurrencent entre elles. Dans un contexte de crise, pouvons-nous encore nous offrir ce luxe ? Ne pouvons-nous pas nous réunir autour d’une table, comme l’ont fait nos voisins espagnols et italiens, pour élaborer des stratégies communes et offensives ?
Comment imaginer qu’un vin vendu 75 centimes le litre en sortie de cave se retrouve à 5 euros le verre de 15 centilitres dans nos restaurants ? Cherchez l’erreur !
Cet exemple vaut pour plusieurs filières agricoles. Tout le monde doit gagner de l’argent, à condition que la valeur soit partagée, ce qui n’est évidemment pas le cas.
Comment le présent texte nous permettra-t-il de mieux traiter cette problématique ? J’ai l’impression d’y retrouver le morcellement de nos politiques agricoles, pourtant largement critiqué. En effet, ses mesures sont conçues au seul prisme de la compétitivité, donc, essentiellement, de l’économie. Ou sont les autres enjeux ?
Pour entrer dans le détail de cette proposition de loi, le RDSE se réjouit de plusieurs avancées, qu’il s’agisse des clauses miroir, de la transposition, de la création du livret Agri ou du diagnostic carbone dans les exploitations.
Mes chers collègues, inutile de vous dire ma satisfaction au sujet de l’article 8 bis : les paiements pour services environnementaux exigent un rapport de bilan exhaustif.
Depuis 2016, mon collègue Franck Montaugé et moi-même n’avons cessé d’expliquer les services rendus les agriculteurs : stockage de carbone, lutte contre les incendies via le pastoralisme, ouverture des espaces, maintien des paysages, etc. Ces efforts doivent être pris en compte et récompensés.
À l’inverse, je déplore l’adoption de l’article 1er, car je ne vois pas en quoi un haut-commissaire à la compétitivité des filières agricoles serait nécessaire. Alors que l’on déplore la complexité administrative et que l’on prône la simplification, le texte ajoute encore une couche à l’organigramme du ministère de l’agriculture, du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et des chambres d’agriculture. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Cela signifie-t-il que ces structures n’ont pas de vision prospective ou d’objectifs en matière de compétitivité ? Si tel est le cas, c’est grave, car c’est le cœur même de leur mission : établir des évaluations et des stratégies.
De même, l’article 11 me choque. Il revient sur la loi Égalim en décalant de 2022 à 2025 l’échéance pour les produits de qualité durable, dont 20 % de bio, alors que nous n’avons pas assez de recul.
La solution ne serait-elle pas plutôt la relance des projets alimentaires territoriaux (PAT), qui structureraient la demande et l’offre locales autour de ces objectifs de qualité ? Par exemple, dans l’Hérault, qui figure parmi les départements précurseurs en la matière, le pari est presque gagné grâce à dix PAT, dont un départemental.
Enfin, je m’étonne de l’article 18, qui réhabilite le conseil et la vente de produits phytopharmaceutiques. Comment peut-on être à la fois juge et partie ?
Pour toutes ces raisons, je m’abstiendrai, de même que la grande majorité des membres de mon groupe.
Le présent texte – nous le savons – est éminemment politique, à l’heure où le projet de loi d’orientation agricole se profile. Ce dernier nous permettra, du moins je l’espère, d’examiner tous les enjeux – je dis bien tous les enjeux – et de concevoir les actions cohérentes à même d’y répondre.
Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, nous voilà réunis une fois encore – je n’ose dire une fois de plus – pour parler d’agriculture.
Après avoir dressé le constat amer de notre déclin agricole, le présent texte en analyse les causes, qui sont multifactorielles : charges excessives, surtransposition, coût de l’innovation, sans compter l’absence depuis très longtemps d’une politique transversale.
Je remercie les auteurs de cette proposition de loi, MM. Duplomb, Louault et Mérillou, de leur engagement constant. Toutefois, depuis des années, je milite pour une loi agricole qui englobe tous les enjeux de l’agriculture, et ils sont nombreux !
La santé publique, la valeur partagée, la protection de l’environnement, le foncier, la préservation de la ressource en eau, le maintien d’un métier non délocalisable, la transmission, l’adéquation à l’évolution des goûts et souhaits des consommateurs ou encore la sauvegarde des paysages : tous ces enjeux méritent d’être étudiés dans leur interconnexion. Les dissocier, comme on l’a fait, conduit inévitablement à des politiques morcelées qui, en effet, font oublier la compétitivité.
En France, dans le monde syndical comme dans la sphère politique, on oppose souvent l’écologie à l’économie. Nos débats, trop fréquemment clivés, en témoignent. Je suis convaincu que c’est une erreur : on ne saurait concevoir les politiques agricoles en regardant par le petit bout de la lorgnette.
En effet, le constat du réchauffement climatique ou encore l’annonce de milliers d’espèces disparues ou menacées nous obligent à revoir nos modes de production et de consommation.
Je pense notamment à la rareté de l’eau. En l’occurrence, la situation devient très tendue. Dans nos territoires du sud, des communes sont régulièrement ravitaillées en eau potable, et les préfets ont déjà pris, à ce jour, des arrêtés pour limiter certains usages. On ne peut pas l’ignorer.
Il faut concevoir la gestion de l’eau, qui est source de vie, dans sa globalité, en sachant que l’agriculture, y compris l’agriculture bio, en a besoin.
Le triptyque santé/économie/environnement doit être au cœur de nos argumentations. Ces trois domaines doivent être pris en considération ensemble.
Nous avons un devoir moral envers les générations futures.
Un tel travail est complexe, mais possible. Mais la caricature consistant à limiter un modèle qualitatif à des niches et à faire peser sur lui tout le poids du déclin agricole n’est pas acceptable.
Je suis persuadé qu’il y a de la place pour toutes les formes d’agriculture, à condition qu’elles soient sincères et qu’elles répondent aux enjeux.
Quand je parle de sincérité, je pense au bio, qui a suscité un véritable engouement. Les aides en témoignent, en particulier celles de la politique agricole commune, qui s’est verdie. Mais le bio traverse aujourd’hui la même crise que l’agriculture conventionnelle, au point que de nombreux agriculteurs pensent revenir à leurs anciens modes de production, car le seul filtre, ici, est le volet économique : ce serait une erreur.
Il faut prendre en compte les deux autres enjeux, la santé et l’environnement, qui sont indissociables du premier. Les gouvernants doivent soutenir la filière pour traverser cette crise conjoncturelle.
Comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire au risque de choquer, les organisations professionnelles doivent également se structurer et se solidariser.
Ainsi, dans le secteur du vin, que je connais bien, il n’existe pas en France de stratégie nationale. Les stratégies déployées se limitent aux bassins viticoles et certaines appellations d’un même territoire se concurrencent entre elles. Dans un contexte de crise, pouvons-nous encore nous offrir ce luxe ? Ne pouvons-nous pas nous réunir autour d’une table, comme l’ont fait nos voisins espagnols et italiens, pour élaborer des stratégies communes et offensives ?
Comment imaginer qu’un vin vendu 75 centimes le litre en sortie de cave se retrouve à 5 euros le verre de 15 centilitres dans nos restaurants ? Cherchez l’erreur !
Cet exemple vaut pour plusieurs filières agricoles. Tout le monde doit gagner de l’argent, à condition que la valeur soit partagée, ce qui n’est évidemment pas le cas.
Comment le présent texte nous permettra-t-il de mieux traiter cette problématique ? J’ai l’impression d’y retrouver le morcellement de nos politiques agricoles, pourtant largement critiqué. En effet, ses mesures sont conçues au seul prisme de la compétitivité, donc, essentiellement, de l’économie. Où sont les autres enjeux ?
Pour entrer dans le détail de cette proposition de loi, le RDSE se réjouit de plusieurs avancées, qu’il s’agisse des clauses miroir, de la transposition, de la création du livret Agri ou du diagnostic carbone dans les exploitations.
Mes chers collègues, inutile de vous dire ma satisfaction au sujet de l’article 8 bis : les paiements pour services environnementaux exigent un rapport de bilan exhaustif.
Depuis 2016, mon collègue Franck Montaugé et moi-même n’avons cessé d’expliquer les services rendus les agriculteurs : stockage de carbone, lutte contre les incendies via le pastoralisme, ouverture des espaces, maintien des paysages, etc. Ces efforts doivent être pris en compte et récompensés.
À l’inverse, je déplore l’adoption de l’article 1er, car je ne vois pas en quoi un haut-commissaire à la compétitivité des filières agricoles serait nécessaire. Alors que l’on déplore la complexité administrative et que l’on prône la simplification, le texte ajoute encore une couche à l’organigramme du ministère de l’agriculture, du Conseil général de l’alimentation, de l’agriculture et des espaces ruraux (CGAAER) et des chambres d’agriculture. Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Cela signifie-t-il que ces structures n’ont pas de vision prospective ou d’objectifs en matière de compétitivité ? Si tel est le cas, c’est grave, car c’est le cœur même de leur mission : établir des évaluations et des stratégies.
De même, l’article 11 me choque. Il revient sur la loi Égalim en décalant de 2022 à 2025 l’échéance pour les produits de qualité durable, dont 20 % de bio, alors que nous n’avons pas assez de recul.
La solution ne serait-elle pas plutôt la relance des projets alimentaires territoriaux (PAT), qui structureraient la demande et l’offre locales autour de ces objectifs de qualité ? Par exemple, dans l’Hérault, qui figure parmi les départements précurseurs en la matière, le pari est presque gagné grâce à dix PAT, dont un départemental.
Enfin, je m’étonne de l’article 18, qui réhabilite le conseil et la vente de produits phytopharmaceutiques. Comment peut-on être à la fois juge et partie ?
Pour toutes ces raisons, je m’abstiendrai, de même que la grande majorité des membres de mon groupe.
Le présent texte – nous le savons – est éminemment politique, à l’heure où le projet de loi d’orientation agricole se profile. Ce dernier nous permettra, du moins je l’espère, d’examiner tous les enjeux – je dis bien tous les enjeux – et de concevoir les actions cohérentes à même d’y répondre.
Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et INDEP.
Il va être procédé dans les conditions prévues par l’article 56 du règlement au scrutin public solennel sur la proposition de loi, modifiée, pour un choc de compétitivité en faveur de la ferme France.
Le scrutin est ouvert.
Le scrutin a lieu.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d'abord à saluer la qualité des travaux préparatoires sur ce texte. Je pense à la fois au premier rapport, établi par M. Duplomb, et au second rapport, rédigé par MM. Duplomb, Mérillou et Louault, qui ont permis d'éclairer nos débats en préparant l'examen de cette proposition de loi.
Monsieur Duplomb, nous n'avons pas toujours été d'accord. C'est la vertu du débat démocratique, et je me félicite que celui-ci ait eu lieu. Sur les questions agricoles, il y a trop de non-dits ; les problèmes sont trop rarement mis sur la table. On a parfois cru que le consensus régnait, alors qu'un certain nombre de points méritaient d'être explicités.
Pour avancer en matière d'agriculture, nous avons besoin de science et non de postures ; de respect et non de mises au ban ; de progrès et non de crainte du progrès. Je ne vois pas pourquoi le secteur agricole serait le seul que l'on priverait des moyens qu'offrent les progrès technologiques et techniques, alors qu'il a été le premier à en bénéficier. §
À chaque nouvelle avancée, qu'il s'agisse de l'amélioration de telle ou telle variété ou de l'utilisation des drones, on voudrait dire au monde agricole : « Vous, vous n'aurez pas droit au progrès technique. » §C'est – je le dis au passage – assez offensant.
Nous avons besoin de solutions, et non d'injonctions ; de réel, et non de postures. Or la vérité est que la ferme France a perdu en compétitivité et en souveraineté.
On peut toujours aller chercher les causes de nos problèmes à l'extérieur de nos frontières. M. Gay a évoqué – c'est un débat entre nous – le libre-échange. Mais ce seul paramètre n'expliquera jamais pourquoi la France est pour ainsi dire le seul pays d'Europe à avoir perdu en souveraineté et en compétitivité agricoles. Nous devons nous pencher sur la question. De ce point de vue, le débat s'est révélé particulièrement intéressant.
Nous avons avancé au cours des dernières années, et pas seulement depuis 2017. À mon sens, la loi Égalim a posé des jalons importants s'agissant de la rémunération.
Monsieur Labbé, vous tenez comme moi aux PAT, qui ont été créés par une loi de 2014 : notre pays en dénombre aujourd'hui 400, contre 20 en 2019. Reconnaissons que l'on a progressé sur un certain nombre de sujets en faveur de notre souveraineté.
Enfin, prenons garde aux discours que nous tenons sur l'agriculture. Je me félicite qu'au Sénat, nous nous soyons efforcés d'éviter les caricatures.
Nous avons besoin des agriculteurs, d'abord pour nous nourrir. Croire que ce problème est résolu pour la nuit des temps serait commettre une erreur funeste, qu'il s'agisse de l'agriculture ou de l'élevage.
La France doit préserver sa souveraineté alimentaire. Chacun doit l'entendre, jusqu'à la rue Cambon. Cela vaut aussi pour l'élevage ! §On ne me fera pas croire que tant que nous importerons des produits d'élevage, nous devrons réduire notre propre production.
Il faut dire aux éleveurs que nous avons besoin d'eux.
Personne ne demande plus à voter ?…
Le scrutin est clos.
J’invite Mmes et MM. les secrétaires à constater le résultat du scrutin.
Mmes et MM. les secrétaires constatent le résultat du scrutin.
Nous avons besoin d'eux, non seulement pour nous nourrir, mais aussi pour entretenir les prairies et stocker du carbone, préserver les haies et les paysages, notamment en luttant contre les incendies. Ils assurent un ensemble de fonctions et d'aménités.
Il faut en finir avec cette chasse permanente à l'élevage et aux éleveurs.
Voici, compte tenu de l’ensemble des délégations de vote accordées par les sénateurs aux groupes politiques et notifiées à la présidence, le résultat du scrutin n° 291 :
Nombre de votants332Nombre de suffrages exprimés304Pour l’adoption210Contre 94Le Sénat a adopté.
Mme Nathalie Goulet et M. Hugues Saury applaudissent.
Applaudissements sur les travées des groupes Les Républicains et UC, ainsi que sur des travées des groupes RDSE et INDEP.
Il faut rendre à l'élevage la place qu'il mérite et mettre fin à une stratégie aussi mortifère, qui entraîne non pas la baisse de la consommation, mais le déclin de notre souveraineté. Car c'est précisément ce qui se passe : il suffit de regarder les courbes pour s'en convaincre.
Monsieur Duplomb, au cours de ce débat, j'ai particulièrement échangé avec vous.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, je tiens tout d’abord à saluer la qualité des travaux préparatoires sur ce texte. Je pense à la fois au premier rapport, établi par M. Duplomb, et au second rapport, rédigé par MM. Duplomb, Mérillou et Louault, qui ont permis d’éclairer nos débats en préparant l’examen de cette proposition de loi.
Monsieur Duplomb, nous n’avons pas toujours été d’accord. C’est la vertu du débat démocratique, et je me félicite que celui-ci ait eu lieu. Sur les questions agricoles, il y a trop de non-dits ; les problèmes sont trop rarement mis sur la table. On a parfois cru que le consensus régnait, alors qu’un certain nombre de points méritaient d’être explicités.
Pour avancer en matière d’agriculture, nous avons besoin de science et non de postures ; de respect et non de mises au ban ; de progrès et non de crainte du progrès. Je ne vois pas pourquoi le secteur agricole serait le seul que l’on priverait des moyens qu’offrent les progrès technologiques et techniques, alors qu’il a été le premier à en bénéficier.
Sinon, vous auriez le sentiment que c'est vous que j'attaque…
Ce débat m'a semblé utile. Nous devons regarder lucidement la situation de l'agriculture française. §
En effet, monsieur le sénateur : j'ai bien noté que vous étiez présent. Mais ne vous plaignez pas que ce ne soit pas vous que je regarde ; sinon, vous auriez le sentiment que c'est vous que j'attaque…
Ce débat m'a semblé utile. Nous devons considérer lucidement la situation de l'agriculture française. §
M. François Calvet manifeste son approbation.
À chaque nouvelle avancée, qu’il s’agisse de l’amélioration de telle ou telle variété ou de l’utilisation des drones, on voudrait dire au monde agricole : « Vous, vous n’aurez pas droit au progrès technique. » §C’est – je le dis au passage – assez offensant.
Nous avons besoin de solutions, et non d’injonctions ; de réel, et non de postures. Or la vérité est que la ferme France a perdu en compétitivité et en souveraineté.
On peut toujours aller chercher les causes de nos problèmes à l’extérieur de nos frontières. M. Gay a évoqué – c’est un débat entre nous – le libre-échange. Mais ce seul paramètre n’expliquera jamais pourquoi la France est pour ainsi dire le seul pays d’Europe à avoir perdu en souveraineté et en compétitivité agricoles. Nous devons nous pencher sur la question. De ce point de vue, le débat s’est révélé particulièrement intéressant.
Nous avons avancé au cours des dernières années, et pas seulement depuis 2017. À mon sens, la loi Égalim a posé des jalons importants s’agissant de la rémunération.
Monsieur Labbé, vous tenez comme moi aux PAT, qui ont été créés par une loi de 2014 : notre pays en dénombre aujourd’hui 400, contre 20 en 2019. Reconnaissons que l’on a progressé sur un certain nombre de sujets en faveur de notre souveraineté.
Enfin, prenons garde aux discours que nous tenons sur l’agriculture. Je me félicite qu’au Sénat, nous nous soyons efforcés d’éviter les caricatures.
Nous avons besoin des agriculteurs, d’abord pour nous nourrir. Croire que ce problème est résolu pour la nuit des temps serait commettre une erreur funeste, qu’il s’agisse de l’agriculture ou de l’élevage.
La France doit préserver sa souveraineté alimentaire. Chacun doit l’entendre, jusqu’à la rue Cambon. Cela vaut aussi pour l’élevage ! §On ne me fera pas croire que tant que nous importerons des produits d’élevage, nous devrons réduire notre propre production.
Il faut dire aux éleveurs que nous avons besoin d’eux.
Nous avons besoin de reconquérir notre souveraineté. En la matière, nous devons admettre notre échec collectif.
Considérer la question avec lucidité en se gardant des pures injonctions : c'était bien l'objet du texte. D'autres initiatives, parlementaires ou gouvernementales, viendront, à commencer par le projet de loi d'orientation agricole.
Nous devons être au rendez-vous pour les agricultrices, pour les agriculteurs, pour notre agriculture. La souveraineté alimentaire est aussi importante que les autres formes de souveraineté : énergétique, industrielle ou militaire.
Applaudissements sur les travées du groupe RDPI, ainsi que sur des travées des groupes INDEP, RDSE, UC et Les Républicains.
Nous avons besoin d’eux, non seulement pour nous nourrir, mais aussi pour entretenir les prairies et stocker du carbone, préserver les haies et les paysages, notamment en luttant contre les incendies. Ils assurent un ensemble de fonctions et d’aménités.
Il faut en finir avec cette chasse permanente à l’élevage et aux éleveurs.
Mes chers collègues, nous allons interrompre nos travaux pour quelques instants.
La séance est suspendue.
Mme Nathalie Goulet et M. Hugues Saury applaudissent.
La séance, suspendue à quinze heures quarante-cinq, est reprise à quinze heures cinquante.
Il faut rendre à l’élevage la place qu’il mérite et mettre fin à une stratégie aussi mortifère, qui entraîne non pas la baisse de la consommation, mais le déclin de notre souveraineté. Car c’est précisément ce qui se passe : il suffit de regarder les courbes pour s’en convaincre.
Monsieur Duplomb, au cours de ce débat, j’ai particulièrement échangé avec vous.
En effet, monsieur le sénateur : j’ai bien noté que vous étiez présent. Mais ne vous plaignez pas que ce ne soit pas vous que je regarde ; sinon, vous auriez le sentiment que c’est vous que j’attaque…
Ce débat m’a semblé utile. Nous devons considérer lucidement la situation de l’agriculture française. §
Nous avons besoin de reconquérir notre souveraineté. En la matière, nous devons admettre notre échec collectif.
Considérer la question avec lucidité en se gardant des pures injonctions : c’était bien l’objet du texte. D’autres initiatives, parlementaires ou gouvernementales, viendront, à commencer par le projet de loi d’orientation agricole.
Nous devons être au rendez-vous pour les agricultrices, pour les agriculteurs, pour notre agriculture. La souveraineté alimentaire est aussi importante que les autres formes de souveraineté : énergétique, industrielle ou militaire.
L'ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 (projet n° 539, texte de la commission n° 612, rapport n° 611).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a quatre-vingts ans, en Europe, le pouvoir nazi et les autorités de collaboration ont confisqué aux Juifs leurs biens avant de s'en prendre à leur vie, de les contraindre à la clandestinité ou à l'exil.
Il y a quatre-vingts ans, en France même, il a été décidé que les possessions des Juifs pouvaient leur être enlevées. Souvenirs, objets du quotidien, livres : autant de biens spoliés et pillés par centaines de milliers qui n'ont pas pu être retrouvés et rendus.
Les œuvres et objets d'art n'ont pas échappé à ce destin. D'abord, par la main de l'Allemagne nazie, puis avec la complicité active de l'État français, par le biais de son commissariat général aux questions juives, les galeries d'art ont été « aryanisées », les biens des professionnels et des particuliers ont été spoliés. Nombre de familles persécutées n'ont eu d'autre choix que de fuir en vendant leurs biens pour financer leur survie ou leur exil forcé.
Derrière chaque œuvre, il y a une histoire familiale. Derrière chaque spoliation, il y a un drame humain. À chaque restitution, c'est un acte de justice qui est rendu.
Ce chemin de justice, nous devons continuer à le tracer ; les derniers témoins de la Shoah sont encore parmi nous – plus pour longtemps – et l'antisémitisme n'appartient toujours pas au passé.
En 1995, dans son discours au Vélodrome d'Hiver, le président Chirac a reconnu la complicité de la France dans la déportation et l'assassinat des Juifs de France au cours de l'occupation du pays par les nazis.
En 1997, la mission Mattéoli a levé le voile sur le sujet, longtemps oublié, des spoliations des Juifs de France, en dénombrant les avoirs en déshérence dans les banques et les compagnies d'assurance et en dressant un bilan des œuvres spoliées encore à la garde des musées nationaux. Ces recherches ont permis de rappeler que les spoliations participaient de l'horreur du génocide, puisqu'elles procédaient de la même volonté de priver les victimes de leur individualité.
Je voudrais dire quelques-uns de leurs noms.
Hugo Simon et Gertrud Simon furent contraints de laisser derrière eux leurs biens pour fuir au Brésil, rompant ainsi avec l'existence qu'ils avaient reconstruite après leur premier exil d'Allemagne, en 1933 ; quatre-vingts ans plus tard, lorsque leur arrière-petit-fils Rafael Cardoso s'est vu restituer le tableau Nus dans un paysage de Max Pechstein, il a prononcé ses mots : « Notre souhait […] est que cet objet serve à raconter l'histoire de nos aïeux et de tous ceux que l'Europe a perdus [...] au nom du délire de la pureté raciale. Nous désirons aussi que cette restitution puisse ouvrir une voie plus saine pour les relations entre les institutions culturelles et les familles spoliées. Le mot allemand pour la réparation, Wiedergutmachung, qui veut littéralement dire “rendre bon de nouveau”, exprime parfaitement l'esprit de ce que nous pouvons réussir quand nous nous consacrons ensemble à réparer l'irréparable. »
Nora Stiasny, déportée et assassinée en 1942 avec sa mère, comme son mari et son fils, vendit pour presque rien ses biens à de faux amis qui trahirent sa confiance, sans parvenir pour autant à échapper au sort tragique qui l'attendait. L'année dernière, grâce à un projet de loi défendu par Roselyne Bachelot et adopté à l'unanimité des deux chambres, nous avons restitué à ses ayants droit Rosiers sous les arbres, tableau de Gustav Klimt, dont elle avait dû se séparer pour tenter, en vain, de fuir l'Autriche en 1938, année de l'Anschluss.
Mathilde Javal vit son appartement parisien pillé et ses biens ensuite dispersés. Après la guerre, ils furent en partie rapatriés en France, mais c'est plus de soixante-dix ans plus tard que le lien a été fait entre elle et deux de ses tableaux. Contactée par des généalogistes, une de leurs ayants droit, Marion Bursaux, a découvert en 2018 ces œuvres et, au travers d'elles, le souvenir d'une famille qu'elle avait toujours recherché.
C'est en contemplant ensemble les œuvres au Louvre que les descendants d'Adolphe et Mathilde Javal se sont rencontrés pour la première fois.
Gertrud et Hugo Simon, Nora Stiasny, Mathilde Javal, et tous ces noms, tous ces destins, qui restent aujourd'hui encore anonymes. Nous devons sans relâche continuer à en chercher les traces.
Pour ce faire, des investigations doivent être conduites jusque dans les collections publiques où cet héritage injustement spolié est souvent méconnu.
On estime à au moins 100 000 le nombre d'œuvres, d'objets d'arts et d'instruments de musique spoliés aux seuls Juifs de France, sans compter les millions de livres. S'ils ont été nombreux à avoir été restitués dans l'immédiat après-guerre, d'autres n'ont pas encore retrouvé leurs légitimes propriétaires. Certains sont passés de main en main, jusqu'à se retrouver dans les collections nationales.
Aryaniser, piller et spolier les biens culturels des Juifs, c'était tenter d'effacer non seulement les êtres que l'on brise, mais aussi leur héritage que l'on vole, leur histoire, leur individualité, leur postérité. Les réduire à un numéro sans voix, sans bagages et sans droits.
Rien ne peut les ramener ; rien ne peut inverser le cours de l'histoire. Mais nous pouvons rendre possible la restitution de leurs biens culturels à leurs familles, à leurs ayants droit.
Nous le devons aux victimes d'hier et à leurs héritiers d'aujourd'hui, pour leur rendre un fragment d'histoire familiale, pour que ce qui est juste ne soit plus un combat législatif sans fin, mais un droit.
La tâche est immense, ardue, car les spoliateurs sont aussi des dissimulateurs. Démêler cet écheveau de faux-semblants, dissiper les simulacres forgés pour masquer l'origine d'une œuvre volée, exige non seulement une intense détermination, mais aussi la mobilisation d'une somme d'informations, de connaissances d'une grande complexité pour traquer les ventes forcées, les échanges suspects, les saisies ou les pillages d'aryanisation et parvenir enfin à retracer l'itinéraire tortueux de ces œuvres.
Ce que le législateur va permettre aujourd'hui, c'est l'historien qui l'a construit.
Ces dernières décennies, de nombreuses études conduites en Europe, essentiellement en France et en Allemagne, ont mis au jour, numérisé et partagé des sources d'archives qui permettent de lutter contre l'oubli. Nul ne peut désormais ignorer ces ressources.
Je veux saluer ici le travail de Mme Corinne Bouchoux, sénatrice de Maine-et-Loire, qui, dans son rapport sur les œuvres culturelles spoliées de 2013, a fait des propositions pour relancer le travail d'enquête.
En 2018, à l'occasion de la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv, le Premier ministre s'était engagé à « faire mieux » en matière de recherche et de restitution des œuvres d'art spoliées aux familles juives.
C'est pour cette raison que la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS) a été créée en 2019 au sein du ministère de la culture : pour piloter et animer cette politique publique de recherche, de réparation et de mémoire.
Je tiens à remercier personnellement David Zivie et son équipe, dont l'expertise et l'engagement, mis au service des musées, contribuent à « faire mieux ».
Longtemps, ces recherches se sont concentrées sur les œuvres récupérées par les Alliés qui n'ont pu, malgré bien des efforts, être restituées à des propriétaires restés inconnus. Elles ont été siglées et inventoriées MNR, pour Musée Nationaux Récupération, et confiées à la garde des musées. En attente de leur légitime propriétaire, ces œuvres, lorsqu'elles ont été spoliées, peuvent être restituées de droit, sans loi spécifique, car elles ne sont jamais entrées dans nos collections publiques.
Depuis la création de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés, les recherches ont été étendues à d'autres types d'œuvres, entrées en toute légalité dans les collections, parfois bien des années, voire des décennies, après la guerre.
Dans deux cas sur trois, c'est sur l'initiative du ministère de la culture que les œuvres spoliées sont identifiées et restituées aux descendants.
Ces restitutions ont tissé un lien entre les chercheurs et experts d'hier et d'aujourd'hui. Je pense ainsi avec émotion à l'héroïque Rose Valland, qui, attachée bénévole au musée du Jeu de Paume, a inventorié clandestinement les œuvres spoliées qui y étaient entreposées pendant l'Occupation.
Aujourd'hui, une nouvelle génération d'historiens s'engagent avec détermination dans les recherches de provenance. Il s'agit désormais d'expertiser les collections sur une tout autre échelle et de déceler l'origine douteuse d'œuvres entrées dans les collections publiques depuis 1933.
Les professionnels de l'art sont désormais prêts à conduire ce chantier, et le ministère de la culture les y encourage. Ces préoccupations figurent aujourd'hui dans la formation initiale des conservateurs et des commissaires-priseurs, à l'École du Louvre, à l'Institut national du patrimoine et, depuis 2022, dans un nouveau diplôme de l'université Paris-Nanterre spécialisé dans la recherche de provenance.
Pour autant, lorsque ces longues et difficiles recherches aboutissent, lorsqu'une œuvre spoliée est repérée comme telle dans les collections publiques, lorsque l'on en a identifié les propriétaires, lorsque toutes les parties s'accordent sur le principe de la restitution, il demeure impossible de la restituer sans passer par une loi spécifique pour déroger au principe d'inaliénabilité des collections publiques. Or cette loi ne peut intervenir qu'au terme d'un processus législatif nécessairement long.
Prenons un exemple : celui de Georges Bernheim, galeriste d'avant-guerre, merveilleux découvreur des grands artistes modernes, dont les biens furent spoliés pendant l'Occupation. En 2018, l'un de ses tableaux volés a été retrouvé dans les collections du musée Utrillo-Valadon de la ville de Sannois. Toutes les parties prenantes étaient d'accord pour le restituer : la ville de Sannois, qui en était propriétaire, la Commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l'Occupation (CIVS), le ministère de la culture et les ayants droit. Toutefois, pour que l'œuvre soit restituée, il a fallu attendre quatre ans, afin qu'une loi d'espèce présentée par Roselyne Bachelot, dont je veux saluer la détermination, soit votée.
Dans la lignée de la politique volontariste que nous menons depuis plusieurs années, nous souhaitons, avec cette loi, offrir un horizon légal clair et juste aux démarches de restitution, afin que les œuvres spoliées conservées dans les collections publiques puissent être restituées, sans délai supplémentaire, sans perdre des années à chaque fois.
Toutes les collections publiques seront concernées, qu'elles soient dans des musées nationaux relevant du ministère de la culture, dans des musées territoriaux, dans des établissements publics non muséaux qui détiennent des collections ou encore dans des bibliothèques.
Avec cette loi, lorsqu'après enquête, la spoliation aura été reconnue par la commission consultative indépendante et par le propriétaire public, quel qu'il soit, la restitution de l'œuvre s'effectuera de droit. Pour l'État, un décret simple de la Première ministre suffira ; pour les collectivités, une décision de l'organe délibérant.
La commission consultative chargée d'apprécier l'existence et les circonstances de la spoliation sera la CIVS, qui a prouvé depuis sa création son expertise et sa légitimité. Organe spécialisé dans l'appréciation des faits de spoliation, elle examine les faits de vols, de pillage, d'aryanisation, ainsi que les ventes contraintes et peut recommander à la Première ministre des mesures de réparation si ces faits constituent des spoliations antisémites.
Cette loi traite du passé et des biens déjà entrés dans les collections, mais elle s'imposera aussi aux futures acquisitions : une œuvre acquise entre 1933 et 1945 dont il sera impossible de déterminer avec certitude la trajectoire ne devra pas entrer dans une collection publique.
Ce projet de loi est le premier à reconnaître, depuis la Libération, la spoliation spécifique subie par les Juifs, en France et partout, du fait de l'Allemagne nazie et des diverses autorités qui lui ont été liées.
Avec l'insertion de quatre nouveaux articles dans le code du patrimoine, je vous propose d'ouvrir un nouveau chapitre du rapport que nous entretenons avec notre histoire, dans le sens de la justice et de la vérité historique.
Sous l'impulsion des chercheurs et sous réserve de l'avis de la CIVS, grâce à cette loi-cadre, chaque bien culturel spolié puis entré dans les collections publiques pourra être restitué aux ayants droit de son propriétaire originel.
Nous élargissons le champ de compétence de la CIVS pour qu'elle puisse traiter des dossiers de spoliations antisémites intervenues entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945, et non pas seulement pendant l'Occupation, quel que soit le lieu de spoliation, parce que même volées à l'étranger, des œuvres spoliées peuvent se trouver aujourd'hui dans une collection publique française.
Telle est désormais la portée de cette nouvelle ambition, qui nous engage et nous oblige.
En 1997, année de la mission Mattéoli, Patrick Modiano écrivait dans Dora Bruder : « Il faut longtemps pour que resurgisse à la lumière ce qui a été effacé. Des traces subsistent dans des registres et l'on ignore où ils sont cachés et quels gardiens veillent sur eux et si ces gardiens consentiront à vous les montrer. Ou peut-être ont-ils oublié tout simplement que ces registres existaient. » Et plus loin : « En écrivant ce livre, je lance des appels, comme des signaux de phare dont je doute malheureusement qu'ils puissent éclairer la nuit. »
Chercheurs, historiens, associations, descendants des familles, généalogistes, élus… Ils ont été nombreux à entendre ces appels et à nous aider à éclairer la nuit.
Rien ne saurait réparer la tragédie de la Shoah. Rien ne saurait rendre aux familles les objets du quotidien massivement spoliés et pillés, qu'il est matériellement impossible de restituer à des hommes, des femmes, des enfants que l'État français a livrés en collaborant avec le régime nazi.
Mais nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour opposer la justice à la cruauté, au cynisme et à l'ignominie.
Ce chemin de justice a été ouvert par les résistants, dans le maquis, à Londres, en Afrique du Nord, mais aussi dans nos musées. Ouvert par Rose Valland, ouvert par tous ceux et celles qui se sont battus pour rendre les restitutions possibles.
Avec cette loi, nous rendons hommage à leur engagement et nous en montrons dignes. §
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certains moments législatifs sont empreints d'une solennité et d'une émotion particulières. Le projet de loi que nous examinons aujourd'hui en est un. Le législateur n'a pas à écrire l'histoire, mais sa responsabilité peut être de panser certaines plaies du passé.
Les spoliations de biens culturels font partie des crimes de la Shoah pour lesquels nous conservons une dette imprescriptible, selon les mots prononcés par le Président de la République Jacques Chirac en 1995. Elles ne peuvent être dissociées de la politique d'extermination des Juifs d'Europe mise en œuvre par le régime nazi et ses complices, et à laquelle le régime de Vichy a pris toute sa part. En privant ces personnes de leurs œuvres et objets d'art, de leurs livres ou de leurs instruments de musique, c'est bien leur dignité, leur culture, leur histoire et leur identité qui leur ont été retirées.
Même si ces crimes sont irréparables, nous pouvons, et même nous devons faire œuvre de justice et d'humanité en corrigeant ce qui peut l'être. En facilitant la restitution des biens culturels spoliés conservés dans nos collections, votre projet de loi, madame la ministre, y contribue de manière indiscutable.
Ce texte s'inscrit dans la continuité de la première loi de restitution des biens spoliés, que nous avons votée l'an dernier. Nous avions alors unanimement souscrit à la nécessité de lever l'inaliénabilité par devoir vis-à-vis des victimes, mais aussi par nécessité pour nos collections. Nous sommes tous d'accord : ces biens n'y ont pas leur place.
C'est pourquoi notre commission de la culture accueille très favorablement le principe d'une loi-cadre. Nous sommes en effet convaincus que le devoir de mémoire et de réparation nous commande d'accélérer le rythme des restitutions avant que la mémoire des familles des victimes ne s'estompe ou que les recherches ne se révèlent impossibles.
La France doit prendre des mesures fortes pour que des solutions justes et équitables aux spoliations de biens culturels confisquées par les nazis soient trouvées, conformément aux principes de Washington de 1998.
De ce point de vue, l'adoption d'une loi-cadre nous parait préférable au vote d'une multitude de lois d'espèce. D'abord, parce que c'est le symbole de notre engagement à aller plus loin sur le chemin de la réparation des spoliations antisémites. Mais aussi, parce que c'est une réponse de long terme, globale, fiable et transparente, au problème soulevé par ces spoliations, sans nécessiter l'autorisation au cas par cas du Parlement.
Nous espérons aussi que les perspectives plus tangibles de restitution offertes par une loi-cadre contribueront à mieux sensibiliser les acteurs culturels à l'enjeu des spoliations et à intensifier les recherches proactives, encore trop modestes.
Nous sommes conscients que la complexité et la lourdeur de la procédure parlementaire peuvent décourager certains établissements de s'investir dans ces recherches, car ils n'ont pas la certitude qu'elles aboutiront à une restitution, au moins à brève échéance.
Ce projet de loi crée une procédure administrative permettant à l'État ou aux collectivités territoriales, par dérogation au principe d'inaliénabilité, de restituer les biens culturels appartenant à leurs collections qui auraient été spoliés dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945, après avis de la CIVS sur l'existence de la spoliation et ses circonstances.
Cette procédure nous apparaît satisfaisante à plusieurs titres. Tout d'abord, la rédaction garantit que la restitution s'impose aux personnes publiques lorsqu'il est établi que le bien a fait l'objet d'une spoliation. Ensuite, le périmètre de la procédure est suffisamment large pour qu'elle soit applicable à tous les types de biens culturels relevant du domaine public, y compris le mobilier, les livres et les instruments de musique, mais aussi aux différentes formes de spoliations liées à des persécutions antisémites, quels que soient la personne responsable et le lieu de leur perpétration.
Enfin, le recours à la CIVS garantit un examen scientifique et impartial. Son expertise en matière de caractérisation des spoliations est reconnue et sa compétence en matière de biens culturels est assurée depuis la réforme intervenue en 2018. Son avis ne doit cependant revêtir qu'un caractère simple, afin de responsabiliser les collectivités publiques et conserver une dimension symbolique à la décision de restitution. Le risque que son avis ne soit pas suivi semble assez faible.
L'une des innovations de ce projet de loi est la possibilité offerte aux parties de conclure un accord amiable sur des modalités de réparation autres que la restitution, une fois le principe de celle-ci obtenu par les victimes, par exemple le maintien du bien dans la collection publique en contrepartie d'une compensation financière.
Cette disposition est évidemment avantageuse pour la préservation des collections publiques. Comme l'a montré la transaction conclue entre le musée Labenche de Brive-la-Gaillarde et les héritiers d'un propriétaire allemand spolié, elle pourrait aussi intéresser des familles, en leur garantissant que demeure, dans un lieu accessible au public, une trace mémorielle de la spoliation dont elles ont été victimes. Quoi qu'il en soit, il n'est pas contestable qu'elle constitue une solution juste et équitable au même titre que la restitution, puisqu'elle ne pourra en aucune manière être imposée et qu'elle préserve la reconnaissance de la spoliation et sa juste indemnisation.
Il reste que sa mise en œuvre pourrait néanmoins se heurter à une problématique financière, compte tenu de la faiblesse des crédits d'acquisition dont disposent les établissements. Cela soulève la question des moyens qui seront déployés pour garantir la bonne application de cette loi. J'y reviendrai.
L'article 2 autorise les propriétaires des musées privés ayant reçu l'appellation « musée de France » à restituer, après avis de la CIVS, les biens spoliés de leurs collections acquis par dons ou legs ou avec le concours financier d'une collectivité publique, dans la mesure où ils sont en principe incessibles, sauf à un autre musée de France. La commission est favorable à cette disposition. Elle permet non seulement de lever les obstacles juridiques qui pourraient bloquer la restitution de certains biens spoliés par des musées privés, mais aussi d'inciter les propriétaires de ces établissements à engager des recherches sur la provenance de leurs collections. La commission a d'ailleurs adopté deux amendements visant à faciliter sa bonne application.
Si le projet de loi crée l'impulsion qui nous faisait défaut en facilitant les restitutions, il reste encore un immense travail qui ne pourra se faire à moyens constants, sauf à décevoir les espoirs suscités par ce projet de loi.
Malgré les progrès réalisés ces dernières années, l'engagement de la France en termes humains et financiers reste modeste en comparaison avec celui de plusieurs de nos voisins européens : l'État fédéral allemand et les Länder ont consacré, depuis quinze ans, plus de 40 millions d'euros à la recherche de provenance des biens spoliés.
Pour mettre en œuvre ce projet de loi, les effectifs de la CIVS et de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés de votre ministère devront être renforcés. Le travail de recherche de provenance, clé de voûte des restitutions à venir, devra aussi être intensifié.
Il s'agit d'un travail titanesque, complexe et chronophage, qui requiert un personnel qualifié et disponible. Nous n'y parviendrons pas sans enrichir l'offre de formation en matière de recherche de provenance ni sans donner aux établissements de nouveaux moyens pour recruter des chercheurs de provenance quitte à envisager des recrutements mutualisés.
Maintenant que l'obstacle législatif aux restitutions est en passe d'être levé, ne restons pas au milieu du gué. Même si le travail de recherche de provenance ne débouchera pas toujours sur une restitution, tant l'identification des biens et des ayants droit se révèle parfois complexe, elle constitue une exigence pour mieux rendre compte de l'histoire des spoliations et retracer le parcours des œuvres conservées dans nos collections.
La médiation des biens spoliés fait partie intégrante de la politique de réparation. Elle est une autre manière de rendre aux victimes une part de leur histoire et de leur identité dans les cas où la restitution se révèle impossible. §
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la question de la provenance des œuvres d'art exposées dans les collections publiques est un sujet majeur pour les musées français. Elle appelle une profonde réflexion sur notre rapport à l'histoire, à la politique mémorielle et à la formation de notre patrimoine culturel. C'est un vaste débat de société qui nous engage collectivement !
Au cours des décennies précédentes, l'humain était au cœur de la politique française de réparation des spoliations. L'heure était au recueil des témoignages et des récits transmis par les ultimes témoins du passé : commissaires-priseurs, fonctionnaires, conservateurs de musée, marchands d'art.
Aujourd'hui, les biens culturels incarnent l'histoire et sont porteurs de mémoire pour les générations à venir. Nous, parlementaires, avons le devoir de participer à la formalisation de la politique française de restitution, grâce à ce projet de loi.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la déportation des Juifs de France s'est accompagnée du pillage méthodique de l'ensemble de leurs biens, notamment culturels.
Dès l'été 1940, de nombreux domiciles de familles juives ont été vidés – du sol au plafond –, de leur mobilier, de leurs œuvres d'art, de leurs instruments de musique. À Paris, première place mondiale du marché de l'art, pas moins de 40 000 appartements ont été pillés.
Les œuvres spoliées ont d'abord été stockées à l'ambassade d'Allemagne à Paris, puis au Louvre et, enfin, au musée du Jeu de Paume, à partir du mois de novembre 1940.
En France, on estime à 100 000 les œuvres volées ou vendues sous la contrainte, un nombre sans doute sous-évalué. Il est en effet calculé en s'appuyant sur les signalements réalisés après-guerre par les familles. Or toutes ne se sont pas manifestées.
Après la guerre, 60 000 de ces œuvres sont revenues en France, dont une grande partie a été rapidement restituée à ses propriétaires. Certains biens ont été vendus, tandis que d'autres ont été confiés aux musées français.
Oublié quelques années, le sujet de la restitution des œuvres spoliées est revenu sur le devant de la scène au milieu des années 1990.
Depuis une vingtaine d'années, le nombre de restitutions augmente peu à peu, à l'image de la Vierge à l'Enfant, de la Vierge de pitié et de la Scène de bataille : Siège de Carthage par Scipion Émilien, œuvres rendues au mois d'avril dernier à leurs ayants droit.
Malheureusement, certaines œuvres n'ont pas encore retrouvé leurs propriétaires et patientent dans les salles d'exposition de nos musées. C'est alors qu'interviennent les historiens spécialisés : leurs longues enquêtes sont le travail de toute une vie. Ils s'appuient sur un faisceau d'indices hétéroclites : archives nazies, services administratifs de l'État collaborateur, généalogistes, marques sur les œuvres elles-mêmes, descriptions par les familles lésées.
Je tiens à saluer la mémoire de Rose Valland, attachée de conservation à Paris pendant l'Occupation. Figure active de la Résistance, elle a pris de grands risques pour archiver l'ensemble des œuvres spoliées et conservées au musée du Jeu de Paume. Nous lui devons une grande partie des restitutions d'après-guerre. (Mme la ministre le confirme.)
Nous devons affronter ce passé. Pour les œuvres qui appartiennent aux collections publiques, seule une loi spécifique peut autoriser leur sortie du domaine public en raison de leur caractère inaliénable.
Pour faciliter les restitutions et éviter de légiférer au cas par cas, il était essentiel de prévoir une loi-cadre permettant d'aller plus vite. Nous pouvons nous féliciter que ce sujet soit l'une des priorités de votre ministère.
Ce texte pose également la question de l'après-restitution. Aucune compensation n'est prévue après la restitution de l'œuvre. Les musées vont devoir se réinventer pour continuer à faire vivre en leurs murs les œuvres rendues aux familles : l'art numérique peut être une piste de réflexion intéressante. Je suis également favorable au fait d'encourager les familles volontaires à permettre au public d'accéder périodiquement aux biens culturels restitués. Ces différents sujets nourriront, je l'espère, de prochains débats.
L'historien Philippe Verheyde écrit : « L'histoire des restitutions des biens juifs […] est une histoire qui reste à faire. » La France ouvre aujourd'hui un nouveau chapitre.
L'unanimité de notre assemblée sur ce sujet qui nous tient tant à cœur est un très bon signal. Ce débat est essentiel au regard de l'immensité et de la complexité du défi de la restitution d'œuvres. Il doit se poursuivre dans les mois à venir.
Le groupe Les Indépendants se félicite de ce texte et le votera. §
Adoption en procédure accélérée d’un projet de loi dans le texte de la commission modifié
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 (projet n° 539, texte de la commission n° 612, rapport n° 611).
La procédure accélérée a été engagée sur ce texte.
Dans la discussion générale, la parole est à Mme la ministre.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a quatre-vingts ans, en Europe, le pouvoir nazi et les autorités de collaboration ont confisqué aux Juifs leurs biens avant de s’en prendre à leur vie, de les contraindre à la clandestinité ou à l’exil.
Il y a quatre-vingts ans, en France même, il a été décidé que les possessions des Juifs pouvaient leur être enlevées. Souvenirs, objets du quotidien, livres : autant de biens spoliés et pillés par centaines de milliers qui n’ont pas pu être retrouvés et rendus.
Les œuvres et objets d’art n’ont pas échappé à ce destin. D’abord, par la main de l’Allemagne nazie, puis avec la complicité active de l’État français, par le biais de son commissariat général aux questions juives, les galeries d’art ont été « aryanisées », les biens des professionnels et des particuliers ont été spoliés. Nombre de familles persécutées n’ont eu d’autre choix que de fuir en vendant leurs biens pour financer leur survie ou leur exil forcé.
Derrière chaque œuvre, il y a une histoire familiale. Derrière chaque spoliation, il y a un drame humain. À chaque restitution, c’est un acte de justice qui est rendu.
Ce chemin de justice, nous devons continuer à le tracer ; les derniers témoins de la Shoah sont encore parmi nous – plus pour longtemps – et l’antisémitisme n’appartient toujours pas au passé.
En 1995, dans son discours au Vélodrome d’Hiver, le président Chirac a reconnu la complicité de la France dans la déportation et l’assassinat des Juifs de France au cours de l’occupation du pays par les nazis.
En 1997, la mission Mattéoli a levé le voile sur le sujet, longtemps oublié, des spoliations des Juifs de France, en dénombrant les avoirs en déshérence dans les banques et les compagnies d’assurance et en dressant un bilan des œuvres spoliées encore à la garde des musées nationaux. Ces recherches ont permis de rappeler que les spoliations participaient de l’horreur du génocide, puisqu’elles procédaient de la même volonté de priver les victimes de leur individualité.
Je voudrais dire quelques-uns de leurs noms.
Hugo Simon et Gertrud Simon furent contraints de laisser derrière eux leurs biens pour fuir au Brésil, rompant ainsi avec l’existence qu’ils avaient reconstruite après leur premier exil d’Allemagne, en 1933 ; quatre-vingts ans plus tard, lorsque leur arrière-petit-fils Rafael Cardoso s’est vu restituer le tableau Nus dans un paysage de Max Pechstein, il a prononcé ses mots : « Notre souhait […] est que cet objet serve à raconter l’histoire de nos aïeux et de tous ceux que l’Europe a perdus […] au nom du délire de la pureté raciale. Nous désirons aussi que cette restitution puisse ouvrir une voie plus saine pour les relations entre les institutions culturelles et les familles spoliées. Le mot allemand pour la réparation, Wiedergutmachung, qui veut littéralement dire “rendre bon de nouveau”, exprime parfaitement l’esprit de ce que nous pouvons réussir quand nous nous consacrons ensemble à réparer l’irréparable. »
Nora Stiasny, déportée et assassinée en 1942 avec sa mère, comme son mari et son fils, vendit pour presque rien ses biens à de faux amis qui trahirent sa confiance, sans parvenir pour autant à échapper au sort tragique qui l’attendait. L’année dernière, grâce à un projet de loi défendu par Roselyne Bachelot et adopté à l’unanimité des deux chambres, nous avons restitué à ses ayants droit Rosiers sous les arbres, tableau de Gustav Klimt, dont elle avait dû se séparer pour tenter, en vain, de fuir l’Autriche en 1938, année de l’Anschluss.
Mathilde Javal vit son appartement parisien pillé et ses biens ensuite dispersés. Après la guerre, ils furent en partie rapatriés en France, mais c’est plus de soixante-dix ans plus tard que le lien a été fait entre elle et deux de ses tableaux. Contactée par des généalogistes, une de leurs ayants droit, Marion Bursaux, a découvert en 2018 ces œuvres et, au travers d’elles, le souvenir d’une famille qu’elle avait toujours recherché.
C’est en contemplant ensemble les œuvres au Louvre que les descendants d’Adolphe et Mathilde Javal se sont rencontrés pour la première fois.
Gertrud et Hugo Simon, Nora Stiasny, Mathilde Javal, et tous ces noms, tous ces destins, qui restent aujourd’hui encore anonymes. Nous devons sans relâche continuer à en chercher les traces.
Pour ce faire, des investigations doivent être conduites jusque dans les collections publiques où cet héritage injustement spolié est souvent méconnu.
On estime à au moins 100 000 le nombre d’œuvres, d’objets d’arts et d’instruments de musique spoliés aux seuls Juifs de France, sans compter les millions de livres. S’ils ont été nombreux à avoir été restitués dans l’immédiat après-guerre, d’autres n’ont pas encore retrouvé leurs légitimes propriétaires. Certains sont passés de main en main, jusqu’à se retrouver dans les collections nationales.
Aryaniser, piller et spolier les biens culturels des Juifs, c’était tenter d’effacer non seulement les êtres que l’on brise, mais aussi leur héritage que l’on vole, leur histoire, leur individualité, leur postérité. Les réduire à un numéro sans voix, sans bagages et sans droits.
Rien ne peut les ramener ; rien ne peut inverser le cours de l’histoire. Mais nous pouvons rendre possible la restitution de leurs biens culturels à leurs familles, à leurs ayants droit.
Nous le devons aux victimes d’hier et à leurs héritiers d’aujourd’hui, pour leur rendre un fragment d’histoire familiale, pour que ce qui est juste ne soit plus un combat législatif sans fin, mais un droit.
La tâche est immense, ardue, car les spoliateurs sont aussi des dissimulateurs. Démêler cet écheveau de faux-semblants, dissiper les simulacres forgés pour masquer l’origine d’une œuvre volée, exige non seulement une intense détermination, mais aussi la mobilisation d’une somme d’informations, de connaissances d’une grande complexité pour traquer les ventes forcées, les échanges suspects, les saisies ou les pillages d’aryanisation et parvenir enfin à retracer l’itinéraire tortueux de ces œuvres.
Ce que le législateur va permettre aujourd’hui, c’est l’historien qui l’a construit.
Ces dernières décennies, de nombreuses études conduites en Europe, essentiellement en France et en Allemagne, ont mis au jour, numérisé et partagé des sources d’archives qui permettent de lutter contre l’oubli. Nul ne peut désormais ignorer ces ressources.
Je veux saluer ici le travail de Mme Corinne Bouchoux, sénatrice de Maine-et-Loire, qui, dans son rapport sur les œuvres culturelles spoliées de 2013, a fait des propositions pour relancer le travail d’enquête.
En 2018, à l’occasion de la commémoration de la rafle du Vel d’Hiv, le Premier ministre s’était engagé à « faire mieux » en matière de recherche et de restitution des œuvres d’art spoliées aux familles juives.
C’est pour cette raison que la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS) a été créée en 2019 au sein du ministère de la culture : pour piloter et animer cette politique publique de recherche, de réparation et de mémoire.
Je tiens à remercier personnellement David Zivie et son équipe, dont l’expertise et l’engagement, mis au service des musées, contribuent à « faire mieux ».
Longtemps, ces recherches se sont concentrées sur les œuvres récupérées par les Alliés qui n’ont pu, malgré bien des efforts, être restituées à des propriétaires restés inconnus. Elles ont été siglées et inventoriées MNR, pour Musée Nationaux Récupération, et confiées à la garde des musées. En attente de leur légitime propriétaire, ces œuvres, lorsqu’elles ont été spoliées, peuvent être restituées de droit, sans loi spécifique, car elles ne sont jamais entrées dans nos collections publiques.
Depuis la création de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés, les recherches ont été étendues à d’autres types d’œuvres, entrées en toute légalité dans les collections, parfois bien des années, voire des décennies, après la guerre.
Dans deux cas sur trois, c’est sur l’initiative du ministère de la culture que les œuvres spoliées sont identifiées et restituées aux descendants.
Ces restitutions ont tissé un lien entre les chercheurs et experts d’hier et d’aujourd’hui. Je pense ainsi avec émotion à l’héroïque Rose Valland, qui, attachée bénévole au musée du Jeu de Paume, a inventorié clandestinement les œuvres spoliées qui y étaient entreposées pendant l’Occupation.
Aujourd’hui, une nouvelle génération d’historiens s’engagent avec détermination dans les recherches de provenance. Il s’agit désormais d’expertiser les collections sur une tout autre échelle et de déceler l’origine douteuse d’œuvres entrées dans les collections publiques depuis 1933.
Les professionnels de l’art sont désormais prêts à conduire ce chantier, et le ministère de la culture les y encourage. Ces préoccupations figurent aujourd’hui dans la formation initiale des conservateurs et des commissaires-priseurs, à l’École du Louvre, à l’Institut national du patrimoine et, depuis 2022, dans un nouveau diplôme de l’université Paris-Nanterre spécialisé dans la recherche de provenance.
Pour autant, lorsque ces longues et difficiles recherches aboutissent, lorsqu’une œuvre spoliée est repérée comme telle dans les collections publiques, lorsque l’on en a identifié les propriétaires, lorsque toutes les parties s’accordent sur le principe de la restitution, il demeure impossible de la restituer sans passer par une loi spécifique pour déroger au principe d’inaliénabilité des collections publiques. Or cette loi ne peut intervenir qu’au terme d’un processus législatif nécessairement long.
Prenons un exemple : celui de Georges Bernheim, galeriste d’avant-guerre, merveilleux découvreur des grands artistes modernes, dont les biens furent spoliés pendant l’Occupation. En 2018, l’un de ses tableaux volés a été retrouvé dans les collections du musée Utrillo-Valadon de la ville de Sannois. Toutes les parties prenantes étaient d’accord pour le restituer : la ville de Sannois, qui en était propriétaire, la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation (CIVS), le ministère de la culture et les ayants droit. Toutefois, pour que l’œuvre soit restituée, il a fallu attendre quatre ans, afin qu’une loi d’espèce présentée par Roselyne Bachelot, dont je veux saluer la détermination, soit votée.
Dans la lignée de la politique volontariste que nous menons depuis plusieurs années, nous souhaitons, avec cette loi, offrir un horizon légal clair et juste aux démarches de restitution, afin que les œuvres spoliées conservées dans les collections publiques puissent être restituées, sans délai supplémentaire, sans perdre des années à chaque fois.
Toutes les collections publiques seront concernées, qu’elles soient dans des musées nationaux relevant du ministère de la culture, dans des musées territoriaux, dans des établissements publics non muséaux qui détiennent des collections ou encore dans des bibliothèques.
Avec cette loi, lorsqu’après enquête, la spoliation aura été reconnue par la commission consultative indépendante et par le propriétaire public, quel qu’il soit, la restitution de l’œuvre s’effectuera de droit. Pour l’État, un décret simple de la Première ministre suffira ; pour les collectivités, une décision de l’organe délibérant.
La commission consultative chargée d’apprécier l’existence et les circonstances de la spoliation sera la CIVS, qui a prouvé depuis sa création son expertise et sa légitimité. Organe spécialisé dans l’appréciation des faits de spoliation, elle examine les faits de vols, de pillage, d’aryanisation, ainsi que les ventes contraintes et peut recommander à la Première ministre des mesures de réparation si ces faits constituent des spoliations antisémites.
Cette loi traite du passé et des biens déjà entrés dans les collections, mais elle s’imposera aussi aux futures acquisitions : une œuvre acquise entre 1933 et 1945 dont il sera impossible de déterminer avec certitude la trajectoire ne devra pas entrer dans une collection publique.
Ce projet de loi est le premier à reconnaître, depuis la Libération, la spoliation spécifique subie par les Juifs, en France et partout, du fait de l’Allemagne nazie et des diverses autorités qui lui ont été liées.
Avec l’insertion de quatre nouveaux articles dans le code du patrimoine, je vous propose d’ouvrir un nouveau chapitre du rapport que nous entretenons avec notre histoire, dans le sens de la justice et de la vérité historique.
Sous l’impulsion des chercheurs et sous réserve de l’avis de la CIVS, grâce à cette loi-cadre, chaque bien culturel spolié puis entré dans les collections publiques pourra être restitué aux ayants droit de son propriétaire originel.
Nous élargissons le champ de compétence de la CIVS pour qu’elle puisse traiter des dossiers de spoliations antisémites intervenues entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945, et non pas seulement pendant l’Occupation, quel que soit le lieu de spoliation, parce que même volées à l’étranger, des œuvres spoliées peuvent se trouver aujourd’hui dans une collection publique française.
Telle est désormais la portée de cette nouvelle ambition, qui nous engage et nous oblige.
En 1997, année de la mission Mattéoli, Patrick Modiano écrivait dans Dora Bruder : « Il faut longtemps pour que resurgisse à la lumière ce qui a été effacé. Des traces subsistent dans des registres et l’on ignore où ils sont cachés et quels gardiens veillent sur eux et si ces gardiens consentiront à vous les montrer. Ou peut-être ont-ils oublié tout simplement que ces registres existaient. » Et plus loin : « En écrivant ce livre, je lance des appels, comme des signaux de phare dont je doute malheureusement qu’ils puissent éclairer la nuit. »
Chercheurs, historiens, associations, descendants des familles, généalogistes, élus… Ils ont été nombreux à entendre ces appels et à nous aider à éclairer la nuit.
Rien ne saurait réparer la tragédie de la Shoah. Rien ne saurait rendre aux familles les objets du quotidien massivement spoliés et pillés, qu’il est matériellement impossible de restituer à des hommes, des femmes, des enfants que l’État français a livrés en collaborant avec le régime nazi.
Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, il y a quatre-vingts ans, en Europe, le pouvoir nazi et les autorités de collaboration ont confisqué aux Juifs leurs biens avant de s’en prendre à leur vie, de les contraindre à la clandestinité ou à l’exil.
Il y a quatre-vingts ans, en France même, il a été décidé que les possessions des Juifs pouvaient leur être enlevées. Souvenirs, objets du quotidien, livres : autant de biens spoliés et pillés par centaines de milliers qui n’ont pas pu être retrouvés et rendus.
Les œuvres et objets d’art n’ont pas échappé à ce destin. D’abord, par la main de l’Allemagne nazie, puis avec la complicité active de l’État français, par le biais de son commissariat général aux questions juives, les galeries d’art ont été « aryanisées », les biens des professionnels et des particuliers ont été spoliés. Nombre de familles persécutées n’ont eu d’autre choix que de fuir en vendant leurs biens pour financer leur survie ou leur exil forcé.
Derrière chaque œuvre, il y a une histoire familiale. Derrière chaque spoliation, il y a un drame humain. À chaque restitution, c’est un acte de justice qui est rendu.
Ce chemin de justice, nous devons continuer à le tracer ; les derniers témoins de la Shoah sont encore parmi nous – plus pour longtemps – et l’antisémitisme n’appartient toujours pas au passé.
En 1995, dans son discours au Vélodrome d’Hiver, le président Chirac a reconnu la complicité de la France dans la déportation et l’assassinat des Juifs de France au cours de l’occupation du pays par les nazis.
En 1997, la mission Mattéoli a levé le voile sur le sujet, longtemps oublié, des spoliations des Juifs de France, en dénombrant les avoirs en déshérence dans les banques et les compagnies d’assurances et en dressant un bilan des œuvres spoliées encore à la garde des musées nationaux. Ces recherches ont permis de rappeler que les spoliations participaient de l’horreur du génocide, puisqu’elles procédaient de la même volonté de priver les victimes de leur individualité.
Je voudrais dire quelques-uns de leurs noms.
Hugo Simon et Gertrud Simon furent contraints de laisser derrière eux leurs biens pour fuir au Brésil, rompant ainsi avec l’existence qu’ils avaient reconstruite après leur premier exil d’Allemagne, en 1933 ; quatre-vingts ans plus tard, lorsque leur arrière-petit-fils Rafael Cardoso s’est vu restituer le tableau Nus dans un paysage de Max Pechstein, il a prononcé ses mots : « Notre souhait […] est que cet objet serve à raconter l’histoire de nos aïeux et de tous ceux que l’Europe a perdus […] au nom du délire de la pureté raciale. Nous désirons aussi que cette restitution puisse ouvrir une voie plus saine pour les relations entre les institutions culturelles et les familles spoliées. Le mot allemand pour la réparation, Wiedergutmachung, qui veut littéralement dire “rendre bon de nouveau”, exprime parfaitement l’esprit de ce que nous pouvons réussir quand nous nous consacrons ensemble à réparer l’irréparable. »
Nora Stiasny, déportée et assassinée en 1942 avec sa mère, comme son mari et son fils, vendit pour presque rien ses biens à de faux amis qui trahirent sa confiance, sans parvenir pour autant à échapper au sort tragique qui l’attendait. L’année dernière, grâce à un projet de loi défendu par Roselyne Bachelot et adopté à l’unanimité des deux chambres, nous avons restitué à ses ayants droit Rosiers sous les arbres, tableau de Gustav Klimt, dont elle avait dû se séparer pour tenter, en vain, de fuir l’Autriche en 1938, année de l’Anschluss.
Mathilde Javal vit son appartement parisien pillé et ses biens ensuite dispersés. Après la guerre, ils furent en partie rapatriés en France, mais c’est plus de soixante-dix ans plus tard que le lien a été fait entre elle et deux de ses tableaux. Contactée par des généalogistes, une de leurs ayants droit, Marion Bursaux, a découvert en 2018 ces œuvres et, au travers d’elles, le souvenir d’une famille qu’elle avait toujours recherché.
C’est en contemplant ensemble les œuvres au Louvre que les descendants d’Adolphe et Mathilde Javal se sont rencontrés pour la première fois.
Gertrud et Hugo Simon, Nora Stiasny, Mathilde Javal, et tous ces noms, tous ces destins, qui restent aujourd’hui encore anonymes. Nous devons sans relâche continuer à en chercher les traces.
Pour ce faire, des investigations doivent être conduites jusque dans les collections publiques où cet héritage injustement spolié est souvent méconnu.
On estime à au moins 100 000 le nombre d’œuvres, d’objets d’arts et d’instruments de musique spoliés aux seuls Juifs de France, sans compter les millions de livres. S’ils ont été nombreux à avoir été restitués dans l’immédiat après-guerre, d’autres n’ont pas encore retrouvé leurs légitimes propriétaires. Certains sont passés de main en main, jusqu’à se retrouver dans les collections nationales.
Aryaniser, piller et spolier les biens culturels des Juifs, c’était tenter d’effacer non seulement les êtres que l’on brise, mais aussi leur héritage que l’on vole, leur histoire, leur individualité, leur postérité. Les réduire à un numéro sans voix, sans bagages et sans droits.
Rien ne peut les ramener ; rien ne peut inverser le cours de l’histoire. Mais nous pouvons rendre possible la restitution de leurs biens culturels à leurs familles, à leurs ayants droit.
Nous le devons aux victimes d’hier et à leurs héritiers d’aujourd’hui, pour leur rendre un fragment d’histoire familiale, pour que ce qui est juste ne soit plus un combat législatif sans fin, mais un droit.
La tâche est immense, ardue, car les spoliateurs sont aussi des dissimulateurs. Démêler cet écheveau de faux-semblants, dissiper les simulacres forgés pour masquer l’origine d’une œuvre volée, exige non seulement une intense détermination, mais aussi la mobilisation d’une somme d’informations, de connaissances d’une grande complexité pour traquer les ventes forcées, les échanges suspects, les saisies ou les pillages d’aryanisation et parvenir enfin à retracer l’itinéraire tortueux de ces œuvres.
Ce que le législateur va permettre aujourd’hui, c’est l’historien qui l’a construit.
Ces dernières décennies, de nombreuses études conduites en Europe, essentiellement en France et en Allemagne, ont mis au jour, numérisé et partagé des sources d’archives qui permettent de lutter contre l’oubli. Nul ne peut désormais ignorer ces ressources.
Je veux saluer ici le travail de Mme Corinne Bouchoux, sénatrice de Maine-et-Loire, qui, dans son rapport sur les œuvres culturelles spoliées de 2013, a fait des propositions pour relancer le travail d’enquête.
En 2018, à l’occasion de la commémoration de la rafle du Vel d’Hiv, le Premier ministre s’était engagé à « faire mieux » en matière de recherche et de restitution des œuvres d’art spoliées aux familles juives.
C’est pour cette raison que la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945 (M2RS) a été créée en 2019 au sein du ministère de la culture : pour piloter et animer cette politique publique de recherche, de réparation et de mémoire.
Je tiens à remercier personnellement David Zivie et son équipe, dont l’expertise et l’engagement, mis au service des musées, contribuent à « faire mieux ».
Longtemps, ces recherches se sont concentrées sur les œuvres récupérées par les Alliés qui n’ont pu, malgré bien des efforts, être restituées à des propriétaires restés inconnus. Elles ont été siglées et inventoriées MNR, pour Musée Nationaux Récupération, et confiées à la garde des musées. En attente de leur légitime propriétaire, ces œuvres, lorsqu’elles ont été spoliées, peuvent être restituées de droit, sans loi spécifique, car elles ne sont jamais entrées dans nos collections publiques.
Depuis la création de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés, les recherches ont été étendues à d’autres types d’œuvres, entrées en toute légalité dans les collections, parfois bien des années, voire des décennies, après la guerre.
Dans deux cas sur trois, c’est sur l’initiative du ministère de la culture que les œuvres spoliées sont identifiées et restituées aux descendants.
Ces restitutions ont tissé un lien entre les chercheurs et experts d’hier et d’aujourd’hui. Je pense ainsi avec émotion à l’héroïque Rose Valland, qui, attachée bénévole au musée du Jeu de Paume, a inventorié clandestinement les œuvres spoliées qui y étaient entreposées pendant l’Occupation.
Aujourd’hui, une nouvelle génération d’historiens s’engage avec détermination dans les recherches de provenance. Il s’agit désormais d’expertiser les collections sur une tout autre échelle et de déceler l’origine douteuse d’œuvres entrées dans les collections publiques depuis 1933.
Les professionnels de l’art sont désormais prêts à conduire ce chantier, et le ministère de la culture les y encourage. Ces préoccupations figurent aujourd’hui dans la formation initiale des conservateurs et des commissaires-priseurs, à l’École du Louvre, à l’Institut national du patrimoine et, depuis 2022, dans un nouveau diplôme de l’université Paris-Nanterre spécialisé dans la recherche de provenance.
Pour autant, lorsque ces longues et difficiles recherches aboutissent, lorsqu’une œuvre spoliée est repérée comme telle dans les collections publiques, lorsque l’on en a identifié les propriétaires, lorsque toutes les parties s’accordent sur le principe de la restitution, il demeure impossible de la restituer sans passer par une loi spécifique pour déroger au principe d’inaliénabilité des collections publiques. Or cette loi ne peut intervenir qu’au terme d’un processus législatif nécessairement long.
Prenons un exemple : celui de Georges Bernheim, galeriste d’avant-guerre, merveilleux découvreur des grands artistes modernes, dont les biens furent spoliés pendant l’Occupation. En 2018, l’un de ses tableaux volés a été retrouvé dans les collections du musée Utrillo-Valadon de la ville de Sannois. Toutes les parties prenantes étaient d’accord pour le restituer : la ville de Sannois, qui en était propriétaire, la Commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation (CIVS), le ministère de la culture et les ayants droit. Toutefois, pour que l’œuvre soit restituée, il a fallu attendre quatre ans, afin qu’une loi d’espèce présentée par Roselyne Bachelot, dont je veux saluer la détermination, soit votée.
Dans la lignée de la politique volontariste que nous menons depuis plusieurs années, nous souhaitons, avec cette loi, offrir un horizon légal clair et juste aux démarches de restitution, afin que les œuvres spoliées conservées dans les collections publiques puissent être restituées, sans délai supplémentaire, sans perdre des années à chaque fois.
Toutes les collections publiques seront concernées, qu’elles soient dans des musées nationaux relevant du ministère de la culture, dans des musées territoriaux, dans des établissements publics non muséaux qui détiennent des collections ou encore dans des bibliothèques.
Avec cette loi, lorsque la spoliation aura été reconnue, après enquête, par la commission consultative indépendante et par le propriétaire public, quel qu’il soit, la restitution de l’œuvre s’effectuera de droit. Pour l’État, un décret simple de la Première ministre suffira ; pour les collectivités, une décision de l’organe délibérant.
La commission consultative chargée d’apprécier l’existence et les circonstances de la spoliation sera la CIVS, qui a prouvé depuis sa création son expertise et sa légitimité. Organe spécialisé dans l’appréciation des faits de spoliation, elle examine les faits de vols, de pillage, d’aryanisation, ainsi que les ventes contraintes et peut recommander à la Première ministre des mesures de réparation si ces faits constituent des spoliations antisémites.
Cette loi traite du passé et des biens déjà entrés dans les collections, mais elle s’imposera aussi aux futures acquisitions : une œuvre acquise entre 1933 et 1945 dont il sera impossible de déterminer avec certitude la trajectoire ne devra pas entrer dans une collection publique.
Ce projet de loi est le premier à reconnaître, depuis la Libération, la spoliation spécifique subie par les Juifs, en France et partout, du fait de l’Allemagne nazie et des diverses autorités qui lui ont été liées.
Avec l’insertion de quatre nouveaux articles dans le code du patrimoine, je vous propose d’ouvrir un nouveau chapitre du rapport que nous entretenons avec notre histoire, dans le sens de la justice et de la vérité historique.
Sous l’impulsion des chercheurs et sous réserve de l’avis de la CIVS, grâce à cette loi-cadre, chaque bien culturel spolié puis entré dans les collections publiques pourra être restitué aux ayants droit de son propriétaire originel.
Nous élargissons le champ de compétence de la CIVS pour qu’elle puisse traiter des dossiers de spoliations antisémites intervenues entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945, et non pas seulement pendant l’Occupation, quel que soit le lieu de spoliation, parce que même volées à l’étranger, des œuvres spoliées peuvent se trouver aujourd’hui dans une collection publique française.
Telle est désormais la portée de cette nouvelle ambition, qui nous engage et nous oblige.
En 1997, année de la mission Mattéoli, Patrick Modiano écrivait dans Dora Bruder : « Il faut longtemps pour que resurgisse à la lumière ce qui a été effacé. Des traces subsistent dans des registres et l’on ignore où ils sont cachés et quels gardiens veillent sur eux et si ces gardiens consentiront à vous les montrer. Ou peut-être ont-ils oublié tout simplement que ces registres existaient. » Et plus loin : « En écrivant ce livre, je lance des appels, comme des signaux de phare dont je doute malheureusement qu’ils puissent éclairer la nuit. »
Chercheurs, historiens, associations, descendants des familles, généalogistes, élus… Ils ont été nombreux à entendre ces appels et à nous aider à éclairer la nuit.
Rien ne saurait réparer la tragédie de la Shoah. Rien ne saurait rendre aux familles les objets du quotidien massivement spoliés et pillés, qu’il est matériellement impossible de restituer à des hommes, des femmes, des enfants que l’État français a livrés en collaborant avec le régime nazi.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 2013, la sénatrice écologiste Corinne Bouchoux écrivait : « Le passé non assumé ne se digère pas. Tout ce refoulement, cet oubli, il faut en sortir. »
Certains actes continuent de nous glacer le sang des décennies après avoir été perpétrés. On voudrait ne plus les voir mentionnés dans des documents législatifs. Hélas ! Les démocraties mettent des décennies à reconstruire ce que les régimes autoritaires détruisent en quelques mois...
Pour toutes les victimes de la Shoah, leurs enfants, leurs petits-enfants, un devoir de réparation nous incombe, de manière imprescriptible, comme le sont les crimes contre l'humanité perpétrés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Tant que cela sera nécessaire, le Parlement devra réparer, comme ici, restituer les biens culturels spoliés par des actes antisémites entre 1933 et 1945. Au-delà de l'aspect patrimonial, priver une personne de son héritage familial et culturel, c'est aussi la priver d'émotions artistiques, le priver d'humanité.
Ne sous-estimons pas les circonstances internationales de ces actes : en France, les spoliations ont été le fait non pas des seuls nazis, mais aussi de Français, politiques, administratifs, anonymes, qui ont acquis des œuvres dans le cadre de procédures dites de vol légal.
Je voudrais saluer le travail de ceux qui se sont opposés dans les premières heures, guidés par leur intuition de justice, notamment des femmes. Je pense à Rose Valland, qui élabore un premier registre en 1940, au péril de sa vie. À partir de 1945, promue capitaine, elle est envoyée en Allemagne, sur le front de l'art. Sur plus de 100 000 œuvres identifiées, 60 000 ont été rapportées en France et 45 000 restituées à leurs propriétaires ou leurs ayants droit dans l'immédiat après-guerre.
Puis, rien, ou presque rien : seulement 184 tableaux sur les 2 000 dits MNR ont été restitués à leurs propriétaires, en grande pompe médiatique.
Après la conférence de Washington, les travaux de Corinne Bouchoux ont permis de relancer la question au Sénat.
Nous, écologistes, savons que le droit international est un puissant outil de communication gouvernementale, mais aussi un bien faible instrument juridique en droit interne...
L'étude d'impact de ce projet de loi confirme le constat de négligence des pouvoirs publics établi par Corinne Bouchoux. Après les années 1950, le statu quo s'est imposé, tant et si bien qu'il est impossible de dire aujourd'hui combien de biens culturels de nos collections publiques auraient été acquis dans des circonstances douteuses. Dans les collections publiques, un énorme travail de recherche s'impose, au-delà des œuvres MNR, pour comprendre les parcours juridiques d'appropriation des œuvres d'individus frappés par les lois scélérates.
Il faut aussi lever des entraves, comme l'accès aux archives nationales, et doter chaque fonds des moyens suffisants pour conduire ces recherches, mais aussi pour identifier les ayants droit, y compris pour les collections des collectivités territoriales, où l'initiative repose sur la bonne volonté d'élus. Enfin, notre intransigeance doit être la même avec les collectionneurs privés, a fortiori lorsqu'ils bénéficient de largesses fiscales : l'article 2 pourrait être renforcé en ce sens.
Au-delà des limites que je viens d'évoquer, je souhaite saluer cette initiative gouvernementale. La procédure de sortie de biens spoliés des collections publiques, instaurée par ce texte, lève le frein législatif aux restitutions, tout en élargissant la période historique de recherches.
Mais quelle leçon pouvons-nous en tirer pour l'avenir ? Dans sa célèbre Lettre au capitaine Butler, Victor Hugo écrivait : « Les crimes de ceux qui mènent ne sont pas la faute de ceux qui sont menés ; les gouvernements sont quelquefois des bandits, les peuples jamais. L'Empire français […] étale aujourd'hui, avec une sorte de naïveté de propriétaire, le splendide bric-à-brac du Palais d'été. J'espère qu'un jour viendra où la France délivrée et nettoyée, renverra ce butin à la Chine spoliée. »
Nous savons que les résultats d'autres massacres et d'autres pillages sont exposés dans nos musées ; il nous revient de nous doter des moyens juridiques pour prévenir l'acquisition publique de ces biens d'origine douteuse. À défaut, nous condamnons les générations futures à de nombreuses lois de réparation. §
Mais nous devons faire tout ce qui est en notre pouvoir pour opposer la justice à la cruauté, au cynisme et à l’ignominie.
Ce chemin de justice a été ouvert par les résistants, dans le maquis, à Londres, en Afrique du Nord, mais aussi dans nos musées. Ouvert par Rose Valland, ouvert par tous ceux et celles qui se sont battus pour rendre les restitutions possibles.
Avec cette loi, nous rendons hommage à leur engagement et nous en montrons dignes.
Madame la ministre, le premier projet de loi que vous nous présentez aborde un sujet douloureux, solennel et grave, sur lequel il me semble important que nous nous penchions, aussi longtemps après.
Dans La tête d'obsidienne, André Malraux écrit : « L'art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort. » Bien qu'il fasse référence à Picasso et aux traces que celui-ci a laissées, ce texte nous parle de manière symbolique de la façon dont l'art transcende, transmue le réel. Or ce projet de loi touche précisément à cela : la manière dont l'art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort.
Le moment est venu d'examiner un tel texte. Jamais auparavant les documents n'ont été aussi nombreux et aussi accessibles, depuis la chute de l'Union soviétique, depuis l'ouverture et la numérisation de toutes les archives. Les travaux scientifiques se sont accélérés et les États coopèrent de plus en plus sur la question de la restitution des biens juifs spoliés pendant les persécutions antisémites de 1933 à 1945.
Vous avez ainsi mentionné le tableau de Klimt, Le rosier, qui a pu être restitué après un travail commun entre le musée d'Orsay et le Belvédère de Vienne, grâce à des recherches intensives et à une coopération entre les deux États.
Les familles y sont prêtes : l'éloignement de la Shoah, avec le lent apaisement de la douleur, permet aussi d'insister sur la dimension de transmission de mémoire qu'implique la restitution de ces collections, car il s'agit aussi de la mémoire de la Shoah elle-même.
Le Gouvernement avait présenté un projet de loi voilà deux ans, que vous rapportiez déjà, madame Gosselin. Vous aviez déclaré à l'époque que chaque demande donnait lieu à un processus administratif et législatif laborieux et qu'il était temps d'élaborer une loi-cadre. La voilà.
En 2019, la M2RS a été créée au sein du ministère de la culture. Avec la disparition des témoins directs de la Shoah, le souvenir de certaines œuvres disparaît parfois. Il est donc temps d'accélérer pour restituer les œuvres dans de bonnes conditions.
C'est pourquoi nous parvenons à un consensus sur ce texte. La question n'est pas simplement symbolique ; elle ne concerne pas seulement la justice. Il s'agit également de réparation intime, car c'est bien là le rôle de l'art.
J'ai ainsi à l'esprit le peintre Mark Rothko, artiste américain d'origine juive russe, parti bien avant la Shoah avec sa famille pour rejoindre son père aux États-Unis en 1913. Sa jeunesse fut marquée par des traumatismes profonds, en raison des pogroms et des massacres de Juifs dans ce qui était à l'époque l'Empire russe ; aujourd'hui, ce sont les pays baltes.
La manière dont ce traumatisme a nourri son œuvre est saisissante : ses fameux rectangles vibrants de couleurs peuvent être perçus comme une tentative de donner une énergie nouvelle à des tombes. En effet, bien que chaque personne puisse interpréter les œuvres d'art à sa manière, l'œuvre de Rothko peut être vue comme une représentation de tombes, celles qui n'ont jamais été érigées pour les victimes des pogroms dans l'Empire russe, qu'il a transmuées en tableaux vibrants de couleurs et donc d'énergie.
Aujourd'hui, c'est également à cela que nous devons penser. Nous nous souvenons avant tout de personnes qui avaient fait le choix de faire vivre l'art en construisant des collections. En leur restituant leurs biens, nous leur rendons leur mémoire, et nous reconnaissons la contribution précieuse qu'ils ont apportée à l'art et aux artistes.
Applaudissements.
Applaudissements sur les travées des groupes RDPI, RDSE, SER et CRCE.
La parole est à Mme la rapporteure. (Applaudissements sur les travées du groupe Les Républicains, ainsi qu ’ au banc des commissions.)
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c'est avec une émotion particulière que j'interviens sur ce sujet nous ramenant aux heures les plus sombres de notre histoire : la spoliation des biens juifs durant l'Occupation, mais également depuis 1933.
Nous nous apprêtons à examiner un projet de loi historique. Héritage volé, les biens concernés ont été arrachés et dispersés à travers le monde et leur inestimable valeur occultée par l'injustice.
Plus de quatre-vingts ans après, il est temps d'apaiser, de réparer, de rétablir l'équilibre et de redonner une voix à cette histoire confisquée. Ces biens culturels – œuvres d'art, livres ou instruments de musique – étaient autrefois en harmonie avec l'âme de leurs propriétaires, mais les nazis, avec le soutien de l'État français de l'époque, complice et acteur de ces exactions, ont procédé à des vols, des pillages, des confiscations abjectes, des saisies.
Sous le couvert de l'aryanisation, bercés par l'antisémitisme le plus radical, ils ont fait des lois du Reich et des rafles une occasion pour dépouiller les Juifs de ces trésors qui leur reviennent aujourd'hui de droit. Des familles entières ont été dépossédées, des communautés réduites au silence, des vies brisées… tout cela au nom de la discrimination et de la haine !
Nous nous souvenons tous des débats précédant l'adoption de la loi du 21 février 2022 relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites. Les parlementaires de tous bords avaient alors exprimé leur volonté de trouver une solution législative durable. Il est temps, mes chers collègues, de mettre fin à cette injustice persistante.
Nous devons simplifier la restitution et lever les barrières qui entravent ces retours légitimes. Les procédures complexes les avaient rendus difficiles ; la simplification des démarches, l'établissement de critères clairs, l'engagement de délais raisonnables, toutes ces mesures forment un message : nous reconnaissons votre souffrance, nous honorons votre histoire, nous rétablirons l'équité.
Le contexte juridique entourant les biens spoliés est actuellement un labyrinthe complexe. Dès 1943, plusieurs ordonnances ont été prises par le gouvernement de Londres pour prévoir la nullité des actes de spoliation. Un inventaire des biens en question a été dressé en 1949, mais il était incomplet. De nombreuses restitutions ont eu lieu à la suite de procédures de recherche.
Cependant, les œuvres concernées sont juridiquement enchaînées, inaliénables et imprescriptibles. Actuellement, deux moyens de restitution existent : une procédure de nullité de l'acte de spoliation devant les tribunaux judiciaires ou une décision du juge administratif ou judiciaire de restitution des biens classés MNR.
Le présent projet de loi propose d'introduire trois nouveaux articles dans le code du patrimoine pour faciliter ces retours. Le premier crée une dérogation de principe de l'inaliénabilité des biens publics ; le deuxième prévoit la nullité de plein droit des actes de spoliation ; enfin, le troisième instaure une procédure spécifique qui garantit des délais raccourcis et des critères clairs pour les demandes.
En simplifiant les procédures, nous guiderons ces biens vers leurs propriétaires légitimes. La restitution n'est pas un simple acte de justice ; c'est une réparation, une réconciliation, la reconnaissance de la valeur inestimable de ces biens pour la mémoire collective et pour les générations futures.
Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons agir pour corriger les torts commis et tisser un avenir de justice et de solidarité. Tel est notre devoir envers ceux qui ont été dépouillés, envers notre histoire et envers nous-mêmes. La restitution des biens spoliés aux Juifs est une étape cruciale vers la réconciliation, une étape de la construction d'un avenir dans lequel le passé n'est pas oublié, et les erreurs sont rectifiées. Il y va de notre devoir de mémoire.
Avant de conclure, je souhaite saluer le travail de la sénatrice Corinne Bouchoux, qui a rédigé un important rapport sur ces questions de restitution ; celui, ensuite, de notre collègue Catherine Morin-Desailly, qui, depuis des années, fait avancer cette question des biens spoliés ; celui, aussi, de Béatrice Gosselin, notre rapporteure, secondée par les services de la commission, avec qui j'ai participé à de très nombreuses auditions intéressantes.
Enfin, madame la ministre, merci de vous être saisie de cet important sujet. Ce projet de loi concerne aujourd'hui les biens spoliés. Demain viendra le tour des restes humains, et, dans un avenir que j'espère proche, celui des biens mal acquis, un projet sur lequel j'aurai plaisir à travailler sur le fond.
Mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendra ce projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945. Ensemble, œuvrons pour réparer ces injustices, pour que les trésors volés retrouvent leur place légitime et pour que la mémoire des victimes soit honorée.
Le temps est venu d'agir pour rendre justice à ceux qui ont été privés de tout.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certains moments législatifs sont empreints d’une solennité et d’une émotion particulières. Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui en est un. Le législateur n’a pas à écrire l’histoire, mais sa responsabilité peut être de panser certaines plaies du passé.
Les spoliations de biens culturels font partie des crimes de la Shoah pour lesquels nous conservons une dette imprescriptible, selon les mots prononcés par le Président de la République Jacques Chirac en 1995. Elles ne peuvent être dissociées de la politique d’extermination des Juifs d’Europe mise en œuvre par le régime nazi et ses complices, et à laquelle le régime de Vichy a pris toute sa part. En privant ces personnes de leurs œuvres et objets d’art, de leurs livres ou de leurs instruments de musique, c’est bien leur dignité, leur culture, leur histoire et leur identité qui leur ont été retirées.
Même si ces crimes sont irréparables, nous pouvons, et même nous devons faire œuvre de justice et d’humanité en corrigeant ce qui peut l’être. En facilitant la restitution des biens culturels spoliés conservés dans nos collections, votre projet de loi, madame la ministre, y contribue de manière indiscutable.
Ce texte s’inscrit dans la continuité de la première loi de restitution des biens spoliés, que nous avons votée l’an dernier. Nous avions alors unanimement souscrit à la nécessité de lever l’inaliénabilité par devoir vis-à-vis des victimes, mais aussi par nécessité pour nos collections. Nous sommes tous d’accord : ces biens n’y ont pas leur place.
C’est pourquoi notre commission de la culture accueille très favorablement le principe d’une loi-cadre. Nous sommes en effet convaincus que le devoir de mémoire et de réparation nous commande d’accélérer le rythme des restitutions avant que la mémoire des familles des victimes ne s’estompe ou que les recherches ne se révèlent impossibles.
La France doit prendre des mesures fortes pour que des solutions justes et équitables aux spoliations de biens culturels confisquées par les nazis soient trouvées, conformément aux principes de Washington de 1998.
De ce point de vue, l’adoption d’une loi-cadre nous parait préférable au vote d’une multitude de lois d’espèce. D’abord, parce que c’est le symbole de notre engagement à aller plus loin sur le chemin de la réparation des spoliations antisémites. Mais aussi, parce que c’est une réponse de long terme, globale, fiable et transparente, au problème soulevé par ces spoliations, sans nécessiter l’autorisation au cas par cas du Parlement.
Nous espérons aussi que les perspectives plus tangibles de restitution offertes par une loi-cadre contribueront à mieux sensibiliser les acteurs culturels à l’enjeu des spoliations et à intensifier les recherches proactives, encore trop modestes.
Nous sommes conscients que la complexité et la lourdeur de la procédure parlementaire peuvent décourager certains établissements de s’investir dans ces recherches, car ils n’ont pas la certitude qu’elles aboutiront à une restitution, au moins à brève échéance.
Ce projet de loi crée une procédure administrative permettant à l’État ou aux collectivités territoriales, par dérogation au principe d’inaliénabilité, de restituer les biens culturels appartenant à leurs collections qui auraient été spoliés dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945, après avis de la CIVS sur l’existence de la spoliation et ses circonstances.
Cette procédure nous apparaît satisfaisante à plusieurs titres. Tout d’abord, la rédaction garantit que la restitution s’impose aux personnes publiques lorsqu’il est établi que le bien a fait l’objet d’une spoliation. Ensuite, le périmètre de la procédure est suffisamment large pour qu’elle soit applicable à tous les types de biens culturels relevant du domaine public, y compris le mobilier, les livres et les instruments de musique, mais aussi aux différentes formes de spoliations liées à des persécutions antisémites, quels que soient la personne responsable et le lieu de leur perpétration.
Enfin, le recours à la CIVS garantit un examen scientifique et impartial. Son expertise en matière de caractérisation des spoliations est reconnue et sa compétence en matière de biens culturels est assurée depuis la réforme intervenue en 2018. Son avis ne doit cependant revêtir qu’un caractère simple, afin de responsabiliser les collectivités publiques et conserver une dimension symbolique à la décision de restitution. Le risque que son avis ne soit pas suivi semble assez faible.
L’une des innovations de ce projet de loi est la possibilité offerte aux parties de conclure un accord amiable sur des modalités de réparation autres que la restitution, une fois le principe de celle-ci obtenu par les victimes, par exemple le maintien du bien dans la collection publique en contrepartie d’une compensation financière.
Cette disposition est évidemment avantageuse pour la préservation des collections publiques. Comme l’a montré la transaction conclue entre le musée Labenche de Brive-la-Gaillarde et les héritiers d’un propriétaire allemand spolié, elle pourrait aussi intéresser des familles, en leur garantissant que demeure, dans un lieu accessible au public, une trace mémorielle de la spoliation dont elles ont été victimes. Quoi qu’il en soit, il n’est pas contestable qu’elle constitue une solution juste et équitable au même titre que la restitution, puisqu’elle ne pourra en aucune manière être imposée et qu’elle préserve la reconnaissance de la spoliation et sa juste indemnisation.
Il reste que sa mise en œuvre pourrait néanmoins se heurter à une problématique financière, compte tenu de la faiblesse des crédits d’acquisition dont disposent les établissements. Cela soulève la question des moyens qui seront déployés pour garantir la bonne application de cette loi. J’y reviendrai.
L’article 2 autorise les propriétaires des musées privés ayant reçu l’appellation « musée de France » à restituer, après avis de la CIVS, les biens spoliés de leurs collections acquis par dons ou legs ou avec le concours financier d’une collectivité publique, dans la mesure où ils sont en principe incessibles, sauf à un autre musée de France. La commission est favorable à cette disposition. Elle permet non seulement de lever les obstacles juridiques qui pourraient bloquer la restitution de certains biens spoliés par des musées privés, mais aussi d’inciter les propriétaires de ces établissements à engager des recherches sur la provenance de leurs collections. La commission a d’ailleurs adopté deux amendements visant à faciliter sa bonne application.
Si le projet de loi crée l’impulsion qui nous faisait défaut en facilitant les restitutions, il reste encore un immense travail qui ne pourra se faire à moyens constants, sauf à décevoir les espoirs suscités par ce projet de loi.
Malgré les progrès réalisés ces dernières années, l’engagement de la France en termes humains et financiers reste modeste en comparaison avec celui de plusieurs de nos voisins européens : l’État fédéral allemand et les Länder ont consacré, depuis quinze ans, plus de 40 millions d’euros à la recherche de provenance des biens spoliés.
Pour mettre en œuvre ce projet de loi, les effectifs de la CIVS et de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés de votre ministère devront être renforcés. Le travail de recherche de provenance, clé de voûte des restitutions à venir, devra aussi être intensifié.
Il s’agit d’un travail titanesque, complexe et chronophage, qui requiert un personnel qualifié et disponible. Nous n’y parviendrons pas sans enrichir l’offre de formation en matière de recherche de provenance ni sans donner aux établissements de nouveaux moyens pour recruter des chercheurs de provenance quitte à envisager des recrutements mutualisés.
Maintenant que l’obstacle législatif aux restitutions est en passe d’être levé, ne restons pas au milieu du gué. Même si le travail de recherche de provenance ne débouchera pas toujours sur une restitution, tant l’identification des biens et des ayants droit se révèle parfois complexe, elle constitue une exigence pour mieux rendre compte de l’histoire des spoliations et retracer le parcours des œuvres conservées dans nos collections.
La médiation des biens spoliés fait partie intégrante de la politique de réparation. Elle est une autre manière de rendre aux victimes une part de leur histoire et de leur identité dans les cas où la restitution se révèle impossible.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, certains moments législatifs sont empreints d’une solennité et d’une émotion particulières. Le projet de loi que nous examinons aujourd’hui en est un. Le législateur n’a pas à écrire l’histoire, mais sa responsabilité peut être de panser certaines plaies du passé.
Les spoliations de biens culturels font partie des crimes de la Shoah pour lesquels nous conservons une dette imprescriptible, selon les mots prononcés par le Président de la République Jacques Chirac en 1995. Elles ne peuvent être dissociées de la politique d’extermination des Juifs d’Europe mise en œuvre par le régime nazi et ses complices, et à laquelle le régime de Vichy a pris toute sa part. En privant ces personnes de leurs œuvres et objets d’art, de leurs livres ou de leurs instruments de musique, c’est bien leur dignité, leur culture, leur histoire et leur identité qui leur ont été retirées.
Même si ces crimes sont irréparables, nous pouvons, et même nous devons faire œuvre de justice et d’humanité en corrigeant ce qui peut l’être. En facilitant la restitution des biens culturels spoliés conservés dans nos collections, votre projet de loi, madame la ministre, y contribue de manière indiscutable.
Ce texte s’inscrit dans la continuité de la première loi de restitution des biens spoliés, que nous avons votée l’an dernier. Nous avions alors unanimement souscrit à la nécessité de lever l’inaliénabilité par devoir vis-à-vis des victimes, mais aussi par nécessité pour nos collections. Nous sommes tous d’accord : ces biens n’y ont pas leur place.
C’est pourquoi notre commission de la culture accueille très favorablement le principe d’une loi-cadre. Nous sommes en effet convaincus que le devoir de mémoire et de réparation nous commande d’accélérer le rythme des restitutions avant que la mémoire des familles des victimes ne s’estompe ou que les recherches ne se révèlent impossibles.
La France doit prendre des mesures fortes pour que des solutions justes et équitables aux spoliations de biens culturels confisquées par les nazis soient trouvées, conformément aux principes de Washington de 1998.
De ce point de vue, l’adoption d’une loi-cadre nous paraît préférable au vote d’une multitude de lois d’espèce. D’abord, parce que c’est le symbole de notre engagement à aller plus loin sur le chemin de la réparation des spoliations antisémites. Mais aussi, parce que c’est une réponse de long terme, globale, fiable et transparente, au problème soulevé par ces spoliations, sans nécessiter l’autorisation au cas par cas du Parlement.
Nous espérons aussi que les perspectives plus tangibles de restitution offertes par une loi-cadre contribueront à mieux sensibiliser les acteurs culturels à l’enjeu des spoliations et à intensifier les recherches proactives, encore trop modestes.
Nous sommes conscients que la complexité et la lourdeur de la procédure parlementaire peuvent décourager certains établissements de s’investir dans ces recherches, car ils n’ont pas la certitude qu’elles aboutiront à une restitution, au moins à brève échéance.
Ce projet de loi crée une procédure administrative permettant à l’État ou aux collectivités territoriales, par dérogation au principe d’inaliénabilité, de restituer les biens culturels appartenant à leurs collections qui auraient été spoliés dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945, après avis de la CIVS sur l’existence de la spoliation et ses circonstances.
Cette procédure nous apparaît satisfaisante à plusieurs titres. Tout d’abord, la rédaction garantit que la restitution s’impose aux personnes publiques lorsqu’il est établi que le bien a fait l’objet d’une spoliation. Ensuite, le périmètre de la procédure est suffisamment large pour qu’elle soit applicable à tous les types de biens culturels relevant du domaine public, y compris le mobilier, les livres et les instruments de musique, mais aussi aux différentes formes de spoliations liées à des persécutions antisémites, quels que soient la personne responsable et le lieu de leur perpétration.
Enfin, le recours à la CIVS garantit un examen scientifique et impartial. Son expertise en matière de caractérisation des spoliations est reconnue et sa compétence en matière de biens culturels est assurée depuis la réforme intervenue en 2018. Son avis ne doit cependant revêtir qu’un caractère simple, afin de responsabiliser les collectivités publiques et conserver une dimension symbolique à la décision de restitution. Le risque que son avis ne soit pas suivi semble assez faible.
L’une des innovations de ce projet de loi est la possibilité offerte aux parties de conclure un accord amiable sur des modalités de réparation autres que la restitution, une fois le principe de celle-ci obtenu par les victimes, par exemple le maintien du bien dans la collection publique en contrepartie d’une compensation financière.
Cette disposition est évidemment avantageuse pour la préservation des collections publiques. Comme l’a montré la transaction conclue entre le musée Labenche de Brive-la-Gaillarde et les héritiers d’un propriétaire allemand spolié, elle pourrait aussi intéresser des familles, en leur garantissant que demeure, dans un lieu accessible au public, une trace mémorielle de la spoliation dont elles ont été victimes. Quoi qu’il en soit, il n’est pas contestable qu’elle constitue une solution juste et équitable au même titre que la restitution, puisqu’elle ne pourra en aucune manière être imposée et qu’elle préserve la reconnaissance de la spoliation et sa juste indemnisation.
Il reste que sa mise en œuvre pourrait néanmoins se heurter à une problématique financière, compte tenu de la faiblesse des crédits d’acquisition dont disposent les établissements. Cela soulève la question des moyens qui seront déployés pour garantir la bonne application de cette loi. J’y reviendrai.
L’article 2 autorise les propriétaires des musées privés ayant reçu l’appellation « musée de France » à restituer, après avis de la CIVS, les biens spoliés de leurs collections acquis par dons ou legs ou avec le concours financier d’une collectivité publique, dans la mesure où ils sont en principe incessibles, sauf à un autre musée de France. La commission est favorable à cette disposition. Elle permet non seulement de lever les obstacles juridiques qui pourraient bloquer la restitution de certains biens spoliés par des musées privés, mais aussi d’inciter les propriétaires de ces établissements à engager des recherches sur la provenance de leurs collections. La commission a d’ailleurs adopté deux amendements visant à faciliter sa bonne application.
Si le projet de loi crée l’impulsion qui nous faisait défaut en facilitant les restitutions, il reste encore un immense travail qui ne pourra se faire à moyens constants, sauf à décevoir les espoirs suscités par ce projet de loi.
Malgré les progrès réalisés ces dernières années, l’engagement de la France en termes humains et financiers reste modeste en comparaison avec celui de plusieurs de nos voisins européens : l’État fédéral allemand et les Länder ont consacré, depuis quinze ans, plus de 40 millions d’euros à la recherche de provenance des biens spoliés.
Pour mettre en œuvre ce projet de loi, les effectifs de la CIVS et de la mission de recherche et de restitution des biens culturels spoliés de votre ministère devront être renforcés. Le travail de recherche de provenance, clé de voûte des restitutions à venir, devra aussi être intensifié.
Il s’agit d’un travail titanesque, complexe et chronophage, qui requiert un personnel qualifié et disponible. Nous n’y parviendrons pas sans enrichir l’offre de formation en matière de recherche de provenance ni sans donner aux établissements de nouveaux moyens pour recruter des chercheurs de provenance quitte à envisager des recrutements mutualisés.
Maintenant que l’obstacle législatif aux restitutions est en passe d’être levé, ne restons pas au milieu du gué. Même si le travail de recherche de provenance ne débouchera pas toujours sur une restitution, tant l’identification des biens et des ayants droit se révèle parfois complexe, elle constitue une exigence pour mieux rendre compte de l’histoire des spoliations et retracer le parcours des œuvres conservées dans nos collections.
La médiation des biens spoliés fait partie intégrante de la politique de réparation. Elle est une autre manière de rendre aux victimes une part de leur histoire et de leur identité dans les cas où la restitution se révèle impossible.
Applaudissements sur les travées des groupes SER, CRCE et GEST.
Applaudissements.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons ce jour est le premier d'une série de trois lois visant à établir un cadre pour des restitutions qui n'exigeront plus le vote par le Parlement de dispositifs législatifs ad hoc.
Un débat préalable aurait sans doute été utile pour préciser les principes de ce dessaisissement du Parlement par lui-même : rappelons que le domaine public mobilier est doublement protégé par le code général de la propriété des personnes publiques et par le code du patrimoine.
Lors du dépôt du projet de loi relative à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal, en juillet 2020, le Gouvernement n'avait ainsi pas souhaité mettre en œuvre une loi de principe. Selon lui, un tel texte aurait pu être censuré pour incompétence négative du législateur, au risque de faire obstacle aux restitutions pourtant souhaitables.
Finalement, le Gouvernement a considéré que ce risque juridique dirimant pouvait être contourné par le dépôt de trois projets de loi. Il serait de bonne politique que ceux-ci obéissent à des objectifs similaires. Le premier serait celui de la collégialité et de la publicité de l'instruction des restitutions. En effet, celles-ci sont assurées par la collaboration d'une mission de recherche chargée du récolement des œuvres et de la constitution des dossiers scientifiques, ainsi que d'une commission administrative indépendante.
Ensuite, il resterait à définir les modalités d'information du Parlement, qui ne peut être totalement exclu de procédures touchant à la domanialité publique. Le décret d'organisation de la commission placée auprès du Premier ministre répondra sans doute à cette attente.
Sur ces deux points, je vous le dis sans détour, madame la ministre, le rapport rendu par M. Martinez et intitulé Patrimoine partagé : universalité, restitutions et circulation des œuvres d'art est décevant. La constitution au cas par cas de groupes de travail formés d'experts bilatéraux nommés par leur gouvernement ne saurait apporter les mêmes garanties d'impartialité qu'une commission indépendante et pérenne.
En outre, je doute que le Parlement se satisfasse d'une information annuelle délivrée par le Gouvernement à la seule commission de la culture. Lors des débats futurs, il conviendra donc de nous demander si les attributions de la commission instaurée par le présent projet de loi ne pourraient pas être étendues à d'autres domaines.
Les conditions de restitution doivent être d'autant plus irréprochables qu'elles concernent des biens collectés durant les périodes les plus sombres de notre histoire nationale ; ceux-ci, au-delà de leur qualité artistique, constituent des témoignages bouleversants du destin dramatique de ceux à qui ils ont été arrachés par la violence, la spoliation institutionnelle et le dol.
Le texte dont nous débattons aujourd'hui n'est pas seulement technique : il marque, pour la première fois depuis 1945, une reconnaissance législative des spoliations antisémites perpétrées par l'Allemagne nazie et l'État français. La voie a été ouverte par les mots du président Jacques Chirac le 16 juillet 1995, lors de la commémoration de la rafle du Vel d'Hiv : « La France, patrie des Lumières et des droits de l'homme, terre d'accueil et d'asile, la France, ce jour-là, accomplissait l'irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux. »
Près de trente ans après cette déclaration, nous allons, mes chers collègues, poursuivre cet effort en identifiant clairement dans la loi la responsabilité spécifique de l'État français.
Sauf à s'engager dans une coupable opération de négationnisme, il est acquis que l'État français a, de son propre chef et avec l'aide de l'occupant nazi, mené une entreprise de persécution et de spoliation des Juifs de France, citoyens français ou immigrés, dont les objectifs ultimes étaient leur déportation et leur extermination.
Cette politique antisémite est au cœur de la Révolution nationale voulue par Pétain. Elle fonde le programme de l'extrême droite française depuis Maurras et l'Action française, dont 2 000 nostalgiques ont défilé le week-end dernier, poussant les mêmes cris de haine que les ligues factieuses de 1934.
Ces crimes antisémites sont des crimes contre l'humanité et sont imprescriptibles. En votant cette loi, nous affirmons solennellement la volonté de la Nation d'œuvrer perpétuellement pour les identifier, les dénoncer et aussi tenter de les compenser matériellement par la restitution.
Applaudissements sur les travées du groupe INDEP.
Applaudissements.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la question de la provenance des œuvres d’art exposées dans les collections publiques est un sujet majeur pour les musées français. Elle appelle une profonde réflexion sur notre rapport à l’histoire, à la politique mémorielle et à la formation de notre patrimoine culturel. C’est un vaste débat de société qui nous engage collectivement !
Au cours des décennies précédentes, l’humain était au cœur de la politique française de réparation des spoliations. L’heure était au recueil des témoignages et des récits transmis par les ultimes témoins du passé : commissaires-priseurs, fonctionnaires, conservateurs de musée, marchands d’art.
Aujourd’hui, les biens culturels incarnent l’histoire et sont porteurs de mémoire pour les générations à venir. Nous, parlementaires, avons le devoir de participer à la formalisation de la politique française de restitution, grâce à ce projet de loi.
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, la déportation des Juifs de France s’est accompagnée du pillage méthodique de l’ensemble de leurs biens, notamment culturels.
Dès l’été 1940, de nombreux domiciles de familles juives ont été vidés – du sol au plafond –, de leur mobilier, de leurs œuvres d’art, de leurs instruments de musique. À Paris, première place mondiale du marché de l’art, pas moins de 40 000 appartements ont été pillés.
Les œuvres spoliées ont d’abord été stockées à l’ambassade d’Allemagne à Paris, puis au Louvre et, enfin, au musée du Jeu de Paume, à partir du mois de novembre 1940.
En France, on estime à 100 000 les œuvres volées ou vendues sous la contrainte, un nombre sans doute sous-évalué. Il est en effet calculé en s’appuyant sur les signalements réalisés après-guerre par les familles. Or toutes ne se sont pas manifestées.
Après la guerre, 60 000 de ces œuvres sont revenues en France, dont une grande partie a été rapidement restituée à ses propriétaires. Certains biens ont été vendus, tandis que d’autres ont été confiés aux musées français.
Oublié quelques années, le sujet de la restitution des œuvres spoliées est revenu sur le devant de la scène au milieu des années 1990.
Depuis une vingtaine d’années, le nombre de restitutions augmente peu à peu, à l’image de la Vierge à l ’ Enfant, de la Vierge de pitié et de la Scène de bataille : Siège de Carthage par Scipion Émilien, œuvres rendues au mois d’avril dernier à leurs ayants droit.
Malheureusement, certaines œuvres n’ont pas encore retrouvé leurs propriétaires et patientent dans les salles d’exposition de nos musées. C’est alors qu’interviennent les historiens spécialisés : leurs longues enquêtes sont le travail de toute une vie. Ils s’appuient sur un faisceau d’indices hétéroclites : archives nazies, services administratifs de l’État collaborateur, généalogistes, marques sur les œuvres elles-mêmes, descriptions par les familles lésées.
Je tiens à saluer la mémoire de Rose Valland, attachée de conservation à Paris pendant l’Occupation. Figure active de la Résistance, elle a pris de grands risques pour archiver l’ensemble des œuvres spoliées et conservées au musée du Jeu de Paume. Nous lui devons une grande partie des restitutions d’après-guerre.
Mme la ministre le confirme.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de saluer à mon tour le présent texte au nom du groupe Union Centriste et de féliciter notre rapporteure, Béatrice Gosselin, pour son travail remarquable sur le sujet.
Comme cela a été souligné à plusieurs reprises en commission, le Sénat peut s'enorgueillir d'avoir a été moteur en la matière ; je tiens à vous faire part, en particulier, de la satisfaction de notre groupe Union Centriste : Nicolas About a porté le premier texte de loi sur la restitution des restes humains, à savoir la loi du 6 mars 2002 relative à la restitution par la France de la dépouille mortelle de Saartjie Baartman à l'Afrique du Sud, concernant la fameuse Vénus hottentote.
Dans la même veine, Catherine Morin-Desailly a été à l'origine de la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections.
J'en viens plus spécifiquement des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations antisémites dans le contexte du nazisme. Corinne Bouchoux a initié le débat en 2013. Nous sommes désormais en 2023, et il a fallu dix ans pour qu'un gouvernement se saisisse pleinement de la question. Les esprits les plus critiques se demanderont pourquoi nous avons tant attendu, tandis que d'autres souligneront qu'il vaut mieux tard que jamais.
Certes, la loi du 21 février 2022 a permis à la France de restituer quatorze œuvres des collections nationales, et une œuvre d'une collection municipale, spoliées ou acquises dans des conditions troubles, aux ayants droit de leurs propriétaires, victimes de persécutions antisémites.
Cependant, pour réaliser un inventaire global et mener une véritable politique de restitution et de réparation, les lois d'espèce ne suffisent plus. Il est établi depuis longtemps que la mise en place d'un cadre global s'impose. Tel est l'objet du présent texte. Nous ne pouvons que nous en féliciter, d'autant plus que le mécanisme qu'il instaure est pertinent.
Sans trop entrer dans le détail, relevons qu'il permet aux détenteurs des biens restituables de prendre l'initiative de la restitution – auparavant, une telle démarche ne pouvait être engagée que sur l'initiative des ayants droit – et soumet alors leur sortie des collections à l'avis préalable de la CIVS.
Nous approuvons l'analyse de notre rapporteure selon laquelle le caractère simple de cet avis ne vide pas ipso facto le dispositif de sa substance. Il est probable que, la plupart du temps, l'avis de la CIVS sera suivi. Pour autant, dans la suite de nos travaux, il nous faudra trancher la question de ce qui se passera lorsqu'il ne le sera pas.
Nous apprécions la flexibilité de ce texte, qui permet que les différentes options de compensation de la spoliation, autre que la restitution pure et simple, soient discutées entre la collectivité et la personne spoliée ou ses héritiers.
Si ce cadre apparaît comme général au regard des lois d'espèce, il demeure néanmoins spécifiquement établi pour les spoliations antisémites. Une question se pose donc. Fallait-il un cadre plus global concernant toutes les restitutions ? Notre première inclination allait dans ce sens et la proposition de loi relative à la circulation et au retour des biens culturels appartenant aux collections publiques, que le Sénat a adoptée le 10 janvier 2022, ne portait pas sur les spoliations antisémites, mais regroupait les restitutions coloniales et celles de restes humains.
Un autre choix a finalement été fait par le Gouvernement : ce projet de loi est le premier d'un train de trois textes qui nous seront successivement présentés. Il concerne les spoliations antisémites, une nouvelle proposition de loi de Catherine Morin-Desailly s'attachera aux restes humains, et un troisième texte sera dédié aux restitutions coloniales.
Pourquoi pas ? Nous comprenons l'intérêt mémoriel et politique de ce choix : il s'agit d'éviter tout amalgame et de respecter l'importance et la singularité de chaque situation.
Néanmoins, il serait préférable que les excellents principes qui irriguent le texte qui nous est soumis aujourd'hui imprègnent également les deux autres ; le groupe Union Centriste y veillera.
Pour autant, vous l'aurez sans doute compris, nous voterons en faveur de ce texte.
Nous devons affronter ce passé. Pour les œuvres qui appartiennent aux collections publiques, seule une loi spécifique peut autoriser leur sortie du domaine public en raison de leur caractère inaliénable.
Pour faciliter les restitutions et éviter de légiférer au cas par cas, il était essentiel de prévoir une loi-cadre permettant d’aller plus vite. Nous pouvons nous féliciter que ce sujet soit l’une des priorités de votre ministère.
Ce texte pose également la question de l’après-restitution. Aucune compensation n’est prévue après la restitution de l’œuvre. Les musées vont devoir se réinventer pour continuer à faire vivre en leurs murs les œuvres rendues aux familles : l’art numérique peut être une piste de réflexion intéressante. Je suis également favorable au fait d’encourager les familles volontaires à permettre au public d’accéder périodiquement aux biens culturels restitués. Ces différents sujets nourriront, je l’espère, de prochains débats.
L’historien Philippe Verheyde écrit : « L’histoire des restitutions des biens juifs […] est une histoire qui reste à faire. » La France ouvre aujourd’hui un nouveau chapitre.
L’unanimité de notre assemblée sur ce sujet qui nous tient tant à cœur est un très bon signal. Ce débat est essentiel au regard de l’immensité et de la complexité du défi de la restitution d’œuvres. Il doit se poursuivre dans les mois à venir.
Le groupe Les Indépendants se félicite de ce texte et le votera.
Applaudissements sur les travées du groupe UC.
Applaudissements.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c'est toujours avec une émotion certaine que nous nous retournons vers cette sombre période de notre histoire durant laquelle l'idéologie nazie a orchestré l'extermination du peuple juif et organisé sa spoliation.
La complicité de l'État français de l'époque nous oblige encore davantage envers les victimes et leurs descendants. De ce fait, ce projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l'objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 est attendu et mérite notre soutien.
Ce texte remet en question le principe d'inaliénabilité des biens culturels du domaine public, pour les restituer, au même titre que les biens MNR. Madame la ministre, profitons de cette occasion pour nous interroger sur une possible évolution des principes d'imprescriptibilité et d'inaliénabilité des biens culturels. L'inaliénabilité pourrait ainsi être fondée sur la seule dimension culturelle plutôt que sur la patrimonialité.
Inscrire les biens culturels dans un patrimoine mondial de l'humanité serait un remarquable message de concorde universelle, permettant à l'art et à la culture de jouer pleinement leur rôle d'éveil de conscience.
Le débat se porterait alors sur l'usufruit et la nue-propriété, ainsi que sur la localisation des œuvres d'art : dans les musées pour un dialogue interculturel et intergénérationnel, ou sur leur lieu d'origine, si celles-ci sont nécessaires à l'identité d'un territoire ou d'un peuple.
Si notre émotion est forte en évoquant les spoliations antisémites, cette reconnaissance et ces réparations doivent s'intégrer au sein d'un devoir de reconnaissance et de réparation plus vaste, englobant les spoliations réalisées à d'autres moments et en d'autres lieux, notamment durant l'époque coloniale.
Au cours des auditions, nous avons été alertés sur le risque de ressentiment qu'une loi spécifique aux spoliations antisémites pourrait alimenter si nous négligions concomitamment d'autres spoliations, remontant en particulier à la période coloniale. L'enfer est pavé de bonnes intentions, et nous devons aux victimes des persécutions antisémites et à leurs descendants de ne pas risquer d'en entrevoir la porte.
Agir en faveur d'une loi-cadre qui engloberait toutes les spoliations, sans stigmatiser aucune catégorie spécifique de victimes, élèverait la France au-dessus de contraintes administratives suspectes au regard de notre devoir de reconnaissance et de réparation des préjudices subis.
Nous accueillons positivement les avancées de ce projet de loi, pour ce qu'il apporte aux démarches légales de reconnaissance et de restitution.
Si l'octroi automatique du certificat d'exportation pour les œuvres spoliées importées sur notre territoire constitue une réparation juste, nous pourrions néanmoins nous interroger sur cette automaticité s'agissant des œuvres qui ne l'ont jamais quitté. Celles-ci pourraient en effet en sortir si les négociations n'aboutissaient pas, puisque l'autorisation de sortie s'imposerait alors.
Plutôt que la présence symbolique de parlementaires dans une CIVS reconfigurée, un véritable rapport annuel d'information des commissions de la culture du Parlement nous semble en outre indispensable, dès lors que le Parlement sera dessaisi de l'avis par l'adoption de cette loi.
Pour finir, madame la ministre, nous souhaitons que les moyens dédiés à la recherche de provenance soient véritablement garantis. Notre devoir de réparation nous y oblige. §
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, qui sommes-nous ? Juste des parlementaires : pas plus, pas moins.
Je voterai en faveur de ce texte, mais j'entends dans cet hémicycle des propos que je préférerais ne pas entendre : un texte pourrait être une « réparation » ou une « réconciliation ». Non ! La Shoah ne se répare pas, ne se réconcilie pas : elle ne relève pas du même domaine que le reste.
Ce texte va permettre de ne plus avoir besoin de loi d'espèce chaque fois que l'on veut procéder à une restitution. On estime que, en France, sans même parler du reste de l'Europe, entre 100 000 et 150 000 biens ont été spoliés.
Oui, il y avait les trains de Goering, le projet de musée de Linz d'Hitler, et ces œuvres d'art magnifiques qui se trouvaient chez des collectionneurs ou des galeristes. Cependant, beaucoup des œuvres concernées n'étaient pas nécessairement de renommée mondiale. Où sont-elles maintenant ? Certaines sont dans nos musées, mais beaucoup d'entre elles ont fini entre les mains de collaborateurs, de profiteurs de guerre, de personnes sans scrupules qui ont utilisé le régime nazi, la collaboration et le régime de Vichy pour s'approprier ces biens. Où en sommes-nous à cet égard ? C'est difficile à dire.
Il est vrai qu'il y a eu beaucoup de restitutions juste après la guerre. Après la Libération, l'occupation de l'Allemagne a permis la restitution de nombreux biens connus, reconnus, enregistrés par l'administration allemande.
Cependant, où sont les très nombreux biens moins connus ? Nous n'en savons rien, pour la plupart d'entre eux. Il faut naturellement, madame la ministre, trouver un texte qui permette au moins la restitution de ceux qui sont dans les musées ou dans les collections publiques.
J'évoquerai l'exemple de ce collectionneur viennois qui, sans en informer les autorités, détenait chez lui des centaines de tableaux spoliés, volés. On les a retrouvés non pas par hasard, certes, mais certainement pas parce qu'il les aurait lui-même déclarés.
Il me semble nécessaire d'avancer. Je vous remercie, madame la ministre, et je tiens également à remercier Mme Bouchoux pour son rapport, ainsi que mes collègues centristes pour leur travail ; pour autant, nous devons être extrêmement modestes. La Shoah ne peut pas être « réparée ». Il ne peut pas y avoir de « réconciliation ».
À mon sens, la restitution des biens ne constitue en rien une réconciliation des Français, car il n'y a pas de réconciliation possible s'agissant de ces événements. Je n'accepterais pas l'idée même qu'il puisse y en avoir une ; ce serait la négation de la République !
Rendre un tableau, ce n'est pas de la réparation ; c'est de la justice, et seulement de la justice. Un tableau qui a été spolié appartient à la famille à laquelle il a été spolié. La justice exige qu'on lui restitue le tableau.
En revanche, on ne peut pas réparer la déportation et le massacre d'une famille. Comment le pourrait-on ?
La restitution est un acte, non pas de réparation ou de réconciliation, mais de justice. J'estime qu'il faut être très clair sur ce point.
Je remercie la commission des travaux qui ont été menés sur l'analyse, le suivi et la possibilité d'accélérer un peu le système de restitution. Mais le véritable travail qu'il conviendrait d'accomplir est-il humainement faisable, madame la ministre ? Comment encourager – j'utilise un terme poli – les musées, privés ou publics, et les collectionneurs, privés ou publics, qui ont un doute sur l'origine d'un bien à se tourner vers les commissions compétentes pour en déterminer l'origine ?
Le conservateur d'un musée privé peut ne pas avoir très envie de restituer un bien. De fait, seule une enquête publique permettrait de retrouver les biens spoliés, et ce travail serait d'autant plus long que ces biens sont nombreux, sans compter que les héritiers étant parfois tous morts, certains biens ne seront jamais restitués aux familles.
Oui, il faut des textes. Il en faudra même sûrement d'autres. Oui, nous pouvons avancer. Mais ne parlons ni de réparation ni de réconciliation. La Shoah est irréductible à une réparation. Restituons, rendons la justice, mais n'oublions pas, mes chers collègues.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il n'est pas facile de prendre la parole après Roger Karoutchi. Tout a été dit, ou presque, sur ce projet de loi, qui comporte à mes yeux une erreur historique majeure.
Le texte reprend en effet l'expression connotée, datant de deux ordonnances de 1944 et 1945, désignant le régime de Vichy comme une autorité de fait « se disant “gouvernement de l'État français” ».
Madame la ministre, ce n'est pas le « se disant gouvernement » qui a expulsé mon père du lycée Charlemagne.
Ce ne sont pas des « se disant gendarmes » qui ont raflé mon père et ses parents, le 16 juillet 1942.
Ce n'est pas le « se disant commissaire-priseur », sur ordre du préfet du Nord, monsieur le sénateur Kanner, qui a spolié ma grand-mère et son mari de quelques bien qu'ils possédaient dans un petit magasin de chapeaux à Douai.
Madame la ministre, la liste des spoliations ne s'arrête pas aux œuvres d'art. On a pris à mes grands-parents des pieds, un rayonnage d'un montant de 350 francs, une caisse et quelques autres éléments, pour un total de 11 160 francs de l'époque.
Mon grand-père maternel ne s'est pas laissé faire. L'histoire est un peu longue pour aujourd'hui, mais, dans une lettre du 25 juin 1942 que ma mère a gardée précieusement, il écrivait ceci au préfet du Nord : « Vous voudrez bien me faire parvenir toute communication ou instruction nouvelle adressée par le commissariat général à Paris relative à cette affaire. »
C'est bien l'État français qui était en cause, comme l'a reconnu le président Chirac dans un discours historique responsable. J'ai déposé des amendements visant à préciser la rédaction dans ce sens.
Dans cette période troublée, madame la ministre, il faut appeler les choses par leur nom de façon à éviter les amalgames et le négationnisme.
Il faut aussi éviter que certains candidats aux élections présidentielles puissent affirmer que Vichy a protégé les Juifs.
Les spoliations sont des vols, des injustices commises par l'État français et ses ilotes.
Les spoliations sont une blessure due à ces injustices que le temps n'efface pas et qui se transmet de génération en génération.
Je veux rappeler ici la mémoire des milliers de familles spoliées de quelques biens meubles, de leur linge de maison, de quelques instruments de cuisine, spoliées de tout et de leur vie.
Hier – hasard du calendrier –, France 5 diffusait un documentaire remarquable sur l'opération « meubles », lors de laquelle 44 000 foyers juifs ont été vidés du sol au plafond, tandis que de la lingerie, des jouets et des petites cuillères étaient spoliés.
Madame la ministre, il faudrait lancer un appel à tous ceux et toutes celles qui pourraient être en possession de documents tels que ceux que j'ai entre les mains pour poursuivre le travail déjà accompli.
Le texte que nous allons voter aujourd'hui est un texte mémoriel, qu'il s'appelle ainsi ou non. C'est un texte pour la mémoire ; Roger Karoutchi l'a très bien dit. Comme je l'ai dit à votre prédécesseur, madame la ministre, vous n'êtes pas aujourd'hui seulement le ministre de la culture : vous êtes aussi celui de la justice.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, en 2013, la sénatrice écologiste Corinne Bouchoux écrivait : « Le passé non assumé ne se digère pas. Tout ce refoulement, cet oubli, il faut en sortir. »
Certains actes continuent de nous glacer le sang des décennies après avoir été perpétrés. On voudrait ne plus les voir mentionnés dans des documents législatifs. Hélas ! Les démocraties mettent des décennies à reconstruire ce que les régimes autoritaires détruisent en quelques mois…
Pour toutes les victimes de la Shoah, leurs enfants, leurs petits-enfants, un devoir de réparation nous incombe, de manière imprescriptible, comme le sont les crimes contre l’humanité perpétrés pendant la Seconde Guerre mondiale.
Tant que cela sera nécessaire, le Parlement devra réparer, comme ici, restituer les biens culturels spoliés par des actes antisémites entre 1933 et 1945. Au-delà de l’aspect patrimonial, priver une personne de son héritage familial et culturel, c’est aussi la priver d’émotions artistiques, le priver d’humanité.
Ne sous-estimons pas les circonstances internationales de ces actes : en France, les spoliations ont été le fait non pas des seuls nazis, mais aussi de Français, politiques, administratifs, anonymes, qui ont acquis des œuvres dans le cadre de procédures dites de vol légal.
Je voudrais saluer le travail de ceux qui se sont opposés dans les premières heures, guidés par leur intuition de justice, notamment des femmes. Je pense à Rose Valland, qui élabore un premier registre en 1940, au péril de sa vie. À partir de 1945, promue capitaine, elle est envoyée en Allemagne, sur le front de l’art. Sur plus de 100 000 œuvres identifiées, 60 000 ont été rapportées en France et 45 000 restituées à leurs propriétaires ou leurs ayants droit dans l’immédiat après-guerre.
Puis, rien, ou presque rien : seulement 184 tableaux sur les 2 000 dits MNR ont été restitués à leurs propriétaires, en grande pompe médiatique.
Après la conférence de Washington, les travaux de Corinne Bouchoux ont permis de relancer la question au Sénat.
Nous, écologistes, savons que le droit international est un puissant outil de communication gouvernementale, mais aussi un bien faible instrument juridique en droit interne…
L’étude d’impact de ce projet de loi confirme le constat de négligence des pouvoirs publics établi par Corinne Bouchoux. Après les années 1950, le statu quo s’est imposé, tant et si bien qu’il est impossible de dire aujourd’hui combien de biens culturels de nos collections publiques auraient été acquis dans des circonstances douteuses. Dans les collections publiques, un énorme travail de recherche s’impose, au-delà des œuvres MNR, pour comprendre les parcours juridiques d’appropriation des œuvres d’individus frappés par les lois scélérates.
Il faut aussi lever des entraves, comme l’accès aux archives nationales, et doter chaque fonds des moyens suffisants pour conduire ces recherches, mais aussi pour identifier les ayants droit, y compris pour les collections des collectivités territoriales, où l’initiative repose sur la bonne volonté d’élus. Enfin, notre intransigeance doit être la même avec les collectionneurs privés, a fortiori lorsqu’ils bénéficient de largesses fiscales : l’article 2 pourrait être renforcé en ce sens.
Au-delà des limites que je viens d’évoquer, je souhaite saluer cette initiative gouvernementale. La procédure de sortie de biens spoliés des collections publiques, instaurée par ce texte, lève le frein législatif aux restitutions, tout en élargissant la période historique de recherches.
Mais quelle leçon pouvons-nous en tirer pour l’avenir ? Dans sa célèbre Lettre au capitaine Butler, Victor Hugo écrivait : « Les crimes de ceux qui mènent ne sont pas la faute de ceux qui sont menés ; les gouvernements sont quelquefois des bandits, les peuples jamais. L’Empire français […] étale aujourd’hui, avec une sorte de naïveté de propriétaire, le splendide bric-à-brac du Palais d’été. J’espère qu’un jour viendra où la France délivrée et nettoyée, renverra ce butin à la Chine spoliée. »
Nous savons que les résultats d’autres massacres et d’autres pillages sont exposés dans nos musées ; il nous revient de nous doter des moyens juridiques pour prévenir l’acquisition publique de ces biens d’origine douteuse. À défaut, nous condamnons les générations futures à de nombreuses lois de réparation.
Applaudissements.
Applaudissements sur les travées des groupes GEST, SER et CRCE.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le dispositif introduit par ce texte ne vise pas seulement à faciliter la restitution de biens à leurs propriétaires ; il ne serait qu'un de plus, dans un long débat relatif à l'origine de certaines collections des musées européens.
Au-delà de la restitution patrimoniale, ce texte s'inscrit dans la démarche de condamnation, constante depuis le général de Gaulle, dès 1940, des persécutions antisémites perpétrées durant la Deuxième Guerre mondiale, de cette injustice profonde qui a déshonoré la France et la République au plus profond d'elles-mêmes et de cette barbarie sans nom qui a commis des crimes sur des individus dont le seul tort était celui d'être nés, comme le disait si justement André Frossard quand il parlait du crime contre l'humanité.
Ce projet de loi vise à restituer les biens culturels ayant fait l'objet de spoliation dans un contexte de persécutions antisémites entre 1933 et 1945 sur le sol français. Ces biens appartiennent à des collections publiques dans lesquelles ils n'auraient jamais dû se trouver.
On peut même s'étonner qu'au regard de cette injustice si profonde, cette restitution n'ait pas été facilitée dès l'origine et que la demande de restitution ait été laissée à l'initiative des propriétaires spoliés ou de leurs ayants droit.
Comme toute démarche, une telle demande peut s'enliser dans les méandres de procédures longues que les familles n'ont pas la force de supporter. Pourtant, la spoliation est une négation honteuse du droit de propriété, qui est profondément ancré dans notre droit et qui ne peut être mis en cause que pour des raisons d'intérêt général. La haine n'en est pas une !
Cette spoliation est pour les familles la négation de leur humanité, de leur mémoire et de leurs souvenirs.
Ce texte doit être donc salué pour ses apports.
Ce texte est attendu par ces familles.
Ce projet de loi institue tout d'abord une procédure de restitution simplifiée des biens culturels spoliés sur l'initiative des personnes publiques. Cela facilitera les restitutions en rappelant que l'État et les administrations ont aussi des devoirs.
C'est donc du côté de la puissance publique que la démarche de restitution doit d'abord être engagée, alors même que les autorités françaises ont reconnu leur responsabilité dans les persécutions, comme l'avait fait Jacques Chirac en 1995 dans son discours du Vél d'Hiv, précédemment cité par notre collègue Pierre Ouzoulias.
La période est définie plus largement, ce qui permettra de viser toutes les spoliations de caractère antisémite et évitera de buter sur des problèmes de chronologie.
Les persécutions antisémites n'ont pas commencé avec Vichy, mais Vichy y a bien participé, et bien au-delà du territoire français.
Cela permettra de restituer les biens confisqués par l'autorité de fait « se disant “gouvernement de l'État français” », comme le prévoit le nouvel article L. 115-2 du code du patrimoine.
Ces biens sont considérables – tous les orateurs l'ont indiqué – au point que les estimations, bien que vraisemblablement trop basses, donnent le tournis : plus de 5 millions de livres et 100 000 œuvres auraient été spoliées en France pendant l'Occupation, dont seulement 45 000 ont été restituées après-guerre et dont 2 200 feraient aujourd'hui partie des collections des musées nationaux.
Le temps peut certes faire son œuvre.
Les propriétaires spoliés ou leurs ayants droit peuvent également demander autre chose qu'une restitution. Le texte prévoit que « d'un commun accord la personne publique et le propriétaire ou ses ayants droit peuvent convenir de modalités de réparation de la spoliation autres que la restitution du bien ».
S'il convient de saluer la possibilité de telles transactions, la souplesse ne doit pas être entendue comme un abandon des restitutions. Il faudra aider au maximum les propriétaires ou leurs ayants droit. Ce sujet sera suivi.
Cette restitution peut aussi être engagée par les personnes morales de droit privé qui détiennent des biens spoliés, notamment les musées de France appartenant à des personnes morales de droit privé.
C'est une autre avancée de ce texte, car la problématique des musées privés est ainsi posée.
Le mouvement de réparation de ces dernières années est en route. Il marque une avancée et un encouragement à poursuivre, notamment pour clarifier le cas des œuvres répertoriées MNR, toujours en attente de restitution.
Enfin, un texte si important ne saurait éluder la question de son application et des démarches qui vont être entreprises.
Madame la ministre, quelles initiatives seront prises dans les mois à venir ? Certaines personnes publiques sont sous la tutelle de votre ministère. Quels établissements ou musées pourraient être concernés ? Comment seront-ils aidés financièrement, car si des indemnisations étaient envisagées, cela soulèverait des problèmes de financement ?
Il faudra être vigilant sur le décret qui fixera les modalités d'application de la nouvelle section introduite dans le code du patrimoine pour cette procédure de restitution simplifiée.
Ce texte doit déterminer la composition, l'organisation et le fonctionnement de la commission administrative qui donnera un avis à la personne publique qui effectuera la restitution.
Le décret concernera également des modalités d'application relatives aux restitutions qui seront effectuées par des musées privés.
Je salue cette précision apportée en commission par l'adoption d'un amendement de ma collègue rapporteure Béatrice Gosselin.
Sans préjuger de la rédaction du décret, il convient d'avoir des garanties et un suivi de son élaboration. Pourrons-nous en être informés ? La commission de la culture y sera vigilante.
Enfin, il faudra préciser l'ampleur des restitutions pour avoir une vue globale de ce qui nous attend.
Madame la ministre, mes chers collègues, avec le groupe Les Républicains, je voterai ce texte, parce qu'il s'inscrit dans une démarche pour une France que nous voulons plus juste, qui ne s'abrite pas derrière la complexité du passé pour mieux fouler les droits les plus fondamentaux de l'homme.
Ce texte traduit une volonté politique au travers de l'émotion suscitée. Je forme le vœu qu'il puisse inspirer d'autres pays, d'autres États confrontés au problème des spoliations.
Un pays qui reconnaît ses fautes peut toujours rester un modèle dans le monde. §
La discussion générale est close.
Nous passons à la discussion du texte de la commission.
Madame la ministre, le premier projet de loi que vous nous présentez aborde un sujet douloureux, solennel et grave, sur lequel il me semble important que nous nous penchions, aussi longtemps après.
Dans La tête d ’ obsidienne, André Malraux écrit : « L’art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort. » Bien qu’il fasse référence à Picasso et aux traces que celui-ci a laissées, ce texte nous parle de manière symbolique de la façon dont l’art transcende, transmue le réel. Or ce projet de loi touche précisément à cela : la manière dont l’art est la présence dans la vie de ce qui devrait appartenir à la mort.
Le moment est venu d’examiner un tel texte. Jamais auparavant les documents n’ont été aussi nombreux et aussi accessibles, depuis la chute de l’Union soviétique, depuis l’ouverture et la numérisation de toutes les archives. Les travaux scientifiques se sont accélérés et les États coopèrent de plus en plus sur la question de la restitution des biens juifs spoliés pendant les persécutions antisémites de 1933 à 1945.
Vous avez ainsi mentionné le tableau de Klimt, Le rosier, qui a pu être restitué après un travail commun entre le musée d’Orsay et le Belvédère de Vienne, grâce à des recherches intensives et à une coopération entre les deux États.
Les familles y sont prêtes : l’éloignement de la Shoah, avec le lent apaisement de la douleur, permet aussi d’insister sur la dimension de transmission de mémoire qu’implique la restitution de ces collections, car il s’agit aussi de la mémoire de la Shoah elle-même.
Le Gouvernement avait présenté un projet de loi voilà deux ans, que vous rapportiez déjà, madame Gosselin. Vous aviez déclaré à l’époque que chaque demande donnait lieu à un processus administratif et législatif laborieux et qu’il était temps d’élaborer une loi-cadre. La voilà.
En 2019, la M2RS a été créée au sein du ministère de la culture. Avec la disparition des témoins directs de la Shoah, le souvenir de certaines œuvres disparaît parfois. Il est donc temps d’accélérer pour restituer les œuvres dans de bonnes conditions.
C’est pourquoi nous parvenons à un consensus sur ce texte. La question n’est pas simplement symbolique ; elle ne concerne pas seulement la justice. Il s’agit également de réparation intime, car c’est bien là le rôle de l’art.
J’ai ainsi à l’esprit le peintre Mark Rothko, artiste américain d’origine juive russe, parti bien avant la Shoah avec sa famille pour rejoindre son père aux États-Unis en 1913. Sa jeunesse fut marquée par des traumatismes profonds, en raison des pogroms et des massacres de Juifs dans ce qui était à l’époque l’Empire russe ; aujourd’hui, ce sont les pays baltes.
La manière dont ce traumatisme a nourri son œuvre est saisissante : ses fameux rectangles vibrants de couleurs peuvent être perçus comme une tentative de donner une énergie nouvelle à des tombes. En effet, bien que chaque personne puisse interpréter les œuvres d’art à sa manière, l’œuvre de Rothko peut être vue comme une représentation de tombes, celles qui n’ont jamais été érigées pour les victimes des pogroms dans l’Empire russe, qu’il a transmuées en tableaux vibrants de couleurs et donc d’énergie.
Aujourd’hui, c’est également à cela que nous devons penser. Nous nous souvenons avant tout de personnes qui avaient fait le choix de faire vivre l’art en construisant des collections. En leur restituant leurs biens, nous leur rendons leur mémoire, et nous reconnaissons la contribution précieuse qu’ils ont apportée à l’art et aux artistes.
L'amendement n° 18, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Avant l'article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Nation reconnaît sa responsabilité à l'égard de la population juive vivant en France métropolitaine et dans les territoires administrés, dans les préjudices subis du fait des agissements de l'État français de 1940 à 1944.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
À ce jour, il n'existe aucun texte reconnaissant les crimes commis par l'État français entre 1940 et 1944. Ce texte pourrait être l'occasion, pour la Nation, de reconnaître sa responsabilité à l'égard des populations juives dans les agissements de l'État français de 1940 à 1944.
Il s'agit au fond d'un amendement mémoriel, mais le sujet est extrêmement important.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est avec une émotion particulière que j’interviens sur ce sujet nous ramenant aux heures les plus sombres de notre histoire : la spoliation des biens juifs durant l’Occupation, mais également depuis 1933.
Nous nous apprêtons à examiner un projet de loi historique. Héritage volé, les biens concernés ont été arrachés et dispersés à travers le monde et leur inestimable valeur occultée par l’injustice.
Plus de quatre-vingts ans après, il est temps d’apaiser, de réparer, de rétablir l’équilibre et de redonner une voix à cette histoire confisquée. Ces biens culturels – œuvres d’art, livres ou instruments de musique – étaient autrefois en harmonie avec l’âme de leurs propriétaires, mais les nazis, avec le soutien de l’État français de l’époque, complice et acteur de ces exactions, ont procédé à des vols, des pillages, des confiscations abjectes, des saisies.
Sous le couvert de l’aryanisation, bercés par l’antisémitisme le plus radical, ils ont fait des lois du Reich et des rafles une occasion pour dépouiller les Juifs de ces trésors qui leur reviennent aujourd’hui de droit. Des familles entières ont été dépossédées, des communautés réduites au silence, des vies brisées… tout cela au nom de la discrimination et de la haine !
Nous nous souvenons tous des débats précédant l’adoption de la loi du 21 février 2022 relative à la restitution ou la remise de certains biens culturels aux ayants droit de leurs propriétaires victimes de persécutions antisémites. Les parlementaires de tous bords avaient alors exprimé leur volonté de trouver une solution législative durable. Il est temps, mes chers collègues, de mettre fin à cette injustice persistante.
Nous devons simplifier la restitution et lever les barrières qui entravent ces retours légitimes. Les procédures complexes les avaient rendus difficiles ; la simplification des démarches, l’établissement de critères clairs, l’engagement de délais raisonnables, toutes ces mesures forment un message : nous reconnaissons votre souffrance, nous honorons votre histoire, nous rétablirons l’équité.
Le contexte juridique entourant les biens spoliés est actuellement un labyrinthe complexe. Dès 1943, plusieurs ordonnances ont été prises par le gouvernement de Londres pour prévoir la nullité des actes de spoliation. Un inventaire des biens en question a été dressé en 1949, mais il était incomplet. De nombreuses restitutions ont eu lieu à la suite de procédures de recherche.
Cependant, les œuvres concernées sont juridiquement enchaînées, inaliénables et imprescriptibles. Actuellement, deux moyens de restitution existent : une procédure de nullité de l’acte de spoliation devant les tribunaux judiciaires ou une décision du juge administratif ou judiciaire de restitution des biens classés MNR.
Le présent projet de loi propose d’introduire trois nouveaux articles dans le code du patrimoine pour faciliter ces retours. Le premier crée une dérogation de principe de l’inaliénabilité des biens publics ; le deuxième prévoit la nullité de plein droit des actes de spoliation ; enfin, le troisième instaure une procédure spécifique qui garantit des délais raccourcis et des critères clairs pour les demandes.
En simplifiant les procédures, nous guiderons ces biens vers leurs propriétaires légitimes. La restitution n’est pas un simple acte de justice ; c’est une réparation, une réconciliation, la reconnaissance de la valeur inestimable de ces biens pour la mémoire collective et pour les générations futures.
Nous ne pouvons pas changer le passé, mais nous pouvons agir pour corriger les torts commis et tisser un avenir de justice et de solidarité. Tel est notre devoir envers ceux qui ont été dépouillés, envers notre histoire et envers nous-mêmes. La restitution des biens spoliés aux Juifs est une étape cruciale vers la réconciliation, une étape de la construction d’un avenir dans lequel le passé n’est pas oublié, et les erreurs sont rectifiées. Il y va de notre devoir de mémoire.
Avant de conclure, je souhaite saluer le travail de la sénatrice Corinne Bouchoux, qui a rédigé un important rapport sur ces questions de restitution ; celui, ensuite, de notre collègue Catherine Morin-Desailly, qui, depuis des années, fait avancer cette question des biens spoliés ; celui, aussi, de Béatrice Gosselin, notre rapporteure, secondée par les services de la commission, avec qui j’ai participé à de très nombreuses auditions intéressantes.
Enfin, madame la ministre, merci de vous être saisie de cet important sujet. Ce projet de loi concerne aujourd’hui les biens spoliés. Demain viendra le tour des restes humains, et, dans un avenir que j’espère proche, celui des biens mal acquis, un projet sur lequel j’aurai plaisir à travailler sur le fond.
Mes chers collègues, le groupe Socialiste, Écologiste et Républicain soutiendra ce projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945. Ensemble, œuvrons pour réparer ces injustices, pour que les trésors volés retrouvent leur place légitime et pour que la mémoire des victimes soit honorée.
Le temps est venu d’agir pour rendre justice à ceux qui ont été privés de tout.
Cet amendement tend à introduire un article liminaire portant reconnaissance par la Nation de la responsabilité de l'État français entre 1940 et 1944 dans les préjudices subis par la population juive.
Si la responsabilité propre du régime de Vichy dans les persécutions antisémites est indéniable, l'objet du présent projet de loi n'est pas mémoriel. Il s'agit de créer une procédure de restitution des biens culturels spoliés.
Par ailleurs, les champs de l'amendement et du projet de loi ne coïncident pas. Le projet de loi couvre un champ plus étroit que l'amendement proposé, puisqu'il ne porte que sur les spoliations de biens culturels, et son périmètre spatio-temporel est plus étendu, puisqu'il couvre toutes les spoliations de biens culturels intervenues entre 1933 et 1945, quel qu'en soit l'auteur ou le lieu de perpétration.
L'amendement n° 4 de M. Pierre Ouzoulias, que nous examinerons dans un instant, vise à rappeler la responsabilité du régime de Vichy.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le texte que nous examinons ce jour est le premier d’une série de trois lois visant à établir un cadre pour des restitutions qui n’exigeront plus le vote par le Parlement de dispositifs législatifs ad hoc.
Un débat préalable aurait sans doute été utile pour préciser les principes de ce dessaisissement du Parlement par lui-même : rappelons que le domaine public mobilier est doublement protégé par le code général de la propriété des personnes publiques et par le code du patrimoine.
Lors du dépôt du projet de loi relative à la restitution de biens culturels à la République du Bénin et à la République du Sénégal, en juillet 2020, le Gouvernement n’avait ainsi pas souhaité mettre en œuvre une loi de principe. Selon lui, un tel texte aurait pu être censuré pour incompétence négative du législateur, au risque de faire obstacle aux restitutions pourtant souhaitables.
Finalement, le Gouvernement a considéré que ce risque juridique dirimant pouvait être contourné par le dépôt de trois projets de loi. Il serait de bonne politique que ceux-ci obéissent à des objectifs similaires. Le premier serait celui de la collégialité et de la publicité de l’instruction des restitutions. En effet, celles-ci sont assurées par la collaboration d’une mission de recherche chargée du récolement des œuvres et de la constitution des dossiers scientifiques, ainsi que d’une commission administrative indépendante.
Ensuite, il resterait à définir les modalités d’information du Parlement, qui ne peut être totalement exclu de procédures touchant à la domanialité publique. Le décret d’organisation de la commission placée auprès du Premier ministre répondra sans doute à cette attente.
Sur ces deux points, je vous le dis sans détour, madame la ministre, le rapport rendu par M. Martinez et intitulé Patrimoine partagé : universalité, restitutions et circulation des œuvres d’art est décevant. La constitution au cas par cas de groupes de travail formés d’experts bilatéraux nommés par leur gouvernement ne saurait apporter les mêmes garanties d’impartialité qu’une commission indépendante et pérenne.
En outre, je doute que le Parlement se satisfasse d’une information annuelle délivrée par le Gouvernement à la seule commission de la culture. Lors des débats futurs, il conviendra donc de nous demander si les attributions de la commission instaurée par le présent projet de loi ne pourraient pas être étendues à d’autres domaines.
Les conditions de restitution doivent être d’autant plus irréprochables qu’elles concernent des biens collectés durant les périodes les plus sombres de notre histoire nationale ; ceux-ci, au-delà de leur qualité artistique, constituent des témoignages bouleversants du destin dramatique de ceux à qui ils ont été arrachés par la violence, la spoliation institutionnelle et le dol.
Le texte dont nous débattons aujourd’hui n’est pas seulement technique : il marque, pour la première fois depuis 1945, une reconnaissance législative des spoliations antisémites perpétrées par l’Allemagne nazie et l’État français. La voie a été ouverte par les mots du président Jacques Chirac le 16 juillet 1995, lors de la commémoration de la rafle du Vel d’Hiv : « La France, patrie des Lumières et des droits de l’homme, terre d’accueil et d’asile, la France, ce jour-là, accomplissait l’irréparable. Manquant à sa parole, elle livrait ses protégés à leurs bourreaux. »
Près de trente ans après cette déclaration, nous allons, mes chers collègues, poursuivre cet effort en identifiant clairement dans la loi la responsabilité spécifique de l’État français.
Sauf à s’engager dans une coupable opération de négationnisme, il est acquis que l’État français a, de son propre chef et avec l’aide de l’occupant nazi, mené une entreprise de persécution et de spoliation des Juifs de France, citoyens français ou immigrés, dont les objectifs ultimes étaient leur déportation et leur extermination.
Cette politique antisémite est au cœur de la Révolution nationale voulue par Pétain. Elle fonde le programme de l’extrême droite française depuis Maurras et l’Action française, dont 2 000 nostalgiques ont défilé le week-end dernier, poussant les mêmes cris de haine que les ligues factieuses de 1934.
Ces crimes antisémites sont des crimes contre l’humanité et sont imprescriptibles. En votant cette loi, nous affirmons solennellement la volonté de la Nation d’œuvrer perpétuellement pour les identifier, les dénoncer et aussi tenter de les compenser matériellement par la restitution.
Le présent projet de loi n'aurait pas pu voir le jour s'il n'y avait pas eu le discours du Vél d'Hiv de Jacques Chirac.
Toutefois, comme vient de l'indiquer la rapporteure, l'objet du texte est à la fois plus restreint et plus vaste que celui de l'amendement n° 4.
Le projet de loi porte en effet sur la sortie du domaine public de biens culturels spoliés, soit un champ nettement plus étroit que celui de toutes les persécutions commises par le régime de Vichy.
À l'inverse, son champ géographique et temporel est plus vaste que celui du régime de Vichy, puisque le texte prévoit de pouvoir faire sortir du domaine public des biens spoliés en Allemagne et ailleurs en Europe par l'Allemagne nazie et divers spoliateurs, et ce dès 1933 pour ce qui concerne l'Allemagne.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement, mais cela n'enlève rien à l'importance du discours fondateur que vous avez évoqué, madame la sénatrice.
Sans entrer dans le débat relatif aux champs respectifs de l'amendement et du projet de loi, je demande à ma collègue de bien vouloir retirer son amendement.
Ce n'est pas la Nation qui est en cause ; c'est le régime de l'État français de Vichy. La Nation comptait des résistants, des Justes, des personnes qui, en aucun cas, n'auraient accepté ce qui s'est passé.
La Nation d'aujourd'hui n'a pas à assumer la responsabilité de celle d'hier, qui était diverse. Il est légitime de confondre le régime collaborationniste de l'État français, qui a permis les spoliations et les déportations. Mais c'est à la République de le faire ; cela ne concerne pas la Nation.
La Nation est un ensemble bien plus vaste que le régime politique. Et, à titre personnel, je ne veux pas que l'on inclue – ce n'est pas le sens de l'amendement de Nathalie Goulet, mais la rédaction proposée pourrait porter à confusion – les résistants et les Justes dans une nation responsable.
La responsabilité incombe à l'État français. Laissons la Nation à part !
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de saluer à mon tour le présent texte au nom du groupe Union Centriste et de féliciter notre rapporteure, Béatrice Gosselin, pour son travail remarquable sur le sujet.
Comme cela a été souligné à plusieurs reprises en commission, le Sénat peut s’enorgueillir d’avoir a été moteur en la matière ; je tiens à vous faire part, en particulier, de la satisfaction de notre groupe Union Centriste : Nicolas About a porté le premier texte de loi sur la restitution des restes humains, à savoir la loi du 6 mars 2002 relative à la restitution par la France de la dépouille mortelle de Saartjie Baartman à l’Afrique du Sud, concernant la fameuse Vénus hottentote.
Dans la même veine, Catherine Morin-Desailly a été à l’origine de la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections.
J’en viens plus spécifiquement des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations antisémites dans le contexte du nazisme. Corinne Bouchoux a initié le débat en 2013. Nous sommes désormais en 2023, et il a fallu dix ans pour qu’un gouvernement se saisisse pleinement de la question. Les esprits les plus critiques se demanderont pourquoi nous avons tant attendu, tandis que d’autres souligneront qu’il vaut mieux tard que jamais.
Certes, la loi du 21 février 2022 a permis à la France de restituer quatorze œuvres des collections nationales, et une œuvre d’une collection municipale, spoliées ou acquises dans des conditions troubles, aux ayants droit de leurs propriétaires, victimes de persécutions antisémites.
Cependant, pour réaliser un inventaire global et mener une véritable politique de restitution et de réparation, les lois d’espèce ne suffisent plus. Il est établi depuis longtemps que la mise en place d’un cadre global s’impose. Tel est l’objet du présent texte. Nous ne pouvons que nous en féliciter, d’autant plus que le mécanisme qu’il instaure est pertinent.
Sans trop entrer dans le détail, relevons qu’il permet aux détenteurs des biens restituables de prendre l’initiative de la restitution – auparavant, une telle démarche ne pouvait être engagée que sur l’initiative des ayants droit – et soumet alors leur sortie des collections à l’avis préalable de la CIVS.
Nous approuvons l’analyse de notre rapporteure selon laquelle le caractère simple de cet avis ne vide pas ipso facto le dispositif de sa substance. Il est probable que, la plupart du temps, l’avis de la CIVS sera suivi. Pour autant, dans la suite de nos travaux, il nous faudra trancher la question de ce qui se passera lorsqu’il ne le sera pas.
Nous apprécions la flexibilité de ce texte, qui permet que les différentes options de compensation de la spoliation, autre que la restitution pure et simple, soient discutées entre la collectivité et la personne spoliée ou ses héritiers.
Si ce cadre apparaît comme général au regard des lois d’espèce, il demeure néanmoins spécifiquement établi pour les spoliations antisémites. Une question se pose donc. Fallait-il un cadre plus global concernant toutes les restitutions ? Notre première inclination allait dans ce sens et la proposition de loi relative à la circulation et au retour des biens culturels appartenant aux collections publiques, que le Sénat a adoptée le 10 janvier 2022, ne portait pas sur les spoliations antisémites, mais regroupait les restitutions coloniales et celles de restes humains.
Un autre choix a finalement été fait par le Gouvernement : ce projet de loi est le premier d’un train de trois textes qui nous seront successivement présentés. Il concerne les spoliations antisémites, une nouvelle proposition de loi de Catherine Morin-Desailly s’attachera aux restes humains, et un troisième texte sera dédié aux restitutions coloniales.
Pourquoi pas ? Nous comprenons l’intérêt mémoriel et politique de ce choix : il s’agit d’éviter tout amalgame et de respecter l’importance et la singularité de chaque situation.
Néanmoins, il serait préférable que les excellents principes qui irriguent le texte qui nous est soumis aujourd’hui imprègnent également les deux autres ; le groupe Union Centriste y veillera.
Pour autant, vous l’aurez sans doute compris, nous voterons en faveur de ce texte.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, permettez-moi de saluer à mon tour le présent texte au nom du groupe Union Centriste et de féliciter notre rapporteure, Béatrice Gosselin, pour son travail remarquable sur le sujet.
Comme cela a été souligné à plusieurs reprises en commission, le Sénat peut s’enorgueillir d’avoir a été moteur en la matière ; je tiens à vous faire part, en particulier, de la satisfaction de notre groupe Union Centriste : Nicolas About a porté le premier texte de loi sur la restitution des restes humains, à savoir la loi du 6 mars 2002 relative à la restitution par la France de la dépouille mortelle de Saartjie Baartman à l’Afrique du Sud, concernant la fameuse Vénus hottentote.
Dans la même veine, Catherine Morin-Desailly a été à l’origine de la loi du 18 mai 2010 visant à autoriser la restitution par la France des têtes maories à la Nouvelle-Zélande et relative à la gestion des collections.
J’en viens plus spécifiquement des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations antisémites dans le contexte du nazisme. Corinne Bouchoux a ouvert le débat en 2013. Nous sommes désormais en 2023, et il a fallu dix ans pour qu’un gouvernement se saisisse pleinement de la question. Les esprits les plus critiques se demanderont pourquoi nous avons tant attendu, tandis que d’autres souligneront qu’il vaut mieux tard que jamais.
Certes, la loi du 21 février 2022 a permis à la France de restituer quatorze œuvres des collections nationales, et une œuvre d’une collection municipale, spoliées ou acquises dans des conditions troubles, aux ayants droit de leurs propriétaires, victimes de persécutions antisémites.
Cependant, pour réaliser un inventaire global et mener une véritable politique de restitution et de réparation, les lois d’espèce ne suffisent plus. Il est établi depuis longtemps que la mise en place d’un cadre global s’impose. Tel est l’objet du présent texte. Nous ne pouvons que nous en féliciter, d’autant plus que le mécanisme qu’il instaure est pertinent.
Sans trop entrer dans le détail, relevons qu’il permet aux détenteurs des biens restituables de prendre l’initiative de la restitution – auparavant, une telle démarche ne pouvait être engagée que sur l’initiative des ayants droit – et soumet alors leur sortie des collections à l’avis préalable de la CIVS.
Nous approuvons l’analyse de notre rapporteure selon laquelle le caractère simple de cet avis ne vide pas ipso facto le dispositif de sa substance. Il est probable que, la plupart du temps, l’avis de la CIVS sera suivi. Pour autant, dans la suite de nos travaux, il nous faudra trancher la question de ce qui se passera lorsqu’il ne le sera pas.
Nous apprécions la flexibilité de ce texte, qui permet que les différentes options de compensation de la spoliation, autre que la restitution pure et simple, soient discutées entre la collectivité et la personne spoliée ou ses héritiers.
Si ce cadre apparaît comme général au regard des lois d’espèce, il demeure néanmoins spécifiquement établi pour les spoliations antisémites. Une question se pose donc. Fallait-il un cadre plus global concernant toutes les restitutions ? Notre première inclination allait dans ce sens et la proposition de loi relative à la circulation et au retour des biens culturels appartenant aux collections publiques, que le Sénat a adoptée le 10 janvier 2022, ne portait pas sur les spoliations antisémites, mais regroupait les restitutions coloniales et celles de restes humains.
Un autre choix a finalement été fait par le Gouvernement : ce projet de loi est le premier d’un train de trois textes qui nous seront successivement présentés. Il concerne les spoliations antisémites, une nouvelle proposition de loi de Catherine Morin-Desailly s’attachera aux restes humains, et un troisième texte sera dédié aux restitutions coloniales.
Pourquoi pas ? Nous comprenons l’intérêt mémoriel et politique de ce choix : il s’agit d’éviter tout amalgame et de respecter l’importance et la singularité de chaque situation.
Néanmoins, il serait préférable que les excellents principes qui irriguent le texte qui nous est soumis aujourd’hui imprègnent également les deux autres ; le groupe Union Centriste y veillera.
Pour autant, vous l’aurez sans doute compris, nous voterons en faveur de ce texte.
Madame Goulet, l'amendement n° 18 est-il maintenu ?
Non, madame la présidente. Les observations qui viennent d'être formulées me paraissent pertinentes. Je retire donc mon amendement.
L'amendement n° 18 est retiré.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, c’est toujours avec une émotion certaine que nous nous retournons vers cette sombre période de notre histoire durant laquelle l’idéologie nazie a orchestré l’extermination du peuple juif et organisé sa spoliation.
La complicité de l’État français de l’époque nous oblige encore davantage envers les victimes et leurs descendants. De ce fait, ce projet de loi relatif à la restitution des biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945 est attendu et mérite notre soutien.
Ce texte remet en question le principe d’inaliénabilité des biens culturels du domaine public, pour les restituer, au même titre que les biens MNR. Madame la ministre, profitons de cette occasion pour nous interroger sur une possible évolution des principes d’imprescriptibilité et d’inaliénabilité des biens culturels. L’inaliénabilité pourrait ainsi être fondée sur la seule dimension culturelle plutôt que sur la patrimonialité.
Inscrire les biens culturels dans un patrimoine mondial de l’humanité serait un remarquable message de concorde universelle, permettant à l’art et à la culture de jouer pleinement leur rôle d’éveil de conscience.
Le débat se porterait alors sur l’usufruit et la nue-propriété, ainsi que sur la localisation des œuvres d’art : dans les musées pour un dialogue interculturel et intergénérationnel, ou sur leur lieu d’origine, si celles-ci sont nécessaires à l’identité d’un territoire ou d’un peuple.
Si notre émotion est forte en évoquant les spoliations antisémites, cette reconnaissance et ces réparations doivent s’intégrer au sein d’un devoir de reconnaissance et de réparation plus vaste, englobant les spoliations réalisées à d’autres moments et en d’autres lieux, notamment durant l’époque coloniale.
Au cours des auditions, nous avons été alertés sur le risque de ressentiment qu’une loi spécifique aux spoliations antisémites pourrait alimenter si nous négligions concomitamment d’autres spoliations, remontant en particulier à la période coloniale. L’enfer est pavé de bonnes intentions, et nous devons aux victimes des persécutions antisémites et à leurs descendants de ne pas risquer d’en entrevoir la porte.
Agir en faveur d’une loi-cadre qui engloberait toutes les spoliations, sans stigmatiser aucune catégorie spécifique de victimes, élèverait la France au-dessus de contraintes administratives suspectes au regard de notre devoir de reconnaissance et de réparation des préjudices subis.
Nous accueillons positivement les avancées de ce projet de loi, pour ce qu’il apporte aux démarches légales de reconnaissance et de restitution.
Si l’octroi automatique du certificat d’exportation pour les œuvres spoliées importées sur notre territoire constitue une réparation juste, nous pourrions néanmoins nous interroger sur cette automaticité s’agissant des œuvres qui ne l’ont jamais quitté. Celles-ci pourraient en effet en sortir si les négociations n’aboutissaient pas, puisque l’autorisation de sortie s’imposerait alors.
Plutôt que la présence symbolique de parlementaires dans une CIVS reconfigurée, un véritable rapport annuel d’information des commissions de la culture du Parlement nous semble en outre indispensable, dès lors que le Parlement sera dessaisi de l’avis par l’adoption de cette loi.
Pour finir, madame la ministre, nous souhaitons que les moyens dédiés à la recherche de provenance soient véritablement garantis. Notre devoir de réparation nous y oblige.
Madame la ministre, je tiens à saluer cette initiative de votre ministère, ainsi que le travail de Mme la rapporteure et de tous les collègues qui sont intervenus sur ce sujet particulièrement sensible, sous la houlette de M. le président de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication.
L'article 1er prévoit la création d'une procédure administrative pour la restitution des biens culturels spoliés intégrés aux collections publiques.
Permettez-moi de rappeler que le 6 juin 2018, dans le cadre de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », la commission des finances avait adopté un rapport d'information intitulé La commission pour l'indemnisation des victimes de spoliations antisémites : vingt ans après, redonner un élan à la politique de réparation dans lequel nous formulions un certain nombre de constats et de recommandations relatifs à la CIVS. Nous rappelions le rôle important du président Jacques Chirac et de toutes les personnes qui se sont investies et engagées.
Nous plaidions notamment pour une CIVS « augmentée », disposant des moyens suffisants pour apporter aux descendants et aux ayants droit une réparation dans un cadre de respect et de mémoire.
Je soutiendrai donc cet article.
L'amendement n° 4, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Après le mot :
nazie
remplacer le mot :
et
par le signe :
2° Remplacer le mot :
notamment
par les mots :
et par
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, qui sommes-nous ? Juste des parlementaires : pas plus, pas moins.
Je voterai en faveur de ce texte, mais j’entends dans cet hémicycle des propos que je préférerais ne pas entendre : un texte pourrait être une « réparation » ou une « réconciliation ». Non ! La Shoah ne se répare pas, ne se réconcilie pas : elle ne relève pas du même domaine que le reste.
Ce texte va permettre de ne plus avoir besoin de loi d’espèce chaque fois que l’on veut procéder à une restitution. On estime que, en France, sans même parler du reste de l’Europe, entre 100 000 et 150 000 biens ont été spoliés.
Oui, il y avait les trains de Goering, le projet de musée de Linz d’Hitler, et ces œuvres d’art magnifiques qui se trouvaient chez des collectionneurs ou des galeristes. Cependant, beaucoup des œuvres concernées n’étaient pas nécessairement de renommée mondiale. Où sont-elles maintenant ? Certaines sont dans nos musées, mais beaucoup d’entre elles ont fini entre les mains de collaborateurs, de profiteurs de guerre, de personnes sans scrupules qui ont utilisé le régime nazi, la collaboration et le régime de Vichy pour s’approprier ces biens. Où en sommes-nous à cet égard ? C’est difficile à dire.
Il est vrai qu’il y a eu beaucoup de restitutions juste après la guerre. Après la Libération, l’occupation de l’Allemagne a permis la restitution de nombreux biens connus, reconnus, enregistrés par l’administration allemande.
Cependant, où sont les très nombreux biens moins connus ? Nous n’en savons rien, pour la plupart d’entre eux. Il faut naturellement, madame la ministre, trouver un texte qui permette au moins la restitution de ceux qui sont dans les musées ou dans les collections publiques.
J’évoquerai l’exemple de ce collectionneur viennois qui, sans en informer les autorités, détenait chez lui des centaines de tableaux spoliés, volés. On les a retrouvés non pas par hasard, certes, mais certainement pas parce qu’il les aurait lui-même déclarés.
Il me semble nécessaire d’avancer. Je vous remercie, madame la ministre, et je tiens également à remercier Mme Bouchoux pour son rapport, ainsi que mes collègues centristes pour leur travail ; pour autant, nous devons être extrêmement modestes. La Shoah ne peut pas être « réparée ». Il ne peut pas y avoir de « réconciliation ».
À mon sens, la restitution des biens ne constitue en rien une réconciliation des Français, car il n’y a pas de réconciliation possible s’agissant de ces événements. Je n’accepterais pas l’idée même qu’il puisse y en avoir une ; ce serait la négation de la République !
Rendre un tableau, ce n’est pas de la réparation ; c’est de la justice, et seulement de la justice. Un tableau qui a été spolié appartient à la famille à laquelle il a été spolié. La justice exige qu’on lui restitue le tableau.
En revanche, on ne peut pas réparer la déportation et le massacre d’une famille. Comment le pourrait-on ?
La restitution est un acte, non pas de réparation ou de réconciliation, mais de justice. J’estime qu’il faut être très clair sur ce point.
Je remercie la commission des travaux qui ont été menés sur l’analyse, le suivi et la possibilité d’accélérer un peu le système de restitution. Mais le véritable travail qu’il conviendrait d’accomplir est-il humainement faisable, madame la ministre ? Comment encourager – j’utilise un terme poli – les musées, privés ou publics, et les collectionneurs, privés ou publics, qui ont un doute sur l’origine d’un bien à se tourner vers les commissions compétentes pour en déterminer l’origine ?
Le conservateur d’un musée privé peut ne pas avoir très envie de restituer un bien. De fait, seule une enquête publique permettrait de retrouver les biens spoliés, et ce travail serait d’autant plus long que ces biens sont nombreux, sans compter que les héritiers étant parfois tous morts, certains biens ne seront jamais restitués aux familles.
Oui, il faut des textes. Il en faudra même sûrement d’autres. Oui, nous pouvons avancer. Mais ne parlons ni de réparation ni de réconciliation. La Shoah est irréductible à une réparation. Restituons, rendons la justice, mais n’oublions pas, mes chers collègues.
Dans l'expression « dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées par l'Allemagne nazie et par les autorités des territoires qu'elle a occupés, contrôlés ou influencés, notamment l'autorité de fait se disant “gouvernement de l'État français” », j'estime que l'adverbe « notamment » est ambigu et pourrait laisser entendre que l'État français a organisé la spoliation des Juifs sous la pression de l'occupant nazi, ce qui n'est pas tout à fait la réalité.
L'analyse historique a bien montré que le gouvernement de Vichy avait organisé de lui-même, sans contrainte, une partie des persécutions.
Le directeur de cabinet de Pétain, Henry Du Moulin de Labarthète, indique d'ailleurs dans ses mémoires, publiés en 1946 : « L'Allemagne ne fut pas à l'origine de la législation anti-juive de Vichy. Cette législation fut, si l'on peut dire, spontanée et autochtone. »
Je propose donc de remplacer « notamment » par « et », afin de bien identifier la spécificité des lois votées par l'État français.
rapporteure. Cette question avait déjà été très débattue lors de l'examen du projet de loi en commission. M. Ouzoulias nous avait promis de nous proposer une rédaction n'ayant pas d'incidence sur le périmètre des spoliations couvertes par le texte.
Si l'on peut s'interroger sur le bien-fondé de la distinction entre le régime de Vichy et les autres territoires occupés, contrôlés ou influencés par l'Allemagne nazie au cours de cette période, cet amendement a pour objet de répondre au souhait, partagé par de nombreux collègues, de voir reconnaître par le législateur la responsabilité du régime de Vichy dans les persécutions antisémites.
C'est une manière de prolonger le discours de Jacques Chirac, prononcé en 1995, à l'occasion de la commémoration du cinquante-troisième anniversaire de la rafle du Vél d'Hiv.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il n’est pas facile de prendre la parole après Roger Karoutchi. Tout a été dit, ou presque, sur ce projet de loi, qui comporte à mes yeux une erreur historique majeure.
Le texte reprend en effet l’expression connotée, datant de deux ordonnances de 1944 et 1945, désignant le régime de Vichy comme une autorité de fait « se disant “gouvernement de l’État français” ».
Madame la ministre, ce n’est pas le « se disant gouvernement » qui a expulsé mon père du lycée Charlemagne.
Ce ne sont pas des « se disant gendarmes » qui ont raflé mon père et ses parents, le 16 juillet 1942.
Ce n’est pas le « se disant commissaire-priseur », sur ordre du préfet du Nord, monsieur le sénateur Kanner, qui a spolié ma grand-mère et son mari de quelques bien qu’ils possédaient dans un petit magasin de chapeaux à Douai.
Madame la ministre, la liste des spoliations ne s’arrête pas aux œuvres d’art. On a pris à mes grands-parents des pieds, un rayonnage d’un montant de 350 francs, une caisse et quelques autres éléments, pour un total de 11 160 francs de l’époque.
Mon grand-père maternel ne s’est pas laissé faire. L’histoire est un peu longue pour aujourd’hui, mais, dans une lettre du 25 juin 1942 que ma mère a gardée précieusement, il écrivait ceci au préfet du Nord : « Vous voudrez bien me faire parvenir toute communication ou instruction nouvelle adressée par le commissariat général à Paris relative à cette affaire. »
C’est bien l’État français qui était en cause, comme l’a reconnu le président Chirac dans un discours historique responsable. J’ai déposé des amendements visant à préciser la rédaction dans ce sens.
Dans cette période troublée, madame la ministre, il faut appeler les choses par leur nom de façon à éviter les amalgames et le négationnisme.
Il faut aussi éviter que certains candidats aux élections présidentielles puissent affirmer que Vichy a protégé les Juifs.
Les spoliations sont des vols, des injustices commises par l’État français et ses ilotes.
Les spoliations sont une blessure due à ces injustices que le temps n’efface pas et qui se transmet de génération en génération.
Je veux rappeler ici la mémoire des milliers de familles spoliées de quelques biens meubles, de leur linge de maison, de quelques instruments de cuisine, spoliées de tout et de leur vie.
Hier – hasard du calendrier –, France 5 diffusait un documentaire remarquable sur l’opération « meubles », lors de laquelle 44 000 foyers juifs ont été vidés du sol au plafond, tandis que de la lingerie, des jouets et des petites cuillères étaient spoliés.
Madame la ministre, il faudrait lancer un appel à tous ceux et toutes celles qui pourraient être en possession de documents tels que ceux que j’ai entre les mains pour poursuivre le travail déjà accompli.
Le texte que nous allons voter aujourd’hui est un texte mémoriel, qu’il s’appelle ainsi ou non. C’est un texte pour la mémoire ; Roger Karoutchi l’a très bien dit. Comme je l’ai dit à votre prédécesseur, madame la ministre, vous n’êtes pas aujourd’hui seulement le ministre de la culture : vous êtes aussi celui de la justice.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, il n’est pas facile de prendre la parole après Roger Karoutchi. Tout a été dit, ou presque, sur ce projet de loi, qui comporte à mes yeux une erreur historique majeure.
Le texte reprend en effet l’expression connotée, datant de deux ordonnances de 1944 et 1945, désignant le régime de Vichy comme une autorité de fait « se disant “gouvernement de l’État français” ».
Madame la ministre, ce n’est pas le « se disant gouvernement » qui a expulsé mon père du lycée Charlemagne.
Ce ne sont pas des « se disant gendarmes » qui ont raflé mon père et ses parents, le 16 juillet 1942.
Ce n’est pas le « se disant commissaire-priseur », sur ordre du préfet du Nord, monsieur le sénateur Kanner, qui a spolié ma grand-mère et son mari de quelques biens qu’ils possédaient dans un petit magasin de chapeaux à Douai.
Madame la ministre, la liste des spoliations ne s’arrête pas aux œuvres d’art. On a pris à mes grands-parents des pieds, un rayonnage d’un montant de 350 francs, une caisse et quelques autres éléments, pour un total de 11 160 francs de l’époque.
Mon grand-père maternel ne s’est pas laissé faire. L’histoire est un peu longue pour aujourd’hui, mais, dans une lettre du 25 juin 1942 que ma mère a gardée précieusement, il écrivait ceci au préfet du Nord : « Vous voudrez bien me faire parvenir toute communication ou instruction nouvelle adressée par le commissariat général à Paris relative à cette affaire. »
C’est bien l’État français qui était en cause, comme l’a reconnu le président Chirac dans un discours historique responsable. J’ai déposé des amendements visant à préciser la rédaction dans ce sens.
Dans cette période troublée, madame la ministre, il faut appeler les choses par leur nom de façon à éviter les amalgames et le négationnisme.
Il faut aussi éviter que certains candidats aux élections présidentielles puissent affirmer que Vichy a protégé les Juifs.
Les spoliations sont des vols, des injustices commises par l’État français et ses ilotes.
Les spoliations sont une blessure due à ces injustices que le temps n’efface pas et qui se transmet de génération en génération.
Je veux rappeler ici la mémoire des milliers de familles spoliées de quelques biens meubles, de leur linge de maison, de quelques instruments de cuisine, spoliées de tout et de leur vie.
Hier – hasard du calendrier –, France 5 diffusait un documentaire remarquable sur l’opération « meubles », lors de laquelle 44 000 foyers juifs ont été vidés du sol au plafond, tandis que de la lingerie, des jouets et des petites cuillères étaient spoliés.
Madame la ministre, il faudrait lancer un appel à tous ceux et à toutes celles qui pourraient être en possession de documents tels que ceux que j’ai entre les mains pour poursuivre le travail déjà accompli.
Le texte que nous allons voter aujourd’hui est un texte mémoriel, qu’il s’appelle ainsi ou non. C’est un texte pour la mémoire ; Roger Karoutchi l’a très bien dit. Comme je l’ai dit à votre prédécesseur, madame la ministre, vous n’êtes pas aujourd’hui seulement le ministre de la culture : vous êtes aussi celui de la justice.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de ce regard précis, car chaque mot compte. Bien entendu, l'intention du Gouvernement n'était absolument pas de minorer l'action du régime de Vichy.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le dispositif introduit par ce texte ne vise pas seulement à faciliter la restitution de biens à leurs propriétaires ; il ne serait qu’un de plus, dans un long débat relatif à l’origine de certaines collections des musées européens.
Au-delà de la restitution patrimoniale, ce texte s’inscrit dans la démarche de condamnation, constante depuis le général de Gaulle, dès 1940, des persécutions antisémites perpétrées durant la Deuxième Guerre mondiale, de cette injustice profonde qui a déshonoré la France et la République au plus profond d’elles-mêmes et de cette barbarie sans nom qui a commis des crimes sur des individus dont le seul tort était celui d’être nés, comme le disait si justement André Frossard quand il parlait du crime contre l’humanité.
Ce projet de loi vise à restituer les biens culturels ayant fait l’objet de spoliation dans un contexte de persécutions antisémites entre 1933 et 1945 sur le sol français. Ces biens appartiennent à des collections publiques dans lesquelles ils n’auraient jamais dû se trouver.
On peut même s’étonner qu’au regard de cette injustice si profonde, cette restitution n’ait pas été facilitée dès l’origine et que la demande de restitution ait été laissée à l’initiative des propriétaires spoliés ou de leurs ayants droit.
Comme toute démarche, une telle demande peut s’enliser dans les méandres de procédures longues que les familles n’ont pas la force de supporter. Pourtant, la spoliation est une négation honteuse du droit de propriété, qui est profondément ancré dans notre droit et qui ne peut être mis en cause que pour des raisons d’intérêt général. La haine n’en est pas une !
Cette spoliation est pour les familles la négation de leur humanité, de leur mémoire et de leurs souvenirs.
Ce texte doit être donc salué pour ses apports.
Ce texte est attendu par ces familles.
Ce projet de loi institue tout d’abord une procédure de restitution simplifiée des biens culturels spoliés sur l’initiative des personnes publiques. Cela facilitera les restitutions en rappelant que l’État et les administrations ont aussi des devoirs.
C’est donc du côté de la puissance publique que la démarche de restitution doit d’abord être engagée, alors même que les autorités françaises ont reconnu leur responsabilité dans les persécutions, comme l’avait fait Jacques Chirac en 1995 dans son discours du Vél d’Hiv, précédemment cité par notre collègue Pierre Ouzoulias.
La période est définie plus largement, ce qui permettra de viser toutes les spoliations de caractère antisémite et évitera de buter sur des problèmes de chronologie.
Les persécutions antisémites n’ont pas commencé avec Vichy, mais Vichy y a bien participé, et bien au-delà du territoire français.
Cela permettra de restituer les biens confisqués par l’autorité de fait « se disant “gouvernement de l’État français” », comme le prévoit le nouvel article L. 115-2 du code du patrimoine.
Ces biens sont considérables – tous les orateurs l’ont indiqué – au point que les estimations, bien que vraisemblablement trop basses, donnent le tournis : plus de 5 millions de livres et 100 000 œuvres auraient été spoliées en France pendant l’Occupation, dont seulement 45 000 ont été restituées après-guerre et dont 2 200 feraient aujourd’hui partie des collections des musées nationaux.
Le temps peut certes faire son œuvre.
Les propriétaires spoliés ou leurs ayants droit peuvent également demander autre chose qu’une restitution. Le texte prévoit que « d’un commun accord la personne publique et le propriétaire ou ses ayants droit peuvent convenir de modalités de réparation de la spoliation autres que la restitution du bien ».
S’il convient de saluer la possibilité de telles transactions, la souplesse ne doit pas être entendue comme un abandon des restitutions. Il faudra aider au maximum les propriétaires ou leurs ayants droit. Ce sujet sera suivi.
Cette restitution peut aussi être engagée par les personnes morales de droit privé qui détiennent des biens spoliés, notamment les musées de France appartenant à des personnes morales de droit privé.
C’est une autre avancée de ce texte, car la problématique des musées privés est ainsi posée.
Le mouvement de réparation de ces dernières années est en route. Il marque une avancée et un encouragement à poursuivre, notamment pour clarifier le cas des œuvres répertoriées MNR, toujours en attente de restitution.
Enfin, un texte si important ne saurait éluder la question de son application et des démarches qui vont être entreprises.
Madame la ministre, quelles initiatives seront prises dans les mois à venir ? Certaines personnes publiques sont sous la tutelle de votre ministère. Quels établissements ou musées pourraient être concernés ? Comment seront-ils aidés financièrement, car si des indemnisations étaient envisagées, cela soulèverait des problèmes de financement ?
Il faudra être vigilant sur le décret qui fixera les modalités d’application de la nouvelle section introduite dans le code du patrimoine pour cette procédure de restitution simplifiée.
Ce texte doit déterminer la composition, l’organisation et le fonctionnement de la commission administrative qui donnera un avis à la personne publique qui effectuera la restitution.
Le décret concernera également des modalités d’application relatives aux restitutions qui seront effectuées par des musées privés.
Je salue cette précision apportée en commission par l’adoption d’un amendement de ma collègue rapporteure Béatrice Gosselin.
Sans préjuger de la rédaction du décret, il convient d’avoir des garanties et un suivi de son élaboration. Pourrons-nous en être informés ? La commission de la culture y sera vigilante.
Enfin, il faudra préciser l’ampleur des restitutions pour avoir une vue globale de ce qui nous attend.
Madame la ministre, mes chers collègues, avec le groupe Les Républicains, je voterai ce texte, parce qu’il s’inscrit dans une démarche pour une France que nous voulons plus juste, qui ne s’abrite pas derrière la complexité du passé pour mieux fouler les droits les plus fondamentaux de l’homme.
Ce texte traduit une volonté politique au travers de l’émotion suscitée. Je forme le vœu qu’il puisse inspirer d’autres pays, d’autres États confrontés au problème des spoliations.
Un pays qui reconnaît ses fautes peut toujours rester un modèle dans le monde.
Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, le dispositif introduit par ce texte ne vise pas seulement à faciliter la restitution de biens à leurs propriétaires ; il ne serait qu’un de plus, dans un long débat relatif à l’origine de certaines collections des musées européens.
Au-delà de la restitution patrimoniale, ce texte s’inscrit dans la démarche de condamnation, constante depuis le général de Gaulle, dès 1940, des persécutions antisémites perpétrées durant la Deuxième Guerre mondiale, de cette injustice profonde qui a déshonoré la France et la République au plus profond d’elles-mêmes et de cette barbarie sans nom qui a commis des crimes sur des individus dont le seul tort était celui d’être nés, comme le disait si justement André Frossard quand il parlait du crime contre l’humanité.
Ce projet de loi vise à restituer les biens culturels ayant fait l’objet de spoliation dans un contexte de persécutions antisémites entre 1933 et 1945 sur le sol français. Ces biens appartiennent à des collections publiques dans lesquelles ils n’auraient jamais dû se trouver.
On peut même s’étonner qu’au regard de cette injustice si profonde, cette restitution n’ait pas été facilitée dès l’origine et que la demande de restitution ait été laissée à l’initiative des propriétaires spoliés ou de leurs ayants droit.
Comme toute démarche, une telle demande peut s’enliser dans les méandres de procédures longues que les familles n’ont pas la force de supporter. Pourtant, la spoliation est une négation honteuse du droit de propriété, qui est profondément ancré dans notre droit et qui ne peut être mis en cause que pour des raisons d’intérêt général. La haine n’en est pas une !
Cette spoliation est pour les familles la négation de leur humanité, de leur mémoire et de leurs souvenirs.
Ce texte doit être donc salué pour ses apports.
Ce texte est attendu par ces familles.
Ce projet de loi institue tout d’abord une procédure de restitution simplifiée des biens culturels spoliés sur l’initiative des personnes publiques. Cela facilitera les restitutions en rappelant que l’État et les administrations ont aussi des devoirs.
C’est donc du côté de la puissance publique que la démarche de restitution doit d’abord être engagée, alors même que les autorités françaises ont reconnu leur responsabilité dans les persécutions, comme l’avait fait Jacques Chirac en 1995 dans son discours du Vel d’Hiv, précédemment cité par notre collègue Pierre Ouzoulias.
La période est définie plus largement, ce qui permettra de viser toutes les spoliations de caractère antisémite et évitera de buter sur des problèmes de chronologie.
Les persécutions antisémites n’ont pas commencé avec Vichy, mais Vichy y a bien participé, et bien au-delà du territoire français.
Cela permettra de restituer les biens confisqués par l’autorité de fait « se disant “gouvernement de l’État français” », comme le prévoit le nouvel article L. 115-2 du code du patrimoine.
Ces biens sont considérables – tous les orateurs l’ont indiqué – au point que les estimations, bien que vraisemblablement trop basses, donnent le tournis : plus de 5 millions de livres et 100 000 œuvres auraient été spoliées en France pendant l’Occupation, dont seulement 45 000 ont été restituées après-guerre et dont 2 200 feraient aujourd’hui partie des collections des musées nationaux.
Le temps peut certes faire son œuvre.
Les propriétaires spoliés ou leurs ayants droit peuvent également demander autre chose qu’une restitution. Le texte prévoit que « d’un commun accord la personne publique et le propriétaire ou ses ayants droit peuvent convenir de modalités de réparation de la spoliation autres que la restitution du bien ».
S’il convient de saluer la possibilité de telles transactions, la souplesse ne doit pas être entendue comme un abandon des restitutions. Il faudra aider au maximum les propriétaires ou leurs ayants droit. Ce sujet sera suivi.
Cette restitution peut aussi être engagée par les personnes morales de droit privé qui détiennent des biens spoliés, notamment les musées de France appartenant à des personnes morales de droit privé.
C’est une autre avancée de ce texte, car la problématique des musées privés est ainsi posée.
Le mouvement de réparation de ces dernières années est en route. Il marque une avancée et un encouragement à poursuivre, notamment pour clarifier le cas des œuvres répertoriées MNR, toujours en attente de restitution.
Enfin, un texte si important ne saurait éluder la question de son application et des démarches qui vont être entreprises.
Madame la ministre, quelles initiatives seront prises dans les mois à venir ? Certaines personnes publiques sont sous la tutelle de votre ministère. Quels établissements ou musées pourraient être concernés ? Comment seront-ils aidés financièrement, car si des indemnisations étaient envisagées, cela soulèverait des problèmes de financement ?
Il faudra être vigilant sur le décret qui fixera les modalités d’application de la nouvelle section introduite dans le code du patrimoine pour cette procédure de restitution simplifiée.
Ce texte doit déterminer la composition, l’organisation et le fonctionnement de la commission administrative qui donnera un avis à la personne publique qui effectuera la restitution.
Le décret concernera également des modalités d’application relatives aux restitutions qui seront effectuées par des musées privés.
Je salue cette précision apportée en commission par l’adoption d’un amendement de ma collègue rapporteure Béatrice Gosselin.
Sans préjuger de la rédaction du décret, il convient d’avoir des garanties et un suivi de son élaboration. Pourrons-nous en être informés ? La commission de la culture y sera vigilante.
Enfin, il faudra préciser l’ampleur des restitutions pour avoir une vue globale de ce qui nous attend.
Madame la ministre, mes chers collègues, avec le groupe Les Républicains, je voterai ce texte, parce qu’il s’inscrit dans une démarche pour une France que nous voulons plus juste, qui ne s’abrite pas derrière la complexité du passé pour mieux fouler les droits les plus fondamentaux de l’homme.
Ce texte traduit une volonté politique au travers de l’émotion suscitée. Je forme le vœu qu’il puisse inspirer d’autres pays, d’autres États confrontés au problème des spoliations.
Un pays qui reconnaît ses fautes peut toujours rester un modèle dans le monde.
Je remercie Pierre Ouzoulias de cet amendement.
J'aurais peut-être des observations à formuler sur son intervention en discussion générale. À mon sens, la responsabilité des antisémitismes dans notre pays est plus large que ce qu'il a indiqué. Mais nous en reparlerons en dehors de cet hémicycle, mon cher collègue. §
En revanche, je remercie Pierre Ouzoulias et Béatrice Gosselin du travail qui a été mené depuis notre réunion de commission pour parvenir à cette rédaction, qui me semble s'inscrire dans le droit fil du discours du Vél d'Hiv de Jacques Chirac.
Le Gouvernement n'avait certainement pas l'intention – je vous rejoins, madame la ministre – de revenir sur cette ligne bien établie, qui précise clairement que la politique antisémite de Vichy était autonome par rapport aux autorités d'occupation, dont elle a même anticipé les désirs. La rédaction proposée par Pierre Ouzoulias permet toutefois de le clarifier.
Je me félicite donc que cet accord ait été trouvé entre Pierre Ouzoulias et la commission.
Je remercie Pierre Ouzoulias de cet amendement.
J'aurais peut-être des observations à formuler sur son intervention lors de la discussion générale. À mon sens, la responsabilité des antisémitismes dans notre pays est plus large que ce qu'il a indiqué. Mais nous en reparlerons en dehors de cet hémicycle, mon cher collègue.
Sourires.
Je soutiens à mon tour cette précision.
Toutefois – je réponds à M. Roger Karoutchi, dont je ne partage qu'à moitié les propos… –, je ne voudrais pas que l'on ait une vision réductrice du discours de Jacques Chirac. Jusqu'à ce discours, la France refusait de s'excuser pour les crimes d'un État qui ne représentait ni la Nation ni la République. Jacques Chirac a mis un terme au récit selon lequel la République n'aurait pas à s'excuser pour ce qu'elle n'avait pas fait. Il a eu le courage de dire que la France de Vichy était la France, sans chercher à esquiver.
Je soutiens donc l'amendement de M. Ouzoulias. Mais je tenais à rappeler que Jacques Chirac ne s'est pas contenté de pointer la responsabilité du régime de Vichy ; il a également affirmé que l'on ne pouvait pas s'exonérer des moments sombres de notre histoire.
Je tiens donc à saluer, lus encore que ceux qui se réclament du chiraquisme, ce qu'a fait Jacques Chirac. §
En revanche, je remercie Pierre Ouzoulias et Béatrice Gosselin du travail qui a été mené depuis notre réunion de commission pour parvenir à cette rédaction, qui me semble s'inscrire dans le droit fil du discours du Vél d'Hiv de Jacques Chirac.
Le Gouvernement n'avait certainement pas l'intention – je vous rejoins, madame la ministre – de revenir sur cette ligne bien établie, qui précise clairement que la politique antisémite de Vichy était autonome par rapport aux autorités d'occupation, dont elle a même anticipé les désirs. La rédaction proposée par Pierre Ouzoulias permet toutefois de le clarifier.
Je me félicite donc que cet accord ait été trouvé entre Pierre Ouzoulias et la commission.
Je mets aux voix l'amendement n° 4.
L’amendement n° 18, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Avant l’article 1er
Insérer un article additionnel ainsi rédigé :
La Nation reconnaît sa responsabilité à l’égard de la population juive vivant en France métropolitaine et dans les territoires administrés, dans les préjudices subis du fait des agissements de l’État français de 1940 à 1944.
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Je soutiens à mon tour cette précision.
Toutefois – je réponds à M. Roger Karoutchi, dont je ne partage qu'à moitié les propos… –, je ne voudrais pas que l'on ait une vision réductrice du discours de Jacques Chirac. Jusqu'à ce discours, la France refusait de s'excuser pour les crimes d'un État qui ne représentait ni la Nation ni la République. Jacques Chirac a mis un terme au récit selon lequel la République n'aurait pas à s'excuser pour ce qu'elle n'avait pas fait. Il a eu le courage de dire que la France de Vichy était la France, sans chercher à esquiver.
Je soutiens donc l'amendement de M. Ouzoulias. Mais je tenais à rappeler que Jacques Chirac ne s'est pas contenté de pointer la responsabilité du régime de Vichy ; il a également affirmé que l'on ne pouvait pas s'exonérer des moments sombres de notre histoire.
Je tiens donc à saluer, plus encore que ceux qui se réclament du chiraquisme, ce qu'a fait Jacques Chirac.
À ce jour, il n’existe aucun texte reconnaissant les crimes commis par l’État français entre 1940 et 1944. Ce texte pourrait être l’occasion, pour la Nation, de reconnaître sa responsabilité à l’égard des populations juives dans les agissements de l’État français de 1940 à 1944.
Il s’agit au fond d’un amendement mémoriel, mais le sujet est extrêmement important.
L'amendement n° 7, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
se disant gouvernement de l'État français
par les mots :
L'État français
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Sourires.
Dans le droit fil de l'amendement n° 4, le présent amendement vise à remplacer les mots : « se disant “gouvernement de l'État français” » par les mots : « l'État français », conformément au discours de Jacques Chirac, qui a reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs de France.
Cet amendement tend à introduire un article liminaire portant reconnaissance par la Nation de la responsabilité de l’État français entre 1940 et 1944 dans les préjudices subis par la population juive.
Si la responsabilité propre du régime de Vichy dans les persécutions antisémites est indéniable, l’objet du présent projet de loi n’est pas mémoriel. Il s’agit de créer une procédure de restitution des biens culturels spoliés.
Par ailleurs, les champs de l’amendement et du projet de loi ne coïncident pas. Le projet de loi couvre un champ plus étroit que l’amendement proposé, puisqu’il ne porte que sur les spoliations de biens culturels, et son périmètre spatio-temporel est plus étendu, puisqu’il couvre toutes les spoliations de biens culturels intervenues entre 1933 et 1945, quel qu’en soit l’auteur ou le lieu de perpétration.
L’amendement n° 4 de M. Pierre Ouzoulias, que nous examinerons dans un instant, vise à rappeler la responsabilité du régime de Vichy.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L' amendement est adopté.
Votre souci de ne pas minimiser la responsabilité de l'État français dans les spoliations antisémites est parfaitement compréhensible, ma chère collègue.
Si les mots : « l'État français » sont effectivement ceux qu'a utilisés le Président de la République Jacques Chirac lors de la commémoration de la rafle du Vél d'Hiv, les mots : « autorité de fait se disant gouvernement de l'État français » sont ceux qui sont employés par l'ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 portant deuxième application de l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement l'a sans doute retenue, dans la mesure où il s'agissait du seul texte déjà en vigueur applicable aux spoliations antisémites.
Il y a un intérêt à créer une continuité entre le présent projet de loi et cette ordonnance, dans la mesure où c'est sur son fondement qu'un juge peut aujourd'hui annuler l'entrée dans les collections publiques d'un bien culturel et ordonner sa restitution. Cela permet donc de lier les deux voies de restitution possibles.
Dans ces conditions, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
L'amendement n° 7, présenté par Mme N. Goulet, est ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
se disant “gouvernement de l'État français”
par les mots :
« L'État français »
La parole est à Mme Nathalie Goulet.
Le présent projet de loi n’aurait pas pu voir le jour s’il n’y avait pas eu le discours du Vél d’Hiv de Jacques Chirac.
Toutefois, comme vient de l’indiquer la rapporteure, l’objet du texte est à la fois plus restreint et plus vaste que celui de l’amendement n° 4.
Le projet de loi porte en effet sur la sortie du domaine public de biens culturels spoliés, soit un champ nettement plus étroit que celui de toutes les persécutions commises par le régime de Vichy.
À l’inverse, son champ géographique et temporel est plus vaste que celui du régime de Vichy, puisque le texte prévoit de pouvoir faire sortir du domaine public des biens spoliés en Allemagne et ailleurs en Europe par l’Allemagne nazie et divers spoliateurs, et ce dès 1933 pour ce qui concerne l’Allemagne.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement, mais cela n’enlève rien à l’importance du discours fondateur que vous avez évoqué, madame la sénatrice.
Le présent projet de loi n’aurait pas pu voir le jour s’il n’y avait pas eu le discours du Vel d’Hiv de Jacques Chirac.
Toutefois, comme vient de l’indiquer la rapporteure, l’objet du texte est à la fois plus restreint et plus vaste que celui de l’amendement n° 4.
Le projet de loi porte en effet sur la sortie du domaine public de biens culturels spoliés, soit un champ nettement plus étroit que celui de toutes les persécutions commises par le régime de Vichy.
À l’inverse, son champ géographique et temporel est plus vaste que celui du régime de Vichy, puisque le texte prévoit de pouvoir faire sortir du domaine public des biens spoliés en Allemagne et ailleurs en Europe par l’Allemagne nazie et divers spoliateurs, et ce dès 1933 pour ce qui concerne l’Allemagne.
Le Gouvernement émet donc un avis défavorable sur cet amendement, mais cela n’enlève rien à l’importance du discours fondateur que vous avez évoqué, madame la sénatrice.
Dans le droit fil de l'amendement n° 4, le présent amendement vise à remplacer les mots : « se disant “gouvernement de l'État français” » par les mots : « l'État français », conformément au discours de Jacques Chirac, qui a reconnu la responsabilité de la France dans la déportation des Juifs de France.
Les explications de Mme la rapporteure sont limpides. Nous avons eu beaucoup d'échanges avec le Conseil d'État avant de vous proposer ce texte. Et c'est exactement pour les raisons qui ont été indiquées que nous avons retenu cette formulation.
Je me joins donc à la demande de retrait formulée par Mme la rapporteure.
Sans entrer dans le débat relatif aux champs respectifs de l’amendement et du projet de loi, je demande à ma collègue de bien vouloir retirer son amendement.
Ce n’est pas la Nation qui est en cause ; c’est le régime de l’État français de Vichy. La Nation comptait des résistants, des Justes, des personnes qui, en aucun cas, n’auraient accepté ce qui s’est passé.
La Nation d’aujourd’hui n’a pas à assumer la responsabilité de celle d’hier, qui était diverse. Il est légitime de confondre le régime collaborationniste de l’État français, qui a permis les spoliations et les déportations. Mais c’est à la République de le faire ; cela ne concerne pas la Nation.
La Nation est un ensemble bien plus vaste que le régime politique. Et, à titre personnel, je ne veux pas que l’on inclue – ce n’est pas le sens de l’amendement de Nathalie Goulet, mais la rédaction proposée pourrait porter à confusion – les résistants et les Justes dans une nation responsable.
La responsabilité incombe à l’État français. Laissons la Nation à part !
Votre souci de ne pas minimiser la responsabilité de l'État français dans les spoliations antisémites est parfaitement compréhensible, ma chère collègue.
Si les mots : « l'État français » sont effectivement ceux qu'a utilisés le Président de la République Jacques Chirac lors de la commémoration de la rafle du Vél d'Hiv, les mots : « autorité de fait se disant “gouvernement de l'État français” » sont ceux qui sont employés par l'ordonnance n° 45-770 du 21 avril 1945 portant deuxième application de l'ordonnance du 12 novembre 1943 sur la nullité des actes de spoliation accomplis par l'ennemi.
C'est la raison pour laquelle le Gouvernement l'a sans doute retenue, dans la mesure où il s'agissait du seul texte déjà en vigueur applicable aux spoliations antisémites.
Il y a un intérêt à créer une continuité entre le présent projet de loi et cette ordonnance, dans la mesure où c'est sur son fondement qu'un juge peut aujourd'hui annuler l'entrée dans les collections publiques d'un bien culturel et ordonner sa restitution. Cela permet donc de lier les deux voies de restitution possibles.
Dans ces conditions, je demande le retrait de cet amendement. À défaut, l'avis serait défavorable.
Madame Goulet, l’amendement n° 18 est-il maintenu ?
J'ai un doute à propos de cet amendement, mes chers collègues.
Lorsque le général de Gaulle signe l'ordonnance de 1945 par la formule « se disant “gouvernement de l'État français” », il veut montrer que la République était à Londres. Si l'État français était à Vichy, la République avait continué de vivre à l'extérieur, sous la forme, ensuite, d'un gouvernement provisoire et qu'en aucun cas, elle ne pouvait être confondue avec l'État français, qui avait sombré dans la collaboration.
Si cette formule pouvait avoir un sens en 1945, je ne suis pas certain qu'elle en ait autant aujourd'hui, en 2023. Peut-être une formule plus courte, telle que « le gouvernement de l'État français », serait-elle désormais plus opportune. Mais je n'en suis pas tout à fait certain.
Je tenais à exprimer ce doute, mes chers collègues.
Les explications de Mme la rapporteure sont limpides. Nous avons eu beaucoup d'échanges avec le Conseil d'État avant de vous proposer ce texte. Et c'est exactement pour les raisons qui ont été indiquées que nous avons retenu cette formulation.
Je me joins donc à la demande de retrait formulée par Mme la rapporteure.
L’amendement n° 18 est retiré.
Je trouve que les deux rédactions ne sont pas terribles.
L'expression « se disant “gouvernement de l'État français” » ne veut pas dire grand-chose aujourd'hui, même si, comme l'a excellemment indiqué Pierre Ouzoulias, dans l'ordonnance de 1945, elle rappelait que la légitimité – la légalité, c'est moins évident – était à Londres.
Par ailleurs, la simple référence à « l'État français » peut prêter à confusion. Aujourd'hui, cela peut être interprété comme l'État actuel. Ou alors, il faudrait préciser « l'État français de Vichy », ce qui ne signifie rien.
En revanche, l'expression « le régime de l'État français » renvoie sans équivoque au régime des années 1940-1944.
Cela évite également d'employer la formule « se disant », qui semble sous-entendre que l'État français n'avait pas le pouvoir, ce qui est faux. Le gouvernement qui avait été mis en place par le Parlement était légal, même s'il était illégitime.
Si Nathalie Goulet est d'accord pour modifier son amendement en ce sens, une telle rédaction permettrait à la fois de ne pas reprendre les termes de l'ordonnance de 1945 tout en faisant référence au régime de Vichy, sans confusion possible avec l'État au sens courant.
Article 1er
J'ai un doute à propos de cet amendement, mes chers collègues.
Lorsque le général de Gaulle signe l'ordonnance de 1945 par la formule « se disant “gouvernement de l'État français” », il veut montrer que la République était à Londres. Si l'État français était à Vichy, la République avait continué de vivre à l'extérieur, sous la forme, ensuite, d'un gouvernement provisoire et qu'en aucun cas, elle ne pouvait être confondue avec l'État français, qui avait sombré dans la collaboration.
Si cette formule pouvait avoir un sens en 1945, je ne suis pas certain qu'elle en ait autant aujourd'hui, en 2023. Peut-être une formule plus courte, telle que « le gouvernement de l'État français », serait-elle désormais plus opportune. Mais je n'en suis pas tout à fait certain.
Je tenais à exprimer ce doute, mes chers collègues.
Le chapitre V du titre Ier du livre Ier du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Sortie des collections publiques d’un bien culturel » ;
2° Est ajoutée une section 1 intitulée : « Déclassement » qui comprend l’article L. 115-1 ;
3° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945
« Art. L. 115 -2. – Une personne publique prononce dans les conditions prévues à l’article L. 115-3 et aux fins de restitution à son propriétaire ou à ses ayants droit, par dérogation au principe d’inaliénabilité des biens des personnes publiques qui relèvent du domaine public inscrit à l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, la sortie de ses collections d’un bien culturel relevant de l’article L. 2112-1 du même code, ayant fait l’objet d’une spoliation entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945 dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées par l’Allemagne nazie et par les autorités des territoires qu’elle a occupés, contrôlés ou influencés, notamment l’autorité de fait se disant “gouvernement de l’État français”.
« Le certificat mentionné à l’article L. 111-2 du présent code est délivré de plein droit pour les biens culturels restitués en application du présent article.
« D’un commun accord la personne publique et le propriétaire ou ses ayants droit peuvent convenir de modalités de réparation de la spoliation autres que la restitution du bien.
« Art. L. 115 -3. – Pour l’application de l’article L. 115-2, la personne publique se prononce après avis d’une commission administrative placée auprès du Premier ministre, compétente en matière de réparation des préjudices consécutifs aux spoliations de biens intervenues du fait des persécutions antisémites. Cet avis porte sur l’existence d’une spoliation et ses circonstances.
« Art. L. 115 -4. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la présente section. Il précise en particulier les règles relatives à la compétence, à la composition, à l’organisation et au fonctionnement de la commission administrative mentionnée à l’article L. 115-3. »
Article 1er
Je remercie notre collègue Nathalie Goulet d'avoir soulevé la question, qui est complexe. Nous le mesurons bien à travers les différentes interventions. Je l'avoue, je ne suis pas plus à l'aise avec les deux appellations proposées qu'avec celle que vient de formuler M. Karoutchi.
Pour moi, l'expression « le régime de l'État français » ne veut pas dire grand-chose. C'est soit le régime de Vichy, soit l'État français. Aussi, je propose d'en rester à la version initiale. Nous sommes en train de faire un texte de loi. Et même si la précision des éléments historiques est extrêmement importante, nous devons avant tout nous préoccuper de consolider la sécurité juridique de notre texte. C'est d'ailleurs dans cette optique que le Conseil d'État a demandé que nous fassions référence à l'ordonnance de 1945, qui reprenait ces mots. Pour bien faire le lien juridique, il m'apparaît plus prudent d'en rester à la proposition originelle du Gouvernement, même si nous n'en sommes pas totalement satisfaits.
Le chapitre V du titre Ier du livre Ier du code du patrimoine est ainsi modifié :
1° L’intitulé est ainsi rédigé : « Sortie des collections publiques d’un bien culturel » ;
2° Est ajoutée une section 1 intitulée : « Déclassement » qui comprend l’article L. 115-1 ;
3° Est ajoutée une section 2 ainsi rédigée :
« Section 2
« Biens culturels ayant fait l’objet de spoliations dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées entre 1933 et 1945
« Art. L. 115 -2. – Une personne publique prononce dans les conditions prévues à l’article L. 115-3 et aux fins de restitution à son propriétaire ou à ses ayants droit, par dérogation au principe d’inaliénabilité des biens des personnes publiques qui relèvent du domaine public inscrit à l’article L. 3111-1 du code général de la propriété des personnes publiques, la sortie de ses collections d’un bien culturel relevant de l’article L. 2112-1 du même code, ayant fait l’objet d’une spoliation entre le 30 janvier 1933 et le 8 mai 1945 dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées par l’Allemagne nazie et par les autorités des territoires qu’elle a occupés, contrôlés ou influencés, notamment l’autorité de fait se disant “gouvernement de l’État français”.
« Le certificat mentionné à l’article L. 111-2 du présent code est délivré de plein droit pour les biens culturels restitués en application du présent article.
« D’un commun accord la personne publique et le propriétaire ou ses ayants droit peuvent convenir de modalités de réparation de la spoliation autres que la restitution du bien.
« Art. L. 115 -3. – Pour l’application de l’article L. 115-2, la personne publique se prononce après avis d’une commission administrative placée auprès du Premier ministre, compétente en matière de réparation des préjudices consécutifs aux spoliations de biens intervenues du fait des persécutions antisémites. Cet avis porte sur l’existence d’une spoliation et ses circonstances.
« Art. L. 115 -4. – Un décret en Conseil d’État fixe les modalités d’application de la présente section. Il précise en particulier les règles relatives à la compétence, à la composition, à l’organisation et au fonctionnement de la commission administrative mentionnée à l’article L. 115-3. »
Je trouve que les deux rédactions ne sont pas terribles.
L'expression « se disant “gouvernement de l'État français” » ne veut pas dire grand-chose aujourd'hui, même si, comme l'a excellemment indiqué Pierre Ouzoulias, dans l'ordonnance de 1945, elle rappelait que la légitimité – la légalité, c'est moins évident – était à Londres.
Par ailleurs, la simple référence à « l'État français » peut prêter à confusion. Aujourd'hui, cela peut être interprété comme l'État actuel. Ou alors, il faudrait préciser « l'État français de Vichy », ce qui ne signifie rien.
En revanche, l'expression « le régime de l'État français » renvoie sans équivoque au régime des années 1940-1944.
Cela évite également d'employer la formule « se disant », qui semble sous-entendre que l'État français n'avait pas le pouvoir, ce qui est faux. Le gouvernement qui avait été mis en place par le Parlement était légal, même s'il était illégitime.
Si Nathalie Goulet est d'accord pour modifier son amendement en ce sens, une telle rédaction permettrait à la fois de ne pas reprendre les termes de l'ordonnance de 1945 tout en faisant référence au régime de Vichy, sans confusion possible avec l'État au sens courant.
Madame la ministre, je tiens à saluer cette initiative de votre ministère, ainsi que le travail de Mme la rapporteure et de tous les collègues qui sont intervenus sur ce sujet particulièrement sensible, sous la houlette de M. le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
L’article 1er prévoit la création d’une procédure administrative pour la restitution des biens culturels spoliés intégrés aux collections publiques.
Permettez-moi de rappeler que le 6 juin 2018, dans le cadre de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », la commission des finances avait adopté un rapport d’information intitulé La commission pour l ’ indemnisation des victimes de spoliations antisémites : vingt ans après, redonner un élan à la politique de réparation dans lequel nous formulions un certain nombre de constats et de recommandations relatifs à la CIVS. Nous rappelions le rôle important du président Jacques Chirac et de toutes les personnes qui se sont investies et engagées.
Nous plaidions notamment pour une CIVS « augmentée », disposant des moyens suffisants pour apporter aux descendants et aux ayants droit une réparation dans un cadre de respect et de mémoire.
Je soutiendrai donc cet article.
Je rejoins les propos de Pierre Ouzoulias, et je remercie M. Karoutchi. Pour moi, l'expression est totalement connotée. Évidemment, elle est reprise par le Conseil d'État, parce que c'est la formule qui existe depuis 1945.
Néanmoins, nous pouvons proposer une meilleure rédaction. J'avais un autre amendement que j'ai retiré entretemps, car j'ai souhaité privilégier la dénomination « l'État français » pour ne pas affaiblir la portée du texte en utilisant une sorte de terme subsidiaire sur ce sujet, qui, comme vous l'avez compris, me touche personnellement, comme nous tous, mais, dans mon cas, peut-être un peu plus...
C'est ce qui m'a fait aussi retirer l'amendement de repli avec l'expression « régime de Vichy », que j'avais proposé dans un premier temps.
Puisque nous devons faire un choix tout de suite, ce que propose M. Karoutchi me convient mieux que le « se disant gouvernement de l'État français », qui est – je le répète – complètement connoté, a fortiori dans une période très troublée, où la question des spoliations d'œuvres d'art appartenant à des Juifs, objet exclusif du texte, peut déboucher sur d'autres types de problématiques. Notre société évolue dans un climat très compliqué, et je trouve que le « se disant » n'est absolument pas conforme à l'idée que je me fais d'un texte juridique.
Je suis donc d'accord pour rectifier mon amendement en remplaçant les mots : « se disant gouvernement de l'État français » par les mots : « Le régime de Vichy ».
L’amendement n° 4, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Après le mot :
nazie
remplacer le mot :
et
par le signe :
2° Remplacer le mot :
notamment
par les mots :
et par
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Madame la ministre, je tiens à saluer cette initiative de votre ministère, ainsi que le travail de Mme la rapporteure et de tous les collègues qui sont intervenus sur ce sujet particulièrement sensible, sous la houlette de M. le président de la commission de la culture, de l’éducation et de la communication.
L’article 1er prévoit la création d’une procédure administrative pour la restitution des biens culturels spoliés intégrés aux collections publiques.
Permettez-moi de rappeler que le 6 juin 2018, dans le cadre de la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation », la commission des finances avait adopté un rapport d’information intitulé La commission pour l ’ indemnisation des victimes de spoliations antisémites : vingt ans après, redonner un élan à la politique de réparation dans lequel nous formulions un certain nombre de constats et de recommandations relatifs à la CIVS. Nous rappelions le rôle important du président Jacques Chirac et de toutes les personnes qui se sont investies et engagées.
Nous plaidions notamment pour une CIVS « augmentée », disposant des moyens suffisants pour apporter aux descendants et aux ayants droit une réparation dans un cadre de respect et de mémoire.
Je soutiendrai donc cet article.
Je suis donc saisie de l'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, et ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
se disant gouvernement de l'État français
par les mots :
Le régime de Vichy
Quel est l'avis de la commission ?
Je remercie notre collègue Nathalie Goulet d'avoir soulevé la question, qui est complexe. Nous le mesurons bien à travers les différentes interventions. Je l'avoue, je ne suis pas plus à l'aise avec les deux appellations proposées qu'avec celle que vient de formuler M. Karoutchi.
Pour moi, l'expression « le régime de l'État français » ne veut pas dire grand-chose. C'est soit le régime de Vichy, soit l'État français. Aussi, je propose d'en rester à la version initiale. Nous sommes en train de faire un texte de loi. Et même si la précision des éléments historiques est extrêmement importante, nous devons avant tout nous préoccuper de consolider la sécurité juridique de notre texte. C'est d'ailleurs dans cette optique que le Conseil d'État a demandé que nous fassions référence à l'ordonnance de 1945, qui reprenait ces mots. Pour bien faire le lien juridique, il m'apparaît plus prudent d'en rester à la proposition originelle du Gouvernement, même si nous n'en sommes pas totalement satisfaits.
Dans l’expression « dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées par l’Allemagne nazie et par les autorités des territoires qu’elle a occupés, contrôlés ou influencés, notamment l’autorité de fait se disant “gouvernement de l’État français” », j’estime que l’adverbe « notamment » est ambigu et pourrait laisser entendre que l’État français a organisé la spoliation des Juifs sous la pression de l’occupant nazi, ce qui n’est pas tout à fait la réalité.
L’analyse historique a bien montré que le gouvernement de Vichy avait organisé de lui-même, sans contrainte, une partie des persécutions.
Le directeur de cabinet de Pétain, Henry Du Moulin de Labarthète, indique d’ailleurs dans ses mémoires, publiés en 1946 : « L’Allemagne ne fut pas à l’origine de la législation anti-juive de Vichy. Cette législation fut, si l’on peut dire, spontanée et autochtone. »
Je propose donc de remplacer « notamment » par « et », afin de bien identifier la spécificité des lois votées par l’État français.
L’amendement n° 4, présenté par MM. Ouzoulias et Bacchi, Mme Brulin et les membres du groupe communiste républicain citoyen et écologiste, est ainsi libellé :
Alinéa 7
1° Après le mot :
nazie
remplacer le mot :
et
par le signe :
2° Remplacer le mot :
notamment
par les mots :
et par
La parole est à M. Pierre Ouzoulias.
Dans l’expression « dans le contexte des persécutions antisémites perpétrées par l’Allemagne nazie et par les autorités des territoires qu’elle a occupés, contrôlés ou influencés, notamment l’autorité de fait se disant “gouvernement de l’État français” », j’estime que l’adverbe « notamment » est ambigu et pourrait laisser entendre que l’État français a organisé la spoliation des Juifs sous la pression de l’occupant nazi, ce qui n’est pas tout à fait la réalité.
L’analyse historique a bien montré que le gouvernement de Vichy avait organisé de lui-même, sans contrainte, une partie des persécutions.
Le directeur de cabinet de Pétain, Henry Du Moulin de Labarthète, indique d’ailleurs dans ses mémoires, publiés en 1946 : « L’Allemagne ne fut pas à l’origine de la législation anti-juive de Vichy. Cette législation fut, si l’on peut dire, spontanée et autochtone. »
Je propose donc de remplacer « notamment » par « et », afin de bien identifier la spécificité des lois votées par l’État français.
Je rejoins les propos de Pierre Ouzoulias, et je remercie M. Karoutchi. Pour moi, l'expression est totalement connotée. Évidemment, elle est reprise par le Conseil d'État, parce que c'est la formule qui existe depuis 1945.
Néanmoins, nous pouvons proposer une meilleure rédaction. J'avais un autre amendement que j'ai retiré entretemps, car j'ai souhaité privilégier la dénomination « l'État français » pour ne pas affaiblir la portée du texte en utilisant une sorte de terme subsidiaire sur ce sujet, qui, comme vous l'avez compris, me touche personnellement, comme chacun d'entre nous, mais, dans mon cas, peut-être encore un peu plus...
C'est ce qui m'a fait aussi retirer l'amendement de repli avec l'expression « régime de Vichy », que j'avais proposé dans un premier temps.
Puisque nous devons faire un choix tout de suite, ce que propose M. Karoutchi me convient mieux que le « se disant “gouvernement de l'État français” », qui est – je le répète – complètement connoté, a fortiori dans une période très troublée, où la question des spoliations d'œuvres d'art appartenant à des Juifs, objet exclusif du texte, peut déboucher sur d'autres types de problématiques. Notre société évolue dans un climat très compliqué, et je trouve que le « se disant » n'est absolument pas conforme à l'idée que je me fais d'un texte juridique.
Je suis donc d'accord pour rectifier mon amendement en remplaçant les mots : « se disant “gouvernement de l'État français” » par les mots : « Le régime de Vichy ».
rapporteure. Cette question avait déjà été très débattue lors de l’examen du projet de loi en commission. M. Ouzoulias nous avait promis de nous proposer une rédaction n’ayant pas d’incidence sur le périmètre des spoliations couvertes par le texte.
Si l’on peut s’interroger sur le bien-fondé de la distinction entre le régime de Vichy et les autres territoires occupés, contrôlés ou influencés par l’Allemagne nazie au cours de cette période, cet amendement a pour objet de répondre au souhait, partagé par de nombreux collègues, de voir reconnaître par le législateur la responsabilité du régime de Vichy dans les persécutions antisémites.
C’est une manière de prolonger le discours de Jacques Chirac, prononcé en 1995, à l’occasion de la commémoration du cinquante-troisième anniversaire de la rafle du Vél d’Hiv.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
Je suis donc saisie de l'amendement n° 7 rectifié, présenté par Mme N. Goulet, et ainsi libellé :
Alinéa 7
Remplacer les mots :
se disant “gouvernement de l'État français”
par les mots :
« Le régime de Vichy »
Quel est l'avis de la commission ?
rapporteure. Cette question avait déjà été très débattue lors de l’examen du projet de loi en commission. M. Ouzoulias nous avait promis de nous proposer une rédaction n’ayant pas d’incidence sur le périmètre des spoliations couvertes par le texte.
Si l’on peut s’interroger sur le bien-fondé de la distinction entre le régime de Vichy et les autres territoires occupés, contrôlés ou influencés par l’Allemagne nazie au cours de cette période, cet amendement a pour objet de répondre au souhait, partagé par de nombreux collègues, de voir reconnaître par le législateur la responsabilité du régime de Vichy dans les persécutions antisémites.
C’est une manière de prolonger le discours de Jacques Chirac, prononcé en 1995, à l’occasion de la commémoration du cinquante-troisième anniversaire de la rafle du Vél d’Hiv.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
rapporteure. Cette question avait déjà été très débattue lors de l’examen du projet de loi en commission. M. Ouzoulias nous avait promis de nous proposer une rédaction n’ayant pas d’incidence sur le périmètre des spoliations couvertes par le texte.
Si l’on peut s’interroger sur le bien-fondé de la distinction entre le régime de Vichy et les autres territoires occupés, contrôlés ou influencés par l’Allemagne nazie au cours de cette période, cet amendement a pour objet de répondre au souhait, partagé par de nombreux collègues, de voir reconnaître par le législateur la responsabilité du régime de Vichy dans les persécutions antisémites.
C’est une manière de prolonger le discours de Jacques Chirac, prononcé en 1995, à l’occasion de la commémoration du cinquante-troisième anniversaire de la rafle du Vel d’Hiv.
La commission émet donc un avis favorable sur cet amendement.
L'amendement est adopté.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de ce regard précis, car chaque mot compte. Bien entendu, l’intention du Gouvernement n’était absolument pas de minorer l’action du régime de Vichy.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
L'amendement n° 11 rectifié bis, présenté par MM. Fialaire, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, M. Gold, Mme Pantel et MM. Requier et Cabanel, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après le mot :
culturels
insérer les mots :
ayant été importés sur le territoire français et
La parole est à M. Bernard Fialaire.
Monsieur le sénateur, je vous remercie de ce regard précis, car chaque mot compte. Bien entendu, l’intention du Gouvernement n’était absolument pas de minorer l’action du régime de Vichy.
Le Gouvernement émet un avis favorable sur cet amendement.
Cet amendement concerne l'automaticité des certificats d'exportation des biens restitués.
Il n'est pas question de revenir sur la liberté des familles des ayants droit, qui pourraient toujours récupérer un bien qui a été importé de l'étranger. En revanche, je souhaiterais que les biens qui ont toujours été sur notre territoire puissent faire l'objet de la même démarche d'interrogation et de sensibilisation pour savoir s'il n'y a pas une possibilité de compensation ou de négociation, afin qu'ils restent en France.
Une telle différence de traitement se justifie à mes yeux. Les familles spoliées, dans le cas que je vise, n'ont jamais eu en leur possession ces biens dans un pays étranger, puisqu'ils n'ont jamais quitté notre territoire. Aussi, nous devons nous interroger sur l'automaticité de la délivrance du certificat d'exportation.
L'amendement est adopté.
Je remercie Pierre Ouzoulias de cet amendement.
J’aurais peut-être des observations à formuler sur son intervention lors de la discussion générale. À mon sens, la responsabilité des antisémitismes dans notre pays est plus large que ce qu’il a indiqué. Mais nous en reparlerons en dehors de cet hémicycle, mon cher collègue.
En adoptant cet amendement, nous n'apporterions plus qu'une réparation partielle à la spoliation. À la différence de familles spoliées à l'étranger, les ayants droit de familles spoliées en France qui vivraient aujourd'hui à l'étranger pourraient in fine se voir refuser le droit de faire venir chez eux l'œuvre qu'on leur aurait restituée.
Les modalités doivent être les mêmes pour toutes les personnes spoliées, quel que soit l'endroit où elles habitent et où se trouve l'œuvre.
À partir du moment où le projet de loi offre déjà la possibilité de négocier à l'amiable le rachat du bien culturel, il me semble que nous disposons déjà d'une mesure permettant d'éviter, sous réserve de l'accord des propriétaires, la sortie du territoire de biens constituant des trésors nationaux.
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
L'amendement n° 11 rectifié bis, présenté par MM. Fialaire, Artano et Bilhac, Mme M. Carrère, M. Corbisez, Mme N. Delattre, M. Gold, Mme Pantel et MM. Requier et Cabanel, est ainsi libellé :
Alinéa 8
Après le mot :
culturels
insérer les mots :
ayant été importés sur le territoire français et
La parole est à M. Bernard Fialaire.
Sourires.
Je remercie Pierre Ouzoulias de cet amendement.
J’aurais peut-être des observations à formuler sur son intervention lors de la discussion générale. À mon sens, la responsabilité des antisémitismes dans notre pays est plus large que ce qu’il a indiqué. Mais nous en reparlerons en dehors de cet hémicycle, mon cher collègue.
Cet amendement concerne l'automaticité des certificats d'exportation des biens restitués.
Il n'est pas question de revenir sur la liberté des familles des ayants droit, qui pourraient toujours récupérer un bien ayant été importé de l'étranger. En revanche, je souhaiterais que les biens qui ont toujours été sur notre territoire puissent faire l'objet de la même démarche d'interrogation et de sensibilisation pour savoir s'il n'y a pas une possibilité de compensation ou de négociation, afin qu'ils restent en France.
Une telle différence de traitement se justifie à mes yeux. Les familles spoliées, dans le cas que je vise, n'ont jamais eu en leur possession ces biens dans un pays étranger, puisqu'ils n'ont jamais quitté notre territoire. Aussi, nous devons nous interroger sur l'automaticité de la délivrance du certificat d'exportation.
En revanche, je remercie Pierre Ouzoulias et Béatrice Gosselin du travail qui a été mené depuis notre réunion de commission pour parvenir à cette rédaction, qui me semble s’inscrire dans le droit fil du discours du Vél d’Hiv de Jacques Chirac.
Le Gouvernement n’avait certainement pas l’intention – je vous rejoins, madame la ministre – de revenir sur cette ligne bien établie, qui précise clairement que la politique antisémite de Vichy était autonome par rapport aux autorités d’occupation, dont elle a même anticipé les désirs. La rédaction proposée par Pierre Ouzoulias permet toutefois de le clarifier.
Je me félicite donc que cet accord ait été trouvé entre Pierre Ouzoulias et la commission.
Sourires.